Le Point, 21 novembre, article payant
La préférence française pour la banqueroute
L’ÉDITO D’ÉTIENNE GERNELLE. L’accablante réalité, c’est qu’aucune force politique n’a l’intention de porter un message raisonnable pour redresser nos finances publiques.
Extraits :
Fascinant gouffre que celui des finances publiques : il a le pouvoir d’engloutir non seulement des milliards mais aussi les volontés, et même les discernements. Pourquoi des années d’alerte sur la dette ont-elles eu si peu d’effets ?
Michel Barnier est arrivé à Matignon en avertissant solennellement sur la gravité de la situation, et, fait exceptionnel, tout le monde ou presque était d’accord avec lui sur ce point. Y compris sur les bancs de LFI et du RN, dont les programmes témoignent pourtant d’un mépris intersidéral pour l’équilibre des comptes.
Sauf que, deux mois après, les mêmes sables mouvants ont étouffé ce bel élan. (…)
L’accablante réalité est qu’il ne s’y trouve aucune force politique pour porter ne serait-ce qu’un message raisonnable. La perspective de l’accident financier, pour la quasi-intégralité de la classe politique française, demeure préférable aux conséquences politiques des actions nécessaires pour l’éviter. L’inaction, à ce stade, ne relève plus de l’insouciance mais bien d’un choix. (…)
Le phénomène n’est pas totalement nouveau. Dans une note pour la Fondation Saint-Simon publiée en 1994 par la revue Le Débat, Denis Olivennes détaillait ce qu’il appelait la « préférence française pour le chômage ». Sa thèse, qui fit alors scandale, était que le chômage, plus élevé en France que chez ses voisins, ne résultait pas de la fatalité mais d’un choix. En clair, la protection farouche de ceux qui sont bien en place dans le travail – les insiders – et de leur rémunération maintenait hors de l’emploi les outsiders, notamment les moins qualifiés, le tout étant amorti par un niveau de protection sociale très élevé. Ce « contrat social » fondé sur « le partage des revenus à travers les transferts sociaux plutôt qu’à travers le travail » faisait l’objet « d’une préférence collective, d’un consensus inavoué » entre patronat, syndicats et État.
Le même mécanisme est manifestement à l’œuvre à propos des finances publiques. Aucune force politique française ne plaide réellement pour des réformes telles que les ont menées Gerhard Schröder (social-démocrate) en Allemagne, Mario Monti (centriste) en Italie, Mariano Rajoy (de droite) en Espagne, José Socrates (socialiste) au Portugal ou Alexis Tsipras (gauche radicale) en Grèce. Aucun parti français n’a, par exemple, la sagesse budgétaire des socialistes espagnols, qui n’ont pas touché à la retraite à 67 ans en arrivant au pouvoir. (…)
Le cardinal de Retz, dans ses Mémoires, décrit bien ce processus : « Le dernier point de l’illusion, en matière d’État, est une espèce de léthargie, qui n’arrive jamais qu’après de grands symptômes. […] Le mal […] n’est jamais à son période [point culminant] que quand ceux qui commandent ont perdu la honte, parce que c’est justement le moment dans lequel ceux qui obéissent perdent le respect ; et c’est dans ce même moment où l’on revient de la léthargie, mais par des convulsions. »
L’horizon des « convulsions » se rapproche : la dégradation de l’économie française ne va pas aider à sortir de la spirale des déficits. Et tout pourrait s’accélérer si d’aventure le gouvernement Barnier était censuré juste avant Noël, précisément sur le budget. Si cela se produit – et c’est encore évitable ! –, ceux qui « ont perdu la honte », selon la formule du cardinal de Retz, connaîtront la véritable impopularité.
Le Figaro, 21 novembre, article payant
Si le gouvernement tombe sur le budget, la France risque-t-elle un «shutdown» à l’américaine?
DÉCRYPTAGE – En cas de motion de censure et de budget introuvable, la France sera engagée dans une course contre la montre pour éviter un scénario catastrophe.
Extraits :
Le vote du budget 2025 pourrait-il bientôt se transformer en expérimentation constitutionnelle ? Pris en étau entre un article 49.3 brandi par le gouvernement et une motion de censure possible en cas d’union de circonstance entre la gauche et le RN, le projet de loi finance (PLF) a un avenir incertain. Avec de lourdes conséquences. Une crise politique, en cas de renversement du gouvernement sur le budget, « déclenchera une crise financière », a prévenu mardi l’ancien premier ministre Édouard Philippe. « Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera la France d’un budget et la précipitera dans le désordre et la chienlit », a conforté Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, au micro d’Europe 1 ce mercredi. (…)
Pour imaginer l’ampleur de ce désordre, il faut se pencher sur les textes de la Constitution et s’atteler à un exercice prospectif aux issues parfois inconnues. « Tout dépend à quel moment l’article 49.3 est invoqué », amorce Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’université de Lille et constitutionnaliste. Si Michel Barnier décide de passer en force lors de la dernière lecture à l’Assemblée nationale, le premier ministre ouvrirait alors une cascade constitutionnelle. Dans le cas d’une motion de censure adoptée par le Parlement, le gouvernement serait contraint à la démission et le projet de loi serait rejeté. Dans ce cas précis, l’article 47 de la Constitution et l’article 45 de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) balisent le terrain pour éviter un scénario de blocage, à l’image du shutdown à l’américaine, c’est-à-dire une paralysie budgétaire allant jusqu’à empêcher de payer les fonctionnaires.
« L’article 45 prévoit plusieurs hypothèses, détaille Jean-Philippe Derosier. Si un nouveau texte est déposé avant le 11 décembre, la loi permet au Sénat d’examiner la première partie avant que la seconde partie soit adoptée par l’Assemblée nationale. » Un premier jet, qui concernerait les recettes, pourrait alors être adopté avant le 31 décembre. Les dépenses seraient débattues dans un second temps. (…)
« Une autre hypothèse, plus périlleuse mais plus probable, intervient si l’on se situe entre le 11 et le 19 décembre, détaille Jean-Philippe Derosier. Le gouvernement peut déposer un projet de loi spécial qui lui permet de demander la reconduction des impôts votée lors de la loi de finances 2024. » Si le projet de loi est adopté, l’État pourrait alors récolter l’impôt tout en fixant les dépenses par décret. (…) Que se passerait-il alors ? « Ce n’est pas prévu dans les textes, concède Jean-Philippe Derosier. De même que rien n’est prévu si aucun texte n’est déposé avant le 19 décembre. »
Cette situation chaotique qui entraînerait une crise de régime est politiquement peu probable. Parmi les parlementaires, combien sont vraiment prêts à sauter dans l’inconnu ? D’autant plus qu’en ultime recours, certains constitutionnalistes envisagent, au nom de la continuité nationale, un usage de l’article 16 qui donnerait les pleins pouvoirs au président de la République. Pour être invoqué, cet article suppose toutefois certaines conditions, comme l’interruption du fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels, la menace grave des institutions, l’indépendance de la nation ou de l’intégrité du territoire. « Il n’a sans doute pas été conçu dans la perspective d’un blocage budgétaire, mais pourrait-il servir à traiter ce cas ? La question est inédite », notait le constitutionnaliste Jean-Pierre Camby dans un article de la Revue politique et parlementaire en juillet dernier. (…)
Le Monde, 21 novembre, libre accès
Éditorial : Economie française : le risque de la spirale négative
Les difficultés que la France rencontre (baisse de l’investissement, plans sociaux, remontée du chômage…) tombent au plus mauvais moment, car la compétition mondiale s’intensifie. Or les débats parlementaires, marqués par de profondes dissensions, se résument à des postures et à des discours électoralistes.
Extraits :
Les difficultés budgétaires que rencontre la France et que la représentation nationale a tant de mal de résoudre se doublent d’une autre menace : depuis la rentrée, l’économie française connaît un net retournement conjoncturel. L’investissement ralentit, la courbe du chômage s’inverse, les plans sociaux et les faillites se multiplient, l’attractivité du pays se dégrade, le climat social se tend.
Les raisons sont multiples : quatre ans après la crise pandémique, les mesures qui avaient été prises pour protéger le tissu économique arrivent à leur terme, provoquant un retour à la réalité douloureux pour les entreprises les plus fragiles. L’Allemagne, notre principal partenaire commercial, connaît une récession qui commence à avoir un impact sur l’activité en France. Enfin, le contexte politique crée un environnement peu favorable à la prise de décision des acteurs économiques : face à l’incertitude fiscale, les ménages épargnent et les chefs d’entreprise freinent sur l’investissement.
Ces difficultés tombent au plus mauvais moment, car la compétition mondiale s’intensifie. (…)
L’Union européenne s’alarme. (…)
Par contraste, l’absence en France de toute réflexion rationnelle sur la conduite de la politique économique saute aux yeux. Les débats parlementaires, marqués par de profondes dissensions, se résument à des postures et à des discours électoralistes. La gauche s’enferme dans le dogme du tout-impôt. La droite dénonce à juste titre le mauvais état des comptes publics, mais préfère flatter ses clientèles (retraités, élus locaux) plutôt que de soutenir une stratégie de redressement cohérente. (…)
En s’installant à Matignon dans des conditions particulièrement difficiles, Michel Barnier a tenté de lancer ce que la France a toujours eu le plus grand mal à opérer lorsqu’elle est au pied du mur : mener de pair le redressement budgétaire et la préservation de l’outil de production. L’équilibre qu’il a proposé pour tenter de résoudre la difficile équation paraissait raisonnable : un peu plus d’impôts, concentrés sur ceux qui peuvent le supporter, beaucoup moins de dépenses publiques. Mais il a présumé de ses forces. A ce stade, toute la copie est déconstruite, et le seul message qui émerge est que chacun veut continuer à dépenser plus. Le réflexe est sans doute légitime dans un pays en quête de protection, exprimée par une partie de la population, mais il n’est pas réaliste dans le monde tel qu’il se présente.
Le Point, 19 novembre, article payant
Le « Schuldenbremse » qui fit chuter le gouvernement allemand
TRIBUNE : Le frein constitutionnel à la dette allemande était au cœur des divergences politiques. Il reste un outil indispensable, qui devrait inspirer la France.
Voir« Chroniques de Klaus Kinzler » (article complet en PDF)
Le Monde, 15 novembre, article payant
Allemagne : la fin du tabou de l’augmentation de la dette publique
Friedrich Merz, chef de file des conservateurs de la CDU et probable prochain chancelier, n’exclut pas de modifier la Constitution pour autoriser l’Allemagne à accroître ses dépenses. Le frein à l’endettement est accusé de limiter les investissements dont le pays a besoin.
Extraits :
Le prochain gouvernement allemand pourrait-il se réconcilier avec la dette, un mot si lourd de sens en allemand qu’il signifie à la fois endettement et culpabilité ? Friedrich Merz, le candidat conservateur de la CDU-CSU pour les élections législatives du 23 février 2025, et probable prochain chancelier, s’est montré ces derniers jours ouvert à l’idée d’une réforme du « frein à la dette », cette disposition constitutionnelle à laquelle les conservateurs allemands sont traditionnellement attachés, et qui corsète le déficit budgétaire à 0,35 % du produit intérieur brut (PIB) hors effets de la conjoncture.
Ce mécanisme, qui symbolise à lui seul toute la rigueur allemande en matière de finances publiques, fait l’objet de critiques récurrentes, qui se sont accentuées ces dernières années. Tenu responsable du manque chronique d’investissements dans les infrastructures délabrées du pays, il est désormais aussi brocardé pour ses effets sur la lenteur du réarmement allemand, alors que la guerre est aux portes de l’Europe. Les pays européens y voient également l’un des freins au redémarrage du Vieux Continent, dont l’économie allemande est historiquement le moteur, et menacé par la prochaine présidence de Donald Trump outre-Atlantique. A 60 % du PIB, la dette allemande est, de fait, l’une des plus faibles des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
M. Merz ne ferme plus la porte à l’idée d’une réforme de cet outil introduit en 2009 dans le sillage de la crise des subprimes. (…)
« Si le résultat conduit à ce que nous dépensions encore plus d’argent pour la consommation et la politique sociale, alors la réponse est non. » En revanche, « si c’est important pour les investissements, si c’est important pour le progrès, si c’est important pour les générations futures, alors la réponse peut être différente ». D’autres déclarations en ce sens ont été tenues dans divers médias. (…)
« La CDU aura, elle aussi, besoin d’argent si elle accède au gouvernement, analyse Thomas Biebricher, professeur de sciences politiques à l’université Goethe de Francfort. Et si elle souhaite former une coalition avec les sociaux-démocrates et/ou les Verts, la réforme du frein à l’endettement sera inévitable. » (…)
L’opinion publique, qui soutenait traditionnellement ce dispositif, est désormais plus partagée, avec une courte majorité en faveur à son maintien.
Le frein à la dette, […] s’annonce comme l’un des sujets phares de la campagne (…)
Redoutable objet politique, le frein à la dette est en partie responsable de l’éclatement de la coalition au pouvoir depuis 2021, actée par le chancelier Scholz le 6 novembre. (…)
De fait, la question ouverte par l’arrêt de Karlsruhe n’a jamais été tranchée politiquement. Est-il possible pour l’Allemagne de financer, sur son budget courant, les dépenses considérables liées au vieillissement des infrastructures, au décrochage de son économie et aux menaces posées à la sécurité européenne dans un cadre d’endettement désormais défini très étroitement par la Cour constitutionnelle ? Oui, insistaient les libéraux, qui plaidaient pour une baisse des dépenses sociales et une pause dans les réformes environnementales, afin de pouvoir baisser les impôts et relancer l’économie. Non, répondent les Verts et le SPD, qui défendent une réforme du frein à la dette. La coalition a implosé quand Christian Lindner a refusé une levée temporaire de l’instrument réclamée par Olaf Scholz. (…)
Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 novembre, article payant
Gut, dass wir die Schulden bremsen
Wenn es noch Beispiele für den Nutzen der Schuldenbremse gebraucht hat – die vergangene Woche hat gleich zwei geliefert.
Extraits :
Wenn es noch ein Beispiel gebraucht hätte dafür, wie eine Schuldenbremse ausgetrickst werden kann, dann hat es Olaf Scholz am Mittwochabend geliefert. Nach dem Wahlsieg von Donald Trump wollte er eine Ausnahme von der Schuldenbremse beschließen lassen. Um 15 Milliarden Euro wäre es gegangen. Die Ukraine hätte aber nur drei Milliarden Euro mehr bekommen als vorgesehen. Die restlichen zwölf Milliarden wollte Scholz mit den sowieso vorgesehenen Zahlungen verrechnen – und das Geld dann für seine Lieblingsprojekte verwenden. Die Autoindustrie hätte Subventionen bekommen, andere Branchen niedrigere Strompreise.
Solche Aktionen halten das Misstrauen wach gegenüber der Idee, die Schuldenbremse für wichtige Ziele zu lockern. Es fällt schwer zu glauben, dass das Geld tatsächlich bei diesen Zwecken ankäme. Doch es gibt noch einen zweiten Grund für die Schuldenbremse. Tatsächlich war sie es, die die Ampelkoalition an ihr Ende gebracht hat. Kurzfristig am Mittwochabend und längerfristig, weil sich die Ampelparteien nicht auf Prioritäten einigen konnten. Die Schuldenbremse macht transparent, dass das wahre Leben Prioritäten erzwingt (und nicht das Geld). Den Euro kann man auch deshalb nur einmal ausgeben, weil man sonst erst mal jemanden finden muss, der die Arbeit für den zweiten Euro erledigt. Das gilt auch jetzt noch, in der Wirtschaftskrise. Denn die ist anders als das, was Deutschland gewöhnt ist.
Schuldenfinanzierte Staatsprogramme sind dazu da, in plötzlichen Krisen die Nachfrage zu stabilisieren, damit sich keine Abwärtsspirale bildet. In solchen Zeiten braucht man finanziellen Spielraum. In der Pandemie wurde Deutschland von der halben Welt darum beneidet, welche Finanzkraft die Regierung plötzlich einsetzen konnte. Weil die Fiskalpolitik vorher solide war. Doch Deutschland hat jetzt kein plötzliches Problem, kein kurzfristiges. Das Land muss sich darauf einstellen, dass sich die Welt dauerhaft geändert hat: Sie ist gefährlicher geworden, Deutschland muss mehr von seinem Geld und seiner Arbeitskraft für die Verteidigung einsetzen. Das Energiesystem muss umgebaut werden. Schienen, Straßen und Internetleitungen müssen ordentlich gepflegt werden. Unternehmen brauchen mehr Freiheit. Für all das reicht ein schuldenfinanziertes Strohfeuer nicht aus, das muss dauerhaft finanziert werden.
Und wo soll das Geld dafür herkommen? Deutschland braucht Reformen, die das Land in Schwung bringen. Ein guter Bürokratieabbau und flexiblere Arbeitsgesetze kosten nicht viel, können aber viel Dynamik auslösen. Dann wäre bald wieder mehr Geld in der Staatskasse – und zwar dann, wenn man es auch verbrauchen kann. Man darf es dann nur nicht wieder in neue Subventionen stecken. (…)
Wer die Schuldenbremse schleifen will, beruft sich gerne auf einen angeblichen Konsens der Ökonomen. Nun sind erstens längst nicht alle Ökonomen davon überzeugt, dass die Regel geändert werden muss (der unabhängige wissenschaftliche Beirat des Finanzministeriums zum Beispiel fordert nichts in dieser Art).
Und zweitens sind die Reformvorschläge oft kleiner, als sie klingen. Folgte man zum Beispiel den Wirtschaftsweisen, hätte Deutschland in diesem Jahr sieben Milliarden Euro mehr Schulden aufnehmen können. Das hätte nicht mal für Olaf Scholz’ Ukraine-Idee gereicht. Auch der Internationale Währungsfonds hat zwar einmal eine Reform der Schuldenbremse empfohlen, findet aber in seinem jüngsten Bericht Deutschlands aktuelles Schuldenniveau sehr angemessen.
Die meisten anderen Länder warnt der Währungsfonds inzwischen vor dem Ausmaß an Schulden, das sie aufgehäuft haben. Welche Probleme das bringen kann, dafür sind die Vereinigten Staaten nur das jüngste Beispiel: Dort hat Präsident Joe Biden versucht, mit einem riesigen schuldenfinanzierten Subventionsprogramm Strukturprobleme der Wirtschaft zu lösen und das Land grüner zu machen. Dieses Programm trug dazu bei, dass die Inflation in den USA so lange hoch blieb. Und das wiederum war einer der wichtigeren Gründe für den Wahlsieg von Donald Trump. Wer die Schuldenbremse jetzt noch schleifen will, sollte vorher zumindest die Lage der USA verstanden haben.
Le Figaro, 12 novembre, article payant
Face au choc fiscal qui s’annonce, les entreprises réduisent déjà la voilure en France
DÉCRYPTAGE – Le vote solennel de la partie recettes du projet de loi de finances est programmé ce mardi. La nouvelle donne fiscale oblige les petits et grands patrons, qui finalisent leur propre budget 2025, à de douloureux arbitrages.
Extraits :
« Depuis quelques semaines, nous voyons nos clients de plus en plus inquiets, quels que soient leur taille et leur secteur d’activité, assure Angélique Acosta, directrice associée du cabinet de conseil Spartes. La plupart n’auront pas d’autre choix que de réduire leurs dépenses de fonctionnement. » Pour faire face au mur de charges qui les attend à partir de 2025, certaines entreprises activent déjà tous les leviers possibles pour trouver des économies. Gestion plus fine de la paie, de l’absentéisme ou des contrats d’assurance collective, optimisation du parc immobilier, de la consommation d’énergie… la chasse aux économies est ouverte.
« Je compte faire un bilan clair des dépenses de santé réelles des collaborateurs », confie Roger Reynaud, à la tête d’Alliance Environnement, une entreprise de traitement de l’eau et de valorisation des déchets basée dans le Sud. Pis, 37% des très petites entreprises envisagent de modérer les salaires, selon une enquête menée par le Syndicat des indépendants (SDI). « Notre service juridique reçoit beaucoup d’appels de TPE qui se posent la question de la possibilité qu’elles ont de se séparer de leurs collaborateurs », alerte Marc Sanchez, secrétaire général du SDI, alors que 27% des entreprises craignent d’avoir à supprimer des postes. (…)
« Si j’ai moins de compétitivité, j’investis moins dans les magasins et dans les baisses de prix et je crée moins d’emplois », a prévenu Alexandre Bompard, PDG de Carrefour, premier employeur privé de France. Rodolphe Saadé, patron de l’armateur CMA CGM, l’un des groupes français les plus florissants de ces dernières années, a, lui, brandi la menace dans une interview au Figaro : « Je vais certainement devoir revoir certains de mes investissements. Dans la logistique, nous faisons traditionnellement de la croissance externe : il se peut que certaines opérations ne se fassent pas. »
Plans d’économies, projets industriels et d’acquisitions remis en cause, menaces sur l’emploi… Le budget 2025 n’a pas encore été voté, mais ses effets secondaires se font déjà sentir. « C’est un vent fiscal très puissant qui s’abat sur les entreprises, déplore un conseiller de plusieurs patrons du CAC 40. Tout entrepreneur ne peut qu’être saisi d’un fort sentiment d’insécurité à la vue des débats actuels à l’Assemblée nationale. » Toutes les entreprises ont senti le vent tourner. La politique de l’offre favorable à l’investissement impulsée par Emmanuel Macron depuis 2017 ? Oubliée, face à l’urgence du moment : contenir la dérive des finances publiques. (…)
Le Monde, 9 novembre, article payant
« L’inflation, si elle se matérialise immédiatement par la hausse des prix, laisse des cicatrices longtemps visibles et douloureuses »
L’inflation est retombée en Europe sous les 2 % annuels en septembre. Mais ses effets se font toujours sentir : les prix ne sont pas redescendus et la volonté publique de limiter l’impact de la hausse des côuts de l’énergie pour les ménages alourdit la dette de l’Etat.
Extraits :
(…) Car l’inflation, si elle se matérialise immédiatement par une valse des étiquettes, peut aussi être un poison lent. Alors que le mauvais génie est retourné dans sa bouteille, ses cicatrices sont encore bien visibles et douloureuses. Dans une conférence sur ce sujet lors des Journées de l’économie, qui se sont tenues à Lyon du mardi 5 au jeudi 7 novembre, le chef du département conjoncture de l’Institut national de la statistique et des études économiques, Dorian Roucher, a dressé la liste de ces blessures mal refermées.
La première est celle du niveau des prix. Car si l’inflation est retombée en Europe sous les 2 % annuels en septembre, les prix, eux, ne sont pas redescendus pour autant. Stable pendant quinze ans, celui des œufs et des pâtes a explosé de plus de 20 % et ne retrouvera pas son niveau de 2020. Certes, comme le souligne l’économiste Xavier Ragot, les salaires ont suivi, mais avec retard. Et le sentiment d’une perte de pouvoir d’achat demeure ainsi prégnant. « Dans les années 1970, les salaires grimpaient sous la pression des revendications salariales, puis les prix s’ajustaient, explique-t-il. L’inflation était donc bien perçue. Aujourd’hui, c’est l’inverse, à l’exception du smic qui reste indexé sur le niveau de l’inflation. D’où l’énervement des ménages. » Un énervement qui se traduit par une baisse de la consommation qui fait chuter la croissance.
Mais ce n’est pas la seule cicatrice douloureuse. Dans le cas français, c’est aussi l’Etat qui a souffert. En voulant protéger les foyers, notamment de la hausse des coûts de l’énergie, le bouclier français a coûté plus de 70 milliards d’euros à la puissance publique. Avec une conséquence bien visible sur ses comptes, comme en témoigne la discussion budgétaire actuelle. L’inflation se solde donc par un conflit de répartition de la facture entre les entreprises, les salariés et l’Etat. Apaiser ces cicatrices prendra du temps et, en attendant, les immigrés en seront les premières victimes indirectes, boucs émissaires faciles en ces temps difficiles.
Contrepoints, 9 novembre, libre accès
« Nouvelles leçons d’Histoire économique » de Jean-Marc Daniel
Des leçons utiles et passionnantes, pour y voir plus clair sur quelques-unes des grandes questions économiques contemporaines.
Extraits :
Douze ans après ses 8 leçons d’histoire économique, Jean-Marc Daniel nous propose 10 nouvelles leçons. Toujours avec l’idée qui lui est chère que les événements qui se produisent paraissent souvent inédits, exceptionnels, voire particulièrement dramatiques, à ceux qui les vivent. Ces derniers omettant toutefois que, dans nombre de situations, les leçons du passé auraient permis de s’apercevoir qu’il n’en est rien. A l’instar de ce qu’Alfred Sauvy en son temps dénonçait, lorsqu’il évoquait par exemple le déficit de connaissance ou de rigueur intellectuelle dans son ouvrage L’économie du diable. (…)
Et c’est bien d’histoire qu’il va être question dans cet ouvrage, avec tout le talent, la connaissance et le sens des anecdotes passionnantes qui font le style de Jean-Marc Daniel. (…)
Dépenses publiques, dette, croissance
Un chapitre passionnant sur les dépenses publiques permet d’illustrer la manière dont elles peuvent conduire à des dérives en matière de dette, puis d’obstacle à la croissance. Un chapitre qui démarre avec la juste analyse de Machiavel selon laquelle dépenser en espérant, pour le gouvernant, en retirer une réputation ne sert à rien, dans la mesure où les bénéficiaires sont des ingrats (on peut en effet constater aujourd’hui encore que les contribuables se souviennent rarement des avantages fiscaux dont il arrive qu’ils bénéficient, tandis qu’ils ont une forte propension à se plaindre constamment du sentiment de ne pas suffisamment recevoir de l’Etat. Quand ce n’est pas simplement l’Envie qui régit les comportements).
Il est donc sage de se résoudre à être appelé avare, qualité qui n’attire que du mépris sans haine, que de se mettre, pour éviter ce nom, dans la nécessité d’encourir la qualification de rapace, qui engendre le mépris et la haine tout ensemble.
De Jean-Jacques Rousseau à William Gladstone en Angleterre, et sa vision libérale de l’Etat minimal, en passant par Joseph de Villèle, ministre des Finances partisan de la réduction sans concession des dépenses publiques, sous la Restauration, ou encore Leroy-Beaulieu, on voit que l’esprit du XIXe siècle était bien éloigné de celui qui a ensuite dominé depuis le XXe siècle, conforme quant à lui à la loi de Wagner selon laquelle « si la dépense s’élève sans cesse, c’est que l’Etat y trouve le moyen d’assurer sa pérennité ».
D’un niveau de dépenses publiques d’environ 14% du PIB en 1830 et toujours à ce niveau en 1913, on est ainsi passés comme on le sait à 56% aujourd’hui.
Déjà en son temps, nous rappelle Jean-Marc Daniel, Turgot se débattait pour tenter de baisser les dépenses publiques et les nombreux gaspillages qu’elles induisent inéluctablement. L’histoire bégaie…
Car la croissance joue un rôle majeur en économie, au-delà du problème de sa mesure. Un autre chapitre nous en montre les enjeux, à travers les travaux de Simon Kuznets ou Robert Solow, entre autres auteurs fondamentaux. C’est un état d’esprit auquel ne sont pas étrangers l’entrepreneur, le rôle du progrès technique, de l’investissement ou encore de la concurrence, comme du libre-marché, de l’énergie bon marché, ou des transformations sociétales, notamment. Les révolutions entamées à Berlin en1989, et qui se sont prolongées dans les pays émergents ensuite, sont sur ce point fondamentales :
Les années de croissance que ces pays ont devant eux ne seront pleinement efficaces que lorsque le processus d’élimination des kleptocrates « post-brejnéviens » sera terminé. C’est alors en effet que la dynamique de l’épargne et de l’investissement, de la concurrence et de la destruction créatrice pourra se faire de façon durable et équilibrée. (…)
Le Figaro, 8 novembre, article payant
«Un gâchis humain et financier» : l’absentéisme des agents de la Ville de Paris sous le feu des critiques
DÉCRYPTAGE – Alors que le gouvernement entend lutter contre ce fléau chez les fonctionnaires, le cas de la Ville de Paris interpelle : en 2023, les agents de la municipalité ont été absents 39 jours en moyenne, selon un rapport. Des chiffres dénoncés par la droite locale.
Extraits :
La mairie de Paris est-elle championne du monde d’absentéisme ? Mardi, au Sénat, le ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, est revenu sur ce sujet qu’il avait déjà développé quelques semaines plus tôt dans nos colonnes. L’occasion pour le membre du gouvernement de pointer du doigt la gestion coûteuse des ressources humaines à la mairie de Paris, dans un contexte de disette budgétaire. Dans les rangs des agents de la capitale, «le taux d’absentéisme atteint 9,14%, soit le double du secteur privé, a souligné le ministre. Le nombre de jours d’absence par agent et par an est assez parlant : 11,6 jours dans le privé, 14,5 jours dans la fonction publique, 39,6 jours à la Ville de Paris», a-t-il égrené, interpellé par la sénatrice Agnès Evren, lors des questions au gouvernement.
39,6 jours d’absence par an et par agent : l’exécutif ne pouvait rêver meilleur plaidoyer pour justifier son projet de durcir les conditions d’indemnisations des arrêts-maladies des fonctionnaires, comme le prévoit le budget de la Sécu. À première vue, aucun doute, les fonctionnaires de la Ville de Paris n’ont pas volé leur titre de champions de l’absentéisme. En parcourant le rapport social unique 2023 de la municipalité, on constate que les agents «permanents», au nombre de 36.248, ont bien comptabilisé 1.435.760 jours ouvrés d’absence, tous motifs confondus, en 2023, ce qui correspond effectivement à une moyenne de 39,6 jours cette année-là.
Sollicitée par Le Figaro, la Ville de Paris préfère souligner la dynamique baissière des absences pour raisons de santé, résultat des «actions entreprises en matière de prévention de l’inaptitude, de mise en place de dispositifs passerelles ou d’accompagnement à la reconversion». (…)
Pas de quoi convaincre la sénatrice Agnès Evren, pour qui l’absentéisme «irrationnel» de la Ville de Paris résulte avant tout d’une «mauvaise gestion» des ressources humaines. Car les absences des agents parisiens ne se limitent pas aux seuls arrêts-maladie et assimilés. Juste derrière les congés de parentalité, viennent les absences pour grèves qui pèsent pour 5,3% des journées de travail manquées par les agents. Rien d’étonnant aux yeux de la sénatrice, qui revient sur le rôle qu’a joué l’édile lors de la dernière mobilisation sociale d’opposition à la réforme des retraites. (…)
Wall Street Journal, 6 novembre, article payant
How to Grow Out of America’s Debt Woes
Infrastructure investment, particularly related to AI, could help tame the deficit and expand the economy (by Larry Fink, chairman and CEO of BlackRock)
Voir « Article du Jour »
Le Figaro, 6 novembre, article payant
Bercy confirme l’envolée du déficit à 6,1% du PIB pour 2024
Il s’agit d’un important dérapage par rapport au déficit de 4,4% qui était prévu dans le projet de loi de finances initiale pour 2024.
Extraits :
Le déficit public de la France atteindra 6,1% du produit intérieur brut (PIB) en 2024, selon le projet de loi de finances de fin de gestion présenté mercredi en Conseil des ministres, qui prévoit des annulations de crédits supplémentaires de 5,6 milliards d’euros, selon le ministère de l’Économie.
Il s’agit d’un important dérapage par rapport au déficit de 4,4% qui était prévu dans le projet de loi de finances initiale pour 2024. Il aurait été plus important encore sans des annulations de crédits de plusieurs milliards d’euros qui ont permis de réduire les dépenses de l’État français d’environ 6 milliards d’euros à 486,4 milliards d’euros.
Le Point, 4 novembre, article payant
Zone euro : des prévisions d’inflation beaucoup trop optimistes
LA CHRONIQUE DE PATRICK ARTUS. Si l’inflation se stabilise autour de 3 % et non autour de 2 %, la Banque centrale européenne disposera d’un potentiel limité de baisse des taux d’intérêt.
Extraits :
(…) En réalité, l’inflation hors énergie et aliments non transformés est stable à 2,7 % depuis le mois d’avril 2024, la hausse des prix des services oscille autour de 4 % depuis le quatrième trimestre 2023 – elle est de 4 % en septembre 2024. Il est à craindre que la situation de l’industrie européenne ne s’améliore que lentement, donc que les prix des produits industriels restent en croissance faible.
Cependant, il faut voir que, depuis 2022, les marges bénéficiaires des entreprises européennes ont beaucoup reculé – ce recul explique 0,8 point par an de baisse de l’inflation totale –, alors que les marges bénéficiaires des entreprises américaines ont beaucoup augmenté. Si les entreprises européennes, y compris les entreprises industrielles, stabilisent leur taux de marge bénéficiaire, l’inflation de la zone euro augmentera donc de 0,8 point par an.
Mauvaise nouvelle
Un autre facteur inflationniste dans la zone euro est l’absence de gains de productivité, alors que le marché du travail reste tendu – l’enquête sur les difficultés d’embauche des entreprises montre que ces difficultés restent fortes. Ce qui entraîne une croissance du salaire nominal par tête et du coût salarial unitaire de 4,2 % sur un an au deuxième trimestre 2024. C’est bien la baisse des marges bénéficiaires qui permet que cette hausse des coûts salariaux ne passe pas entièrement dans les prix.
Si on fait l’hypothèse d’une stabilisation dans le futur du prix de l’énergie et d’un moindre recul des marges bénéficiaires, on arrive à la conclusion que l’inflation totale de la zone euro va se stabiliser autour de 3 %. Cela est 1 point (100 points de base) au-dessus de ce qui est anticipé pour l’inflation de 2025 ou 2026 aujourd’hui. Probablement, les prévisionnistes extrapolent-ils l’évolution récente de l’inflation totale au lieu d’analyser les différentes composantes de l’inflation.
La mauvaise nouvelle est que si l’inflation se stabilise autour de 3 % et non autour de 2 %, la BCE disposera d’un potentiel limité de baisse des taux d’intérêt – de 3,25 % aujourd’hui pour le taux des dépôts des banques à la BCE à environ 3 % –, alors que si l’inflation descendait effectivement à 2 %, la BCE pourrait baisser le taux des dépôts jusqu’à 2 % également. En conséquence, si la baisse des taux directeurs de la BCE s’arrête à 3 %, il faut attendre une remontée des taux d’intérêt à long terme par rapport au niveau présent qui est cohérent avec des taux d’intérêt à court terme de 2 %.
Le taux d’intérêt à dix ans sur la dette publique de la France est aujourd’hui de l’ordre de 3 %. Après révision des anticipations d’inflation et de taux d’intérêt à court terme, il faut prévoir une remontée des taux d’intérêt sur la dette publique de la France jusqu’à 3,4 % environ et des taux d’intérêt sur les crédits immobiliers à vingt ans en France de 3,85 %, au lieu de 3,35 % aujourd’hui. La reprise du crédit immobilier risque de ne pas durer si effectivement notre prévision d’inflation et de taux d’intérêt est correcte.
* Patrick Artus est conseiller économique d’Ossiam, membre du Cercle des économistes.
Nicolas Baverez: «La France est devant un choix clair : le redressement ou la mise sous tutelle»
GRAND ENTRETIEN – Depuis plus de vingt ans, l’auteur* alerte sur le décrochage économique de la France. Cela ne l’empêche pas de croire encore que le pays peut éviter le déclassement, s’il accepte de se réformer en profondeur. Il détaille les conditions de ce «sursaut» dans son dernier livre. (Le Figaro, 30 octobre, article payant)
Extraits :
(…) L’affaissement de la France est indissociable du modèle malthusien de la décroissance à crédit. Or il est caduc. Les marchés financiers, les agences de notation, l’Union européenne, la BCE, le FMI n’entendent plus cautionner une fuite en avant que tous savent insoutenable. Ils ont perdu toute confiance dans les promesses des dirigeants français et nous placent devant un choix clair : la transformation ou la mise sous tutelle. (…)
Dès lors, deux questions fondamentales se posent. Sommes-nous capables de faire les changements par nous-mêmes ou devrons-nous les subir sous la contrainte de l’Union européenne, de la BCE et du FMI ? C’est le même dilemme qu’en 1983. Le « quoi qu’il en coûte » d’Emmanuel Macron a mis la France dans une situation de quasi-défaut comme la construction du socialisme dans un seul pays et la relance à contre-courant de 1981. Sans l’assumer politiquement, François Mitterrand a choisi en 1983 le tournant de la rigueur pour éviter le passage sous les fourches caudines du FMI et éviter la situation du Royaume-Uni des années 1970.
Nous devons à nouveau trancher : soit nous réformer par nous-mêmes, comme le fit l’Allemagne avec l’Agenda 2010 sous le leadership de Gerhard Schröder, soit éprouver les affres de la restructuration de la Grèce, qui a vu l’incompétence et la corruption de la classe politique rendre inévitable le placement sous une tutelle extérieure. L’autre question décisive est démocratique : la France parviendra-t-elle à surmonter sa crise dans le cadre de la République ou connaîtra-t-elle une expérience populiste ou autoritaire, à l’image de Donald Trump aux États-Unis, Boris Johnson au Royaume-Uni, Giorgia Meloni en Italie ou Viktor Orban en Hongrie ?
Vous êtes très sévère à l’égard de la classe politique actuelle, et vous parlez d’un « aveuglement volontaire ». Y a-t-il une vraie incompétence de la classe politique, depuis des décennies ?
La vraie cassure est intervenue au moment de l’élection de François Mitterrand. (…)
À partir de François Mitterrand, la priorité n’est plus donnée à la puissance de la France mais à la satisfaction des Français, y compris dans leurs demandes les plus inconsistantes et dangereuses pour la nation, car en porte-à-faux avec les bouleversements du monde. Les politiques publiques basculent alors dans une logique clientéliste et consumériste. Dans le domaine de l’éducation, pour flatter les élèves et les parents, on abandonne la transmission du savoir et l’on institutionnalise le mensonge en distribuant des diplômes dont on sait qu’ils ont perdu toute valeur. Et dans le même temps, on occulte la montée de la violence, qui finit par se retourner contre les enseignants, jusqu’aux tragédies des assassinats de Samuel Paty et de Dominique Bernard.
Dans la santé, l’objectif de la gratuité pour tout et pour tous débouche sur un système régulé par la restriction de l’accès aux soins, l’effondrement de leur qualité et la pénurie endémique de médicaments. Avec des conséquences très concrètes comme la forte hausse de la mortalité infantile, près de deux fois supérieure aux grands pays développés. Le tout est surplombé par la dette publique, qui constitue une arme massive de l’économie, de la société et de la souveraineté. Nous avons remis le destin de la France entre les mains des marchés et de nos partenaires européens tout en spoliant les générations futures pour distribuer des revenus fictifs à deux générations de Français. (…)
Les grandes crises ont touché, et touchent, tous les pays occidentaux. Pourquoi la France fait-elle moins bien que ses voisins ?
L’exception française, c’est le déni sur les difficultés du pays et sur les évolutions du monde. Plus le décrochage s’accélérait, plus on a communié dans la célébration du modèle français, de sa supériorité et de son intangibilité, à grand renfort de commémorations sur la grandeur passée qui sont autant de prétextes pour ne pas traiter les problèmes du présent. Plus nous avons cherché des boucs émissaires dans la mondialisation, l’Europe, l’Allemagne ou les immigrés, et plus nous nous sommes repliés dans une forme de bulle déconnectée du réel.
La France n’avait aucune raison de rater le cycle de la mondialisation. Compte tenu de ses atouts et de son histoire, elle aurait dû exceller dans une période de grande avancée de la liberté. Au lieu de quoi l’État a coupé l’économie et la société du monde du XXIe siècle. Avec pour conséquence un écroulement économique qui cumule baisse de la productivité, croissance potentielle nulle, chômage de masse, paupérisation accélérée (la richesse d’un Français est inférieure de 20 % à celle d’un Allemand et de plus de 50 % à celle d’un Américain), déficit commercial abyssal et perte de contrôle de la dette publique. (…)
Alors que les États-Unis réinvestissent massivement dans leur économie, avec des finances publiques dégradées, et sans le privilège exorbitant du dollar, la France peut-elle faire face ?
La réponse est assurément positive. L’IRA (Inflation Reduction Act, NDLR), en réalité, reprend les recettes du capitalisme à la française. Il mobilise les pouvoirs publics, les entreprises et la classe moyenne autour de la modernisation du modèle économique. Et il se sert de l’argent public comme d’un levier pour l’argent privé. C’est une déclinaison américaine du plan Monnet dans l’économie de la connaissance, de l’intelligence artificielle et de la transition écologique. (…)
* Historien et économiste de formation, Nicolas Baverez est avocat et éditorialiste au « Figaro » et au « Point ». Il publie « Sursaut » (éditions l’Observatoire, 192 p., 20 €).
Budget : la France livrée à une bande d’idéologues et de calculateurs, par Jean-François Copé
La décision de dissolution de l’Assemblée prise par Emmanuel Macron le 9 juin a des conséquences catastrophiques sur le fonctionnement régulier de nos institutions. La preuve avec l’examen du budget, selon notre chroniqueur. (L’Express, 30 octobre, article payant)
Extraits :
(…) la fragile coalition gouvernementale née de ce qu’il restait des partis de gouvernement, au lieu de faire bloc face à la gravité de la situation, se fourvoie dans des divisions politiciennes inimaginables. Obsédés par la présidentielle de 2027, les chefs de file des différentes écuries n’ont qu’une idée en tête, empêcher le voisin de gagner des points dans les sondages. Ils se déchirent sur les postes de commandement à l’Assemblée nationale au point d’offrir une vice-présidence de l’Assemblée et la stratégique présidence de la commission des Affaires économiques au NFP plutôt que de se partager sereinement les responsabilités.
Pire encore, les voici incapables de courage sur les sujets difficiles concernant les pensions de retraite ou la réduction ponctuelle des crédits surabondants de l’apprentissage. Sans oublier – honte absolue – le comportement du MoDem, centriste en temps normal, qui vote les hausses d’impôts proposées par l’extrême gauche, voire rédige lui-même leurs pires amendements. Enfin, comme si cela ne suffisait pas, le gouvernement voit certains de ses ministres menacer de démissionner au motif que leurs crédits seraient rabotés!
La vraie question, les Français la posent depuis le début de ce triste mois d’octobre : quand va s’arrêter ce cauchemar? Pendant combien de temps ces gens censés incarner la représentation nationale vont-ils continuer de jouer les pyromanes? Notre pays était heureux jusqu’au 9 juin et le voici en train de sombrer parce que livré à une bande d’idéologues d’un côté et de calculateurs, de l’autre. Depuis six semaines, l’économie française retient son souffle. Les décisions d’investissement, d’embauche, de consommation dans les entreprises, les collectivités locales et bien sûr les ménages sont stoppées net. Tout le monde est sidéré devant ce spectacle de honte. Comme si on avait oublié que le soutien au gouvernement de Michel Barnier ne relevait ni de l’engagement ni de l’affect, mais de la survie politique du pays.
Alors? Alors il va falloir faire preuve d’autorité et siffler la fin de la folie. Un rendez-vous de pédagogie va s’imposer sérieusement. D’abord pour rappeler qu’à court terme, la baisse du déficit est scrutée par des marchés financiers qui sont en train d’inscrire la dette française au tableau des risques majeurs. Et à long terme, parce que des réformes structurelles sont indispensables – les Français le savent très bien même si ça les énerve. Augmenter la durée du travail hebdomadaire, réformer l’assurance chômage, allonger encore l’âge de départ à la retraite à l’image de la moyenne européenne qui est à 67 ans, diminuer le nombre de fonctionnaires, baisser ces dépenses de fonctionnement dont l’efficacité n’est plus démontrée et qui nous conduisent inéluctablement vers le dépôt de bilan. La vérité, c’est qu’il n’y a là ni drame ni tragédie à mettre ces mesures en oeuvre. Ce sont des décisions de bon sens qu’appliquent tous les chefs de famille ou d’entreprise raisonnables. Raisonnable? Mais oui bien sûr, l’inverse de la folie.
Un débat sur le budget 2025 de plus en plus sous pression
Même si la France échappe fin octobre à la dégradation de sa note de crédit par Moody’s, il ne faut pas relativiser ce qui est à l’œuvre. Les parlementaires devraient faire davantage preuve de sens des responsabilités pour élaborer un budget crédible face à des déséquilibres qui ne sont plus soutenables. (Le Monde, édito, 28 octobre, article payant)
Extraits :
(…) Même si la France échappe cette fois-ci à la dégradation, il ne faut pas relativiser ce qui est à l’œuvre. Désormais, l’Hexagone n’est plus qu’à un cran de la catégorie A chez deux des trois principales agences de notation, Standard & Poor’s (S&P) et Fitch. C’est une zone dangereuse, car une nouvelle dégradation disqualifierait la dette française auprès de nombreux investisseurs. Les règles de gestion des fonds de placement limitent voire interdisent de détenir des obligations qui sont classées sous les catégories AAA ou AA. La dette française aurait beaucoup plus de mal à trouver preneur et ceux qui accepteraient d’en acheter ne le feraient qu’avec une prime de risque substantielle, c’est-à-dire des taux beaucoup plus élevés. S&P se prononcera le 29 novembre.
Le pays est au seuil de ce cercle vicieux, qui entraînerait un alourdissement de la charge de la dette et réduirait d’autant les marges de manœuvre budgétaires. La menace devrait inciter les parlementaires à faire davantage preuve d’esprit constructif et de sens des responsabilités pour élaborer un budget crédible face à des déséquilibres qui ne sont plus soutenables.
La France bénéficie encore d’une certaine mansuétude de la part des agences de notation par rapport à des pays qui ont des taux d’endettement et de déficit du même ordre de grandeur. Mais cette prime ne tient désormais qu’à un fil. Alors que la crédibilité de la France est entamée, tout blocage politique sonnerait l’hallali.https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/26/un-debat-sur-le-budget-2025-de-plus-en-plus-sous-pression_6360242_3232.html
Guillaume Kasbarian : « Nous voulons passer le nombre de jours de carence des fonctionnaires d’un à trois, comme dans le privé »
ENTRETIEN – Le ministre de la Fonction publique estime qu’il est urgent de lutter contre l’absentéisme. Son plan doit permettre de réaliser 1,2 milliard d’euros d’économies. (Le Figaro, 28 octobre, article payant)
Extraits :
(…) Mais dans la période budgétaire actuelle, j’ai identifié une urgence : celle de la lutte contre l’absentéisme. Pour rappel, en dix ans, le nombre de jours d’absence est passé de 43 millions à 77 millions, soit une hausse de 80 %. L’écart s’est creusé entre la fonction publique et le secteur privé, puisque, aujourd’hui, les fonctionnaires sont absents en moyenne 14,5 jours par an contre 11,6 jours pour les salariés du privé. Cet absentéisme a coûté 15 milliards d’euros à l’État en 2022. La Cour des comptes a récemment tiré la sonnette d’alarme et, alors que l’agence de notation Moody’s s’est inquiétée de la capacité de la France à mener des réformes structurelles, nous estimons que nous ne pouvons pas nous permettre de ne rien faire.
Comment comptez-vous lutter contre cet absentéisme ?
Nous allons d’abord prendre deux mesures de responsabilisation, par des amendements au projet de loi de finances. La première, en passant le nombre de jours de carence d’un à trois – ce qui revient à aligner le régime de la fonction publique sur le secteur privé. Et nous ferons la même chose concernant les remboursements des arrêts maladie, en les limitant à 90 %, ce qui est le cas dans le privé. (…)
En complément de ces mesures de responsabilisation, nous prendrons aussi trois mesures d’accompagnement portant sur l’amélioration de la qualité de vie au travail, la débureaucratisation et la protection des agents face aux actes de violences. (…)
Pour un coup de tronçonneuse dans les dépenses publiques
Michel Barnier prend en charge un pays qui depuis une cinquantaine d’années a pour pratique de recourir systématiquement à la dette pour boucler le budget de la nation. Cette dette a fini, évidemment, par devenir considérable, et avec la remontée des taux des crédits son service se trouve en passe de devenir le premier poste du budget de la nation. La Commission européenne s’agaçant de nos incartades nous rappelle donc, maintenant, à l’ordre, et les agences de notation de la dette commencent à s’inquiéter de notre sort. On voit bien que nous sommes parvenus au point où le recours à cet expédient pour faire fonctionner notre économie arrive à son terme, et il va donc falloir entreprendre de tailler à la hache dans nos dépenses publiques. Ce rôle ingrat échoit à notre nouveau premier ministre. Nous sommes dans une situation d’urgence où il nous faudrait un homme à la tronçonneuse, comme Javier Milei en Argentine, qui s’attaquerait à nos dépenses publiques à coups de « afuera ». Mais on a beaucoup de peine à imaginer notre nouveau premier ministre dans ce rôle : il est beaucoup trop policé pour cela et il faudrait déjà qu’il en ait le pouvoir. (Contrepoints, 25 octobre, libre accès)
Budget 2025, un choc fiscal mortel pour l’industrie
L’ÉDITO DE NICOLAS BAVEREZ. Avec la loi de finances annoncée, la faillite de l’État va se payer de la ruine des entreprises françaises. (Le Point, 25 octobre, article payant)
Extraits :
La France a perdu le contrôle de ses finances publiques, avec un déficit qui atteindra 6,2 % du PIB en 2024, alors qu’il était prévu à 4,4 %. La dette s’élève désormais à 112 % du PIB et son service à 55 milliards d’euros. Le caractère insoutenable de cette bulle spéculative a conduit la Commission européenne à engager en juillet 2024 une procédure pour déficit excessif contre la France et l’agence Fitch, à placer sa dette sous surveillance négative. La crise financière n’est plus un risque mais une réalité, puisque notre pays emprunte désormais à des taux plus élevés que l’Espagne et la Grèce, ce qui acte son déclassement.
Le Premier ministre, lors de son discours de politique générale du 1er octobre, s’est fixé, à juste titre, pour objectif de ramener le déficit public à 5 % du PIB en 2025 et à 3 % du PIB en 2029. Le projet de loi de finances prévoit ainsi un effort inédit de 60 milliards d’euros en 2025. Mais, contrairement aux annonces initiales, il n’engage aucune réduction effective des 1 600 milliards de dépenses publiques et prévoit plus de 30 milliards de hausses d’impôts, dont plus des deux tiers, soit 22 milliards, sont mis à la charge des entreprises.
Chute de la compétitivité
L’économie française s’apprête donc à subir un choc fiscal de 1,1 % du PIB, qui sera supporté à hauteur de 0,8 % du PIB par les entreprises, alors qu’elles acquittent déjà des prélèvements représentant 12,6 % du PIB, contre 9,3 % du PIB en Allemagne. L’effet sera dévastateur pour la croissance – avec une perte minimum de 0,8 point d’activité – comme pour l’emploi, avec une remontée du chômage à 8 % de la population active.
Les finances publiques connaîtront une nouvelle dégradation, car le rendement par ailleurs incertain des nouvelles taxes sera annihilé par la chute de l’activité, les dépenses croîtront plus vite que les recettes et la dette publique – qui s’envolera au-dessus de 115 % du PIB – progressera plus rapidement que la richesse nationale. La ponction fiscale sera parfaitement vaine faute de diminution des dépenses.
Les conséquences à long terme sont pires encore. La chute de la compétitivité des entreprises s’accompagnera d’une vague de délocalisation de capitaux et de sociétés ainsi que de l’arrêt des investissements étrangers, accélérant ainsi l’attrition de l’appareil de production, qui constitue la première raison du décrochage de l’économie française. (…)
L’EXEMPLE DU CANADA: «Le Canada a montré que remettre de l’ordre dans les comptes publics tout en baissant les impôts, c’est possible !»
FIGAROVOX/TRIBUNE – Dans les années 1990, le Canada est passé d’une situation de déficit avoisinant les 10 % à une situation d’équilibre en baissant en même temps les dépenses publiques et la fiscalité, expliquent Kevin Brookes, chercheur associé à l’Institut économique de Montréal et Louise Baroin. (Le Figaro, 24 octobre, article payant)
Extraits :
(…) Pourquoi le gouvernement a-t-il privilégié la piste de la hausse des impôts dans le pays le plus fiscalisé au monde, sans envisager de réduire sérieusement les dépenses publiques ? Outre les difficultés politiques qu’un tel choix pourrait impliquer, probablement parce qu’il a considéré, comme certains commentateurs, que la réduction de la dépense publique pouvait « casser » la croissance.
Or, l’expérience budgétaire et politique du Canada dans les années 1990 nous enseigne deux leçons importantes. La première est que la spirale infernale de la dette n’est pas une fatalité, même lorsqu’on est au bord du gouffre : avec du volontarisme politique, il est possible d’en sortir. La deuxième est que la baisse des dépenses publiques peut aller de pair avec une baisse des impôts pour créer un environnement favorable à la création de richesses.
Au début des années 1990, la situation du Canada était considérée comme dramatique par le FMI en raison du niveau de sa dette publique, jugée exceptionnellement élevée. Elle avait atteint un niveau similaire au nôtre aujourd’hui, quoique légèrement inférieur (100 %). En janvier 1995, le Wall Street Journal publiait même un éditorial titré «Le Canada en faillite ?» , soutenant que si rien n’était fait dans le budget 1995-96, le Canada pourrait en venir à demander une aide du FMI. Le gouvernement de centre-gauche (Parti libéral) de Jean Chrétien, au pouvoir à l’époque, a mis en place un véritable «consensus» avec les forces politiques et acteurs locaux en présence sur la méthode à adopter pour réduire la dette publique en réduisant les dépenses du gouvernement. L’approche est globale : à la fois horizontale avec une réflexion sur le périmètre d’action de l’État et verticale avec une réflexion au sein de chaque domaine d’action publique quant à l’efficacité de la dépense. Une revue de l’ensemble des dépenses a été réalisée par chaque Ministère autour de six questions :
- La dépense sert-elle l’intérêt public ?
- Nécessite-t-elle la participation du gouvernement ?
- Le rôle du gouvernement fédéral est-il approprié ?
- Y a-t-il des possibilités de partenariats secteur public/secteur privé ?
- Y a-t-il des possibilités d’amélioration de l’efficacité ?
- Est-ce économiquement raisonnable ?
Le succès de ce gouvernement est quasi immédiat : en trois ans, le pays passe d’une situation de déficit avoisinant les 10 % à une situation d’équilibre. La dette a baissé de 30 points en 10 ans, tandis que tous les budgets ont été votés proches de l’équilibre ou en excédent avant que ne survienne la crise de 2008.
Le «consensus Chrétien» a fait ses preuves, grâce à une réduction drastique des dépenses publiques, d’un niveau voisin de celui de la France aujourd’hui (53 % du PIB) à 39 % du PIB. Dans le même temps, les libéraux aux pouvoirs et leurs successeurs conservateurs ont progressivement baissé l’impôt sur les sociétés, qui est passé d’un taux de 28 % en 2001, à 15 % en 2012.
Cela a-t-il abouti à une croissance en berne et à une «casse sociale» ? Non. L’inverse semble même s’être produit. Alors que les dépenses publiques diminuaient, la croissance s’est maintenue à un niveau compris entre 2 et 5 %, le taux d’emploi a augmenté en moyenne de 2,3 % entre 1997 et 2003, le niveau de vie de 2,8 %, le PIB par habitant de 20 %, tandis que le taux de pauvreté a fortement reculé. (…)
Vu de la France de 2024, l’expérience canadienne est riche d’enseignements. Tout d’abord, quand on veut on peut ! (…) «Le Canada a montré que remettre de l’ordre dans les comptes publics tout en baissant les impôts, c’est possible !»
GAGEBIE : Une cérémonie d’ouverture à «environ 100 millions d’euros» pour les Jeux olympiques 2024
L’État a dévoilé le coût de la cérémonie sur la Seine dans un document officiel publié en annexe du projet de loi de finances débattu en ce moment à l’Assemblée nationale. (Le Figaro, 24 octobre, libre accès)
Une cérémonie d’ouverture à «environ 100 millions d’euros» pour les Jeux olympiques 2024
Budget 2025 : « L’esprit de sérieux semble avoir déserté la plupart des acteurs »
Le projet de loi de finances pour 2025 est devenu prétexte à mauvaise farce, reflet d’un dérèglement général qui accrédite l’idée d’une décomposition accélérée, observe, dans sa chronique, Françoise Fressoz, éditorialiste au « Monde ». (Le Monde, 23 octobre, article payant)
Extraits :
(…) La gauche n’a pas pour autant marqué de point politique. Mise en minorité à force de charger la barque, elle n’a pas démontré qu’elle aurait été en situation de gouverner si Emmanuel Macron s’était résolu à nommer l’un des représentants du Nouveau Front populaire (NFP) à Matignon.
La demande était-elle crédible ? Face à une dette publique et des déficits record, l’esprit de sérieux semble avoir déserté la plupart des acteurs. Le projet de loi de finances sur lequel la France est censée jouer sa crédibilité est devenu prétexte à mauvaise farce, reflet d’un dérèglement général qui n’épargne aucun acteur politique et accrédite, au contraire, l’idée d’une décomposition accélérée. (…)
Au milieu de cette jungle, Michel Barnier ne peut espérer tenir que par contraste. Il est l’ingénu dans un monde de fous ; celui qui n’a rien demandé mais auquel on ne pourra reprocher de n’avoir pas essayé. Dans ce Far West qu’est devenue l’Assemblée nationale, ses armes semblent en carton-pâte : le dialogue contre la surenchère, la raison contre la déraison, le bon sens populaire contre la surchauffe parisienne. Le message subliminal qu’elles façonnent, à coups de déplacements en province et de longs entretiens dans la presse écrite, est cependant plus tranchant : rien ne va, mais tout pourrait être pire. A bon entendeur, salut !
Budget 2025 : « L’esprit de sérieux semble avoir déserté la plupart des acteurs »
Budget 2025 : un «effort significatif» est nécessaire en France «dès l’année prochaine», avertit le FMI
«Il y aura certainement un ralentissement de l’économie qui sera lié à la consolidation», estime le chef économiste du FMI, qui juge cependant ce «sacrifice» comme étant nécessaire. (Le Figaro, 23 octobre, libre accès)
Extraits :
Un «effort significatif» de consolidation budgétaire est nécessaire en France «dès l’année prochaine», a estimé mardi le chef économiste du Fonds monétaire international (FMI), Pierre-Olivier Gourinchas, pour qui la trajectoire budgétaire actuelle n’est «pas souhaitable». «La trajectoire budgétaire n’est pas souhaitable, d’autant plus que les raisons qui font que l’on peut avoir des dépenses très élevées, lorsque l’on fait face à une situation de crise, ne sont plus là», a expliqué Pierre-Olivier Gourinchas.
(…) «Il est normal et souhaitable qu’il y ait une consolidation des comptes publics en France», a souligné le chef économiste du FMI, «pour montrer que, de manière décisive, la trajectoire des finances publiques va revenir vers un sentier soutenable». Elle doit cependant être réalisée de «manière crédible et sur une certaine durée, pour ne pas tuer la croissance tout de suite», a-t-il alerté. Néanmoins, «il y aura certainement un ralentissement de l’économie qui sera lié à la consolidation», jugeant cependant ce «sacrifice» comme étant nécessaire. (…)
Budget 2025 : faire contribuer les retraités, un débat ultrasensible
Le gouvernement veut geler les pensions pendant six mois, ce qui a provoqué l’indignation de tous les partis politiques et une pluie d’amendements en commission. (Le Monde, 23 octobre, article payant)
Extraits :
(…) Le gouvernement compte faire contribuer les retraités au redressement des finances publiques. Ainsi, il a prévu de décaler de six mois, au 1er juillet 2025, l’augmentation des pensions prévues le 1er janvier. Un report qui concerne quelque 14 millions de personnes et qui doit permettre d’économiser, selon Bercy, environ 4 milliards d’euros.
La décision du gouvernement a toutefois provoqué un tollé de tous les partis politiques et fragilise notamment l’équilibre du « bloc central ». Du président des députés Les Républicains (LR), Laurent Wauquiez, au président « insoumis » de la commission des finances, Eric Coquerel, en passant par le député Renaissance du Nord et ex-ministre de l’intérieur Gérald Darmanin et la présidente des députés Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, tout le monde ou presque conteste l’idée de demander un effort aux retraités. Hors de question de toucher à une catégorie de la population qui se rend beaucoup aux urnes lors de chaque élection.
Face à cette opposition généralisée, le gouvernement laisse entendre qu’une évolution est possible, afin de protéger les retraités les plus modestes. « Nous pouvons à la fois faire ce décalage et protéger les petites retraites », a assuré le ministre du budget, Laurent Saint-Martin, lundi, au 20 heures de France 2, ajoutant que « le minimum vieillesse sera, lui, bien revalorisé au 1er janvier », quoi qu’il arrive. « On va avoir une discussion pour que nous puissions avoir un seuil qui puisse être protégé » d’une perte de six mois de revalorisation, a-t-il expliqué, laissant la discussion ouverte sur le montant : « Est-ce que c’est 1 200 euros, 1 400 euros, j’ai entendu 1 600, il faut avoir ce débat. »
A Matignon, on se montre également ouvert sur des ajustements. (…)
Budget 2025 : faire contribuer les retraités, un débat ultrasensible
Jean Pisani-Ferry : « La France souffre d’une inefficience de la dépense publique à laquelle il est plus que temps de porter remède »
Si le budget 2025 est assez habile pour éviter les écueils, il repousse à l’année suivante les choix qu’il faudra faire, observe l’économiste dans sa chronique. (Le Monde, 19 octobre, article payant)
Extraits :
Le projet de budget pour 2025, présenté officiellement le 10 octobre, ne définit que de manière approximative de nombreuses recettes et dépenses, les nouveaux ministres des finances et du budget, Antoine Armand et Laurent Saint-Martin, n’ayant eu que peu de temps pour élaborer leurs propositions. Des modifications seront sans doute apportées lors de l’examen du projet de loi de finances (PLF) par le Parlement. Mais les grands défis auxquels la gestion des finances publiques doit se confronter sont clairs.
Face à une situation budgétaire qui s’est nettement détériorée depuis le début de l’année, avec un déficit qui devrait atteindre 6,1 % du produit intérieur brut (PIB) en 2024 au lieu de 4,4 % prévus par la loi de finances, le gouvernement de Michel Barnier a dû s’attacher à concilier trois objectifs partiellement antinomiques. Il devait éviter de perdre totalement la confiance du marché obligataire, sur lequel l’écart entre taux français et taux allemand se creusait dangereusement. Il devait se garder de précipiter une récession économique en évitant de mener une politique budgétaire par trop restrictive. Et il devait, enfin, préserver autant que possible la politique de l’offre d’Emmanuel Macron, qui, sans atteindre de résultats à la hauteur des espoirs placés en elle, a néanmoins amélioré l’attractivité de la France et le niveau d’emploi.
A l’aune de ces critères, le projet de budget ne manque pas d’habileté. (…)
Si les grandes lignes du PLF survivent à la discussion parlementaire, le budget Barnier devrait rassurer Bruxelles et les marchés, sans pénaliser à l’excès la croissance et l’emploi à court terme. C’est un tour de force, mais le moment de vérité viendra très vite, dès le prochain budget : en 2026, l’impact de l’assouplissement monétaire sera moindre, les hausses de prélèvement temporaires seront pour moitié éliminées, et le redressement des finances publiques devra reposer en partie au moins sur des coupes dans les dépenses. (…)
La France souffre d’une inefficience de la dépense publique à laquelle il est plus que temps de porter remède. L’épisode qui s’ouvre doit faire place à une action en profondeur qui sélectionne les priorités, augmente les moyens qui leur sont consacrés, et à l’inverse réduise drastiquement les dépenses inefficaces. Ce travail aurait dû être conduit depuis longtemps déjà. La crise budgétaire offre l’occasion de le mener à bien.
Il faudra, en outre, que le gouvernement allonge son horizon. Comme l’a rappelé en juillet une note du Conseil d’analyse économique, la reprise en main des finances publiques appelle un effort prolongé et structurel, auquel invitent tant notre intérêt national que les règles européennes. Récemment réformées, celles-ci fixent un cadre qui met l’accent sur la soutenabilité et laisse aux gouvernements nationaux le choix des moyens pour y parvenir. Quelles que soient les critiques qui peuvent être adressées à ce cadre – en particulier le fait qu’il ne fait pas place au financement par endettement de la transition climatique –, on ne peut ignorer l’impératif de soutenabilité. Pour la France, qui ruse depuis des décennies avec les règles européennes, il n’est plus possible de repousser l’heure des choix.
Schuldenbremse: Wie Deutschlands Finanzminister Christian Lindner über die Brüsseler Bande spielt
Neue EU-Regeln fordern von Deutschland eine Drosselung des Ausgabenwachstums im Staatshaushalt oder wachstumsfördernde Reformen. Aus Sicht des Finanzministers verkennen die ewigen Debatten über die nationale Schuldenbremse diese Vorgaben. (NZZ, interview, 19 octobre, article payant)
Extraits :
Christian Lindner, deutscher Finanzminister und Parteichef der Liberalen, hat als kleinster Partner einer zerstrittenen Dreierkoalition mit den Sozialdemokraten und den Grünen einen schweren Stand. Während die Schuldenbremse und der Verzicht auf Steuererhöhungen zu den letzten Bastionen seiner Partei zählen, liebäugeln die beiden Koalitionspartner zur Finanzierung ihrer sozial-, industrie- und klimapolitischen Projekte unermüdlich mit einer Aufweichung oder Umgehung der Schuldenbremse und mit Steuererhöhungen für Bürger mit höheren Einkommen oder Vermögen – erst vor wenigen Tagen wieder nachzulesen im jüngsten Papier des SPD-Parteivorstandes.
Selbst in Teilen der Wirtschaft, der internationalen Organisationen und der Ökonomenzunft ist der Ruf nach einer Reform der Schuldenbremse verbreitet. Doch nun hat Lindner zur Abwehr solcher Vorstösse ein neues Argument zur Hand. Es könnte sein, dass Deutschland im Haushalt 2025 trotz Einhaltung der Schuldenbremse zusätzliche Einsparungen vornehmen müsse, um auch die europäischen Regeln einzuhalten, sagte er am Mittwochabend vor dem Verein der Ausländischen Presse in Deutschland. Denn die nationale Schuldenbremse erlaube derzeit mehr Ausgaben, als es die EU-Fiskalregeln täten.
Deshalb mache es keinen Sinn, die bestehenden nationalen Regeln zu ändern, fügte Lindner an. Die deutschen Debatten über eine Reform der Schuldenbremse berücksichtigten das EU-Recht nicht, die einschlägigen Leitartikel müssten neu geschrieben werden.
Lindner bestätigte damit im Kern einen Sachverhalt, auf den ein Beratergremium (der Beirat des Stabilitätsrats der Finanzminister aus Bund und Ländern) schon letzte Woche hingewiesen hat. Dabei geht es um die neuen EU-Fiskalregeln, die im Frühjahr im Zuge einer Reform des Stabilitätspakts in Kraft getreten sind.
Worum geht es? Während die nationale Schuldenbremse enge Grenzen für die Neuverschuldung setzt, legen die neuen EU-Fiskalregeln zusätzlich mehr Gewicht auf den langfristigen Abbau der Staatsschulden. Mitgliedstaaten, deren Bruttoverschuldung wie im Falle von Deutschland zwischen dem Referenzwert von 60 Prozent des Bruttoinlandprodukts (BIP) und 90 Prozent des BIP liegen, sollen diese Schuldenquote im Durchschnitt um 0,5 Prozentpunkte pro Jahr reduzieren, bei Staaten mit einer Verschuldung von über 90 Prozent soll es 1 Prozentpunkt sein. (…)
In den EU-Verhandlungen über die Reform des Stabilitätspakts hatte Lindner zu den Verfechtern strikter Regeln gehört. Vor der Auslandspresse bekräftigte er nun, Deutschland stehe für eine Einhaltung der Regeln. Auch wenn sie die anstehende Einigung über den Haushalt 2025 erschweren könnten, scheint der Minister über die zusätzlichen Leitplanken nicht allzu unglücklich zu sein: Im Ringen innerhalb der Koalition kann ihm der Druck aus Brüssel beim Ruf nach Reformen sowie bei der Abwehr von Ausgabenwünschen und ewigen Angriffen auf die Schuldenbremse helfen.
Überschätzen sollte man den Brüsseler Einfluss indessen nicht. Der EU-Stabilitätspakt hat eine lange Geschichte von Missachtungen durch die Mitgliedstaaten, die weitgehend ohne Folgen blieben. Das könnte auch seiner jüngsten Variante passieren. (…)
Schuldenbremse: Christian Lindner nutzt die EU-Fiskalregeln als Hebel (nzz.ch)
Prévisions erronées, modèles périmés, « facteurs externes »… Comment Bercy s’est laissé dépasser par le déficit
RÉCIT – Le dérapage du Budget pour 2023 puis celui de 2024 ont déjà donné lieu à des rapports de l’Inspection générale des finances et du Trésor qui ont donné des premières explications. (Le Figaro, 19 octobre, article payant)
Extraits :
« Un électrochoc », « un coup de tonnerre », « une prise de conscience »… Dans les couloirs de Bercy, on décrivait la découverte d’un « trou » dans les recettes budgétaires de 2023 avec effarement. En effet, à la fin de l’année dernière, alors que le paquebot était encore pris dans la tempête parlementaire du budget, les ministres d’alors, Thomas Cazenave, pour les Comptes publics, et Bruno Le Maire, pour l’Économie, sont informés par l’administration que le déficit 2023, jusqu’ici attendu aux abords des 4,9 % du PIB, allait finalement culminer bien au-delà des 5 %. Le couperet de l’Insee tombe finalement en mars : la différence entre les dépenses publiques et les recettes s’élève à 5,5 % du PIB, soit près de 154 milliards d’euros, un montant inédit hors crise.
Aussitôt ce dérapage rendu public, l’Assemblée et le Sénat demandent des comptes à Bercy, s’insurgeant que l’information n’ait pas été rendue publique plus tôt. Les ministres, de leur côté, demande des comptes à leur propre administration. L’Inspection générale des finances (IGF) est chargée de comprendre pourquoi les prévisions de recettes ont été si éloignées de la réalité (21 milliards d’euros d’écart). Selon ses conclusions, l’essentiel (80 %) de cette différence est à mettre sur le compte de facteurs externes imprévisibles (macroéconomie, comportement des acteurs…). Le reste de l’écart, la part « évitable » (20 %, soit tout de même 4,6 milliards d’euros), serait dû à des « facteurs internes » (modèles utilisés, hypothèses plus ou moins favorables, exploitation ou non des informations disponibles). En bref, des erreurs.
Quelques semaines après la publication de ce rapport, un autre document fait l’effet d’une bombe. Transmise aux parlementaires de la commission des finances, une note de la Direction du Trésor, qui se charge d’élaborer les prévisions de croissance, d’inflation ou de déficit, alerte sur un nouveau risque de dérapage des comptes, à 5,6 % du PIB au lieu des 5,1 % prévus par le gouvernement, cette fois en 2024. Depuis, ces prévisions ont continué de s’assombrir. Aujourd’hui, le gouvernement estime que le déficit 2024 atteindra même 6,1 % du PIB, soit près de 180 milliards d’euros. Plusieurs causes sont mises en avant pour expliquer ce nouveau dérapage.
La première, très soulignée par Bruno Le Maire, au grand dam des élus locaux, tient à un important écart (16 milliards d’euros) entre les dépenses des collectivités territoriales prévues et les dépenses réelles. Le dérapage des dépenses des mairies, des départements et des régions par rapport aux prévisions aurait alourdi le déficit public de 0,5 point de PIB cette année. « Nous avions pourtant prévu une hausse conséquente des dépenses des collectivités car cela était cohérent avec le cycle électoral », se rappelle un ancien conseiller de l’exécutif. « Ainsi, je ne vois pas comment expliquer cet écart si ce n’est par le comportement individuel des élus. »
La deuxième composante du dérapage de 2024 est à la fois surprenante et familière, puisqu’elle tient à « un autre choc non anticipé des recettes publiques », notent les experts de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Ces derniers estiment que les causes de ces écarts de prévisions sont appelées à durer. « Ces évolutions laissent la France face à ses défis structurels, récemment masqués par des chocs globaux d’une ampleur historique », prévient l’OFCE. Ce nouvel accident prévisionnel, pour l’année 2024, a motivé la création de la commission d’enquête, qui débutera d’ici la fin de l’année à l’Assemblée nationale. (…)
Non, la dette publique, ce n’est pas « de la rigolade »
LA CHRONIQUE DE BRICE COUTURIER. Pendant des décennies, on nous a répété que l’accumulation des dettes publiques permettrait de soutenir l’économie. Illusion coûteuse. (Le Point, 18 octobre, article payant)
Extraits :
« La dette, c’est de la rigolade. » Il ne faut pas « céder au chantage à la dette » car « la France est richissime ». Il faut « faire payer les riches » – alors que 10 % seulement des contribuables acquittent 75 % de l’impôt sur le revenu. C’est le « prêchi-prêcha libéral » qui veut imposer des « politiques d’austérité », en faisant croire aux gens que la dette d’un État est comparable à celle d’un ménage ou d’une entreprise et qu’il pourrait être également mis en faillite. Dépensons sans compter : c’est gratuit.
Et Jean-Luc Mélenchon citait, à l’appui de sa thèse, un membre des « économistes atterrés », aujourd’hui disparu, Michel Husson. Selon celui-ci, « l’État renouvelle constamment sa dette et peut le faire dans la mesure où il est a priori (sauf crise explosive) immortel ». Ces propos (…) ont mal vieilli. (…)
Comme le disait Pierre Mendès France, « les comptes en désordre sont la marque des nations qui s’abandonnent ». Notre souveraineté est tombée entre les mains des marchés qui jugent de la capacité de notre État à faire face à la montagne de ses dettes qui ne cessent de s’envoler.
Dès cette année, la seule « charge de la dette » (les intérêts à acquitter sur les emprunts en cours) va coûter à notre État l’équivalent du budget de la Défense (55 milliards), en 2027, ce sera 72 milliards (l’équivalent du budget de l’Éducation nationale), en 2031, 125 milliards… (…)
À la décharge de Mélenchon et des « économistes atterrés » qui le conseillent, il faut reconnaître qu’ils n’étaient pas les seuls à recommander à nos gouvernants la fuite en avant. Ainsi, Philippe Aghion, qui n’est certes pas un gauchiste, prétendait encore en octobre 2021 : « Le discours alarmiste sur la dette publique est socialement dangereux et économiquement erroné. »
Et il conseillait de lancer de nouveaux emprunts, à condition qu’ils soient destinés à financer des « investissements de croissance » et non les dépenses de fonctionnement. Quant à Jean Pisani-Ferry, il n’a cessé de juger, comme il le faisait lors de la crise du Covid, que « le risque d’une contraction de notre économie l’emporte sur celui d’un endettement excessif ».
En gros, nous avons vu s’opposer deux logiques. Les keynésiens, selon lesquels les politiques monétaires, déployées face à la crise des subprimes (le quantitative easing), avaient atteint leurs limites et qui jugeaient nécessaire de dégainer l’arme budgétaire, quitte à financer l’augmentation des dépenses par un surcroît d’endettement.
Pour eux, l’État doit s’endetter pour soutenir la croissance. Celle de demain permettra de rembourser les emprunts d’aujourd’hui puisque les prélèvements auront augmenté en proportion. Ce raisonnement tenait tant que le niveau de déficit était inférieur ou égal au taux de croissance. Tel n’est plus le cas depuis longtemps.
En face, les libéraux mettaient en garde lors de la crise sanitaire contre les tentations de « l’argent magique » (emprunté à 0 %) et le recours à l’endettement sans limites des États incapables de tenir leurs comptes. Les premiers craignaient la déflation, sous l’effet du vieillissement des populations et de la baisse de la productivité. Comme Paul Krugman, Prix Nobel d’économie 2008. Les seconds redoutaient au contraire un regain de l’inflation provoquée par l’excès d’endettement ainsi que par la création monétaire mise en œuvre par les banques centrales afin d’aider les États. (…)
Depuis 1974, aucun gouvernement français n’a été capable de présenter un budget en équilibre. Alors que l’Allemagne a gravé dans sa Constitution (article 115) l’interdiction faite aux gouvernants de creuser le déficit au-delà des investissements, nous sommes englués dans une « culture de la dette ». Le « recours à l’endettement » est utilisé par nos gouvernements « comme lubrifiant politique et social ». (…)
Aujourd’hui, on découvre que le précédent gouvernement avait dissimulé l’ampleur du déficit : ce n’est pas 4,4 % du PIB, mais 6,2 %, voire davantage… Emmanuel Macron, qui avait été critiqué comme « le président des riches » et de « l’austérité », est à présent dépeint comme un politicien laxiste, ayant acheté la paix sociale à coups de subventions, comme tous ses prédécesseurs depuis un demi-siècle. L’endettement était censé soutenir la croissance. Elle se traîne autour de 1 %.
Où est l’économiste libéral qui assainira nos finances, comme l’a fait Jacques Rueff en 1958 à la demande de De Gaulle ?
Non, la dette publique, ce n’est pas « de la rigolade » (lepoint.fr)
Deutschland verlottert – die Lockerung der Schuldenbremse darf kein Tabu sein
Einstürzende Brücken, Züge im Schneckentempo: Deutschland braucht Investitionen in die Infrastruktur und vor allem mutige Entscheidungen. (NZZ, opinion, 18 octobre, article payant)
Extraits :
(…) Deutschland befindet sich in einer Abwärtsspirale, was auch für die Schweiz nichts Gutes verheisst. Die Bundesrepublik krankt an vielem, zwei Entwicklungen fallen aber besonders ins Auge.
Schon unter Merkel begannen die staatlichen Subventionen zu steigen, bis sie dann mit der Ampelkoalition vollends ausser Kontrolle gerieten. Laut dem Kieler Institut für Weltwirtschaft spendiert die Regierung dieses Jahr 127 Milliarden Euro: für den Bau von Computerchips im Osten und von Vergnügungsdampfern an der Küste ebenso wie für das 49-Euro-Ticket und die Pendlerpauschale.
Ebenfalls stetig gewachsen sind die Sozialausgaben. Sie betragen inzwischen 212 Milliarden Euro oder 35 Prozent des Bundeshaushalts. Das Bürgergeld gehört dazu oder der Zuschuss zur Rentenkasse.
Das Urteil der Kieler Forscher fällt vernichtend aus und verdient es, ausführlich zitiert zu werden: «Das subventionspolitische Instrumentarium des Bundes ist sehr überladen, undurchsichtig, unkoordiniert, von den Zielen und Wirkungen her heterogen und oft widersprüchlich, so dass von einer rationalen Subventionspolitik nicht die Rede sein kann. Mit der einen Finanzhilfe bekämpft die Politik die Schäden und unerwünschten Nebenwirkungen, die sie mit der anderen Finanzhilfe hervorgerufen hat.»
Das ist die eine Entwicklung. Es ist die Geschichte von Überfluss und von Politikern, die in einem Anflug von Grössenwahn glauben, klüger zu sein als die Schwarmintelligenz des Marktes. (…)
Der gegenwärtige Strömungsabriss hat viele Gründe, aber das ist sicher einer der wichtigsten: Die ungeheuren Summen, die in Sozialausgaben und Industriepolitik fliessen, fehlen angesichts der Zwänge der Schuldenbremse an anderer Stelle. Die Mittel eines 500-Milliarden-Haushalts werden in einer Weise ineffizient eingesetzt, die an Verschwendung grenzt. Nach mir die Sintflut, denkt die «Ampel» wie vor ihr Merkel. (…)
Das ist noch kein Argument gegen die Schuldenbremse. Sie funktioniert in der Schweiz, wo sie erfunden wurde, tadellos. Die Politiker und die Stimmbürger sorgen bei den Ausgaben innerhalb des vorgegebenen Rahmens für eine Balance (obwohl die Neigung zu einer verantwortungslosen Sozialpolitik zunimmt und das Parlament sich schwertut, die Mehrkosten für die Verteidigung mit der Bremse in Einklang zu bringen).
Auch in Deutschland könnte die Schuldenbremse funktionieren, wenn die Regierungen ihre Mittel nicht einseitig für Prestigevorhaben und Soziales ausgäben. Dann bliebe genügend Geld für die reparaturbedürftige Infrastruktur. (…)
Gleichzeitig ist die Schuldenbremse kein Selbstzweck. Sie soll die Zukunftsfähigkeit garantieren, indem sie verhindert, dass der Staat durch ein Übermass an Schulden handlungsunfähig wird. Wenn aber die Zukunftsfähigkeit auf andere Art gefährdet ist, kann es sinnvoll sein, die Schuldenbremse zu modifizieren.
Unter den grossen westlichen Nationen weist Deutschland die geringste Schuldenquote auf. Sie ist mit 64 Prozent des Inlandsprodukts weit entfernt von Grossbritannien (97), Frankreich (110), den USA (125) oder Italien (141). Angesichts der Notlage besteht also ein gewisser Spielraum. Ohnehin manipuliert Deutschland die Staatsrechnung längst mit Schattenhaushalten, den angeblichen Sondervermögen. Mehr Transparenz und klare Regeln sind von Vorteil. (…)
Die Mittel dürfen nur in produktive Bereiche fliessen: etwa in die Infrastruktur oder in Forschung und Bildung. Auch in die Sicherheit muss investiert werden angesichts einer radikal veränderten äusseren Bedrohungslage und einer Migrationspolitik, die zusätzliche Risiken im Innern geschaffen hat. (…)
Die Union sollte über ihren Schatten springen und die Schuldenbremse für einen befristeten Zeitraum lockern. Im Gegenzug müssten die Sozialdemokraten die Hand bieten für eine Reform der Sozialausgaben, darunter des verkorksten Bürgergelds. Drittens müsste die Regierung die in den letzten Jahren sprunghaft angestiegenen Subventionen reduzieren. Das trifft alle, denn alle Parteien bedienen ihre Klientel mit Geschenken. (…)
Welch ein Paradox: Wer die Schuldenbremse aufweicht, muss die Kunst des Nein-Sagens beherrschen. Wenn das aber alles bloss ein Wunschtraum ist? Dann bleibt Deutschland in der Abwärtsspirale gefangen. Für den Rest Europas wären das trübe Aussichten.
Schuldenbremse lockern? Deutschlands Infrastruktur ist am Limit (nzz.ch)
Espagne, Portugal, Grèce… Comment les anciens cancres de l’Europe ont réduit leur déficit
DÉCRYPTAGE – Alors que la France débat de son budget sur fond de dérapage incontrôlé de son déficit public, les anciens mauvais élèves de la zone euro empruntent désormais moins cher qu’elle. Explications. (Le Figaro, 17 octobre, article payant)
Extraits :
À peine présenté, le projet de loi de finances de Michel Barnier se trouve critiqué de tous côtés ; chaque piste d’économies suscite de virulents foyers d’opposition. Compte tenu du manque d’assise politique du gouvernement, il apparaît ainsi fort probable qu’une fois de plus, malgré la pression des marchés et de ses pairs européens, la France se contentera de quelques hausses d’impôts pour réduire son déficit. Les investisseurs s’en inquiètent : à tel point que Paris emprunte aujourd’hui plus cher à dix ans que l’Espagne ou le Portugal, et à cinq ans, plus cher que la Grèce. Ces pays que l’on désignait par l’acronyme peu flatteur de Piigs (Portugal, Italie, Irlande, Grèce Espagne) ont, dans l’ensemble, pris le taureau par les cornes.
Dès les années 1990, la Suède rationalise le périmètre de son État. « Des agences, avec des objectifs de gains de productivité et d’investissement, en charge d’un domaine particulier (transports, santé, éducation…) sont créées et leurs salariés dotés d’un statut de droit privé », détaille l’économiste Patrick Artus. Le déficit du pays passe de 10,6 % du PIB en 1993 à un excédent de 0,8 % en 1998.
L’Allemagne du chancelier Schröder suit avec les réformes Hartz. Les lois revoient de fond en comble la politique de traitement social du chômage jugée inefficace et trop coûteuse. Gerhard Schröder appelle Jacques Chirac pour lui suggérer d’emprunter le même chemin. « Les Français ne sont pas prêts », répond en substance le second. Rien n’a été fait depuis pour mieux les préparer. (…)
Comment donc nos voisins ont-ils pris le tournant des réformes ? Du Portugal au Danemark, en passant par la Grèce, les histoires diffèrent bien sûr. Un point les réunit au moins. « Tous les pays qui sont parvenus à maîtriser leurs finances publiques bénéficiaient d’un consensus politique en ce sens. Ce qui n’est pas le cas de la France », avance Andreas Eisl, chercheur à l’Institut Jacques Delors.
C’est un souci de compétitivité qui a conduit les États du Nord à mener des réformes au cours des années 1990. Au sud, beaucoup, se sont retrouvés contraints à évoluer en ce sens, après l’épisode des crises souveraines de 2012, en échange d’une aide financière par la troïka (FMI, BCE, Commission européenne). (…)
En France, [toute] évocation d’une réforme de l’État-providence menace alors de mettre une part importante de la population dans la rue. D’où l’atermoiement des gouvernements successifs.
« Un sujet essentiel du pilotage des finances publiques, mais peu exploré en France, est celui de la bonne gouvernance, indique ainsi Andreas Eisl. Des réformes du processus et de la gestion budgétaire en Suède et Autriche, par exemple, ont mené à une meilleure maîtrise des finances publiques et des dépenses plus efficaces. Des fortes institutions budgétaires indépendantes, comme aux Pays-Bas, peuvent rationaliser les débats politiques et soutenir le développement des politiques budgétaires crédibles. » L’immobilisme n’est pas une fatalité.
Baverez, l’homme qui avait raison (et que moquaient les imbéciles)
L’ÉDITO D’ÉTIENNE GERNELLE. Vingt et un ans après son fameux livre « La France qui tombe », notre ami Nicolas Baverez publie « Sursaut » (L’Observatoire). Et il tape une nouvelle fois dans le mille… (Le Point, 17 octobre, article payant)
Extraits :
Elle est longue, la liste des « autruchistes » de salon qui, ces vingt dernières années, ont arboré ce petit rictus dédaigneux à l’évocation du nom de Nicolas Baverez. « Déclinologue ! » exorcisaient ces jocrisses. Pauvres d’eux !
Car notre ami et éditorialiste, qui publie ces jours-ci Sursaut (L’Observatoire), un brillant et remuant mode d’emploi du redressement, avait raison! Il avait vu juste, il y a vingt et un ans, avec son fameux livre La France qui tombe, qu’il était de bon ton de balayer d’un revers de la main dans certains cercles de la cuistrerie mondaine. Il a touché dans le mille, depuis un peu plus longtemps encore, dans ses éditoriaux du Point. Le tout premier fut publié fin 2001 et était intitulé « Crise et châtiment »… Il y était – déjà ! – question de la « dérive accélérée des dépenses », et s’il visait à l’époque Lionel Jospin, les mêmes mots pourraient s’appliquer aujourd’hui à Emmanuel Macron, ce qui en dit long sur ce dernier.
(…) Sursaut nous rappelle que le bricolage se termine toujours mal. Or le projet de budget actuel, un rafistolage laborieux essentiellement à base d’impôts, fait plutôt penser à un gruyère à trous commençant à fondre qu’à des fondations solides pour l’avenir. Alors on dira – et ce n’est pas faux ! – que Michel Barnier fait ce qu’il peut avec ce qu’il a, c’est-à-dire presque rien. (…)
En attendant, le constat baverézien se confirme chaque jour. Le fabuleux exploit réalisé par Elon Musk, qui a réussi à faire revenir sur Terre le premier étage de sa fusée géante Starship (71 mètres de haut), recueilli par des bras mécaniques à quelques mètres du sol, nous rappelle cruellement que le monde ne nous attend pas. Il est loin le temps où, chez Arianespace – qui est un projet européen mais une société française –, on se gaussait des ambitions de SpaceX… (…)
Désespérant ? Attendons un peu. Baverez, lui, se veut « raisonnablement optimiste » car la prise de conscience a commencé. « Les Français sont suffisamment dégoûtés du mensonge pour accepter de considérer la vérité », écrit-il. Acceptons-en l’augure, l’ami Nicolas a si souvent eu raison…
Baverez, l’homme qui avait raison (et que moquaient les imbéciles) (lepoint.fr)
Budget 2025 : et si l’on supprimait les 35 heures ?
Opposés au choc fiscal qui se prépare, Gérald Darmanin et Gabriel Attal plaident pour la suppression des 35 heures. Est-ce une bonne idée ? (Le Point, 17 octobre, article payant)
Extraits :
Voilà une sortie dont les syndicats se seraient bien passés. Opposé à une hausse de la fiscalité des plus riches et des grandes entreprises, le tout nouveau député du Nord Gérald Darmanin a remis sur le tapis la question de la suppression de la réduction du temps de travail, en vigueur en France depuis près de vingt-cinq ans, afin de réaliser de nouvelles économies. Dans une interview aux Échos, l’ancien ministre conseille ainsi à Michel Barnier, qui peine à boucler un budget particulièrement délicat, de « mettre fin définitivement aux 35 heures dans le privé et de renvoyer le temps de travail au dialogue dans l’entreprise, en échange d’intéressements et de participations, et passer à 36 ou 37 heures dans le public, bien sûr payées en conséquence ».
Le prédécesseur de Michel Barnier à Matignon, Gabriel Attal, a embrayé à son tour, visant tout particulièrement les fonctionnaires, qui doivent être « vraiment aux 35 heures » alors que leur semaine de travail en compte nettement moins, notamment du fait d’une multitude de congés particuliers. Ce rattrapage rapporterait, selon le député des Hauts-de-Seine, un milliard d’euros et « permettrait d’éviter une partie des efforts qui sont demandés, par exemple, à nos retraités ».
Le fait est qu’en France on travaille moins qu’ailleurs en Europe : avec 1 670 heures, selon l’institut Rexecode, la durée annuelle effective du travail des salariés français à temps complet figure parmi les plus faibles après la Finlande. Mais elle est supérieure au seuil correspondant à 35 heures par semaine (1 607 heures). Et la durée « habituelle » (c’est-à-dire celle d’une semaine normale sans événement particulier ni absence) s’est établie à 38,9 heures en 2022, selon l’enquête européenne sur les forces de travail. Reste qu’entre les congés et les RTT l’écart atteint 122 heures, par exemple, avec l’Allemagne, soit l’équivalent de trois semaines de travail. « On a posé une norme qui se révèle coûteuse pour les entreprises et les finances publiques », explique Olivier Redoules, directeur des études de Rexecode. (…)
Plutôt que d’établir une nouvelle durée légale du travail, Olivier Redoules plaide pour laisser la main aux partenaires sociaux, secteur par secteur. « Ne remplaçons pas un carcan par un autre ! Il faut assouplir davantage et faire confiance aux négociations de branche et au niveau de l’entreprise. » Derrière ce serpent de mer politique se joue en vérité un débat beaucoup plus stratégique : l’intégration durable sur le marché du travail des non-qualifiés, des jeunes et des séniors. « On entre plus tard et on sort plus tôt, rappelle Mathieu Plane. Notre écueil, c’est la durée du travail tout au long de la vie. C’est en réfléchissant aux moyens d’y parvenir qu’on augmentera le nombre d’heures travaillées en France. » Et pas simplement en tordant le cou aux 35 heures.
Budget 2025 : et si l’on supprimait les 35 heures ? (lepoint.fr)
Finances publiques : Monsieur le Premier ministre, si vous osiez…
Système de retraite à bout de souffle, fonction publique en surpoids, fiscalité du travail écrasante… Nos voisins européens ont réussi à se réformer. Pourquoi pas nous ? (Le Point, 16 octobre, article payant)
Voir « Article du Jour »
Finances publiques – Monsieur le Premier ministre, si vous osiez… (lepoint.fr)
L’Allemagne inquiète face à la « tragédie » budgétaire française
Au pays de la rigueur budgétaire érigée en dogme, les dérapages de la France exaspèrent Christian Lindner, le ministre allemand des Finances. (Le Point, 16 octobre, article payant)
Extraits :
Cela fait un bon moment que Christian Lindner a la France à l’œil. Déjà, avant le premier tour des législatives, fin juin, le ministre allemand des Finances n’avait pas hésité à sortir de la réserve que lui impose sa fonction pour prédire « une tragédie » budgétaire si le futur gouvernement français continuait à mener une politique trop laxiste en matière de finances publiques. Il redoutait que les projets de dépenses en cas de victoire du Rassemblement national ou du Nouveau Front populaire ne fassent paniquer les marchés. (…)
En réponse à une question posée en marge d’une réunion des ministres européens à Luxembourg, Christian Lindner exprimait une fois de plus son exaspération face à l’ampleur du déficit des dépenses publiques du voisin français. Il craint que la France ne perde sa crédibilité auprès des marchés des capitaux.
« L’Union monétaire nécessite que ses membres respectent les règles budgétaires communes », a-t-il rappelé, tout en demandant que « le déficit budgétaire et l’endettement soient réduits de façon plausible de façon à pouvoir nous financer de manière stable et efficace ». Il y va, selon lui, de la stabilité de la France et des 19 autres pays de l’Union européenne qui, depuis vingt-cinq ans, partagent la même monnaie.
L’inquiétude est vive en Allemagne. L’endettement du premier partenaire politique et économique de l’Allemagne, seconde économie européenne, tout autant que l’instabilité de sa situation politique ces derniers mois a fait renaître outre-Rhin le spectre de la Grèce et de la faillite de l’État. Avec un déficit de plus de 6 % cette année (contre 1,9 % en Allemagne) et une dette à plus de 112 %, la France est, aux yeux de nombreux analystes allemands, à deux doigts d’une crise financière qui risque de lui faire perdre la confiance des marchés. (…)
Le ministre allemand ne se contente pas de rappeler à son voisin qu’il est loin de respecter le plafond des 3 % de déficit fixé par le pacte de stabilité, qui limite la dette à 60 % du PIB, il veille aussi dans son propre pays à l’équilibre des dépenses publiques. Défenseur acharné du fameux frein à la dette inscrit dans la Constitution allemande en 2009, qui limite à 0,35 % le déficit annuel de l’État pour empêcher les dérives budgétaires, il bataille avec ses propres partenaires sociaux-démocrates et Verts au sein de la coalition au pouvoir à Berlin.
(…) les trois partis ont durement négocié pendant des mois et le projet de budget 2025 a finalement été adopté le 5 juillet. Il est à présent discuté par le Parlement. Sur un point, Christian Lindner a obtenu gain de cause : le frein à la dette ne sera pas desserré. Le chancelier Scholz souhaite pour sa part que l’Allemagne reste un « pôle de stabilité » dans un monde en crise. (…)
La presse allemande jette elle aussi un œil critique du côté de la France. « Deux hommes, un pays et un immense tas de dettes », titrait le journal économique Handelsblatt après la nomination des ministres Antoine Armand à l’Économie et Laurent Saint-Martin au Budget, tandis que l’hebdomadaire Die Zeit, peu optimiste, commentait à propos de Michel Barnier : « Son premier budget pourrait être son dernier ».
100.000 milliards de dollars: l’alerte du FMI sur la dette publique mondiale qui s’emballe
La crise du Covid a accéléré l’endettement généralisé qui devrait atteindre, en moyenne pour tous les pays de la planète, 100% du PIB en 2030. Les États-Unis représentent un tiers du fardeau. (Le Figaro, 16 octobre, libre accès)
Extraits :
Alors que la France s’engage dans une discussion budgétaire acrobatique pour tenter de réduire son déficit public et ralentir son endettement de 3 300 milliards d’euros, le monde entier croule sous la dette publique, alerte le Fonds monétaire international (FMI). Le cumul de la dette de tous les pays devrait dépasser les 100.000 milliards de dollars cette année, soit environ 93 % du PIB mondial. Et pourrait atteindre 100 % d’ici 2030. Une augmentation significative par rapport à 2019, avant la pandémie, où la dette mondiale était inférieure de 10 points.
« Il y a de bonnes raisons de penser que la situation est même pire qu’attendu », a souligné Era Dabla-Norris, directrice adjointe du département affaires budgétaires du FMI, en présentant le rapport. Trois facteurs l’expliquent : « l’augmentation des dépenses publiques, des projections de dettes trop optimistes et des dettes non identifiées ». La hausse des taux d’intérêt ces trois dernières années a mis à mal les caisses de nombreux pays en augmentant le coût de leurs emprunts. La Banque mondiale rapporte qu’une quarantaine d’Etats sont actuellement en situation de crise ou proche de l’être, du fait d’une hausse significative du remboursement de leurs emprunts. Dans un scénario pessimiste, la dette publique mondiale pourrait grimper à 115 % du PIB d’ici trois ans.
Les gouvernements sont sous pression pour financer des sujets critiques comme le vieillissement de la population, la santé, la transition écologique et la défense, ce qui augmente inévitablement leurs dépenses. Parallèlement, des erreurs de projection et des dettes « cachées » (souvent liées aux entreprises publiques) alourdissent les bilans. (…)
Sans oublier que Washington comme Pékin vit à crédit. Alors que la campagne actuelle pousse les deux candidats Kamala Harris et Donald Trump à une surenchère de promesses irréalistes à plusieurs dizaines de milliards dollars, le déficit budgétaire flambe. Il approchera cette année les 2 000 milliards de dollars (6% du PIB), quand la dette dépasse les 34.000 milliards (125% du PIB) soit le tiers du fardeau mondial! Quant à celle de la Chine, elle continue de croître rapidement en 2024, et avait atteint, en 2023, 83% du PIB (contre 77% en 2022). (…) 100.000 milliards de dollars: l’alerte du FMI sur la dette publique mondiale qui s’emballe (lefigaro.fr)
Want More Inflation? Go Ahead, Let Presidents Meddle With the Fed (NYT, opinion, 16 octobre, article payant)
Extraits :
Former President Donald Trump wants a say in monetary policy decisions. He has tried to clarify that his goal is simply to give his opinion. But we know that he was upset with and opposed to the Federal Reserve’s recent decision to lower interest rates by half of a percentage point and that he toyed with firing the Fed’s chair, Jerome Powell, in his first term. Moreover, Mr. Trump’s supporters apparently have compiled a list of proposals that give the former president new ways to exert influence.
Giving any president a substantive role in monetary policy would be a terrible idea. Congress created the Fed to make such calls using its judgment free from short-term political pressures. History tells us that eroding that independence — allowing politicians, whose horizons extend only to the next election, to have an effective say on policy — produces inflation and economic instability.
The threat of substantive presidential input to monetary policy would undermine the public’s trust that the Fed will do what it judges to be in the best long-term interest of the economy and the American people. That could lead to higher interest rates as investors price in faster price increases and more uncertainty.
Mr. Trump is far from unique. Many presidents who “wanted a say” in monetary policy have exerted public and private pressures on the Fed’s interest rate decisions. Harry Truman wanted to keep the Fed on a short leash so that it would continue the low interest rates it maintained to help finance World War II. Lyndon Johnson leaned all over (literally as well as figuratively) Chairman William McChesney Martin to keep rates low when inflation was rising during the Vietnam War. Richard Nixon exerted considerable pressure on Arthur Burns in the 1970s to keep the economy roaring into elections, and unfortunately, Burns acceded, contributing to the great inflation of the 1970s.
Ronald Reagan, through his then-campaign manager James Baker, ordered Paul Volcker not to raise rates in the lead-up to the 1984 election. George H.W. Bush was a frequent public voice urging Alan Greenspan to lower rates in the late 1980s and early 1990s. In his first term, Mr. Trump called Mr. Powell an “enemy” of the country for not following his advice to ease policy.
Presidents’ desires to influence the Fed are understandable. They get blame or credit for the state of the economy but don’t have their hands on perhaps the most important lever, which is monetary policy. (…)
Ensuring that the Federal Reserve’s monetary policy decisions are based on the best economic information and analysis, insulated from political interference, is no guarantee of price stability — as we’ve seen in recent years. But history indicates it is the best way to achieve and maintain price and economic stability over time. The welfare of the American people depends on resisting efforts to erode the Fed’s independence.
Plus de fonctionnaires, moins de services : le malaise français
LA CHRONIQUE DE WILLIAM THAY. Si la France était un pays normal, elle compterait 2 millions de fonctionnaires en moins. Ils représentent aujourd’hui un emploi sur cinq. Pour quel résultat ? (Le Point, 15 octobre, article payant)
Extraits :
Le fonctionnaire illustre le malaise français. Alors que le nombre de fonctionnaires a augmenté sans discontinuer depuis 1981, les Français se plaignent de la baisse des services publics. Nous avons donc des citoyens de plus en plus imposés et taxés pour financer des services qui marchent de moins en moins bien. Comment expliquer ce phénomène ?
Le fonctionnaire illustre le malaise français. Alors que le nombre de fonctionnaires a augmenté sans discontinuer depuis 1981, les Français se plaignent de la baisse des services publics. Nous avons donc des citoyens de plus en plus imposés et taxés pour financer des services qui marchent de moins en moins bien. Comment expliquer ce phénomène ?
Si la France était un pays normal et dirigé comme ses voisins, elle compterait 2 millions de fonctionnaires en moins. Comment expliquer que l’Hexagone dispose de plus de fonctionnaires que l’Allemagne, qui compte pourtant 15 millions d’habitants en plus ? Personne n’ira dire que l’État allemand fonctionne mal ou que ses performances sur plusieurs indicateurs ne sont pas meilleures que les nôtres, comme dernièrement sur le classement Pisa pour l’Éducation. (…)
La France dépense trop, mais, surtout, elle dépense mal, en gaspillant l’argent du contribuable. Cette mauvaise gestion porte des noms : la suradministration et la bureaucratie. Prenons des exemples. En santé, plus de 35 % des emplois à l’hôpital ne sont pas des soignants, contre 24 % en Allemagne selon l’OCDE. Pire, on rajoute une couche d’emplois administratifs avec les ARS, qui nous coûtent chaque année 1 milliard d’euros juste pour étouffer l’activité hospitalière. Dans l’Éducation nationale, en 2019, plus de 11 000 fonctionnaires étaient… en congé longue durée, soit plus de 1 % des effectifs ! (…)
Rompons avec le dogme du « manque de moyens » pour nous interroger sur l’organisation de l’État, voire du temps de travail réel des fonctionnaires. Pourquoi, finalement, sur ces questions, le changement ne serait pas pour maintenant ?
* William Thay est président du think tank Le Millénaire.
Plus de fonctionnaires, moins de services : le malaise français (lepoint.fr)
Philippe Dessertine : « Commençons par réformer les services publics »
ENTRETIEN. Selon l’économiste, le budget 2025, qui s’appuie sur l’impôt, passe à côté de l’essentiel : une restructuration profonde de la dépense publique. (Le Point, 13 octobre, article payant)
Extraits :
Ancien membre du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), l’économiste Philippe Dessertine est un fin connaisseur du budget de l’État. Le Point : Les finances publiques françaises vont-elles si mal ?
Philippe Dessertine : Oui, nos finances publiques vont mal. Elles se détériorent à un rythme accéléré depuis quelques mois, bien que cette tendance ait commencé il y a de nombreuses années. Aujourd’hui, nous sommes pris dans un cercle vicieux : le paiement des intérêts de la dette contribue à lui seul à l’augmentation de la dette publique. À un niveau d’endettement avoisinant les 111 % du PIB, la dynamique de la dette n’appartient désormais plus qu’à elle-même. Il est donc plus qu’urgent d’en reprendre le contrôle en la réduisant drastiquement. (…)
Qu’avez-vous pensé du budget 2025, présenté jeudi par le gouvernement ?
C’est un budget choc d’urgence, car la dégradation de la situation est historique. Il nous amène vers une logique d’austérité, c’est-à-dire de réduction brutale et rapide des déficits publics. Ce PLF prévoit 60 milliards d’euros d’économies en un an, c’est énorme. Malgré cet effort, avec à la clef un taux de déficit public pour 2025 ramené à 5 % du PIB, contre 6,9 % selon les estimations, la France ne sortira pas de la dynamique négative dans laquelle elle se trouve… Nous sommes à l’an 1 du redressement des comptes publics. Il faudra le poursuivre durant les quatre ou cinq prochaines années. (…)
Pour le Haut Conseil des finances publiques, 70 % des efforts seront en réalité des hausses d’impôts. Pour être plus précis, le HCFP a requalifié ce que le gouvernement présentait comme des « baisses de dépenses » en « fiscalité complémentaire ». Or c’est tout le problème de ce budget. Il s’appuie principalement sur de la fiscalité supplémentaire qui peut être décidée en urgence et non sur des baisses de dépenses beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre. Un tel choc fiscal, qui rappelle par exemple celui imposé par François Hollande, n’a pas fait ses preuves ces dernières années. Les recettes ne sont pas au rendez-vous et le dynamisme de l’économie réelle est très affecté. (…)
Auriez-vous préféré des coupes budgétaires plus franches et assumées ?
L’expression « coupes budgétaires » ne me convient pas. Elle laisse penser qu’il s’agirait d’une réduction aveugle des dépenses qu’il s’agirait ensuite de répercuter sur leur utilisation. C’est une restructuration beaucoup plus profonde qu’il faut engager, un vaste chantier, qui par définition n’est pas populaire électoralement.
(…) Ce grand chantier est repoussé depuis des années, alors que nos voisins européens l’ont assumé. Il suppose donc un vrai courage politique, un sens de l’intérêt général à long terme, une vision stratégique. Il impliquerait évidemment une nouvelle approche du dialogue social sur laquelle nous ne sommes absolument pas prêts à nous engager.
Dès lors que vous commencez à chercher brutalement des économies significatives et quasi immédiates dans les services publics, y compris les collectivités locales, vous enclenchez des mouvements de blocage généralisés dont l’histoire récente du pays a souvent été l’illustration. (…)
Le gouvernement doit aussi travailler sur la question énorme de la dépense sociale. Il faudra rouvrir le chantier des retraites, car le système actuel contribue encore à creuser les déficits. Il pose également la question du rapport au travail et des traumatismes qu’il engendre. De même, se trouve également posé celui de l’assurance-chômage, abandonné par Gabriel Attal après la défaite de son camp aux dernières législatives.
Nous devons, enfin, nous interroger sur le périmètre de l’intervention de l’État. L’ensemble de l’économie française a maintenant un lien intrinsèque à la dépense publique. En clair, la croissance économique est associée à beaucoup de dépenses publiques en tous genres, des dépenses non financées, se traduisant par des dettes, et à un endettement qui augmente beaucoup trop.
Si la croissance a été si forte après le Covid, c’est parce qu’elle a été soutenue par des dépenses publiques créant du déficit, donc par de la dette publique. Autrement dit : notre croissance est en grande partie artificielle ; elle est intenable sur le long terme, et c’est le prix fort que nous risquons de commencer à payer à partir du prochain budget. (…)
Si rien n’est fait, jusqu’à quand la situation française est-elle tenable ?
En toute logique, elle devrait déjà être insoutenable, et depuis longtemps ! La France tient uniquement grâce à l’euro, notre monnaie commune. La zone euro est beaucoup plus saine que nous : le déficit moyen est faible, l’endettement est moins fort et les exportations sont plus dynamiques. Le parapluie européen est la raison pour laquelle notre inconséquence n’a, pour le moment, jamais été sanctionnée. Il nous a protégés d’au moins vingt dévaluations pour mauvaise gestion budgétaire ! (…)
Philippe Dessertine : « Commençons par réformer les services publics » (lepoint.fr)
Jacques de Larosière : Le Déclin français est-il réversible ? (Contrepoints, critique de livre, 14 octobre, libre accès)
Extraits :
Ancien directeur du Fonds monétaire international (1978-1987), puis gouverneur de la Banque de France (1987-1993) avant de devenir président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (1993-1998), Jacques de Larosière vient de faire paraître un livre dans lequel le lecteur de sensibilité libérale se plongera avec intérêt : Le Déclin français est-il réversible ? (Paris, Odile Jacob). On ne compte plus les livres et les articles qui décrivent par le menu le déclin économique, éducatif et culturel de notre pays. Mais, de son propre aveu, l’auteur entend ici retracer la genèse de ce déclin tout en proposant des solutions pour en sortir.
Le spectre du déclin ne plane certes pas seulement sur la France. Dans les pays scandinaves toutefois, nous dit l’auteur, les journalistes ont tendance à poser sans détours aux politiques des questions essentielles – quel est l’état des dépenses publiques, du budget de l’État, ou encore de la dette publique ? – sans possibilité pour les personnes interrogées de se dérober (p. 9). En France, par comparaison, les politiques de tous bords ont tendance à bavarder plus qu’à entreprendre les réformes qui devraient s’imposer, et nombre de journalistes sont enclins à se montrer conciliants, afin d’éviter les questions trop dérangeantes – chose qui contrevient d’ailleurs aux principes fondamentaux de l’éthique journalistique, qui est de toujours chercher et relater avec exactitude la vérité.
Dans son dernier livre, Jacques de Larosière tire donc le signal d’alarme : nos finances publiques et notre dette sont dans un état critique, et la situation continuera d’empirer si rien n’est fait pour y mettre un terme, un refus d’agir qui serait profondément irresponsable de la part de nos dirigeants et qui aurait des conséquences potentiellement désastreuses pour les générations à venir. Mais afin de pouvoir prendre de bonnes décisions pour le futur de notre pays, il conviendrait déjà pour Jacques de Larosière de nous défaire d’un certain nombre de servitudes d’ordre idéologique (p. 9-10) : servitude à l’égard des politiques de type keynésien d’augmentation de la demande globale, qui ne marchent pas et aggravent les déficits ; servitude à l’égard du discours rassurant, qui consiste à minimiser voire à mettre sous le tapis les graves problèmes économiques qui minent notre pays ; enfin, servitude du politiquement correct, qui n’est autre que le règne sans partage d’une « pensée unique » qui exclut par principe les faits et les idées qui n’entrent pas dans son système d’interprétation du réel.
Un des enseignements du livre de Jacques de Larosière est que le déclin que connaît actuellement notre pays ne saurait être imputable à un quelconque faisceau de causes externes : si la performance économique de la France s’est dégradée, si sa croissance est freinée, et si notre taux de chômage reste trop élevé, ce n’est la faute ni de la mondialisation, ni de l’Amérique ni de quelque autre bouc émissaire commode : c’est au contraire en nous qu’il faut voir les causes de notre échec. Dans le domaine éducatif, si la France a été classée 26e au sein de l’OCDE dans la publication du PISA 2022, c’est parce que notre enseignement s’est inexorablement délité ces dernières années. Et le fait que les jeunes ne maîtrisent pas tous, une fois arrivés à l’âge adulte, les fondamentaux du calcul et de la langue française, ne peut que les pénaliser de manière durable dans leur vie professionnelle et sociale, car ils se trouvent dès lors jetés dans une société dont ils méconnaissent largement le fonctionnement, et dans laquelle ils auront les plus grandes difficultés à s’insérer. Que faut-il faire pour renverser la tendance ? Plusieurs objectifs, nous dit l’auteur, devraient être poursuivis de manière prioritaire, comme donner davantage d’autonomie aux établissements éducatifs, améliorer le niveau des enseignants (p. 19), revaloriser la fonction enseignante, ou encore avoir un recours accru à l’initiative privée (associations caritatives, fondations…) afin de remédier aux carences du système hypercentralisé de notre Éducation nationale (p. 21).
Jacques de Larosière se montre également convaincant lorsqu’il remet en perspective les bons chiffres apparents de l’apprentissage en France. Longtemps considérée comme étant à la traîne vis-à-vis de l’Allemagne dans ce domaine, la France serait aujourd’hui en passe de rattraper son retard, étant susceptible de compter un million d’apprentis à horizon 2027. Un succès en trompe-l’œil car même si le nombre d’apprentis a été multiplié par plus de deux depuis 2019-2020, cela « vient essentiellement de l’octroi par l’État aux entreprises recrutant des apprentis d’une prime ‘exceptionnelle’ de 6 000 euros par an » (p. 22). Nous assistons en réalité dans notre pays à un dévoiement de l’apprentissage, lequel « tend désormais à devenir surtout un moyen commode pour les étudiants de trouver un emploi payé par l’État pendant qu’ils poursuivent leurs études supérieures » (p. 25). « Il permet aussi aux entreprises, ajoute l’auteur, de maintenir un niveau d’emploi satisfaisant grâce à l’aide publique » (ibid.).
Un autre volet important du livre est celui consacré à la débâcle des finances publiques. L’auteur nous rappelle que la dette publique de la France était de 20% du PIB en 1980, avant de monter à 111% en 2023 ! Elle est passée sur cette période de 100 milliards d’euros à environ 3 000 milliards ! (p. 51). De plus, nos déficits budgétaires ne cessent de s’alourdir. Comme l’IREF vient d’ailleurs de le rappeler, nous célébrons cette année en France le triste anniversaire du 50e déficit public consécutif ! Les dépenses publiques continuent leur folle course en avant : en 2023, c’est même le record planétaire de 57,3% du PIB qui a été atteint – contre 50,1% pour la moyenne de la zone euro (p. 52). Quant aux prélèvements obligatoires, c’est la même tendance qui s’observe : de 500 milliards d’euros en 1995, ils sont passés à 1 200 milliards en 2022, une hausse vertigineuse même si l’on tient compte de l’inflation (p. 53). Le jugement de l’auteur est sans appel : « Si nous voulons arrêter le déclin qui nous mine et qui risque de faire de la France un pays en voie de sous-développement, il est impératif et urgent de porter remède à notre situation des finances publiques » (p. 57-58).
Les problèmes auxquels la France d’aujourd’hui est confrontée ont pour origine non les supposés dysfonctionnements du capitalisme mais bien plutôt les déficiences de notre système public (p. 93). C’est à lui en effet qu’on doit notamment la dette publique abyssale, le délitement de notre système éducatif, ainsi que le chômage et la pauvreté dans notre pays. Il nous faut donc renverser la vapeur, conclut l’auteur, avant qu’il ne soit trop tard. « Si nous ne renversons pas la table, écrit-il, il y a de fortes chances pour que notre déclin continue jusqu’à la catastrophe dans quelques années ». (…)
Jacques de Larosière : Le Déclin français est-il réversible ? – IREF Europe FR
The French budget : France stares into a “colossal” budgetary abyss
A fragile new government must try to plug the hole. Fast (The Economist, 11 octobre, article payant)
Extraits :
When a fresh-faced Emmanuel Macron swept into presidential office for the first time, in 2017, he hoped for a grand European bargain. France, which had not balanced a government budget since 1974, would fix its public finances and restore its credibility with its thrifty neighbour. In return, Germany, the euro zone’s biggest economy, would cede ground on French ideas for European integration, such as joint borrowing. Initially the bargain worked. In 2018 and 2019 France cut its annual deficit to below the EU’s limit of 3% of gdp. In 2020, nudged by the need to respond to the pandemic, the EU issued its first big joint bond.
Now, however, that bargain is falling apart. After snap legislative elections in July returned a hung parliament, a new minority government is trying to keep a coalition together that, awkwardly, relies for its survival on the tacit support of Marine Le Pen’s hard right. Michel Barnier, the new conservative prime minister, is confronting a fiscal crisis. France’s “colossal” deficit and debt, he declared on October 1st, is a “sword of Damocles” hanging over the country. In 2024, he said, the deficit will exceed 6% of GDP (next to 5.1% forecast earlier this year) and remain at 5% in 2025. It will fall back to 3% only by 2029, two years after Mr Macron’s previous government had promised. Government debt could reach 115% of GDP by the end of 2025.
France needs a squeeze. In the budget for 2025, which Mr Barnier was due to present to cabinet on October 10th, he was expected to unveil a massive €60bn ($66bn) in savings, or 2% of GDP: two-thirds in spending cuts, a third in tax increases. (…)
France’s neighbours are watching with a mix of weary familiarity and sharpening dismay. When asked this week about France’s deficit, Christian Lindner, Germany’s finance minister, replied drily: “We should all realise that the credibility of public finances vis-à-vis the capital markets is not to be trifled with.” On September 26th, for the first time since 2008, the yield on France’s ten-year government bonds exceeded Spain’s, usually considered riskier by investors. Mr Barnier knows he cannot get this moment wrong. (…)
Mr Barnier now needs to make his eye-watering budget savings while running a precarious minority government. The left will reject almost anything it tries. This puts the government’s ability to manoeuvre in Ms Le Pen’s hands. Parliament must approve the budget by December. (…)
France is under close scrutiny. The European Commission has already put the country on formal watch, and will want evidence that it is not only serious about fixing public finances but intends to continue with reforms. France needs the commission’s permission to delay obeying EU rules until 2029. Three ratings agencies are also each due to report on France’s credit rating this month and in November.
The more Mr Barnier takes over domestic policy, the more Mr Macron will turn to European and foreign affairs. The president has lost none of his ambition to reinforce European “strategic autonomy”. Yet this agenda, and his hopes of fresh joint borrowing and a bigger EU budget, depends on his credibility. As Mujtaba Rahman, European head of Eurasia Group, a consultancy, puts it: “If your own house is in disrepair, it is difficult to ask your neighbours to raise more debt.” Mr Macron is still one of Europe’s main thinkers about how to face up to the continent’s fragile future. But France’s perilous finances undermine his ability to do much about it. ■
France stares into a “colossal” budgetary abyss (economist.com)
Retraites, santé, niches fiscales… Le rapport choc qui identifie 150 milliards d’économies pour la France
EXCLUSIF – L’Institut Montaigne dresse un inventaire précis des coupes possibles dans les dépenses pour redresser les comptes publics. (Le Figaro, 10 octobre, article payant)
Extraits :
« Sur le rétablissement des finances publiques, il y a un débat politique qui s’est concentré sur de mauvaises idées. » La directrice des études France de l’Institut Montaigne, Lisa Thomas-Darbois, ne mâche pas ses mots. Le cercle de réflexion publie ce mardi une étude qui passe au peigne fin les pistes d’économies potentielles permettant à la France d’assainir ses comptes publics. Mesures explosives sur les retraites, la santé, les niches fiscales… En tout, le rapport identifie près de 150 milliards d’euros d’économies réalisables d’ici à 2050, soit environ le montant du déficit public actuel.
L’objectif est non seulement de montrer, chiffres à l’appui, les gisements potentiels de réduction de dépenses. Mais il insiste aussi sur la prise de conscience nécessaire sur le sujet, si la France ne veut pas finir déclassée dans la compétition mondiale et si elle veut assurer la pérennité de son modèle social. « Pourquoi nous est-il à ce point impossible de nous emparer collectivement d’un sujet si crucial et prioritaire pour l’avenir de notre pays ? », peut-on lire dans l’introduction du document. « Nous avons tous collectivement accepté la situation financière délétère dans laquelle se trouve le pays. Les politiques, les syndicats, les fédérations, les entreprises, les citoyens : chacun entrave à sa manière les démarches d’économies », répond Lisa Thomas-Darbois. Et d’ajouter qu’« en France, une dépense, une fois réalisée, devient due ». Ainsi, les exécutifs successifs se contentent, pour rétablir les finances publiques, « de mesures symboliques » comme la lutte contre la fraude aux prestations sociales ou des mesures de « justice fiscale qui n’ont pas de sens économiquement ». « Au fond, les solutions sont connues, soupire l’experte. La France a de grands pôles de dépenses sur lesquels il y a évidemment des marges de manœuvre. »
En tête de ces pôles de dépenses figurent, sans surprise, les retraites, qui représentent à elles seules un quart de la dépense publique française, selon le think-tank. Pour alléger ce fardeau, le rapport propose deux mesures qui permettraient d’économiser une trentaine de milliards d’euros chacune, à plus ou moins long terme. La première consisterait à reculer l’âge minimal de départ à la retraite pour le porter progressivement à 66 ans d’ici à 2050, ce qui permettrait de récupérer 1 point de PIB sur la dépense publique, soit 30 milliards d’euros. Une deuxième mesure consisterait à geler toutes les pensions de retraite pendant quatre ans, pour un gain de 29 milliards d’euros d’ici 2029. (…)
Autre mastodonte de la dépense publique, le système de santé français représente également un gisement d’économies potentielles. Le poids des dépenses de santé est beaucoup plus important en France que dans la plupart des pays de l’OCDE : la France occupe ainsi la troisième place pour les dépenses de santé rapportées au PIB parmi les pays de l’OCDE, après les États-Unis et l’Allemagne. Malgré ces dépenses, « la qualité perçue par les citoyens de l’offre de soins se dégrade », note l’institut. Au total, l’Institut Montaigne estime que les gouvernants pourraient réaliser des économies tout en renforçant l’efficience du système de soins, à hauteur de 28 milliards d’euros. Parmi les mesures proposées, figurent la création d’un système de tarification plus performant (2,9 milliards d’économies), l’augmentation du taux de prescription des médicaments génériques à 85 % (3 milliards), la réduction du coût des indemnités journalières (environ 3,2 milliards) ou encore la réduction de la durée des séjours en maternité après un accouchement (400 millions). (…)
« Pour mener des réformes vraiment efficaces, il faut une volonté gouvernementale et accepter d’être critiqué », poursuit Lisa Thomas-Darbois. Pour l’instant, Michel Barnier semble l’avoir bien compris. « J’accepte d’être impopulaire », a-t-il d’ailleurs déclaré en détaillant son plan de redressement des finances publiques dans le budget 2025. Ce texte doit être présenté par le gouvernement ce jeudi, alors que les finances publiques sont à la dérive. En 2024, le déficit public devrait dépasser les 6 % du PIB, loin de la prévision gouvernementale de 5,1 %. Pour éviter un scénario catastrophe à 7 % en 2025, le premier ministre prévoit d’inscrire un effort budgétaire colossal de 60 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2025. « Il a raison de le faire, mais la situation serait plus encourageante si le premier ministre pouvait s’appuyer sur un fort crédit politique et la possibilité d’inscrire ces économies dans la durée », conclut Lisa Thomas-Darbois.
Les charlatans ne sont jamais timides
L’ÉDITO D’ÉTIENNE GERNELLE. Les retraites constituent le premier poste de dépenses publiques. Cela n’empêche pas certains, de Mélenchon au RN, de proférer des énormités. Michel Barnier avait, lui, promis de dire la vérité. On attend toujours. (Le Point, 10 octobre, article payant)
Extraits :
Pour une fois, Mark Twain a un peu manqué sa cible. Sa célébrissime formule « Un mensonge peut faire le tour de la terre le temps que la vérité mette ses chaussures » est au minimum incomplète. La réalité, c’est que, le plus souvent, la vérité n’essaie pas de faire la course et demeure en chaussettes.
Sinon, comment expliquer que tant de dirigeants politiques reconnaissent en privé que le levier le plus efficace pour sortir des déficits est de relever l’âge de la retraite, mais ne pipent mot en public ?
La situation est pourtant limpide. Les retraites sont le premier poste de dépenses publiques, et de loin. Elles sont en outre responsables de la moitié de l’accroissement de la dette entre 2018 et 2023, soit 438 milliards d’euros, selon une édifiante étude de Jean-Pascal Beaufret publiée par la revue Commentaire.
Si l’on s’alignait sur nos voisins immédiats, avec un âge de départ compris entre 65 et 67 ans, assorti bien sûr de certains aménagements, la question des déficits ne serait pas résolue mais ferait beaucoup moins peur. Cela s’inscrirait dans une logique d’augmentation du taux d’activité de la population française : on sait que, si ce dernier était comparable à celui de l’Allemagne ou des Pays-Bas, nous serions tirés d’affaire.
Mais croyez-vous que l’on se pose sérieusement la question de l’âge de la retraite au gouvernement ? Pas très longtemps. (…) Y compris sous Michel Barnier, qui avait pourtant promis de « dire la vérité ». Pas tout entière, faut-il croire.
Cette timidité à verbaliser des évidences n’a d’égale que l’incroyable audace de ceux qui ont fait de la faribole leur fonds de commerce. Croyez-vous que Jean-Luc Mélenchon hésite au moment de réclamer le retour de la retraite à 60 ans ? Les charlatans ne sont jamais timorés, c’est même le principe de cette profession.
Ce n’est pas pour rien que Peter Sloterdijk, l’un des penseurs les plus brillants du monde, parle de « désinhibition cynique » pour désigner ce que l’on appelle de façon imprécise les « populismes ». Cela déséquilibre le débat. La raison se cache, la folie se vante. (…)
Olivier Blanchard, le brillantissime ancien économiste en chef du FMI, avait détaillé cet été dans nos colonnes sa méthode pour s’en sortir : un plan portant sur 120 milliards d’euros, étalé sur « cinq à dix ans » (pour éviter de tuer la croissance), en conservant des marges en cas de crise et en augmentant l’investissement.
Blanchard prônait surtout la franchise : « Plus la vision qui sous-tend les projets et les engagements du gouvernement est claire, plus grandes sont les chances que le programme soit perçu comme crédible et que la France ne soit pas pénalisée. » Mais, pour cela, il faut arrêter de jouer au chat et à la souris et tout exposer. Dès le début.Les charlatans ne sont jamais timides (lepoint.fr)
D’objectif second à question secondaire, comment Emmanuel Macron a laissé filer les comptes publics
RÉCIT – La politique économique n’est jamais sortie du «quoi qu’il en coûte», mobilisé pendant le Covid, ni de l’époque de l’argent gratuit. (Le Figaro, 10 octobre, article payant)
Extraits :
Ce n’est pas un mystère : les questions budgétaires n’ont jamais vraiment intéressé Emmanuel Macron. En la matière, le « en même temps » des origines était un « ni ni ». Ni rigueur, ni relance. « Autant il ne serait pas pertinent de viser l’équilibre de nos comptes publics dans un contexte de transition comme aujourd’hui, autant il ne serait pas sain de ne pas se préoccuper du niveau de nos dépenses publiques et de leur efficacité », écrivait le candidat Macron en 2016.
Il s’est fait élire sur une ambition de transformation du modèle économique pour le rendre plus favorable à l’investissement, plus attractif, plus productif, plus innovant. Le redressement des finances publiques était un objectif second, à la fois un gage à donner à une Union européenne qu’Emmanuel Macron mettait au cœur de son projet et une conséquence naturelle de l’amélioration de l’activité en France.
Et les débuts du premier quinquennat ont été prometteurs sur le front des réformes fiscales et sociales, avec pour résultat une croissance dynamique et un déficit public ramené sous 3 % du PIB dès 2017, permettant à la France de sortir de la procédure de déficits excessifs. Que s’est-il passé pour que, sept ans après, le pays soit dans une situation financière aussi dégradée, avec un déficit public qui dépassera 6 % du PIB cette année et une dette de 3228 milliards d’euros ? (…)
La politique économique s’est repliée sur un credo : si la France avait le même taux d’activité que l’Allemagne, elle n’aurait pas de problème de déficit public. Partant de ce calcul, tous les efforts ont été engagés pour augmenter le taux d’emploi (réforme du lycée professionnel, création de France Travail, réforme des retraites, réforme de l’assurance-chômage). Mais pouvait-on laisser pour autant les comptes de la nation à l’abandon ?
La politique économique n’a en fait jamais été repensée pour le nouveau monde né en 2022 : celui de la fin de l’argent magique, dans lequel les taux d’intérêt remontent. Aujourd’hui, les cadres de l’ancienne majorité résistent aux hausses d’impôts au nom de la croissance. Mais, comme le dit un ancien ministre, « on a bouffé nos marges de manœuvre ». La France n’a plus les moyens d’attendre, comme Godot, la croissance. Le coût de l’inaction, mesuré en milliards supplémentaires de charges d’intérêt sur la dette (55 milliards d’euros en 2025), suffira à l’étouffer. Le pays n’a plus un sou à échanger contre un peu de temps en plus pour redresser la barre.
Federal Deficit Hit $1.8 Trillion for 2024, CBO Says
U.S. budget shortfalls fueled by interest costs, Social Security, Medicare (WSJ, 9 octobre, article payant)
Extraits :
WASHINGTON—The U.S. budget deficit topped $1.8 trillion in the latest fiscal year, driven by higher spending on interest and programs for older Americans, as the government faces a persistent gap between federal outlays and tax collections.
The new data comes as Republican presidential nominee Donald Trump and Democratic pick Kamala Harris are both proposing new tax and spending plans that are estimated to add trillions more to the deficit over the next decade.
Whoever wins the election will face immediate decisions next year about agencies’ spending levels, the federal debt limit and expiring tax cuts. That debate will be pulled one way by a future filled with projections of red ink and pulled the other by Americans who enjoy federal benefits and lower taxes.
In all, the government collected $4.92 trillion in revenue and spent $6.75 trillion, putting the deficit at $1.83 trillion for the year that ended Sept. 30, according to the Congressional Budget Office, which issued its estimates ahead of the official administration tallies expected later this month.
The deficit in 2023 was officially $1.7 trillion, but it was actually larger than that. That is because the government recorded more than $300 billion in spending for student-debt cancellation in 2022 and recorded a similar-size spending cut in 2023 when the Supreme Court blocked President Biden’s program. (…)
Federal Deficit Hit $1.8 Trillion for 2024, CBO Says – WSJ
Keeping up with the neighbours : How bond investors soured on France
They now regard the euro zone’s second-largest economy as riskier than Spain (The Economist, 8 octobre, article payant)
Voir “Article du Jour”!
How bond investors soured on France (economist.com)
«Une administration qui ne cesse de grossir» : pourquoi la France n’arrive pas à diminuer son nombre de fonctionnaires
DÉCRYPTAGE – Le contingent des agents n’a eu de cesse d’augmenter depuis vingt ans. Dans certains versants de la fonction publique, les effectifs se sont même envolés, sans qu’il soit toujours possible de faire un lien avec les services rendus. (Le Figaro, 5 octobre, article payant)
Extraits :
Y a-t-il, oui ou non, trop de fonctionnaires en France ? En ces temps de disette budgétaire, la question se pose, plus brûlante que jamais, au sommet de l’État. Et le gouvernement formé autour de Michel Barnier n’hésite pas à répondre à l’affirmative. Invité dans l’émission «L’évènement» ce jeudi, le premier ministre a avancé plusieurs pistes visant à réduire le nombre d’agents de la fonction publique, comme la «fusion de services» ou le «non-remplacement» des personnes partant à la retraite. Des mesures qui permettraient, selon lui, de «gagner quelques points de PIB» et de récupérer une partie des 40 milliards d’économies dont le pays a désespérément besoin pour boucler son prochain budget.
Selon les chiffres officiels, la France comptait 5,67 millions d’agents en 2023, répartis entre la «fonction publique d’État» (2,52 millions d’agents), la «fonction publique territoriale» (1,94 million d’agents) et la «fonction publique hospitalière» (1,21 million d’agents). De 1997 à 2022, les effectifs de la fonction publique ont augmenté de 23%, contre 18% pour les personnes en emploi dans le secteur privé et 14% pour la population française. L’Hexagone se hisse au 7e rang des pays de l’OCDE où l’emploi public est le plus élevé dans l’emploi total. Elle est certes moins gourmande en fonctionnaires que les pays scandinaves (Norvège, Suède, Danemark), mais bien davantage que l’Allemagne, la Belgique ou l’Italie. Sa position dans le classement est inchangée depuis 2007.
À chaque campagne présidentielle, une partie des candidats fait pourtant le serment de tailler, en cas de victoire, dans les effectifs de la fonction publique française. (…) Les effectifs de la fonction publique d’État, qui ont connu des baisses ponctuelles entre 1997 et 2021, n’ont pas drastiquement augmenté sur la période. Leur progression globale n’a pas dépassé 7%. Mais ce n’est pas le cas des contingents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, qui ont bondi respectivement de 46% et de 36% sur la période. (…)
Une administration qui «se nourrit de sa propre complexité»
Il faut ajouter à cela la rigidité du statut des fonctionnaires, facteur qui explique largement l’inertie de la fonction publique en France. «La garantie de l’emploi à vie, dont jouissent les fonctionnaires français, avait du sens dans un monde stable, mais il n’en a plus dans le monde qui est le nôtre, qui ne cesse d’évoluer», estime le président de l’Institut Sapiens. Un poste rendu obsolète par le numérique peut ainsi disparaître de l’organigramme, mais pas la personne qui l’occupait, à qui il faut trouver une nouvelle affectation, quitte à créer un doublon. En parallèle, la fonction publique a régulièrement besoin d’embaucher de nouveaux profils, plus qualifiés, pour répondre à l’extension de ses compétences. «Le risque est celui d’une administration qui ne cesse de grossir et de se nourrir de sa propre complexité, qui finit par exister pour elle-même et non pour son utilité publique, analyse l’universitaire. La création de l’emploi devient alors son premier but. Il y a déjà une tendance à créer de nouvelles missions et de nouvelles règles qui justifient le maintien ou l’agrandissement de la masse salariale».
À côté de ce possible «big bang», les pistes évoquées par Michel Barnier relèvent de la «méthode douce», remarque Olivier Babeau. «La pyramide des âges favorise le non-remplacement des fonctionnaires qui partent à la retraite. Dans la fonction publique territoriale, 7% des effectifs partiront à la retraite chaque année, selon l’IGF. À compter de 2035, cela serait même 10%. Cela ne dispensera pas d’affronter une réforme plus profonde du statut des fonctionnaires», soupire l’économiste.
Christine Lagarde en croisade pour l’union des marchés des capitaux
LA LETTRE DE BRUXELLES. La patronne de la BCE met tout son poids dans la balance pour l’union des marchés des capitaux. Quels avantages et quels obstacles se dressent sur la route ? (Le Point, 4 octobre, article payant)
Extraits :
La Commission von der Leyen II n’est pas encore en fonction, mais un dossier s’impose à elle d’urgence pour combler le décrochage de l’économie européenne par rapport aux États-Unis : réaliser enfin l’union des marchés des capitaux. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, interrogée lundi par la commission Econ du Parlement européen, est venue souligner la nécessité vitale de cette initiative. « La BCE a longtemps souligné la nécessité de progresser dans ce domaine pour intégrer nos marchés fragmentés et ainsi favoriser la diversification des risques et l’absorption des chocs dans l’Union européenne », souligne la Française, qui a salué les rapports convergents d’Enrico Letta (remis en avril), de Mario Draghi (remis en début septembre) et de celui commandé par Bruno Le Maire au comité piloté par Christian Noyer (remis en avril).
Ce sujet, qui pourrait sembler abstrait pour le commun des mortels, touche, en réalité, au cœur de notre quotidien économique. Imaginez un instant que vous êtes un jeune entrepreneur avec une idée révolutionnaire. En Europe, vous auriez 40 % de chances de voir votre épargne dormir sur un compte courant, contre seulement 13 % aux États-Unis. Pourquoi ? Parce que notre Vieux Continent souffre d’une fragmentation de ses marchés financiers. Un puzzle réglementaire ! C’est là que l’UMC (union des marchés des capitaux) entre en jeu, comme un grand couturier qui voudrait recoudre les pièces éparpillées de ce tissu financier européen.
La commission Econ du Parlement européen, qui sera amenée à colégiférer, a eu la bonne idée de s’appuyer sur les réflexions préparatoires de Charles Wyplosz, éminent économiste français, professeur honoraire à l’IHEID (Institut de hautes études internationales et du développement) de Genève. L’étude de l’économiste part d’un constat : l’Europe est un nain financier. (…)
« Si l’Europe n’est pas capable d’innover, l’Europe ne sera pas capable d’améliorer sa compétitivité, l’Europe ne sera pas en mesure de combler l’écart de productivité [avec les États-Unis] », insiste Christine Lagarde pour appeler à l’action et à la levée des barrières. « En 2022, l’épargne des ménages européens a dépassé 1 100 milliards d’euros, note la patronne de la BCE. (…)
Ensuite, il y a la complexité réglementaire. Imaginez 27 pays, 27 systèmes fiscaux, 27 lois sur les faillites dont les hiérarchies des créanciers diffèrent. Un vrai casse-tête pour quiconque voudrait investir ou lever des fonds à l’échelle européenne. Sans parler de la supervision financière, aujourd’hui morcelée entre les autorités nationales, quand les États-Unis disposent d’un gendarme unique et puissant avec la SEC. (…)
Le rapport Draghi, cité par Lagarde, enfonce le clou. Il propose des mesures ambitieuses, allant jusqu’à suggérer la création d’une « 28e juridiction » européenne pour les grands acteurs financiers. Une idée qui fait grincer le Luxembourg et d’autres petites places financières, mais qui pourrait bien être le coup de fouet dont l’Europe a besoin. (…)
Christine Lagarde, elle, insiste sur l’urgence d’agir au regard des chiffres macroéconomiques. Avec une croissance européenne atone (0,8 % prévu pour cette année, quand le reste du monde tourne à plus de 3 %), l’Europe ne peut plus se permettre le « luxe du temps pour exclure des options potentielles », martèle-t-elle. Ce qui est en jeu, c’est la prospérité future de l’Europe, sa capacité à financer la transition écologique, à rester dans la course technologique face aux géants américains et chinois. C’est ni plus ni moins que l’avenir du modèle social et économique européen dont il est question.
Christine Lagarde en croisade pour l’union des marchés des capitaux (lepoint.fr)
Ce qui attend la France, le mauvais élève de la zone euro, à Bruxelles
En déficit excessif, la France va devoir respecter les nouvelles règles budgétaires européennes. Le laxisme français semble bel et bien dans le collimateur de la Commission… (Le Point, 4 octobre, article payant)
Extraits :
Le compte à rebours est lancé. Avant le 15 octobre, la France devra transmettre à la Commission européenne son projet de budget pour 2025 et au-delà. Un exercice délicat dans un contexte de nouvelles règles européennes et de finances publiques tendu. Mauvais élève de la zone euro depuis sa création, l’Hexagone ne fait plus rire personne à Bruxelles.
En plus du budget annuel, la France doit présenter, le 31 octobre, une trajectoire financière de quatre à sept ans, assortie d’un programme d’investissements et de réformes. Entre-temps, le gouvernement devra jongler entre le Parlement français et les institutions européennes.
Pour la France, l’équation est complexe. Soumise à une procédure pour déficit excessif, elle doit convaincre de sa capacité à redresser ses finances publiques. Michel Barnier s’est fixé comme cap un déficit ramené à 5 % du PIB en 2025 et à 3 % en 2029.
Nouveauté importante : cette procédure de déficit excessif comporte désormais des éléments automatiques. En effet, les recommandations du Conseil, qui sera l’ultime décideur à la fin, fixeront une trajectoire de correction des dépenses compatible avec un ajustement structurel minimal de 0,5 % du PIB par an. Impossible de s’y soustraire cette fois ! Ce fut le point dur de la négociation avec les Allemands et, en particulier, leur représentant, le libéral Christian Lindner, grand argentier du budget à Berlin. Le ministre des Finances allemand tenait à ce que, chaque année, le déficit baisse de 0,5 %, sans que la Commission – jugée trop douce – puisse atténuer la pente. (…)
Que se passera-t-il en cas de non-respect ? La France encourra une amende pouvant s’élever jusqu’à 0,05 % du PIB du pays, soit 1,4 milliard d’euros sur la base du PIB français en 2023. L’amende est appliquée pour une période initiale de six mois. Elle est versée tous les six mois. Et elle continue d’être appliquée jusqu’à ce que le Conseil (des États membres) estime que l’État concerné a entrepris une action correctrice en réponse à cette mise en demeure. L’amende peut être augmentée ou diminuée ; en tout cas, une fois versée – et même en cas de rétablissement des comptes publics –, elle ne sera pas remboursée et alimentera les recettes du budget européen. (…)
Ce qui attend la France, le mauvais élève de la zone euro, à Bruxelles (lepoint.fr)
Dette : un scandale français
Dégradation de la note, procédure pour déficit excessif, augmentation du spread… Pour la France, les signaux négatifs se multiplient. (Le Point, 3 octobre, article payant)
Voir « Article du Jour » !
Dette, une folie française : comment en sommes-nous arrivés là ? (lepoint.fr)
« A chaque fois qu’un risque d’emballement de la dette a été identifié, les dirigeants se sont retrouvés pris à revers de leur discours »
Alors qu’un premier ministre de droite ose assumer, à rebours de son parti, une hausse d’impôt, il se fait vilipender par les macronistes amnésiques sur leur responsabilité et est menacé de censure par la gauche qui a pourtant réclamé plus de justice fiscale, note, dans sa chronique, Françoise Fressoz, éditorialiste au « Monde ». (2 octobre, article payant)
Extraits :
Au moment où Michel Barnier affronte, à travers sa déclaration de politique générale, un Parlement sur ses ergots, un rapide coup d’œil en arrière montre à quel point la crise des finances publiques qui fige le décor des débats actuels a accompagné et nourri en France l’intensité de la crise politique. Pour ne s’en tenir qu’aux années les plus récentes, l’explosion des déficits et de la dette a sapé la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy, miné celui de François Hollande et fait disjoncter le deuxième mandat d’Emmanuel Macron.
Le point commun entre ces trois présidents est qu’aucun d’entre eux n’a cru bon alerter les Français du sérieux de la situation au moment où ils avaient la main. Le tournant de la rigueur de 1983 est resté comme un traumatisme collectif au même titre que la potion administrée par Alain Juppé entre 1995 et 1997alors que Jacques Chirac avait promis durant sa campagne de réduire « la fracture sociale ».
Depuis la remise du rapport Pébereau sur la dette publique qui a constitué en 2005 la dernière tentative politique assumée de sensibiliser l’opinion, le déni a été une constante. On se souvient de la colère de Nicolas Sarkozy en entendant François Fillon, qu’il avait nommé à Matignon, se décrire comme un premier ministre à la tête d’un « Etat en situation de faillite ». C’était en septembre 2007. La crise des subprimes n’avait pas encore éclaté. (…)
L’accroissement de la dette publique au cours des dernières décennies est allé de pair avec la montée de la défiance politique. En même temps qu’elle a offert aux dirigeants les moyens de leur politique, elle a fini par les prendre au piège. La dette a été une chance parce qu’elle a permis de protéger les Français contre les grandes crises mondiales, d’amorcer la remise à niveau de services publics en grande difficulté, d’engager la transition climatique, de relever le niveau de sécurité et de défense dans un monde dangereux, de servir de levier pour les investissements d’avenir.
Mais la dette a été aussi un poison parce qu’elle a résulté de l’incapacité durable de l’Etat et de la Sécurité sociale d’équilibrer les dépenses courantes et de transferts. Le pays a beau figurer, dans le classement de l’OCDE parmi ceux qui dépensent et qui prélèvent le plus, une insatisfaction chronique s’est développée autour du travail qui ne paie plus, des services publics insuffisamment efficaces et du système fiscal inapte à taxer les plus riches à due proportion. (…)
Dans un environnement politique particulièrement délabré, chacun flatte sa clientèle électorale en vue de la prochaine échéance présidentielle qui peut arriver dans trois ans ou plus tôt, nul ne le sait, et qui, de nouveau, autorisera un nouveau départ. Le mirage est total mais révélateur : personne n’a aujourd’hui la légitimité suffisante pour rebâtir de fond en comble le pacte social et fiscal.
Dette : les Français plus inquiets que jamais
Une écrasante majorité de Français est très inquiète du niveau de la dette publique, selon un sondage Cluster17 pour « Le Point ». La baisse des dépenses de l’État est la piste privilégiée. (Le Point, 1 octobre, libre accès)
Extraits :
Le sondeur partenaire du Point, Cluster17, est formel : la dette publique donne désormais des sueurs froides aux Français. 77 % d’entre eux considèrent en effet que le niveau d’endettement du pays a atteint un niveau « très élevé », selon une enquête réalisée sur un échantillon représentatif de 1 641 personnes, du 22 au 24 septembre. (…)
Sans surprise, droite et gauche restent toutefois divisées sur cette question. Si 77 % des électeurs de Valérie Pécresse et 69 % de ceux de Marine Le Pen à la dernière élection présidentielle disent ressentir « beaucoup » d’inquiétude, de même que 44 % des soutiens d’Emmanuel Macron, devant notre stock de dette (3 228,4 milliards d’euros, selon le dernier pointage officiel de l’Insee), ce sentiment n’est partagé que par 20 à 35 % des électeurs de Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon.
Une fois le problème posé, que faire ? « Les Français expriment un consensus assez large en faveur d’une réduction des dépenses de l’État », relève Stéphane Fournier, analyste chez Cluster17 et auteur de l’étude. Ainsi, 46 % des Français contactés par l’institut de sondage estiment qu’il faut réduire les dépenses de l’État, 38 % pensent qu’il faut à la fois augmenter les recettes et diminuer les dépenses, tandis que seulement 33 % sont en faveur de l’augmentation des recettes sans réduction des dépenses. (…)
Sondage exclusif : sur la dette, les Français plus inquiets que jamais (lepoint.fr)
ZEW-Studie: Die Kreditwürdigkeit der EU sinkt
Die Risikoaufschläge auf EU-Anleihen erreichen eine ähnliche Höhe wie jene der Hochschuldenländer Portugal und Belgien. Das macht neue EU-Schulden teurer – und damit unwahrscheinlicher. (FAZ, 30 septembre, article payant)
Extraits :
Sie sind nicht nur der Wunschtraum von Investoren: Anleihen mit geringstmöglichem Ausfallrisiko, hoher Wertbeständigkeit und Handelbarkeit. Ein solches „Safe Asset“ wünschen sich viele europäische Politiker auch für die EU, nicht zuletzt aus politischen Gründen. Denn verfügte Europa über ein ähnlich sicheres (Staats-)Papier wie die Vereinigten Staaten mit ihren Treasuries, steigerte das nicht nur das Vertrauen der Anleger in die EU, sondern wäre auch ein Schub für die europäische politische Integration, lautete immer wieder die Hoffnung. (…)
Gerade in diesem Jahr ist die Sehnsucht nach einem europäischen „Safe Asset“ ungebrochen. Geäußert wird sie vor allem von Politikern aus Italien. Der scheidende EU-Wirtschaftskommissar Paolo Gentiloni wirbt für neue Gemeinschaftsschulden nach Ablauf des Corona-Programms 2027, seine Landsleute Enrico Letta und Mario Draghi erheben in ihren Berichten zum Binnenmarkt und zur europäischen Wettbewerbsfähigkeit dieselbe Forderung – nicht zuletzt mit Hinweis darauf, dass in einer EU-Kapitalmarktunion ein sicheres gemeinsames Papier, eben ein „Safe Asset“, erforderlich sei. (…)
Kommissionspräsidentin Ursula von der Leyen steht solchen Forderungen positiv gegenüber, will aber so lange keine neuen gemeinsamen Schulden vorschlagen, solange sie nicht genügend politische Unterstützung aus den Mitgliedstaaten erkennen kann. Diese ist derzeit tatsächlich nicht absehbar. (…)
Aber nicht nur politische, sondern auch ökonomische Gründe lassen Gemeinschaftsschulden zunehmend unwahrscheinlich werden. (…) Auch die Kreditwürdigkeit der Gesamt-EU im Vergleich zu den Mitgliedstaaten mit der besten Bonität hat sich verschlechtert. So liegt der Renditeabstand zehnjähriger EU-Bonds gegenüber gleich laufenden Bundesanleihen derzeit bei 63 Basispunkten – und damit etwa so hoch wie der von Anleihen der hoch verschuldeten Staaten Portugal und Belgien. (…)
Der spürbare Renditeabstand der EU-Bonds belegt, dass die Märkte deren Ausfall in den kommenden Jahrzehnten nicht ganz ausschließen wollen. Die Hoffnung, die EU-Anleihen könnten ein über alle Zweifel erhabenes „Safe Asset“ schaffen, habe sich nicht erfüllt, urteilt der Autor der Studie, Friedrich Heinemann. Daran werde sich in absehbarer Zeit auch nichts ändern. Die EU bleibe auf den Rückzahlungswillen ihrer Mitgliedstaaten angewiesen. Ihre Kreditwürdigkeit leite sich aus der Bonität der nationalen Garantien für die EU-Schulden ab. „Safe Assets“ stellten allenfalls die Staatspapiere Deutschlands oder der Niederlande dar.
Das Interesse gerade dieser Staaten an neuen Gemeinschaftsschulden hält Heinemann gerade zurzeit für denkbar gering, weil rechtspopulistische oder EU-skeptische Parteien die Regierung unter Druck setzen oder schon an ihr beteiligt sind. (…)
Die Frage nach neuen Gemeinschaftsschulden dürfte sich vor allem stellen, wenn sich die Haushaltslage wichtiger Mitgliedstaaten weiter verschlechtert. Heinemann verweist aktuell auf Frankreich, wo der Risikoaufschlag auf Staatspapiere seit dem Sommer erstmals über dem EU-Durchschnitt liegt und die Neuverschuldung weiter zu steigen droht. Dass die Gesamt-EU einzelne Mitgliedstaaten mit stark steigenden Finanzierungskosten ähnlich wie in der Eurokrise automatisch herauspauken könnten, hält der ZEW-Ökonom aber nicht für ausgemacht. „Eine breite Bonitätsverschlechterung großer Mitgliedstaaten würde sich auf die EU übertragen. Es wäre nicht auszuschließen, dass eine neue europäische Schuldenkrise auch den Emittenten Europäische Union erfassen könnte.“
Die Kreditwürdigkeit der EU sinkt (faz.net)
La dette française poursuit sa folle envolée et atteint 3228,4 milliards d’euros
Elle pèse 112% du PIB à la fin du deuxième trimestre, selon les derniers chiffres publiés ce vendredi matin par l’Insee. En sept ans, l’addition a bondi de plus de 900 milliards d’euros. (Le Figaro, 28 septembre, article payant)
Extraits :
C’est une litanie de chiffres stratosphériques, si grands qu’ils semblent totalement irréels. À chaque publication de l’Insee sur l’évolution de sa dette, la France, presque résignée, redécouvre l’ampleur du trou qui ne cesse de se creuser dans son budget. À chaque fois, des milliards supplémentaires s’ajoutent à la pile, déjà vertigineuse. Des sommes rendues presque dérisoires à côté de la montagne qu’il faudra bien rembourser un jour. La dernière estimation de l’Insee ne fait pas exception : à la fin du deuxième trimestre, la dette publique atteignait 3228,4 milliards d’euros, selon les statisticiens nationaux. Un chiffre affolant, qui représente 112% du PIB tricolore. Son plus haut niveau depuis le troisième trimestre 2022.
La hausse de la dette frôle 69 milliards d’euros sur trois mois, et 127 milliards d’euros sur le premier semestre. Sur le deuxième trimestre, elle est portée par la dette de l’État, qui a bondi de près de 70 milliards d’euros, ainsi que par celle des administrations de sécurité sociale, en hausse de 4 milliards d’euros. (…)
Lus à tête reposée, les chiffres des statisticiens nationaux révèlent deux tendances particulièrement préoccupantes. D’abord, la flambée de la dette, sur le moyen terme, est démesurée, mille milliards d’euros se rajoutant à chaque décennie, dernièrement. Le cap symbolique des 1000 milliards d’euros a ainsi été franchi en 2003, celui des 2000 dix ans plus tard, et celui des 3000 en 2023. Et ce, malgré les alertes à répétition des connaisseurs du dossier, qui mettent en garde, à cor et à cri, contre l’aveuglement des dirigeants successifs. (…)
La tendance ne s’est pas ralentie après la pandémie de Covid-19, la dette ayant progressé de 275 milliards d’euros, portée notamment par les mesures en faveur du pouvoir d’achat. En sept ans, l’addition a bondi de plus de 935 milliards d’euros… (…)
Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, et la France se retrouve, peu à peu, dos au mur. La remontée des taux d’intérêts et la flambée de la charge de la dette limitent d’autant la marge de manœuvre du gouvernement, dans ses plans actuels comme pour financer les investissements d’avenir. L’incertitude politique pèse par ailleurs sur le coût des emprunts : la France se finance désormais plus cher que nombre de ses partenaires, dont l’Espagne, le Portugal et… la Grèce.
De quoi faire réagir les autorités. «Sur les seuls intérêts de la dette — je ne parle même pas de son remboursement — nous allons dépenser plus que pour l’école», s’inquiétait récemment le gouverneur de la Banque de France. (…)
La dette française poursuit sa folle envolée et atteint 3228,4 milliards d’euros (lefigaro.fr)
47.217 euros par Français : ce que représentent concrètement la dette publique et ses intérêts
La dette française dépasse les 3200 milliards d’euros, un niveau stratosphérique qu’il est difficile d’apprécier. Sauf à la comparer à des produits qui parlent à tout un chacun. (Le Figaro, 28 septembre, article payant)
Extraits :
(…) Seulement, l’augmentation de la dette s’accompagne mécaniquement de l’alourdissement de la charge de la dette. Laquelle, avec 7,3 milliards d’euros, était déjà le premier poste de dépense de l’État en juillet dernier, comme le révèle la dernière situation mensuelle de l’État disponible. L’année dernière, les «engagements financiers de l’État» figuraient à la seconde place des dépenses derrière l’éducation (82 milliards d’euros), avec quelque 62,4 milliards d’euros dépensés en 2023, dont 53,9 milliards d’euros au titre de la «Charge de la dette et trésorerie de l’État». Loin devant la Défense, et son budget de 54,8 milliards d’euros en 2023.
Pis. Selon le programme de stabilité laissé par le gouvernement Attal, la charge de la dette devrait atteindre «environ 80 milliards en 2027, presque autant que le budget de l’Éducation nationale», avertissait déjà en avril le gouverneur de la Banque de France. De quoi alerter le nouveau ministre du Budget qui a tiré la sonnette d’alarme ce mercredi. «La situation de nos finances publiques est grave, et je n’irai pas par quatre chemins: en 2024, le déficit public risque de dépasser les 6% du PIB» contre 5,1% initialement attendus, a-t-il annoncé devant la Commission des Finances de l’Assemblée nationale.
Seulement, l’augmentation de la dette s’accompagne mécaniquement de l’alourdissement de la charge de la dette. Laquelle, avec 7,3 milliards d’euros, était déjà le premier poste de dépense de l’État en juillet dernier, comme le révèle la dernière situation mensuelle de l’État disponible. L’année dernière, les «engagements financiers de l’État» figuraient à la seconde place des dépenses derrière l’éducation (82 milliards d’euros), avec quelque 62,4 milliards d’euros dépensés en 2023, dont 53,9 milliards d’euros au titre de la «Charge de la dette et trésorerie de l’État». Loin devant la Défense, et son budget de 54,8 milliards d’euros en 2023.
Pis. Selon le programme de stabilité laissé par le gouvernement Attal, la charge de la dette devrait atteindre «environ 80 milliards en 2027, presque autant que le budget de l’Éducation nationale», avertissait déjà en avril le gouverneur de la Banque de France. De quoi alerter le nouveau ministre du Budget qui a tiré la sonnette d’alarme ce mercredi. «La situation de nos finances publiques est grave, et je n’irai pas par quatre chemins: en 2024, le déficit public risque de dépasser les 6% du PIB» contre 5,1% initialement attendus, a-t-il annoncé devant la Commission des Finances de l’Assemblée nationale.
Mécanique de la crise financière, la France de 2024 est-elle la Grèce de 2010 ?
LETTRE EXCLUSIVE ABONNÉS – La signature de l’État français sur les marchés a déjà changé de statut. Michel Barnier est à la tête d’un État, non pas en faillite, mais financièrement déclassé. (Le Figaro, 27 septembre, article payant)
Extraits :
Toute ressemblance avec des faits existants serait évidemment fortuite. Et pourtant, il me revient le souvenir de ce pays qui avait peu de temps auparavant organisé les Jeux Olympiques; chez qui la gauche, face à une situation économique et financière en détérioration, avait multiplié les promesses démagogiques de campagne aux législatives avec pour slogan «l’argent est là», sous-entendu chez les riches; où, enfin, les comptes publics s’étaient révélés faux. Ce pays, c’est bien sûr la Grèce en 2009, à la veille de l’une des pires crises de dettes souveraines de l’histoire.
La France n’est pas la Grèce. son économie est plus forte et plus diversifiée, son État est plus robuste y compris pour lever l’impôt, son poids politique et économique est considérablement supérieur.
Ses comptes ne sont pas faux. Du moins ne sont-ils pas délibérément maquillés à coups de produits financiers comme ceux de la Grèce l’avaient été, dans la perspective de l’entrée dans la zone euro. Mais ils sont mal fichus, si on en croit Jean-Pascal Beaufret, ancien haut-fonctionnaire, qui dans la revue «Commentaire» ce mois-ci, explique que leur présentation masque la réalité du déséquilibre du système des retraites qui contribue massivement à notre endettement structurel.
Les comptes de la France ne sont pas faux, mais leur dérive récente les rend peu crédibles. Début 2024, on apprenait que le déficit pour 2023 s’élevait à 5,5% du PIB au lieu de 4,9% inscrits en loi de finances. Pour 2024, la cible a été réécrite plusieurs fois par rapport aux 4,4% inscrits dans le budget approuvé fin 2023 : la prévision a été relevée à 5,1% dès le printemps, puis à 5,6% cet été, à plus de 6% désormais. En tout, cela amène ce qui peut être mis sur le compte de l’erreur de calcul atteint 1,5 point de PIB (0,5 point au titre de 2023 et 0,9 points au titre de 2024), constaté en l’espace de sept mois à peine. (…)
J’ai toujours détesté cette expression, le «déclassement», qui renvoie souvent à un passé glorieux fantasmé et qui tend à ignorer l’effet mécanique que l’apparition de nouvelles puissances sur la scène mondiale. Pour autant, sur les marchés obligataires, c’est un fait : il y a déclassement de la France. La signature de notre pays «a changé de statut depuis la dissolution», comme le constate un haut responsable. «Cela concerne l’État mais avec lui, tout le pays, ménages et entreprises, pour lequel l’argent coûte plus cher».
Ce changement de statut se mesure au fameux «spread», l’écart de taux qui sépare la France du bon élève, l’Allemagne. De mois de 50 points de base au début de l’année, cet écart est monté autour de 70 points après la dissolution, et cette semaine, il a atteint 80 points de base. Deux signaux d’alerte sont venus consacrer la relégation de la signature française : désormais, notre pays, déjà dépassé par le Portugal, emprunte au même prix que l’Espagne à 10 ans (jeudi, les taux espagnols étaient de 2,95% contre 2,97% pour la France) et une émission à 5 ans grecque s’est même vendue moins cher que la nôtre.
La hausse du prix de l’argent conjuguée à une hausse des volumes (plus de 300 milliards d’euros l’an prochain contre 185 milliards en 2017) qu’il va falloir emprunter du fait de la persistance de déficits importants va faire grimper encore plus vite la charge d’intérêt que la France doit supporter chaque année. Celle-ci qui était de l’ordre de 40 milliards d’euros en 2017-2018 et qui était tombée à 30 milliards en 2020, le point bas sur fond de politique monétaire en mode Covid, est remontée à 48 milliards d’euros en 2023. Elle sera de l’ordre de 54 milliards pour 2024. Selon les derniers documents budgétaires transmis au parlement, Bercy anticiperait 65 milliards l’an prochain. La prévision de 84 milliards (toutes administrations comprises) pour 2027 est, elle aussi, caduque. Comptez 90 milliards d’euros «au train où ça va», selon les mots de Pierre Moscovici sur BFM TV mercredi soir. Dans ce scénario, la charge de la dette dépasserait allègrement la barre de 5% des recettes de l’État, qui fait partie de ces voyants qui, quand ils clignotent, mettent les agences de notation de très mauvaise humeur. (…)
Même à 80 points de base d’écart du prix de l’argent, on ne peut pas dire que les investisseurs soient exagérément sévères avec la France. Alors pourquoi ? «Si les spreads de la dette française ne montent pas plus que cela, c’est parce que les investisseurs ont BESOIN d’en acheter», explique un expert des marchés de crédit. C’est le facteur liquidité. La dette souveraine française représente 3,5% de la dette souveraine en circulation dans le monde. Surtout, elle pèse pour un quart du stock de dette de la zone euro. (…)
Un autre facteur fait que la situation actuelle est très différente de celle de 2010 : à l’époque, les marchés doutaient que la BCE interviendrait. Il a fallu le fameux «whatever it takes» de Mario Draghi en 2012 pour calmer la spéculation. Et aujourd’hui ? Pas si simple de répondre. Depuis 2022, la banque centrale s’est munie d’un instrument «anti-fragmentation», destiné à resserrer des spreads qui s’écarteraient trop à l’intérieur de la zone euro. Mais l’emploierait-elle pour la France ? «Ce n’est pas le rôle de la BCE de venir au secours de tel ou tel État. Le Traité interdit même le financement monétaire des déficits», rappelait récemment le gouverneur de la Banque de France et membre du conseil des gouverneurs de la BCE François Villeroy de Galhau, dans Le Point. Cet instrument, le TPI (Transmission Policy Instrument) n’a vocation à être employé qu’en cas de spread «injustifié», provoqué par un choc externe en somme, pas par la paresse d’un pays incapable de tenir ses comptes. Évidemment, il y a de la latitude dans l’interprétation des textes et des marges de manœuvre de la BCE en cas de crise. Mais il faut compter avec les autres partenaires et les faucons de la BCE.
The case for taxing consumption : If you must raise taxes, raise VAT
Taxing consumption is economically efficient and politically possible (The Economist, Leader, 27 septembre, article payant)
Extraits :
The rich world’s states are getting bigger and less effective—and the forces that are the cause cannot easily be turned back. As governments look after ageing populations and fight wage inequality, they are doling out more in pensions and benefits. From 1980-2022, social spending in rich countries with available data rose from 14% to 21% of GDP.
Yet politicians have been loth to raise taxes to keep pace, and in many cases have cut them. Borrowing has therefore soared and, to pay the bills, public services have been squeezed. As a result, many government services are breaking down. In parts of Canada children spend as long on the waiting list for nursery as they would in nursery itself. Britain is releasing convicts early because it has not built enough prisons; fewer than two-thirds of Germany’s long-distance trains run on time.
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The rich world’s states are getting bigger and less effective—and the forces that are the cause cannot easily be turned back. As governments look after ageing populations and fight wage inequality, they are doling out more in pensions and benefits. From 1980-2022, social spending in rich countries with available data rose from 14% to 21% of GDP.
Yet politicians have been loth to raise taxes to keep pace, and in many cases have cut them. Borrowing has therefore soared and, to pay the bills, public services have been squeezed. As a result, many government services are breaking down. In parts of Canada children spend as long on the waiting list for nursery as they would in nursery itself. Britain is releasing convicts early because it has not built enough prisons; fewer than two-thirds of Germany’s long-distance trains run on time.
The Economist has long argued that retirement ages should rise with life expectancy. Even with this policy, however, the ratio of pensioners to workers can still rise simply because the elderly are so numerous. In any case, the formidable voting power of the old makes it hard to stop their benefits from growing. Likewise, it is unavoidable that progressive taxation and income top-ups for low earners bring about more redistribution when pre-tax wage inequality rises. If they want to be elected, politicians will struggle to contain the welfare bill. If they are to avoid the implosion of public services—or fiscal crises—they will need instead to pay for bigger government by raising taxes. The option that is both feasible and not too economically damaging is to tax consumption by raising vat. (…)
Experience suggests that it is easier to raise VAT than other efficient taxes—so much so that America’s Republican Party has historically opposed the tax on the grounds that it makes it too easy to build a welfare state. (America, unusually, levies only state-level sales taxes.) In 2011 Britain raised its VAT rate from 17.5% to 20% and faced little public backlash. And high VAT has long helped Nordic countries pair big government with thriving market economies; they levy rates of 24% or 25%, among the highest in the rich world. Estonia is raising its tax to similar levels to pay for more defence. (…)
An argument against VAT is that it is regressive, because the poor consume more of their incomes than the rich. But the poor also have the most to gain from better public services and faster economic growth. (…)
The same cannot be said of the consequences of allowing public services to collapse and debt to explode. That would outrage voters and upend economies. VAT is not perfect, but few other taxes can preserve public services as populations age and fund Leviathan without throttling free enterprise. If a state is fat, it needs a VAT. ■
If you must raise taxes, raise VAT (economist.com)
May to September : China’s central bank tries to save the economy
Now it is the government’s turn (The Economist, 25 septembre, article payant)
Extraits :
As China’s economy has descended into deflation, the central bank’s lack of urgency has been a source of frustration. Officials at the People’s Bank of China (PBoC) at first expressed confidence that deflation was, so to speak, transitory. When it persisted, they worried less about falling prices than about the side-effects of fighting them. They were reluctant to ease monetary policy decisively as China’s currency was too weak, banks’ profit margins too slim and bond yields too low.
But at a press conference on September 24th the central bank revealed a change of heart. It announced a set of policies that were unusually bold. It said it would cut its policy interest rate by 0.2 percentage points, lower banks’ reserve requirements by half a percentage point and reduce interest rates on existing mortgages by about half a percentage point. It is unusual for China’s central bank to ease on two fronts at once, let alone three. Pan Gongsheng, the PBoC’s governor, said it might do more in the near future, perhaps cutting reserve requirements by another quarter- or half-point this year. Such “forward guidance” is unprecedented in China, notes Morgan Stanley, a bank. (…)
The bulk of those measures will have to come not from the central bank but from China’s fiscal authorities. They may announce an increase in China’s budget deficit later this year, as they did last year, according to Xing Zhaopeng, also of ANZ. Local governments might also issue more bonds than planned, since they have not used all of the quotas assigned to them. With reduced interest rates and low bond yields, the central bank has “created a good monetary environment for China to implement a proactive fiscal policy”, Mr Pan said at the press conference. With luck, China’s government will take the hint. ■
China’s central bank tries to save the economy (economist.com)
Jean-Pierre Robin: «Les retraites sont responsables pour moitié de l’envolée de la dette publique depuis 2017»
CHRONIQUE – Jean-Pascal Beaufret, ancien inspecteur général des finances et ex-directeur général des impôts, en apporte la démonstration lumineuse. (Le Figaro, 23 septembre, article payant)
Voir “Article du jour”
The Fed Is Flying Blind. Investors Don’t Seem to Care.
Markets are embracing the spirit of dovishness following the big rate cut this past week (WSJ, 23 septembre, article payant)
Extraits :
You can spend a lot of time on Federal Reserve kremlinology, analyzing policymaker statements and forecasts. Or you can ignore what they say, and just look at what they do—as markets decided after the Fed’s supersize rate cut on Wednesday.
The basic question is whether half-percentage-point cuts are the new normal. Fed policymakers say not: Only one official predicted cuts of more than a quarter point at the two meetings between now and the end of the year. Two, in their “dot plot” forecasts, predicted no more cuts, and the rest said one or two cuts.
But who cares what they say? Markets got into the spirit of dovishness that Chairman Jerome Powell now exudes and concluded that there’s a decent chance that half a point is the new quarter point. (…)
The cynic in me supports the idea of ignoring the central bank’s own prognostications, since it is terrible at predicting what it will do. Just this year the median policymaker’s rate forecast has swung from predicting three (normal quarter-point) rate cuts by the end of this year, down to one in its dot plot three months ago, and now back up to four, including last week’s double. Why should investors think this particular prediction is the right one?
It’s even worse if you try to look further out. Much of what matters when assessing how the Fed will react to any given economic development is where it thinks rates will eventually land in a balanced economy—what economists call the neutral rate, or r-star. Unfortunately policymakers are showing their confusion about where it lies, with their estimates ranging from 2.4% to 3.8%, and much higher than before the pandemic.
This wide gap reflects the uncertainty about future inflationary pressures from deglobalization, a spendthrift government more willing to interfere in the economy, military and green spending and the aging global population. For what it’s worth, the overnight indexed swap market is pricing long-term rates higher than the median policymaker forecast.
And that’s even before you get to the logical problem created by the feedback from Fed forecasts. What Mr. Powell and other policymakers say they expect to do usually has a strong influence on bond yields and so borrowing costs, affecting the economy. If they get their communications right, the market will do their work for them—meaning the Fed itself may end up not needing to do what it planned.
That isn’t the case this time, though. Investors have decided that the Fed will be much more dovish than it says. And the effect is to push down the cost of short-term borrowing as traders anticipate lower rates, while pushing up the cost of longer-term borrowing as investors prepare for the resulting stronger economy to pressure inflation. (…)
Something is likely to give, either trouble in the economy or smaller rate cuts than are priced in. Much as I hate to say it, maybe investors should be listening more to what the Fed says about the rest of the year—and worrying that uncertainty about the long term means volatility ahead as the Fed tries to feel its way in the dark.The Fed Is Flying Blind. Investors Don’t Seem to Care. – WSJ
Le beurre et l’argent du beurre, l’hypocrisie française
L’ÉDITO DE PIERRE-ANTOINE DELHOMMAIS. Devoir payer la facture de la dette rend les Français plus lucides sur l’état réel de nos finances publiques. (Le Point, 20 septembre, article payant)
Extraits :
L’économie française est descendue de son Olympe éphémère et le retour sur terre est brutal, avec, en cette rentrée, une croissance au point mort, une consommation en berne et des défaillances d’entreprises en forte hausse. Avec, surtout, un déficit déjà excessif qui se creuse encore, une dette qui continue d’enfler, Bruxelles, les agences de notation et les marchés financiers qui menacent de nous sanctionner.
Bonne nouvelle pour Michel Barnier, pour redresser les finances publiques, il peut a priori compter sur le soutien des Français qui semblent – enfin – avoir pris conscience de la gravité de la situation. Selon un sondage Elabe réalisé pour Les Échos et l’Institut Montaigne, 80 % d’entre eux jugent « urgent » de réduire la dette. Ce pourcentage monte à 96 % chez ceux qui ont voté pour Les Républicains (LR) au premier tour des législatives, suivis par ceux du Rassemblement national (RN, 88 %), d’Ensemble ! (87 %) et du Nouveau Front populaire (NFP, 71 %).
Si les Français s’étaient jusqu’à présent totalement désintéressés du problème de la dette, c’est d’abord parce qu’ils considéraient de façon parfaitement égoïste que celui-ci n’était pas le leur, mais celui des générations futures se voyant généreusement léguer en héritage plus de 3 000 milliards d’euros d’emprunts d’État à rembourser. La donne a changé. Avec les hausses d’impôts et les coupes budgétaires envisagées dès l’année prochaine pour stopper la dérive du déficit, chacun se sent pour la première fois directement concerné. La perspective de devoir commencer à payer nous-mêmes la facture de l’endettement nous rend tout à coup plus lucides.
L’apparent consensus populaire et politique qui se dégage en faveur d’une réduction de la dette reste toutefois bien fragile. Les programmes économiques du RN et du NFP, qui ont remporté près de deux tiers des suffrages, se caractérisent tous les deux par leurs outrances dépensières, dont le résultat mécanique serait de dégrader fortement les comptes publics. La candidate de la gauche au poste de Premier ministre, Lucie Castets, ne s’en était d’ailleurs pas cachée, expliquant qu’elle n’aurait « pas pour objectif premier de respecter le pacte de stabilité ».
Les politologues ont beau affirmer que les Français sont très majoritairement à droite, cela ne se vérifie guère en économie. Ils se montrent depuis des décennies, et leurs gouvernants avec, bien plus keynésiens que libéraux, bien plus favorables à l’intervention de l’État qu’à son désengagement. Emmanuel Macron ne fait pas exception. (…)
Les Français revendiquent plus de pouvoir d’achat, mais refusent de travailler davantage, ils ne veulent pas entendre parler de rigueur budgétaire, mais jugent urgent de réduire la dette. Ils demandent que l’État réduise son train de vie, mais lui réclament sans cesse des sous, des subventions supplémentaires et de nouvelles aides financières. Tenter de ramener à la raison et à la cohérence un peuple qui souhaite économiquement tout et son contraire, qui veut le beurre et surtout l’argent du beurre s’annonce pour Michel Barnier une tâche infiniment plus délicate que celle d’avoir négocié avec l’impétueux Boris Johnson les conditions du Brexit.Le beurre et l’argent du beurre, l’hypocrisie française (lepoint.fr)
Pierre et le loup : Finances publiques : c’est grave “grave” ou juste grave “comme d’hab’” ?
On annonce la faillite aux Français depuis trop longtemps pour qu’ils y croient pour de bon. Mais les Grecs aussi croyaient en leurs mythes. (Atlantico, 20 septembre, quelques articles gratuits / semaine)
Extraits :
Bon, ça y est, alleluia, on a un gouvernement (ou presque) ! Sauf ultime objection présidentielle, il devrait d’ailleurs vaguement ressembler à celui d’avant, et même à celui d’avant avant, mais les Français ont surtout besoin de se sentir en terrain connu en cette période troublée. Ça les détresse. (…)
Mais maintenant que l’équipage est virtuellement au complet, il y a une chose qu’on aimerait bien savoir parce que ça n’est pas très clair depuis quelques semaines : la situation de nos finances publiques, elle est grave grave, ou juste pas terrible comme d’habitude ? Il faut commencer à paniquer ou il n’y a pas le feu au lac ? Je pose la question parce que des situations prétendument graves graves, on en a connu par le passé. Déjà, lorsqu’il occupait le bureau de Barnier, François Fillon nous avait averti qu’il était « à la tête d’un Etat en faillite », que c’était pratiquement la fin des haricots, mais le pays ne s’est toujours pas écroulé en 17 ans. Il s’est même débrouillé pour faire passer son découvert à 3 000 milliards dans l’intervalle.
Ça devait être juste grave, en fait. Pas grave grave pour de bon ou les banques auraient fermé le robinet. Quel émotif, ce Fillon…
Parce que grave grave pour de bon, on a pu voir ce que ça donnait chez les Grecs ou chez les Argentins —posez-leur la question si vous en doutez—, et ce n’est pas une hausse du périmètre de l’ISF ou de la taxe sur les permis de chasse qui vous font revenir dans le vert quand vous en êtes là.
Non, à ce stade, il faut appeler le FMI, une sorte de McKinsey des plans de sauvetages, et c’est l’austérité la vraie, pas un ralentissement dans la hausse des dépenses publiques : les salaires sont amputés, les retraites dégringolent, les fonctionnaires sont remerciés, les riches se barrent en Suisse, les Chinois rachètent les ports et les aéroports, la classe moyenne mange des rats et court taper sur des casseroles devant les lieux de pouvoir en sortant du bureau de chômage…
C’est ça grave grave, ça rigole pas. Et Mélenchon et Binet pourront bien déclencher une grève générale : s’il reste trois kopecks dans les caisses, c’est aux créanciers qu’ils seront destinés. Pas aux augmentations du point d’indice ou aux primes SNCF post-JO.
Mais bon, personne ne l’envisage vraiment, ce genre de scénario. C’est costaud, la France. La sixième puissance mondiale. Too big to fail. Et les Allemands viendraient sûrement à notre secours. On pourra certainement continuer à s’écharper tranquillement sur le SMIC à 1 600 euros et le retour de la retraite à 60 ans. Comme les Grecs, continuons de croire à nos mythes !
Finances publiques : c’est grave “grave” ou juste grave “comme d’hab’” ? | Atlantico.fr
Agnès Verdier-Molinié : «Mais enfin, ne recommençons pas le concours Lépine des impôts les plus bêtes!»
TRIBUNE – Face à la situation dégradée des finances publiques, plusieurs voix, dont celles du gouverneur de la Banque de France et du premier ministre, s’interrogent sur d’éventuelles hausses d’impôts. Une ineptie, estime la directrice de l’iFrap*, qui plaide plutôt en faveur d’une réduction des dépenses.
Extraits :
L’Europe nous regarde en riant. Nous fonçons toutes voiles dehors vers la crise de la dette. Notre modèle social nous coûte 300 milliards d’euros de plus par an par rapport à nos voisins européens, et nous sommes aussi le pays le plus taxé. Nous avons, ces dernières années, dépensé sans vergogne 50 milliards d’euros de plus par an, creusé le déficit public, mais, au lieu d’annoncer des listes d’économies, nos chers décideurs sont tous en train d’imaginer des augmentations d’impôts tous azimuts.
Pourrait-on organiser parmi nos parlementaires le concours Lépine de la baisse des dépenses plutôt que le feuilleton convenu de la hausse des impôts avec les vieilles recettes vues et revues : ISF, taxer le capital comme le travail, taxer les rentes, les super-riches, les superprofits… ? De vieilles recettes moisies qui n’ont jamais marché pour résoudre notre équation budgétaire, au contraire… (…)
Le gouverneur de la Banque de France nous propose la répartition de l’effort suivant sur les 120 milliards de redressement de nos comptes publics à réaliser en 5 ans : un quart de hausses d’impôts et trois quarts de baisses de dépenses. Cela supposerait que, chaque fois qu’il y a la proposition de 1 euro de hausse d’impôts, on identifie en face 3 euros de vraies baisses de dépenses. Étonnamment, tous ceux qui disent qu’il faut faire des économies, qu’ils soient à la Cour des comptes, à la Banque de France ou ailleurs, ne disent jamais comment ils comptent le faire et quelle serait leur liste d’économies possibles, comme s’ils ne voulaient pas se saisir des constats maintes fois identifiés dans les revues de dépenses. (…)
À tous les conseillers vertueux qui poussent à taxer plus, demandons des idées d’économies à réaliser dès 2025. Que fait la commission des finances de l’Assemblée nationale en la matière ? Où est sa liste d’économies ? Ce n’est plus le temps du buzz mais le temps du faire. Si nos élus ne le comprennent pas, avant que le concours Lépine des impôts les plus bêtes ne soit clôturé, la crise de la dette battra son plein au grand détriment de nous tous, de l’intérêt général et de la démocratie. Chiche, Messieurs qui aimez tellement taxer l’argent des autres, essayez de réfléchir à comment vous dépenseriez si c’était votre propre argent. Vous trouveriez vite 10 % d’économies.
* Dernier livre paru : « Où va notre argent ? » (L’Observatoire, 2023).
Alain Minc : « Le gouvernement Barnier est assis sur une bombe »
ENTRETIEN. Gare au mur budgétaire ! exhorte l’essayiste, qui alerte, faute de mesures sérieuses, sur le précédent de la Britannique Liz Truss, poussée à la démission par les marchés. (Le Point, 19 septembre, article payant)
Extraits :
Le Point : Nous nous rapprochons d’octobre et nous n’avons aucune piste pour le budget 2025. Vous redoutez un coup de semonce de Bruxelles et des marchés ?
Alain Minc : Nous entrons dans des temps très difficiles. On peut trouver un accord avec Bruxelles, et Michel Barnier est certainement le mieux placé pour le négocier. Mais les marchés, c’est une autre paire de manches ! À un moment, ils vont se déclencher, il suffit d’une étincelle. Les propositions de loi annoncées par le Rassemblement national et LFI dans leurs niches parlementaires [respectivement fin octobre et fin novembre, NDLR] pour abroger la réforme des retraites me semblent, de ce point de vue, de véritables bombes car il ne faut pas exclure que l’une soit votée. Or toute machine arrière sur cette réforme serait un signal désastreux. La discussion avec Bruxelles va être très dure, mais la rupture de barrage des marchés peut être terrible. (…)
Le problème avec les marchés est plus complexe. Rappelez-vous Liz Truss, qui était la militante la plus pro-marchés qui soit. Elle a présenté un budget qui n’était pas crédible dans son équilibre impôts-recettes et elle a été crucifiée en vingt-quatre heures ! Ce qui peut passer dans une discussion rationnelle avec Bruxelles peut donc être rejeté par les marchés. Notre chance, c’est qu’il y a énormément d’argent en circulation et qu’il ne peut pas uniquement s’engouffrer dans des bons du trésor allemand. Aux yeux des marchés, la France garde un autre atout, paradoxal et triste : ils savent que la machine technique à prélever des impôts est l’une des meilleures au monde. Il n’en reste pas moins que, vis-à-vis des marchés, on patine sur une fine couche de glace qui peut se rompre à tout instant. (…)
La grande erreur macroéconomique du président et du secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, est d’avoir cru qu’il suffisait d’augmenter le taux d’emploi pour combler le déficit. Ils ont pris de bonnes mesures, en particulier le projet de réforme des allocations chômage que Gabriel Attal a, hélas, mis au congélateur. Mais c’est une très longue marche, et leur politique aurait mis des années à amener notre taux d’emploi au niveau allemand. Or ils pensaient que, si le taux d’emploi augmentait dans des proportions significatives, ils n’auraient pas besoin de baisser les dépenses car le système se rétablirait automatiquement. C’était vrai à très long terme, totalement faux à court terme. C’était de la pensée magique. Ils y ont trouvé un alibi, dans les années où ils avaient le pouvoir, pour ne pas faire de grandes réformes autres que celle du marché de l’emploi. (…)
Le danger immédiat, ce sont les marchés, mais la rue est imprévisible. Heureusement, le diable Mélenchon n’est pas en état de mettre le feu. Sa politique communautariste fait qu’il a capté, au nom d’une stratégie condamnable, le vote des quartiers. De là à fabriquer une révolte des quartiers, ce n’est pas évident car il aura face à lui les narcotrafiquants, qui lui résisteront pour de mauvaises raisons : ils ne veulent pas que le business s’arrête.
Alain Minc : « Le gouvernement Barnier est assis sur une bombe » (lepoint.fr)
Ignoring the noise : Why the Federal Reserve has gambled on a big interest-rate cut
The bold move carries economic and political risks (The Economist, 19 septembre, article payant)
Extraits :
The Federal Reserve’s decision to lower interest rates by half a percentage point, announced on September 18th, is momentous for two reasons. As the first cut by America’s central bank since it lifted rates to quell inflation, it marks the start of a monetary-easing cycle. It also represents a bet by the Fed that inflation will soon be yesterday’s problem and that action is needed to support the labour market. For the first time since 2005, one of the Fed’s governors in Washington, DC, dissented from the decision. Michelle Bowman preferred to cut rates by a quarter-point. (…)
The argument for a half-point cut rested on several pillars. Crucially, the Fed is confident that it is on track to bring inflation under control. Price rises have slowed to an annual pace of 2.5%, not far from its target of 2%. With oil prices sagging and rents rising more slowly, there is a good chance that inflation will soon ease further. So the Fed’s worries have shifted to the job market. The unemployment rate of 4.2% is low, but nearly a full percentage point higher than early last year. And firms have pared back their hiring. Jerome Powell, the Fed’s chair, portrayed the rate cut as a recalibration of monetary policy in line with a lessening of inflation risks and an increase in unemployment risks. (…)
The Fed’s big cut nevertheless poses some dangers. Despite the cracks in the labour market, the economy as a whole appears to be holding up well. Resilient consumption has put it on track for annualised growth of 3% in the current quarter, well ahead of most forecasts just a month ago. A hefty rate cut against a strong economic backdrop risks sending the wrong signal to markets. The central bank judged that this risk was manageable. According to projections released on September 18th, the median forecast of Fed officials is that they will reduce rates by another 1.5 percentage points by the end of next year. They could easily make fewer cuts if inflation proves to be a more stubborn foe.
Another danger is politics. Coming just before the presidential election, the big rate cut may attract criticism from Donald Trump as a sign that the Fed, a regular target of his ire, is trying to help Kamala Harris. Yet a quarter-point cut could just as easily have invited a charge from Democrats that Mr Powell had been intimidated by Mr Trump. Mr Powell has long said that he tunes out the political din. He may well need a hefty pair of noise-cancelling headphones in the coming weeks. ■
Why the Federal Reserve has gambled on a big interest-rate cut (economist.com)
A U.S. National Debt Crisis Is Coming
Trump and Harris are determined to ignore the problem—at the country’s peril. (WSJ, opinion, 18 septembre, article payant)
Extraits :
Despite intensifying polarization, the Republican and Democratic parties are alike in one important respect: Both now behave as though budget deficits don’t matter. Red and blue politicians alike seem to think we can increase spending, cut taxes indefinitely, and borrow whatever we need to close the gap while running up the national debt—all without paying a price.
Why not make everyone happy by eliminating taxes altogether and borrowing everything? The answer is obvious: No prospective lenders would believe that they’d be repaid in full. They would thus demand ever-higher rates of interest on debt. Eventually, the merry-go-round would grind to a halt, triggering a crisis the likes of which the U.S. has never faced. (…)
Our current course—beset with rising net interest outlays and stagnant revenue—could also halt the merry-go-round, though in slow motion. At some point, the volume of debt needed to finance our deficits would exceed lenders’ willingness to lend their cash reserves on terms that wouldn’t ruin the economy.
That this hasn’t yet happened is no evidence that it won’t or can’t. It proves only the wisdom of Adam Smith’s famous reminder that “there is a great deal of ruin in a nation.” We can recover from episodic folly, but if we persist in it, we’re asking for trouble. (…)
Over the past half-century, interest payments on the federal debt averaged 2.1% of GDP, compared with 3.1% this year. If current trends continue, the annual interest payment will reach $1.7 trillion—4.1% of GDP—by 2034. (…) The budget office projects that defense spending, which has averaged 4.2% of GDP over the past 50 years, will shrink to 2.8% by 2034. The growing burden of interest payments, including to foreign creditors, makes it harder to afford the national security we need. (…)
The balanced budgets we enjoyed at the end of the 20th century won’t return anytime soon. Fortunately, fiscal sustainability doesn’t require this. As I’ve argued in previous columns, politicians should at a minimum stabilize the national debt as a share of GDP so that the burden of interest payments and debt refinancing grows no faster than the economy. If long-term projections for 2% annual economic growth and inflation rates are accurate, this target would require a cut of about $9 trillion, or 40%, in addition to the debt projected over the next decade. Bringing Social Security and Medicare into balance would be a big step toward this goal, but we would have to do more to meet it. We can’t ignore the deficit and debt indefinitely, even though we like to pretend that we can.
A U.S. National Debt Crisis Is Coming – WSJ
François Lenglet : «Comment augmenter les impôts quand notre niveau de prélèvement est sans équivalent dans le monde ?»
ENTRETIEN – Alors que les comptes publics sont à la dérive depuis le début du second quinquennat d’Emmanuel Macron, l’imbroglio politique né de la dissolution de l’Assemblée nationale pourrait aggraver encore la situation budgétaire de la France, analyse le journaliste économique.
François Lenglet est journaliste économique à TF1 et RTL. Dernier livre paru : Combien de temps ça va durer ? – 100 vérités bonnes à dire (Plon, 2023).
Voir « Article du jour »
Federal Debt Is Soaring. Here’s Why Trump and Harris Aren’t Talking About It.
Both candidates were part of administrations that produced growing deficits. Neither is likely to reverse that trend if elected. (WSJ, 17 septembre, article payant)
Extraits :
The U.S. isn’t fighting a war, a crisis or a recession. Yet the federal government is borrowing as if it were.
This year’s budget deficit is on track to top $1.9 trillion, or more than 6% of economic output, a threshold reached only around World War II, the 2008 financial crisis and the Covid-19 pandemic. Publicly held federal debt—the sum of all deficits—just passed $28 trillion or almost 100% of GDP.
If Congress does nothing, the total debt will climb by another $22 trillion through 2034. Interest costs alone are poised to exceed annual defense spending.
But the country’s fiscal trajectory merits only sporadic mentions by the major-party presidential nominees, let alone a serious plan to address it. Instead, the candidates are tripping over each other to make expensive promises to voters.
Economists and policymakers already worry that the growing debt pile could put upward pressure on interest rates, restraining economic growth, crowding out other priorities and potentially impairing Washington’s ability to borrow in case of a war or another crisis. There have been scattered warning signs already, including downgrades to the U.S. credit rating and lackluster demand for Treasury debt at some auctions. (…)Federal Debt Is Soaring. Here’s Why Trump and Harris Aren’t Talking About It. – WSJ
L’Irlande, ce pays auquel Bercy n’ose pas rêver
L’ÉDITO DE LUC DE BAROCHEZ. Dublin gère si bien ses comptes publics qu’ils dégagent d’énormes excédents. Et si la France s’en inspirait ? (Le Figaro, 17 septembre, article payant)
Extraits :
(…) Il serait trop facile de ne voir dans la performance irlandaise que le résultat d’un dumping fiscal. La bonne tenue de l’économie est d’abord le résultat d’une gestion avisée. Au passage, on note que les potions tant décriées du FMI et de la Commission européenne ont eu un effet extraordinairement bénéfique sur le patient irlandais. Le produit intérieur brut par habitant y est le plus élevé de l’Union européenne après le Luxembourg (95 000 euros par an, plus du double de la France). La bureaucratie est réduite au minimum, le chômage est quasi inexistant.
La population est jeune (un Irlandais sur trois a moins de 30 ans), bien éduquée (la proportion de diplômés scientifiques est la plus élevée d’Europe) et, de surcroît, elle parle anglais. La productivité est la plus forte de tous les pays développés (deux fois et demie supérieure à la moyenne européenne). De quoi transformer l’île en havre doré pour tous les grands groupes américains qui tiennent à avoir un pied dans l’Union européenne, un marché de 450 millions de consommateurs. (…)
L’Irlande, ce pays auquel Bercy n’ose pas rêver (lepoint.fr)
Jacques de Larosière : « Pour équilibrer un budget, il suffit d’avoir de la jugeote »
INTERVIEW. Diminuer la dette sans toucher aux prestations sociales, c’est possible. L’ex-gouverneur de la Banque de France, qui publie « Le déclin français est-il réversible ? », nous explique comment. (Le Point, 14 septembre, article payant)
Extraits :
Le Point : Votre diagnostic sur la politique économique est très sombre. À vous lire, la France risque de devenir une puissance « à peine secondaire ».
Jacques de Larosière : C’est un constat. Si l’on mesure la compétitivité de la France et sa capacité productrice à l’aune de celle de ses voisins, on s’aperçoit que nous sommes très décalés. Tout, en matière économique, est une question de trajectoire. Or nous sommes sur une trajectoire de déclin, depuis le début des années 1980, qui s’est aggravée depuis une vingtaine d’années. C’est un problème majeur, car, si nous poursuivons ainsi, nos déficits et notre manque de compétitivité vont causer des dégâts intolérables dont nous souffriront tous. Pendant plus de quarante ans, tous nos dirigeants, sans exception, ont conduit une politique malfaisante pour l’économie et donc pour les Français. Ils ont menti sur la réalité des chiffres. Emmanuel Macron, de ce point de vue, ne fait pas exception puisqu’il a accentué la dérive des finances publiques après la crise des Gilets jaunes. Cela me conduit à me poser la question suivante : « La France a-t-elle encore des dirigeants politiques capables de redresser la barre ? » J’en doute, même si je l’espère.
Outre le déficit de culture économique, le déclin relatif de la France est dû en grande partie à l’endettement, devenu hors de contrôle, rappelez-vous…
Le ratio entre le taux d’endettement public français et le PIB, c’est-à-dire la richesse que produit le pays, était de 60 % jusqu’en 2000, comme en Allemagne. Puis nous avons dérivé jusqu’à dépasser aujourd’hui les 110 %, tandis que nos voisins d’outre-Rhin sont à 64 %. Si les Allemands se sont maintenus à ce niveau, malgré les alternances et les crises, c’est parce qu’ils en ont eu la volonté politique. En France, si vous me désignez quelqu’un qui a pris en main le budget national depuis vingt ans, je vous paie une coupe de champagne ! En outre, l’endettement des entreprises françaises se situe autour de 200 % du PIB, alors que celui des autres pays européens converge autour de 60 %. C’est inquiétant. J’ajouterai qu’en près de trente ans, notre capacité industrielle a fondu d’à peu près 30 %, tandis que celle de nos voisins allemands s’est maintenue, ce qui est bien la preuve que la politique de stimulation de la demande par l’endettement ne fonctionne pas.
Comment expliquer cette consternante particularité française ?
Nos supposées « élites » ont commis deux erreurs. La première a été de penser que l’expansion continue du déficit budgétaire stimule la croissance. C’est la fameuse théorie du « multiplicateur keynésien », du nom de l’économiste britannique John Maynard Keynes (1883-1946). On se dit : « Chic ! On donne de l’argent aux gens pour qu’ils le dépensent et ça va finir par augmenter le PIB ! » Mais, en définitive, les Français achètent des produits étrangers et nos entreprises désinvestissent le territoire national. À long terme, l’endettement érode la croissance au lieu de la stimuler. Keynes, lui-même, l’avait compris. Pour lui, la relance budgétaire ne devait être qu’une exception conjoncturelle, pas une politique permanente. La seconde erreur a été de croire que les taux bas favorisent l’investissement productif. En réalité, l’épargne longue reste sur les livrets puisque les investissements risqués ne sont plus assez rémunérés. Keynes avait aussi alerté contre ce risque, qu’il nommait « la trappe à liquidités ». À croire que ceux qui se réclament de lui ne l’ont jamais lu ! (…)
La feuille de route de l’ex-gouverneur de la Banque de France pour réduire la dette (lepoint.fr)
Unseriöse Wahlversprechen: Statt «Zuckerln» braucht Österreich ein Sparpaket
Unter dem Motto «Koste es, was es wolle» hat die Regierung in Wien in den letzten Jahren einen Schuldenberg angehäuft. Nach der Wahl werden schmerzhafte Einschnitte folgen müssen. Doch keine Partei wagt, das auszusprechen. (NZZ, opinion, 14 septembre, article payant)
Extraits :
Kuchen statt ein Sparpaket – im Land der Sachertorte klingt das verlockend. Nicht umsonst heissen die Versprechen sozialer Wohltaten, mit denen die Parteien jeweils auf Stimmenfang gehen, in Österreich «Wahlzuckerl». Dass fast alle Ökonomen stattdessen Einsparungen verlangen, ist so kurz vor der Parlamentswahl unbequem. Denn Sparen bedeutet, den Gürtel enger zu schnallen, und das möchte man der Bevölkerung keinesfalls zumuten.
Bundeskanzler Karl Nehammer von der ÖVP stellt deshalb in Aussicht, das Wirtschaftswachstum kräftig anzukurbeln, so dass einfach der Kuchen grösser wird, den es zu verteilen gibt. Den Subventionsdschungel durchforsten will seine konservative Partei laut ihrem Wahlprogramm schon auch, aber Sparen soll man das offenbar nicht nennen. (…)
37 Jahren mitregierende Partei sich nicht längst an die Umsetzung gemacht hat. Es ist aber völlig unrealistisch, zu glauben, dass sie ausreichen.
Erstens ist die Haushaltslage inzwischen nicht angespannt, sondern desolat. (…)
Die Folge ist, dass in der Amtszeit der konservativ-grünen Regierung die Schuldenquote von gut 70 auf knapp 80 Prozent der Wirtschaftsleistung gestiegen ist. Für dieses Jahr erwartet der Fiskalrat ein Budgetdefizit von 3,4 Prozent. Österreich, das sich in der EU gerne zu den haushaltspolitisch besonders restriktiven «Sparsamen Vier» zählt, verfehlt die Maastricht-Kriterien also deutlich. Brüssel verlangt deshalb für das kommende Jahr Einsparungen von 2,5 Milliarden Euro. (…)
Die ÖVP wird mit grösster Wahrscheinlichkeit auch nach der Wahl Ende Monat Teil der künftigen Regierung sein. Es wäre allerdings unfair, nur ihre Pläne als unrealistisch einzustufen. Fast alle Parteien werfen mit «Zuckerln» um sich. Die SPÖ will diese mit Vermögens- und Erbschaftssteuern finanzieren, rechnet aber mit viel zu hohen Einnahmen. Die voraussichtliche Wahlsiegerin FPÖ lehnt dagegen neue Steuern ab. Sie will stattdessen Ausländern die Sozialhilfe streichen und aus der europäischen Luftverteidigungsinitiative Sky-Shield austreten. Ersteres bringt indes kaum Einsparungen, Letzteres wäre sicherheitspolitisch fahrlässig.
Der Fiskalratspräsident Badelt bezeichnete die Versprechungen kürzlich allesamt als «unseriös und nicht realistisch». Die Ernüchterung wird nach der Wahl folgen. Die leeren Kassen werden eine künftige Regierung zu schmerzhaften Einschnitten zwingen. Dazu müssen auch politisch heikle Massnahmen gehören wie etwa die Abschaffung klimaschädlicher Subventionen oder eine Pensionsreform, die rasch das sehr niedrige faktische Rentenalter erhöht. Das auszusprechen ist unangenehm, wäre aber ehrlich.
Wahlen Österreich: Es braucht ein Sparpaket statt unseriöser Versprechen (nzz.ch)
Nice ideas, Mr Draghi—now who will pay for them?
From “whatever it takes” to “whatever the cost” (The Economist, 13 septembre, article payant)
Extraits :
An old joke haunts economists. A chemist, a physicist and an economist are stranded on a desert island with a tin of beans but no implement to open it. The chemist suggests corroding the container with sea water, but concludes it would take years. The physicist proposes a method to prise the tin open that turns out to be equally impractical. The economist is delighted that only she has the right answer: “Assume a tin-opener.”
Mario Draghi, himself an economist of some renown, this week unveiled a report on how to revive Europe’s flagging economic prospects. His answer: “Assume €800bn” (close to $900bn). That is the annual investment the former boss of the bloc’s central bank thinks is required to prevent the European Union’s economy falling ever further behind America’s. The problem is that money on that scale is as elusive in Europe as a tin-opener on a desert island. Establishing blueprints for spending money is the easy bit. But given EU countries are trillions of euros in debt beyond what the club’s own rules are meant to allow, finding the cash is likely to prove as hard as coming up with a funny joke involving economists.
Nice ideas, Mr Draghi—now who will pay for them? (economist.com)
Jean-Pierre Robin : «Le tandem Barnier-Macron condamné à une politique de rigueur à contretemps»
ANALYSE – Il n’est plus possible d’invoquer les risques conjoncturels à court terme pour différer encore l’assainissement des comptes publics. (Le Figaro, chronique, 13 septembre, article payant)
Extraits :
Lors de la cérémonie de passation de pouvoirs avec Gabriel Attal, Michel Barnier s’est engagé à « dire la vérité sur la dette financière et la dette écologique ». La vérité est toujours bonne à dire ; encore faut-il trouver les mots pour l’exprimer. Lorsque les technos de Bercy nous informent d’un risque de dérapage du déficit public à « 5,6 % du PIB » en 2024 (le produit intérieur brut étant l’ensemble des ressources du pays) au lieu des 5,1 % envisagés précédemment, croient-ils vraiment sensibiliser ainsi les Français ? Il serait déjà plus compréhensible de dire que ce déficit risque d’atteindre 157 milliards d’euros cette année, soit encore 2308 euros en moyenne pour chacun des 68 millions de Français. À chacun de nous de juger d’une telle somme. (…)
De tels chiffres sont-ils de nature à frapper l’opinion ? On peut en douter tant les grands équilibres économiques du pays sont devenus abstraits et sans conséquences pratiques sur la vie des gens. Ainsi, le déficit commercial français de 99 milliards d’euros en 2023 n’a aucun impact sur notre monnaie, l’euro, contrairement à ce qui se passait avec le franc menacé de dévaluation. En 1983 le gouvernement avait dû opérer le « tournant de la rigueur », expression restée fameuse. Le contrôle des changes avait été durci, limitant les voyages et les achats des particuliers à l’étranger. Le déficit public était pourtant deux fois moindre alors qu’il ne l’est aujourd’hui en pourcentage du PIB.
Ces réalités comptables sont niées quotidiennement par les députés du NFP qui dénoncent la politique « austéritaire » (sic), un néologisme qui plaît à ses locuteurs, sans doute parce qu’il rime avec « autoritaire ». Comment dans une telle atmosphère de déni persuader les Français que trop, c’est trop ? Les marchés des changes ne jouant plus leur rôle de déclencheur d’alerte, les autorités européennes font office de juge de paix. Bruxelles a placé la France « en procédure de déficit excessif » en juin dernier, à charge pour le gouvernement d’y répondre par des mesures d’assainissement. C’est tout l’enjeu du plan pluriannuel que le ministère des Finances devait faire parvenir le 20 septembre mais dont l’envoi a été différé sine die dans l’attente du projet de loi de finances 2025.
Bercy connaît parfaitement l’effort à accomplir. Selon une note du Trésor rendue publique, « un retour dès 2027 du déficit sous les 3 % du PIB supposerait de réaliser environ 110 milliards d’économies d’ici à 2027 », un peu moins de 40 milliards par an. « C’est brutal, c’est difficilement faisable politiquement, peu acceptable socialement et économiquement guère cohérent », a commenté le week-end dernier Pierre Moscovici, le premier président de la Cour des comptes dans une interview au Parisien.
Voilà qui peut paraître paradoxal venant de la vigie de nos comptes publics, et qui contredit ses appels répétés à la rigueur des trimestres précédents. Mais Moscovici parle en expert, au sens étymologique du terme de « celui qui a l’expérience ». En tant que ministre des Finances de François Hollande, il avait reconnu le « ras-le-bol fiscal » des Français en août 2013. (…)
Invoquer les risques conjoncturels à court terme pour différer encore l’assainissement des comptes publics relève à l’évidence de la procrastination, terme remis au goût du jour par Emmanuel Macron tardant à nommer un premier ministre. La seule solution pour remettre de l’ordre dans nos comptes publics serait d’établir un véritable plan de 7 à 12 ans, comme le préconisent le Conseil d’analyse économique de Matignon et François Bayrou en tant que haut-commissaire au Plan. Reste à savoir si l’Assemblée nationale actuelle prédispose à telle vision.
Jean-Pierre Robin : «Le tandem Barnier-Macron condamné à une politique de rigueur à contretemps»
Michel Barnier sera-t-il le chevalier du déclin… réversible ?
L’ÉDITO DE FOG. Pourquoi le Premier ministre devrait lire l’ouvrage de Jacques de Larosière, ancien gouverneur de la Banque de France et économiste sans chichis. (Le Point, édito, 11 septembre, article payant)
Extraits :
L’union nationale est-elle possible avec une Assemblée nationale coupée en trois ou quatre blocs apparemment irréconciliables ? On a peine à le croire, mais c’est tout ce que la France doit se souhaiter si elle veut cesser sa course folle vers l’abîme. Il faut une « rupture », comme dit Michel Barnier. Pour en finir avec au moins trois « servitudes » auxquelles un vieux connaisseur de la chose économique, Jacques de Larosière, impute notre actuelle débine. D’abord, la « servitude » à un keynésianisme de maternelle, socialisme des imbéciles, au nom duquel on prétend créer de la croissance par la stimulation de la demande, en augmentant toujours plus les dépenses publiques ; ensuite, à une propagande gouvernementale mensongère, célébrant sans arrêt de faux succès dans le but d’endormir les Français au lieu de les alerter ; enfin, à un gauchisme économique infantile et scolaire qui coupe une grande partie des « élites » de la réalité.
« Le déclin français est-il réversible ? » est le titre du nouveau livre de Jacques de Larosière (1), ancien directeur du FMI et ancien gouverneur de la Banque de France, qui donne une sacrée fessée à toute notre classe politique. (…)
Michel Barnier devrait faire sa bible du dernier Larosière, un économiste sans chichis, le contraire d’un idéologue, qui montre que la politique de l’endettement de nos gouvernants depuis la fin du siècle dernier n’a servi qu’à masquer des problèmes de fond auxquels ils ne voulaient pas s’attaquer. Ils craignaient d’être rejetés, les pleutres, par le peuple français qui, abreuvé d’antilibéralisme dès la petite école, a fini par croire que la subvention est, avec la nouvelle taxe pour la payer, la réponse à tout. Or il est possible de réduire nos délirantes dépenses publiques (57 % du PIB), les plus élevées du monde développé, sans toucher à notre patrimoine social. Avec de la volonté, du doigté et de la pédagogie, le déclin ne sera plus une fatalité.
Bonne chance, Michel Barnier !
1. « Le déclin français est-il réversible ? », de Jacques de Larosière (Odile Jacob, 160 p., 17,90 €)
Michel Barnier sera-t-il le chevalier du déclin… réversible ? (lepoint.fr)
👎« L’erreur budgétaire majeure de l’Allemagne emporte toute l’Europe avec elle »
Malgré une économie en berne et des comptes publics sains, l’Allemagne refuse d’augmenter ses dépenses publiques, avec des conséquences pour toute la zone euro, constate Eric Albert, dans sa chronique. (Le Monde, chronique, 11 septembre, article payant)
Extraits :
La France est bien mal placée pour donner des leçons de gestion budgétaire, avec un déficit sans cesse révisé à la hausse, qui devrait atteindre – au moins – 5,6 % du PIB cette année. C’est d’autant plus insatisfaisant que le résultat économique est très médiocre et que la qualité des services publics se dégrade.
Paradoxalement, un autre pays n’est pas en mesure de donner des leçons budgétaires en Europe : l’Allemagne, qui fait l’erreur inverse. Rarement l’argument pour présenter un grand plan de relance n’a été aussi clair. Voilà un pays en stagnation, au modèle économique structurellement affaibli, mais dont les finances publiques sont saines (1,9 % de déficit prévu cette année, 63 % de dette). Il s’agit d’un cas d’école parfait pour augmenter les dépenses publiques.
Politiquement, il n’en est pourtant pas question. Le ministre des finances, Christian Lindner (Parti libéral-démocrate, FDP), refuse de desserrer les cordons de la bourse. Il a la Constitution avec lui : en 2009, l’Allemagne a commis la regrettable erreur d’introduire dans sa loi suprême l’obligation d’un quasi-équilibre budgétaire, avec un déficit structurel maximum de 0,35 % du PIB, sauf en cas de récession. Le gouvernement a tenté de contourner la règle en créant des fonds à part, notamment sur la transition verte. La Cour constitutionnelle a interdit cette approche en novembre 2023. La situation est bloquée, et il faudrait une majorité des deux tiers au Parlement pour retirer la règle du frein à la dette. Impossible en l’état actuel des forces politiques.
« C’est une erreur historique,s’agace Isabella Weber, économiste à l’université du Massachusetts. Cette politique budgétaire a joué un rôle-clé dans la reprise économique médiocre du pays [après la pandémie]. » Depuis le quatrième trimestre 2019, la croissance allemande a été inexistante, à seulement 0,3 %, loin de la France (3,8 %), et surtout des Etats-Unis (9,4 %). (…)
« L’erreur budgétaire majeure de l’Allemagne emporte toute l’Europe avec elle » (lemonde.fr)
Bertille Bayart : «Michel Barnier, une majorité XXS pour relever un défi XXL»
CHRONIQUE – Faut-il se contenter de bouger quelques curseurs pour rendre une copie budgétaire acceptable, ou s’attaquer de front aux problèmes profonds qui minent notre modèle économique et social ? (Le Figaro, chronique, 11 septembre, article payant)
Extraits :
Ce n’est plus un signal d’alarme qui est tiré, c’est un orchestre philarmonique de klaxons qu’on entend maintenant jouer le grand air de l’alerte sur les finances publiques françaises. « Notre situation budgétaire pourrait devenir dangereuse », avertit le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici (Le Parisien). « Nous sommes au bord de la falaise », affirme Édouard Philippe (Le Point). « Les comptes publics sont à vau-l’eau », constate Jacques de Larosière, ancien patron du Fonds monétaire international (FMI). « Il est important de rassurer les marchés », rappelle à la France l’économiste en chef du FMI, Pierre-Olivier Gourinchas (AFP).
La note de la dette tricolore, dégradée en mai, reste « sous pression », a insisté l’agence S&P. Et le salut, cette fois, ne viendra pas de la Banque centrale européenne. « Ce n’est pas son rôle de venir au secours de tel ou tel État », dit le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau (Le Point).
Bienvenue, Monsieur Barnier ! Il revient au nouveau premier ministre et à son gouvernement de redresser en urgence la trajectoire des finances publiques de la France, engagée sur une pente qui, si rien n’est fait, portera le déficit à 5,6 % du PIB en 2024 et à 6,2 % en 2025, selon les dernières estimations de la Direction du Trésor. Il faudra convaincre la Commission européenne que la France sera capable de ramener son déficit sous la fameuse barre des 3 %, si ce n’est en 2027, du moins quelque part entre 2029 et 2031. La dette du pays, mesurée en points de PIB (110 % à fin 2023), va continuer à augmenter sauf à passer d’une situation de déficit primaire (avant paiement des intérêts) de 4,2 % aujourd’hui à un excédent de 1 %, a calculé le Conseil d’analyse économique. L’enjeu n’est cependant ni le culte du chiffre ni l’allégeance à Bruxelles. C’est la maîtrise des volumes des titres de dette d’État que la France doit placer chaque année (285 milliards d’euros pour la seule année 2024, dont 219 milliards placés à fin juillet). La capacité d’absorption des investisseurs est moins infinie que notre faculté à dépenser. Nous sommes extrêmement vulnérables à tout mouvement de défiance : chaque point de pourcentage supplémentaire de taux d’intérêt sur les obligations souveraines coûtera 17 milliards d’euros par an. (…)
Bertille Bayart : «Michel Barnier, une majorité XXS pour relever un défi XXL» (lefigaro.fr)
Haushaltskrise in Frankreich: Michel Barnier muss sein Land vor dem Shutdown bewahren
Paris steht unter Druck, Brüssel zu erklären, wie es seinen Schuldenberg abbauen will. Die künftige Regierung von Premierminister Barnier hat aber schon mit dem laufenden Haushalt ihre Probleme. (NZZ, 11 septembre, article payant)
Extraits :
(…) Mit mehr als 3100 Milliarden Euro Schulden steht Europas zweitgrösste Volkswirtschaft bei den Banken und Investoren tief in der Kreide. Wie das französische Finanzministerium mitteilte, könnte das Defizit in diesem Jahr von 5,1 auf 5,6 Prozent des Bruttoinlandprodukts steigen – das ist weit entfernt von den Schwellenwerten des Stabilitäts- und Wachstumspakts, der von den EU-Staaten verlangt, ihr Defizit unter 3 Prozent zu halten. Mitte Juni hatte die Kommission deswegen ein Vertragsverletzungsverfahren gegen Frankreich (und sechs weitere Mitgliedstaaten) eingeleitet. (…)
Bereits in drei Wochen, am 1. Oktober, muss seine Regierung in der Assemblée nationale einen Haushaltsentwurf für das kommende Jahr vorgelegen. Bei der Bildung seines Kabinetts steht der konservative Gaullist jedoch erst ganz am Anfang, und es ist rätselhaft, wie er einen Sparhaushalt durch ein Parlament bekommen will, in dem der Mehrheit der Abgeordneten herzlich wenig nach Sparen zumute ist.
Zu erwarten ist, dass Barnier eine Minderheitsregierung aus Parteien des Mitte-Lagers und seiner eigenen Partei, den konservativen Républicains, schmieden wird. Das Linksbündnis Nouveau Front populaire (NFP) sieht sich weiter um seinen Wahlsieg betrogen und will Barnier mit einem Misstrauensvotum stürzen. So wird sich der Premierminister voraussichtlich vom rechtsnationalen Rassemblement national (RN) tolerieren lassen. Sowohl die extreme Linke wie auch die extreme Rechte haben sich jedoch in der Vergangenheit wiederholt gegen Ausgabenkürzungen ausgesprochen.
Im Wahlkampf agitierte die Partei von Marine Le Pen heftig gegen die Rentenpläne von Präsident Emmanuel Macron, die eine Anhebung des Mindesteintrittsalters von 62 auf 64 Jahre vorsehen. Und auch bei der geforderten Senkung der Mehrwertsteuer auf Gas, Heizöl und Kraftstoffe wusste sich das RN mit den Linken einig. Massiv will Le Pen zudem in die Sicherheit, in mehr Polizei und Grenzschutz investieren. (…)
Wird Barnier für eine Politik der haushaltspolitischen Vernunft trotzdem Partner finden? In seinem ersten Interview nach seiner Ernennung machte der Premierminister keine Anstalten, die Lage zu beschönigen. Die Franzosen dürften wohl von ihm erwarten, dass er die Wahrheit ausspreche, sagte er, und zur Wahrheit gehöre, dass die Schulden «schwer auf den Schultern unserer Kinder lasten». Eine Erhöhung des Staatsdefizits werde es mit ihm jedenfalls nicht geben. Barnier hatte schon während des Präsidentschaftswahlkampfes 2022 Macrons mühsam erkämpfte Rentenreform unterstützt. Zu «moderaten Anpassungen», deutete er jetzt im Interview an, sei er aber bereit.
Ob das ausreicht, um die Wut des linken Spektrums zu zügeln, ist fraglich. (…)
Kommt es zu keiner Einigung im Haushaltsstreit, könnte Frankreich im schlimmsten Fall ein Stillstand der Regierungsgeschäfte drohen, ein Shutdown, wie man ihn aus den USA kennt. Davor warnte am Wochenende der Präsident des Rechnungshofes, der Sozialist Pierre Moscovici, in einem Interview mit «Le Parisien». Der nächste Haushalt sei zweifellos der «heikelste in der Geschichte der Fünften Republik».
Haushaltskrise in Frankreich: Barnier muss den Shutdown abwenden (nzz.ch)
Jacques de Larosière: «On peut trouver 200 milliards d’économies sur dix ans»
ENTRETIEN – Selon l’ex-gouverneur de la Banque de France, il est possible de réduire la dette sans toucher aux dépenses sociales. Il appelle à un sursaut pour en finir avec les politiques du déni et de la facilité monétaire et budgétaire. (Le Figaro, 9 septembre, article payant)
Extraits:
Alors que le nouveau gouvernement va devoir boucler le budget 2025 de l’État dans les deux semaines qui viennent, le sage de la finance Jacques de Larosière, 94 ans, lance une nouvelle fois un cri d’alarme sur les finances calamiteuses de la France. Après En finir avec le règne de l’illusion financière, l’ex-directeur général du Fonds monétaire international, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, publie Le déclin français est-il réversible? Renverser la table et sortir de la servitude, aux Éditions Odile Jacob. De façon très pédagogique, l’auteur décrypte le mythe de l’argent facile et propose surtout des pistes concrètes pour réduire l’endettement public élevé afin de retrouver des marges de manœuvre pour diriger le pays.
LE FIGARO. – Quels sont les signes du déclin français?
Jacques de LAROSIÈRE. – J’en citerai quatre. Le premier est notre perte de compétitivité économique. En près de trente ans, notre capacité industrielle a fondu d’à peu près 30 % tandis que celle de nos voisins allemands se maintenait. La raison? Le choix de la France pour une politique de la stimulation continue de la demande intérieure et non pas de l’investissement productif. Il en est résulté que nous fabriquons surtout des produits bas de gamme qui n’ont pu résister, lors de l’ouverture des frontières, à la concurrence des pays à faibles coûts de main-d’œuvre. Notre industrie française s’est délocalisée massivement à l’étranger. Et ceci, de façon beaucoup plus prononcée qu’en Allemagne, où les syndicats ont souvent accepté de réduire leurs salaires pour renforcer les entreprises en difficulté.
Le second symptôme est la permanence et l’importance depuis vingt ans du déficit de la balance commerciale, liées à la hausse de produits importés en raison du phénomène précédent.
Troisième indice, auquel j’accorde beaucoup d’importance, c’est l’éducation. Les statistiques de l’OCDE montrent le déclin, de manière extrêmement dangereuse, de notre système éducatif depuis une vingtaine d’années. Par rapport à la France, l’Allemagne a des professeurs mieux rémunérés et plus nombreux.
Enfin, quatrième manifestation: l’état déplorable de nos finances publiques. La dette publique française a plus que doublé depuis vingt ans, passant de 50 % de la production nationale (PIB) à 112 % aujourd’hui. Si elle est voisine de celle de l’Italie ou de la Belgique, elle est près du double de celle de l’Allemagne (près de 60 %). N’oublions pas que le budget, c’est d’une certaine manière la synthèse stratégique d’une nation.
Comment en est-on arrivé là?
La doxa pensait, dans une période encore récente de très bas taux d’intérêt liée à la politique de la Banque centrale européenne, qu’emprunter favoriserait la croissance. État, comme entreprises privées, s’en sont ainsi donné à cœur joie. Le problème est que l’on ne peut emprunter indéfiniment parce que le montant de la dette, par définition, s’accroît. Aujourd’hui, les taux d’intérêt sont plus hauts qu’au temps de l’argent facile. Entre le niveau élevé de l’endettement public, qui pourrait dépasser à l’avenir 120 %, et la hausse ces dernières années des taux d’intérêt, le coût de la charge de la dette est déjà supérieur au budget de la Défense nationale! (…)
Faut-il, comme certains, imputer cette situation à l’Europe, l’entrée de la France dans la zone euro en 2002 empêchant toute dévaluation?
Certainement pas. Ce sont justement les dévaluations répétées du passé du franc qui ont appauvri le pays et ont été le résultat de politique inflationniste. Il est temps que les dépenses de consommation, de fait subventionnées, laissent la place à l’augmentation de crédits pour la recherche, l’Éducation nationale…
L’Europe est toutefois fautive. Elle n’a pas été capable de faire respecter le plafond de la dette fixé à 60 % du PIB de la part des pays indisciplinés, comme la France et même l’Allemagne en 2003. Depuis plus de vingt ans, pas une seule fois la règle n’a été honorée par l’ensemble des États membres. Avec un commissaire par pays, la Commission européenne est devenue une collection de représentants nationaux, soucieux de promouvoir la politique de son pays, plus qu’un exécutif véritable.
Réduire les dépenses publiques est pour vous une mission possible…
Bien sûr. Je crois réaliste de trouver 200 milliards d’économies sur une période de dix ans. (…) Elles nécessitent, surtout, de s’attaquer au sureffectif de la fonction publique. Rappelons que la France compte 85 fonctionnaires pour 1000 habitants, contre 56 en Allemagne. Une réduction graduelle des effectifs, via le non-remplacement de tous les départs à la retraite, permettrait de réduire le surcoût estimé à 75 milliards d’euros.
(…) Comment préconiser le maintien de la réforme de la retraite voulue par Emmanuel Macron quand les Français ne cessent de la contester?
Ce n’est pas parce que les gens sont prêts à descendre dans la rue que les recommandations des experts ne sont pas valables. N’oublions pas que l’espérance de vie croît et que la moyenne européenne de l’âge légal de départ à la retraite est de 67 ans. (…) Oui, les Français ne sont pas friands de réformes, mais on leur a seriné pendant des années que l’argent était facile. Et, encore récemment, avec le fameux «quoi qu’il en coûte». Je demande juste aux hommes politiques de raisonner juste. Sans en appeler à un de Gaulle, qui avait compris qu’une nation ne tient pas debout sans un budget raisonnable, cela ne doit pas être difficile à trouver. (…)
À Michel Barnier, qui vient d’être nommé premier ministre, quelle première recommandation feriez-vous?
Puisque Michel Barnier juge important de réduire la dette publique, je recommanderais deux choses. Premièrement, d’arrêter de faire croire aux Français que tout peut se régler par de l’endettement supplémentaire. Deuxièmement, je me tournerais vers la Cour des comptes pour lui demander une analyse systématique de tous les budgets publics. Et de s’interroger, comme le font les pays scandinaves, si les budgets doivent être automatiquement reportés d’une année sur l’autre.
Il est très regrettable que les rapports, perspicaces, de la Cour des comptes ne soient pas suivis par les politiques. Si ses recommandations avaient été entendues, sans doute la France se porterait-elle mieux.
Jacques de Larosière: «On peut trouver 200 milliards d’économies sur dix ans» (lefigaro.fr)
«Budget: Michel Barnier à l’assaut de l’Everest»
L’ÉDITORIAL DU FIGARO – Malgré toutes ses bonnes intentions, on imagine mal le premier ministre décréter un grand soir budgétaire qui serait aussitôt censuré. (Le Figaro, édito, 9 septembre, article payant)
Extraits:
Tous les montagnards, dit-on, caressent au fond d’eux-mêmes le rêve ultime de gravir l’Everest. C’est à peu de chose près le défi politique qui s’impose à Michel Barnier, au moment de s’attaquer au budget 2025. D’un côté, le dérapage incontrôlé des finances publiques ces derniers mois exige de toute urgence un plan de redressement massif: censé se réduire cette année, le déficit, déjà abyssal (5,5 % du PIB!), se creuse désormais dans des proportions jamais vues. De l’autre, les trois quarts des députés nouvellement élus soutiennent des programmes où la dépense inconsidérée tient lieu de politique économique : abrogation de la réforme des retraites, augmentation des salaires, embauches dans la fonction publique… Autant demander à un père Fouettard de faire régner l’ordre dans une foire à la saucisse. (…)
Dans leur monde parallèle, les parlementaires élus en juillet pensent avoir raison contre tous. Il est donc fort à craindre que l’on s’en tienne aux tièdes potions qui nous ont conduits où nous en sommes: aucun plan d’économies, mais un recours pavlovien à l’impôt, en commençant par les entreprises. Et les mêmes causes produiront les mêmes effets.
«Budget: Michel Barnier à l’assaut de l’Everest» (lefigaro.fr)
La BCE accusée d’étouffer la croissance en Europe
La Banque centrale européenne (BCE) pourrait baisser ses taux d’intérêt lors de sa réunion, jeudi. Une décision jugée trop tardive. (Le Monde, 9 septembre, article payant)
La BCE accusée d’étouffer la croissance en Europe (lemonde.fr)
François Villeroy de Galhau : « Ce n’est pas le rôle de la BCE de venir au secours de tel ou tel État »
EXCLUSIF. Le gouverneur de la Banque de France appelle le futur gouvernement à trouver des compromis budgétaires pour redresser nos finances publiques. (Point, entretien, 4 septembre, article payant)
Extraits:
Quel serait le meilleur profil du prochain gouvernement ?
La Banque de France est indépendante ; elle sert l’intérêt général et n’a pas à faire de commentaire partisan. En réponse à ces élections inattendues, les Français se sont mobilisés en masse ; ils ont exprimé des attentes fortes de respect, de justice et d’ordre ; ils ont appelé à une forme d’union républicaine, y compris pour agir. Ce sont les responsables politiques, démocratiquement légitimes, qui doivent maintenant répondre à ces attentes et passer à l’action. J’observe simplement que nous avons le choix : soit retomber dans le syndrome d’Astérix et la zizanie si bien décrit par Goscinny et Uderzo il y a plus de cinquante ans, soit nous unir comme nous avons su le faire pour étonner le monde avec les Jeux de Paris. La plupart de nos partenaires européens pratiquent de telles coalitions après les élections. Le dialogue sur le fond, les compromis pour des résultats concrets, cela peut marcher en France aussi. Et respecter les Français, c’est également leur dire la vérité et rappeler les exigences du réel.
(…) Voulez-vous dire que la priorité économique du prochain gouvernement est d’assurer la soutenabilité de nos finances publiques ?
Ce n’est pas la seule priorité, mais le rendez-vous budgétaire est évidemment clé. La crédibilité suppose ici la vérité et un certain nombre de compromis, qui ne sont pas des solutions de facilité. Pour être elle-même respectée et écoutée en Europe, la France doit remplir ses engagements européens. Mais c’est aussi notre intérêt national : la charge de la dette publique nous coûte de plus en plus cher, elle est passée de près de 30 milliards d’euros en 2020 à plus de 80 milliards en 2027. Ces 50 milliards supplémentaires que nous devrons dépenser chaque année pour payer le passé, c’est plus que le budget actuel de la défense ! Nous ne pouvons pas continuer dans cette direction : il y va de notre liberté d’action aujourd’hui et plus encore de celle de nos enfants demain. Les règles du jeu européennes supposent un redressement sur le déficit « primaire » (hors intérêts de la dette) de près de 20 milliards d’euros par an. C’est exigeant, mais c’est nécessaire et c’est possible si nous inscrivons notre effort dans la durée : alors nous diminuerons le ratio de la dette – comme le font déjà tous nos grands voisins européens – et nous reviendrons progressivement sous 3 % de déficit. Pas nécessairement cependant dès 2027 : il faudra un compromis réaliste sur le calendrier, compatible avec le nouveau Pacte européen. (…)
Certains pensent pourtant que la dette n’est pas un problème, et que la BCE viendra toujours à notre secours…
L’euro est un grand atout, soutenu par plus des trois quarts des Français. Mais ce n’est pas le rôle de la BCE de venir au secours de tel ou tel État. Le traité interdit même le financement monétaire des déficits, à juste titre car c’est un élément central du succès de la lutte contre l’inflation.
Budget : le gouvernement en partance prescrit une potion amère au suivant
Alors que le déficit est en plein dérapage, Bercy fait connaître ses pistes pour réaliser des dizaines de milliards d’économies. (Le Figaro, 4 septembre, article payant)
Extraits:
Dans cette atmosphère crépusculaire, le gouvernement démissionnaire n’a plus, au fond, qu’à soigner sa sortie. Avant de passer de la lumière à l’ombre, Bruno Le Maire semble en tout cas décidé à faire savoir qu’il s’est battu « comme un chien », une formule de son entourage, pour éviter au pays le dérapage budgétaire qui se profile, malgré tout, à l’horizon. Ce lundi, Bercy a transmis aux députés de la commission des finances plusieurs documents censés leur permettre de commencer à travailler sur le budget 2025, qui doit être présenté par le nouveau gouvernement dans quelques semaines. Dans ces documents, figurent notamment des nouvelles plus qu’alarmantes sur la situation des finances publiques.
Une note du Trésor alerte sur le fait que, si rien n’est fait, le déficit public de cette année pourrait s’établir autour de 5,6 % du PIB, bien loin de la cible de la trajectoire budgétaire (5,1 %) et en dégradation par rapport à l’an dernier (5,5 %). En cause : des recettes fiscales en berne et une dynamique de dépenses inattendue du côté des collectivités territoriales. Alors que la France est déjà sous le coup d’une procédure pour déficit excessif à Bruxelles, un tel dérapage serait pour le moins fâcheux.
Pour l’éviter, « Bruno Le Maire a mis en place des leviers qui permettraient de respecter la cible de déficit en 2024 », plaide son entourage. Le ministre préconise notamment de mettre en place des mesures fiscales rétroactives prévues dans le projet de loi de finances 2025 sur les superprofits des énergéticiens et sur les rachats d’actions. Si le prochain gouvernement choisissait d’appliquer ces taxes – qui ne manqueront pas de faire polémique -, cela pourrait rapporter jusqu’à 3 milliards aux caisses de l’État. Mais, au-delà de ces mesures de recettes, le plan de Bercy pour respecter la trajectoire budgétaire s’appuie surtout sur des coupes budgétaires, des dizaines de milliards de coupes budgétaires. (…)
Budget : le gouvernement en partance prescrit une potion amère au suivant (lefigaro.fr)
Bertille Bayart: «La France à la dérive»
L’état des lieux des finances publiques est catastrophique. C’est plus qu’un dérapage, c’est un abandon. (Le Figaro, 4 septembre, chronique, article payant)
Extraits:
(…) Or, il y a des conséquences à ne pas avoir de gouvernement, à ne pas faire marcher ce qui existe. Ces conséquences se lisent dans l’état des lieux des finances publiques transmis lundi par Bercy aux parlementaires. La France n’est pas un sous-marin, c’est un paquebot à la dérive. Le déficit est en train de déraper très dangereusement.
Du fait de rentrées fiscales moindres que prévues et de dépenses supérieures, nous pourrions finir l’année sur un déficit de 5,6 %, soit 0,5 point de plus que la cible, elle-même scandaleusement élevée, de 5,1 % jusqu’ici affichée. Pour l’an prochain, à politique inchangée, la prévision ressort à 6,2 %. Il n’y a plus aucun événement exceptionnel qui justifie un tel tableau. C’est un abandon.
Quelles seront les conséquences de cette situation délabrée ? La dette va, encore, s’envoler. Elle pourrait atteindre 124 % du PIB en 2028, estime le Trésor. Oublions nos engagements européens, et l’hypothèse d’un retour sous 3 % du PIB de déficit en 2027. Le seul objectif encore valable, à la fois à notre portée et impératif, consiste, selon l’expression employée par Agnès Pannier-Runacher (Le Figaro du 29 août) à assurer « la capacité à financer dans de bonnes conditions nos dépenses publiques ».
La deuxième conséquence est que, quelle que soit l’issue des tractations élyséennes, une hausse d’impôts est inévitable. La couleur du gouvernement à venir en dira l’ampleur. Mais le monde économique se prépare déjà à une hausse du taux de l’impôt sur les sociétés, à un coup de rabot sur le crédit d’impôt recherche et à un alourdissement de la fiscalité du patrimoine et des hauts revenus. L’incertitude porte davantage sur un éventuel programme de réduction de la dépense publique. (…)
L’abandon des finances publiques est enfin un sabordage. Que peut aujourd’hui opposer Emmanuel Macron aux promoteurs d’une autre politique, déterminés à déconstruire la politique de l’offre pour engager le pays dans le mirage d’une relance de la demande financée à grands coups de matraquage fiscal ? Le redressement des finances publiques devrait être le premier objectif d’un gouvernement d’union républicaine, entièrement tendu vers l’évitement de la crise financière qui nous guette.
Mais le débat rendu fou laisse croire que la France peut envisager de revenir sur la réforme des retraites, créer de nouvelles gratuités, augmenter les salaires sans avoir trouvé la clé de la productivité, inventer du pouvoir d’achat sans avoir créé de richesse collective supplémentaire. N’ayant jamais pris de front le sujet budgétaire, Emmanuel Macron risque d’avoir détruit son bilan économique. L’un ne va pas sans l’autre. Le croire est une illusion. Le président de la République devrait le savoir : « Le monde du pouvoir bâtit des constructions imaginaires. » C’est lui qui l’a écrit (Révolution, 2016).
Bertille Bayart: «La France à la dérive» (lefigaro.fr)
Ces documents de Bercy qui révèlent le risque d’un sévère dérapage du déficit public dès 2024
Après l’accident à 5,5% du PIB en 2023, le déficit pourrait encore se dégrader à 5,6% cette année, si rien n’est fait. Un élément qui complique encore le casse-tête du budget. (Le Figaro, 3 septembre, article payant)
Extraits:
Si le gouvernement démissionnaire marche encore sur des œufs, c’est que le sujet est sensible et le moindre faux pas pourrait devenir une sortie de route, notamment pour les deux ambitieux futurs ex-ministres qui dirigent Matignon et Bercy. Et pour cause, les documents envoyés ce lundi (une synthèse des plafonds de dépenses pour chaque ministère, des notes du Trésor sur les indicateurs macroéconomiques, des rapports sur les dépenses des collectivités territoriales…) font état d’un considérable dérapage des finances publiques… dès cette année. Selon nos informations, une note de la Direction du Trésor datée de cet été alerte sur le risque d’un véritable accident budgétaire. Ainsi, si rien n’était fait, explique l’administration, le déficit public pourrait s’établir autour de 5,6 % de PIB, soit bien au-delà des 5,1 % prévus pour 2024 dans la trajectoire budgétaire du gouvernement. Une réédition de la catastrophe du début d’année quand Bercy a annoncé que le déficit de 2023 avait atteint 5,5 % du PIB au lieu des 4,9 % prévus. Dans les deux cas, le dérapage représente une quinzaine de milliards d’euros.
Cette fois, la dégradation est à mettre notamment sur le compte de l’explosion inattendue des dépenses des collectivités territoriales qui, cette année, dépasseraient les plafonds prévus dans la trajectoire budgétaire de 16 milliards d’euros, selon un document qui a été transmis lundi soir aux élus de la commission des finances. Du côté des recettes, les nouvelles sont plus floues mais tout aussi sombres, « nous étions encore dans les clous en juillet, nous sommes en dessous en août », entre autres du fait de rentrées d’impôt sur les sociétés et d’impôt sur le revenu à la peine. Bref, les voyants budgétaires sont au rouge et la pression politique monte. (…)
Alors que la France est sous le coup d’une procédure pour déficit excessif à Bruxelles, le prochain gouvernement va devoir tirer sur les freins d’urgence s’il veut éviter – ou tempérer – la catastrophe annoncée. (…)
Les banques centrales détruisent nos économies
Les politiques monétaires des banques centrales constituent l’intervention gouvernementale la plus perverse. Leurs conséquences sont désastreuses, durent très longtemps et les gens ne les perçoivent pas comme des problèmes ou ne comprennent pas les dommages qu’elles causent. La politique monétaire (expansion monétaire et taux d’intérêt artificiellement bas) a cinq conséquences principales qui nuisent au niveau de vie général. (Contrepoints, 20 août, opinion, article payant, article original paru dans Mises Institute)
Extraits:
C’est la conséquence la plus évidente, et pourtant, elle est très mal comprise par les électeurs. Si l’argent qui circule effectivement dans l’économie (c’est-à-dire M1 et M2, ou pour une meilleure perspective, la véritable masse monétaire) augmente, l’inflation des prix a tendance à augmenter. L’expansion de la masse monétaire détruit le pouvoir d’achat des consommateurs et rend les gens plus pauvres au fil du temps. (…)
Les interventions des gouvernements par l’intermédiaire des banques centrales sont les plus destructrices et pourtant les moins bien comprises par la majorité. Il s’agit d’un problème suffisamment grave pour être traité seul, mais il est encore plus difficile de le faire lorsque les gens ne perçoivent pas les dégâts qu’il provoque. Les banques centrales sont la source de la plupart des maux de l’économie.
Les banques centrales détruisent nos économies – Contrepoints
«In einer Währungsunion, in der keiner sparen will, sind die Sparer die Dummen», sagt der Ökonom und Autor Daniel Stelter
Aus Sicht von Stelter sind die hohen Schulden einer der Gründe für die Börsenturbulenzen. Der Ökonom befürchtet eine Wohlstandserosion in der Euro-Zone – und sagt, wie Deutschland wieder zum wirtschaftlichen Zugpferd werden könnte. (NZZ, 20 août, opinion, article payant)
Extraits:
(…) Sie erwarten also eine Erholung an der Börse, bevor es dann zum Crash kommt?
Das weiss niemand. Ich schaue mir die Situation einfach an, wie sie ist. Das Finanzsystem hat mit dem jetzigen Zinsniveau schon Probleme, das sieht man an den Staatsfinanzen. Der französische Finanzminister Bruno Le Maire hat beispielsweise gesagt, die Zinsausgaben des französischen Staats seien massgeblich schuld daran, dass das Haushaltsdefizit steige. Und mit jedem Monat, in dem die Zinsen höher bleiben, wird das Problem grösser, weil alte Anleihen auslaufen und neue Schulden mehr kosten. Hinzu kommt, dass die Produktivitätszuwächse in der Wirtschaft unbefriedigend sind. (…)
Wie ist die Lage in Europa?
In Europa gibt es eine solche Trendwende definitiv nicht. Hinzu kommt noch die demografische Entwicklung. Europa schrumpft, in den USA ist die Vergreisung nicht ganz so schlimm. Trotzdem haben beide Regionen das Problem, dass sie für diese alternde Gesellschaft nicht vorgesorgt haben. Das ist kein gutes Szenario. (…)
Sie rechnen also mit dauerhaft höheren Inflationsraten?
Wir leben in einer Welt, in der die Schulden nur dann nominal zurückgezahlt werden können, wenn wir sie über Inflation entwerten. Für höhere Inflation braucht es nicht einmal eine Eskalation im Nahen Osten oder einen Ölpreis von 200 Dollar – wenn das eintritt, ist das Problem noch viel grösser. Auch die Höhe der derzeitigen Aktienkurse und Immobilienpreise ist nur dann gerechtfertigt, wenn man davon ausgeht, dass die Zinsen fallen.
Besteht aufgrund der hohen Verschuldung nicht auch die Gefahr von Staatsbankrotten?
Hier ist die Antwort ganz klar: Die Staaten werden nicht pleitegehen, weil die Notenbanken sie finanzieren. Und das wird auch in der Euro-Zone passieren. In einer Währungsunion, in der keiner sparen will, sind die Sparer die Dummen. Der Euro hat nur mit einer strukturell höheren Inflation eine Chance, zu überleben. Das Vermögen von Sparern im Euro dürfte sich also schleichend entwerten. (…)
Besteht denn nicht die Chance, dass die Wirtschaft aus der Schuldenmisere herauswächst?
Glauben Sie mir, ich persönlich würde mir nichts sehnlicher wünschen als das. Um das Schuldenproblem zu lösen, müsste das Wachstum aber sehr, sehr hoch sein. Mit höheren Steuern lässt es sich auch nicht lösen. In der Euro-Zone dürfte es folglich auf eine Inflationierung hinauslaufen.
Das heisst dann im Umkehrschluss, dass der Euro immer stärker zu einer Weichwährung wird.
Diesen Weg hat der Euro längst eingeschlagen. In Europa steht die Schaffung von Wohlstand und dessen Erhaltung nicht auf der politischen Agenda, weder in Deutschland noch in anderen EU-Staaten. Das wird sich bitter rächen. Je weiter sich die EU von ihrem Versprechen entfernt, den Wohlstand der Menschen zu nähren, desto grösser wird das Risiko politischer Spannungen. (…)
Schuldenkrise, Börse, Inflation & Euro: Daniel Stelter zu den Folgen für Anleger (nzz.ch)
«Budget 2025: après les JO, le cruel retour sur terre»
Alors qu’il faut trouver 20 à 30 milliards d’euros d’économies, qui peut imaginer pouvoir constituer une majorité avec la rigueur budgétaire pour programme? (Le Figaro, 14 août, éditorial, article payant)
Extraits:
(…) D’autres que nous ayant connu pareille situation, dira-t-on, s’en sont fort bien accommodés. La Belgique, privée de gouvernement pendant deux ans, y a survécu sans drame en parvenant à réunir des coalitions de circonstance. Soyons lucides : au point de tension où se trouve la vie politique chez nous, il faudrait un miracle pour répliquer le modèle. Voilà bien tout le problème : contrairement à nos voisins, l‘état d’urgence financier dans lequel est plongée la France exige davantage qu’une gestion des seules affaires courantes. Mois après mois, année après année, la dette s’accumule (près de 3200 milliards) au rythme du creusement du déficit (5,5 % du PIB l’an dernier !), sous le regard effaré de tous les observateurs – Cour des comptes, Commission européenne, Fonds monétaire international, agences de notation… -, qui tirent un à un tous les signaux d’alarme imaginables.
Aux yeux de tous, nous sommes en train de perdre le contrôle de nos finances publiques. La crise politique née de la dissolution ajoute encore à la dramaturgie. On doute que le redressement qu’il n’a pas été possible d’entreprendre en temps normal puisse l’être dans la chienlit actuelle. Alors qu’il faut trouver 20 à 30 milliards d’euros d’économies, qui peut imaginer pouvoir constituer une majorité avec la rigueur budgétaire pour programme ? Pour l’heure, entre ceux qui ont pour obsession d’abroger la réforme des retraites et ceux qui veulent augmenter les impôts, on peine à entendre des voix pour tailler dans la dépense publique.
«Budget 2025: après les JO, le cruel retour sur terre» (lefigaro.fr)
👎Pourquoi il faut se méfier d’une politique budgétaire très restrictive
LA CHRONIQUE DE PATRICK ARTUS. Une réduction brutale des dépenses publiques fait apparaître un recul durable de l’activité et de l’emploi et une dégradation structurelle de l’économie. (Le Point, 3 août, tribune, article payant)
Extraits:
l est important d’analyser les conséquences d’une politique budgétaire très restrictive qui a été menée dans le passé, en particulier en Espagne, au Portugal, en Grèce et qui est menée aujourd’hui en Argentine et qui était prévue en France – avec une réduction des dépenses publiques de 20 milliards d’euros par an.
Le premier épisode de réduction massive du déficit public est la période de la crise de la zone euro de 2010 à 2014. L’Espagne a réduit son déficit public de 11,6 % du PIB en 2012 à 5,3 % en 2015 et 2,6 % en 2018. Le Portugal a réduit son déficit public de 11,4 % du PIB en 2010 à 4,4 % en 2015 et 0,3 % en 2018. La Grèce a réduit son déficit public de 15,2 % du PIB en 2009 à 5,9 % en 2015 et a un excédent budgétaire de 0,9 % en 2018.
En apparence, ces trois pays ont retrouvé – en 2014 pour l’Espagne, en 2016 pour le Portugal et en 2018 pour la Grèce – une bonne santé économique : retour à la croissance du PIB et de l’emploi, baisse du chômage. Cependant, il aura fallu un temps très long, après une cure d’austérité budgétaire, pour retrouver le niveau initial de production.
L’austérité budgétaire s’accompagne, dans ces trois pays, d’un recul des dépenses publiques utiles à la croissance : dépenses de santé, d’éducation, de recherche et de développement – sauf en Grèce –, dépenses d’investissement public. Il n’est donc pas étonnant de constater que, depuis 2012, la productivité du travail stagne au Portugal et recule en Espagne et en Grèce, que les scores Pisa – l’étude internationale de l’OCDE scrute les systèmes éducatifs – de ces trois pays baissent, fortement en Grèce. (…)
Au total, même si les économies de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce se redressent aujourd’hui, il a fallu au moins huit ans pour que ces pays retrouvent leur niveau de PIB de 2008, au moins treize ans pour que ces pays retrouvent leur niveau d’emploi de 2008. Les coupes dans les dépenses publiques utiles ont dégradé la qualité du système éducatif, fait reculer ou stagner la productivité, et poussé à une spécialisation productive bas de gamme.
Il est à craindre que l’Argentine connaisse le même type d’évolution. (…)
Au total, les politiques d’austérité budgétaire font apparaître un recul durable de l’activité et de l’emploi, et plus grave encore, une dégradation structurelle de l’économie. Peut-on tirer de ces exemples – l’Espagne, le Portugal, la Grèce, l’Argentine – des enseignements concernant la France ?
D’une part, s’il n’y a pas de pression des marchés financiers, il faut éviter de réduire brutalement les dépenses publiques et il faut privilégier une approche progressive de la réduction du déficit public. D’autre part, il faut absolument éviter de réduire les dépenses d’investissement public, d’éducation, de recherche et de développement puisque cette réduction implique le recul de la productivité et le passage à une spécialisation productive défavorable, peu sophistiquée.
Pourquoi il faut se méfier d’une politique budgétaire très restrictive (lepoint.fr)
Bientôt réunis à Jackson Hole, les banquiers centraux seront-ils au chevet de la croissance mondiale ?
Le CAC 40 se tasse alors que le dynamisme de l’économie donne des signes de faiblesse. Comment les banques centrales vont-elles réagir ? Le sommet de Jackson Hole, qui commencera le 22 août, pourrait donner des indications. (Le Figaro, 31 juillet, libre accès)
Extrait:
(…) Jackson Hole, un rendez-vous incontournable
Entre-temps, un événement majeur se tiendra dans l’État américain du Wyoming: le «symposium» de Jackson Hole, qui réunira une bonne centaine de banquiers centraux, décideurs politiques et économistes du 22 au 24 août. Le thème de cette grand-messe, qui en 2023 était «Les changements structurels de l’économie mondiale» et donne lieu à des débats approfondis, sera cette année davantage dans le vent: «Réévaluer l’efficacité et la transmission de la politique monétaire».
Alors que le chômage reste bas aux États-Unis et que l’inflation recule doucement, voilà un beau sujet de réflexion pour Jerome Powell ! Autre thème potentiel: le résultat de l’élection présidentielle américaine influera-t-il sur les décisions de la Fed? Grâce à l’indépendance dont jouit la banque centrale, tel n’est historiquement pas le cas, mais il n’en reste pas moins que Jerome Powell est plus proche des Démocrates que des Républicains. Bref, le patron de la Fed laissera-t-il transparaître, ou du moins deviner, ses intentions? Et du côté de la BCE, le premier assouplissement de juin en appellera-t-il d’autres? À suivre.
Budget, le jeu dangereux d’Emmanuel Macron
Affaibli par la dissolution qui s’est révélée un pari hasardeux, le chef de l’Etat tergiverse et crispe un peu plus chaque jour la scène politique. C’est problématique car si cette situation d’attente devait dégénérer en crise budgétaire, les Français seraient les premiers perdants (Le Monde, 27 juillet, édito, libre accès)
Excerpt:
(…) Au fil de rapports alarmants, la Cour des comptes a planté le décor : avec près de 3 200 milliards d’euros de dette publique, qui représentent plus de 110 % de sa richesse nationale, la France est le troisième pays le plus endetté de la zone euro. Elle peine, contrairement à ses voisins, à trouver le chemin du désendettement. (…)
Or, la campagne des élections législatives a été le théâtre de multiples promesses qui rendent l’atterrissage post-électoral particulièrement périlleux. Arrivé en tête du second tour des élections législatives, tardivement doté d’une candidate à Matignon, l’économiste Lucie Castets, le Nouveau Front populaire (NFP) revendique le pouvoir pour abroger la réforme des retraites, augmenter le point d’indice des fonctionnaires, revaloriser les minima sociaux et augmenter la fiscalité sur les plus riches. (…)
Sous prétexte de profiter de la trêve olympique pour que les esprits se calment, Emmanuel Macron joue un jeu dangereux. Affaibli par la dissolution qui s’est révélée un pari hasardeux, le chef de l’Etat se comporte pourtant comme s’il était encore faiseur de rois. Au lieu de se détendre, la scène politique se crispe un peu plus chaque jour, les rancœurs s’affirment. C’est problématique car si la crise politique devait dégénérer en crise budgétaire et financière pour cause de majorité introuvable, les Français seraient les premiers perdants. Encore faudrait-il avoir le courage de le leur dire.
Budget, le jeu dangereux d’Emmanuel Macron (lemonde.fr)
Attention, un déficit peut en cacher un autre
Seul pays européen à enregistrer un déficit de sa balance courante, la France affiche aussi une position extérieure de plus en plus négative (Le Point, 26 juillet, édito, article payant)
Extraits :
« La France est une cigale, nous achetons plus que nous ne produisons, et cela pèse sur notre croissance comme sur notre position extérieure nette. » C’est avec La Fontaine que le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau a choisi de résumer le rapport annuel sur la balance des paiements. De lecture indigeste mais édifiante, celui-ci illustre, à grand renfort de statistiques et de tableaux, les profonds déséquilibres économiques du pays, son manque de compétitivité, la dérive de ses comptes publics et son extrême vulnérabilité financière.
Après 31,1 milliards d’euros en 2022, la France a enregistré l’année dernière un déficit de 28,1 milliards d’euros de ses transactions courantes, lesquelles regroupent les échanges de biens, de services et les transferts de revenus de notre pays avec le reste du monde. La France est le seul grand pays de la zone euro à présenter un déficit de sa balance courante, le gouverneur parlant pudiquement d’« une faiblesse singulière ». L’Allemagne a, il est vrai, dégagé l’année dernière un excédent courant de 243 milliards d’euros, les Pays-Bas de 103 milliards, l’Espagne de 37 milliards et l’Italie, avec laquelle la France aime pourtant généralement bien se comparer pour se consoler, de 11 milliards. (…)
Les capitaux « immigrés » ont heureusement permis de financer le déficit courant avec des entrées nettes de 35,7 milliards d’euros, comprenant des achats de 133 milliards d’euros d’obligations assimilables du Trésor par les investisseurs étrangers, nos sauveurs anonymes. Ils en détenaient fin 2023 un stock total de 1112,7 milliards d’euros, disposant ainsi d’une arme de destruction massive qu’ils risquent d’utiliser dès la rentrée si le budget manque de sérieux et de rigueur. À en juger par les folies dépensières qu’ils continuent de proposer, nos élus n’ont dans leur immense majorité toujours pas pris conscience de cette menace existentielle.
L’enseignement le plus inquiétant du rapport annuel sur la balance des paiements reste toutefois que « la position extérieure nette de la France » à l’égard du reste du monde, c’est-à-dire la différence entre la valeur de ce que nous détenons à l’étranger et celle de ce que les étrangers détiennent chez nous, devient de plus en plus négative. La dette publique nourrissant la dette extérieure, cette position, reflet de la richesse réelle d’un pays, s’est dégradée de 133,5 milliards d’euros en 2023 pour s’établir à – 792,9 milliards, soit 28,1 % du PIB. Il n’y a même pas dix ans, fin 2005, elle était de seulement -35 milliards, soit moins de 2 % du PIB.
À titre de comparaison, le Japon affichait en 2023, selon le FMI, une position extérieure positive de 3 321 milliards de dollars, l’Allemagne de 3 205 milliards, la Norvège de 1 503 milliards et la Suisse de 896 milliards. Non seulement la France ne fait pas partie de ces bienheureuses nations créancières, mais elle figure désormais parmi les plus débitrices au monde avec les États-Unis (-19 770 milliards de dollars), le Royaume-Uni (-1 050 milliards) ou encore le Brésil (-975 milliards). Face au risque croissant de crise de balance des paiements, le futur gouvernement va devoir sérieusement envisager, le cœur lourd, de vendre aux enchères la tour Eiffel, la Joconde et le château de Versailles.
Attention, un déficit peut en cacher un autre (lepoint.fr)
Le mur des réalités va obliger la classe politique à s’entendre… sinon la contrainte budgétaire va tout faire sauter
Depuis cette funeste décision de dissoudre l’Assemblée nationale, le pays est plongé dans un débat politique délirant, mais dont il faudra bien sortir, parce qu’il va falloir présenter un budget avant la fin de l’année ; sinon, le pays va s’effondrer. (Atlantico, 21 juillet, trois gratuites / sem.)
Extraits :
(…) En fait, les choses ne sont pas encore très claires, mais les analystes du MEDEF par exemple ont bien compris depuis les élections européennes que la représentation nationale était coupée en deux. D’une part, des extrêmes à droite et à gauche qui défendent un projet très radical avec un programme de réformes qui est inapplicable dans le cadre du système d’économie de marché actuel. Le programme défendu par La France Insoumise notamment débouche sur des risques de révolution et de guerre civile, parce qu’il s’affranchit de toutes les contraintes économiques et financières. Le programme promet monts et merveilles en termes de revenus et de modèle de développement, mais ne dit jamais comment il sera réalisé et financé.
En bref, La France Insoumise reprend les principes d’une relance par la demande dans un cadre et un environnement qui ne lui correspondent plus. Ce dont l’économie européenne et mondiale a besoin aujourd’hui, ce sont des outils d’une relance par l’offre. Contrairement à ce que proclament Jean-Luc Mélenchon et ses amis, l’économie moderne n’a pas besoin d’un choc de demande, mais d’un choc d’offre. Il faut produire, innover et inventer pour créer de la richesse, et ensuite on pourra la redistribuer.
Alors, de deux choses l’une : soit les extrémistes (et notamment l’extrême gauche) ne savent pas comment l’économie fonctionne et leurs électeurs finiront par s’apercevoir qu’on leur raconte des histoires, soit les extrémistes savent que leurs logiciels sont obsolètes et faux, mais ils ne le disent pas parce qu’ils espèrent un bouleversement complet du système. Donc, ils ne feront aucun effort de pragmatisme puisque leur projet est de provoquer une révolution. (…)
Le budget est le principal mur des réalités qu’un gouvernement doit affronter. Un gouvernement, quel qu’il soit, doit donc se trouver une majorité pour présenter son budget. Ni l’extrême gauche avec son programme, rien que son programme, ni l’extrême droite, plus préoccupé par le récit national que par la performance économique ne pourront s’affranchir du mur des réalités, lequel lui sécurise des financements. Sans financements, le gouvernement explose. (…)
Big spenders : Can America afford its debts?
Public debt stands at 98% of GDP. Neither Democrats nor Republicans are helping » (The Economist, 21 juillet, graphs, article payant)
Extraits :
Regardless of who wins America’s presidential election in November, the next four years are likely to make a bad fiscal situation worse: net government debt has ballooned to 98% of gdp, up from 40% in 1990. Neither the Democrats nor the Republicans have meaningful plans to tackle it. Below are three charts to help make sense of what the runaway borrowing means in practice. (…) (…)Cuts in spending to bring down the debt would be painful. Baby boomers are retiring (though not those who work in Congress) and an ageing population will rely more on government services, such as Medicare and other social benefits. America’s defence spending, the transition to renewable energy and industrial policy will also add to the problem. But if these large deficits make creditors skittish, they could demand a higher rate of interest. Congress has been slow to act on America’s deficit but, eventually, the market may force its hand.■
Can America afford its debts? (economist.com)
Investissement dans le ferroviaire : la France est-elle vraiment le cancre de l’Europe ?
DÉCRYPTAGE – Dans une étude publiée ce lundi 15 juillet, l’alliance pro-rail allemande révèle la faiblesse de l’investissement de l’État français dans le rail, dernier du classement derrière treize voisins européens (Le Figaro, 17 juillet, article payant)
Extraits :
Vieillissement, manque de fiabilité, vitesse réduite… La promesse d’Élisabeth Borne, en février 2023, d’investir 100 milliards d’euros dans le réseau ferroviaire n’aurait visiblement pas suffi. Du moins, c’est ce qui ressort d’une étude menée par l’association allemande «Alliance pour le rail», qui dresse un classement européen des investissements réalisés dans les infrastructures ferroviaires en fonction de la population. La France figure en dernière position avec 51 euros d’investissements par habitant, derrière l’Espagne et ses 70 euros ainsi que l’Italie avec 92 euros. En tête du classement, on retrouve en troisième position le Danemark avec 336 euros d’investissement par tête, la Suisse avec 477 euros et enfin le Luxembourg avec 512 euros.
Ce classement n’est «pas une surprise» pour Arnaud Aymé, expert transport chez Sia Parters. Mais ses résultats sont toutefois à prendre avec quelques pincettes. Et ce pour une raison simple : ils sont à appréhender au regard de la taille des pays et de leur population. Comparer les investissements sur un réseau ferroviaire d’un territoire comme le Luxembourg – avec ses quelque 2500 km2 de superficie et ses 650.000 habitants – à celui de la France – avec ses plus de 550.000 km2 et presque 68 millions d’habitants – n’est pas nécessairement un exercice très représentatif. Reste que la France se place tout de même en dernière position, et ce même avec des pays relativement comparables comme l’Allemagne, l’Italie ou encore l’Espagne. (…)
Paris va officiellement se retrouver sous le coup d’une procédure européenne pour déficit excessif
La Commission a présenté ce mardi ses préconisations aux ministres de l’Économie et des Finances de l’Union européenne (Le Figaro, 16 juillet, article payant)
Extraits :
(…) Bruxelles n’entend pas couvrir de cendres son petit groupe de cancres, mais les inciter à prendre de vigoureuses mesures pour redresser la barre et rentrer au plus vite dans les clous du pacte de stabilité budgétaire européen. Ce texte, suspendu un temps en raison du Covid, exige que chaque État-membre maintienne son déficit public en dessous des 3 % du produit intérieur brut (PIB), et sa dette sous le seuil des 60 % de la richesse nationale. La France est malheureusement loin du compte : son déficit en 2023 s’élève à 5,5 % de son produit intérieur brut, et sa dette publique à 110,6 % du PIB. Pire, cette dernière pourrait s’envoler, selon les prévisions de la Commission européenne, jusqu’à 114 % du PIB en 2025. (…)
« La situation actuelle augmente l’incertitude économique, qui peut dériver du processus politique mais également d’une incertitude importante quant à la trajectoire budgétaire qui sera mise en place », a ainsi avancé Pierre-Olivier Gourinchas, le chef économiste du FMI, ce mardi, à l’occasion de la présentation de la dernière actualisation de son rapport annuel sur l’économie mondiale. (…)
Pierre Moscovici a également tenté une nouvelle fois lundi, en présentant le dernier rapport de la Cour des comptes sur la situation des finances publiques, de tirer la sonnette d’alarme. « Il faut réduire notre endettement. La dette française s’élève déjà à 3100 milliards d’euros. Elle sera de 3600 milliards en 2027. Nous payons déjà 52 milliards par an pour la rembourser, ce sera 80 milliards en 2027. Il ne restera plus de marge de manœuvre pour financer les services publics et la transition écologique », a-t-il martelé. (…)
La France de plus en plus dépendante de l’extérieur pour financer son train de vie
Les maigres performances des entreprises à l’exportation et le gigantesque déficit public dessinent les déficits jumeaux français (Le Figaro, 16 juillet, article payant)
Extraits :
(…) le déficit des échanges de biens s’élève à 76 milliards (après 133 milliards en 2022). Cette « amélioration » s’explique par l’allégement de la facture énergétique. « La persistance d’un déficit commercial élevé est une faiblesse spécifique de la France au sein de la zone euro, a toutefois rappelé François Villeroy de Galhau. Le pays est une Cigale. » Et d’appuyer : « Le remède à ce déséquilibre est une augmentation de la production. »
Malgré une nette remontée de leur compétitivité-coût depuis 2010, les exportations françaises demeurent en effet à la peine. « Depuis 2010, le rétablissement de la compétitivité prix et coût n’a permis de regagner qu’une petite partie du terrain perdu par rapport aux autres grands pays de la zone euro étant donné la dégradation continue des autres facteurs de la performance exportatrice », expliquent deux économistes de l’établissement, Antoine Berthou et Guillaume Gaulier, dans une note récente. Autrement dit, les questions de qualité et d’innovation – la fameuse compétitivité hors coût – restent à régler. (…)
La France de plus en plus dépendante de l’extérieur pour financer son train de vie (lefigaro.fr)
Entre le poids de la dette et du modèle social, la Cour des comptes reconnaît que la gouvernance française est bloquée
La Cour des comptes dénonce, une fois de plus, un risque grave de dérapage des finances publiques, implore les forces politiques à redresser les comptes mais ne donne aucune solution pour stopper l’hémorragie des dépenses sociales qui sont à l’origine du déficit (Atlantico, 16 juillet, quelques articles gratuites / sem.)
Extraits :
(…) Bref, c’est bien le modèle social français qui est en cause : la retraite, l’assurance santé, l’assurance chômage… Un modèle qui a fait l’objet de projets de réformes initiés après le Covid mais rejetés par l’opinion publique. La réforme des régimes de retraite, par exemple, a servi de catalyseur à toutes les colères sociales. Le modèle social et ses dysfonctionnements ont été pris en otage par l’extrême gauche et l’extrême droite et ont servi de moteurs à l’opposition au macronisme depuis le deuxième quinquennat. (…)
C’est parce que ce modèle social est trop coûteux, trop généreux, que la France a du mal à financer son administration régalienne, à financer les grandes mutations incontournables… Et c’est bien parce que le régime mis en place par Emmanuel Macron n’a pas réussi à sortir de ce piège des dépenses sociales, qu’il a provoqué la nécessité d’une clarification politique.
Après le fiasco des élections européennes, les élections législatives ont démontré qu’il n’y avait pas de majorité politique en France pour redresser les finances publiques.
Ce qui est désormais très grave, c’est moins l’endettement que le refus d’une opinion publique de réformer le modèle social afin de s’affranchir de nos créanciers. Alors ni la Cour des comptes, ni le président qui garde un potentiel de confiance dans l’opinion, n’explique comment redresser l’équilibre budgétaire, mais on comprend très clairement que les programmes présentés ne fonctionneront pas. Notamment ceux qui ont été signés par l’ensemble des forces de gauche. (…)
Finances publiques : la Cour des comptes met en garde le futur gouvernement
Dans un rapport remis lundi 15 juillet, la haute juridiction invite l’équipe qui accédera au pouvoir à faire preuve de sérieux budgétaire, pour assainir des finances publiques très « dégradées » (Le Monde, 15 juillet, article payant)
Extraits :
Un blâme pour le gouvernement sortant et une mise en garde adressée à l’équipe qui lui succédera. Dans un rapport rendu public lundi 15 juillet, la Cour des comptes jette, à nouveau, une lumière crue sur la « situation dégradée » des finances publiques françaises. Alors que la Commission européenne s’apprête à proposer l’ouverture d’une procédure pour « déficit excessif » à l’encontre de la France, les perspectives de redressement s’annoncent, pour le moment, très incertaines, malgré les mesures annoncées ou promises depuis le début de l’année par Bercy. Pour les magistrats de la rue Cambon, à Paris, il est impératif de définir une stratégie robuste de retour vers l’équilibre, faute de quoi les investissements indispensables, dans la décarbonation de l’économie et la transition écologique, seront compromis.
Le rapport diffusé lundi dresse un constat sans concession : l’année 2023, souligne-t-il, fut « très mauvaise » pour les finances publiques, avec un déficit représentant 5,5 % du PIB, soit 0,6 point de plus que prévu. Plusieurs facteurs ont joué dans ce dérapage d’une ampleur rare. D’abord, les recettes issues des prélèvements obligatoires se sont tassées dans des proportions inattendues. Mais le pouvoir en place est également en cause, avec des choix entachés de « carences » : pour que le « trou » ne se creuse pas davantage en 2023, « il aurait été nécessaire (…) de renoncer à certaines mesures de baisses d’impôts et de réaliser des économies effectives », ce qui ne fut pas le cas, selon la Cour – abstraction faite de la mise en extinction des dispositifs exceptionnels de soutien pour affronter la crise sanitaire puis l’emballement des prix. (…)
Finances publiques : la Cour des comptes met en garde le futur gouvernement (lemonde.fr)
Agnès Verdier-Molinié : «Instabilité, crise de la dette, fuite des talents et des capitaux… Ce cocktail explosif qu’il est urgent d’éviter»
Qu’il s’agisse d’une cohabitation, d’une grande coalition, d’un pacte législatif ou même d’un gouvernement technique, il faudra mettre à plat nos comptes publics, alerte la directrice de l’iFrap*. Sinon, ajoute-t-elle, notre économie risque de plonger dans des abîmes insoupçonnés (Le Figaro, 15 juillet, tribune, article payant)
Extraits :
À la veille de la dissolution, la France était déjà fragile : sa dette publique a bondi de 840 milliards d’euros entre 2017 et 2023. De 98 % de la richesse nationale à 110 %. Une augmentation bien plus importante que dans les pays comparables. Cela saute aux yeux si l’on compare les performances de la France avec celles de nos voisins européens. Si la France s’était endettée à l’aune de ce qu’ont fait en moyenne les pays européens, notre pays aurait au compteur 400 milliards d’euros de dette publique en moins à l’heure qu’il est et acquitterait 8 milliards de moins de charges d’intérêt par an.
Certains pays ont même réussi, sur cette période et malgré la crise Covid et ses suites, à baisser leur dette. L’exemple le plus spectaculaire est celui des Pays-Bas, dont la dette a baissé de 10 points quand celle de la France augmentait de 12 points. Depuis 2017, un tiers maximum de la nouvelle dette provient de la crise. Le reste de la dette, soit plus de 550 milliards d’euros, est inhérent à la dérive de nos déficits publics aggravés à l’occasion du « quoi qu’il en coûte ». La charge annuelle de la dette a déjà augmenté de 28 % entre 2017 et 2023. Elle pourrait dépasser les 80 milliards en 2027.
Qui peut croire que Jean-Luc Mélenchon, ses acolytes et leur programme à 220 milliards de dépenses de plus par an seraient crédibles pour redresser la situation économique de la France ? Personne. (…) De qui se moque-t-on quand on laisse croire que toutes ces mesures seraient même envisageables une seconde ? (…)
Pas à un paradoxe près, les mêmes qui conspuent les marchés seraient prêts à emprunter 500 milliards d’euros par an à des investisseurs pour financer leurs lubies économiques ? À mettre encore plus la dette française entre les mains de non-résidents ? À moins qu’ils ne comptent, comme Sandrine Rousseau, capter toute simplement l’assurance-vie des Français pour renflouer les caisses publiques ? (…)
Qu’il s’agisse d’une cohabitation, d’une grande coalition, d’un pacte législatif ou même d’un gouvernement technique, il faudra mettre à plat nos comptes publics. Baisser les dépenses nous-mêmes avant que le FMI et/ou une troïka ne nous l’imposent brutalement. Si nous n’agissons pas nous-mêmes, la potion est connue : baisse des salaires publics entre 20 et 30 % et réduction drastique des effectifs publics, comme en Grèce, augmentation du temps de travail sans hausse de salaire et baisse de 20 % de l’équivalent du RSA, comme au Portugal… Dépêchons-nous, le sablier est en route et chaque minute qui passe sans nouveau gouvernement, dans le poison de l’incertitude, joue pour le déclassement.
La présidente de la Banque centrale européenne a l’habitude de faire face aux crises. Mais sauver la France pourrait s’avérer délicat (Le Figaro, 13 juillet, article payant)
Voir « Article du jour »
Crise de la dette : Christine Lagarde pourra-t-elle nous tirer d’affaire ? (lepoint.fr)
«Le programme du Nouveau Front populaire, droit dans le mur de la dette»
Les partenaires de la coalition ont déjà prévenu qu’ils feront les poches des plus aisés et des entreprises. Mais, comme toujours, se résigneront à faire exploser les déficits (Le Figaro, 13 juillet, chronique article payant)
Extraits :
(…) Un hic de taille, le mur de la dette publique est devenu si élevé qu’il impose de se serrer la ceinture et n’autorise aucun surcroît de dépenses. Les belles promesses de campagne sont tout bonnement incompatibles avec la situation financière de la France. Rangez les lampions et les guirlandes ! Bruno Le Maire promet «un naufrage économique et financier pour la France» si le futur gouvernement ne fait pas d’économies ni ne réduit la dette, intérêts et principal, foi d’animal. Notre cigale de l’économie et des finances, qui nous chante depuis sept ans la chanson de la fourmi, aura bien du mal à convaincre les futurs locataires de Matignon et de Bercy.
Las, la situation de nos finances est si préoccupante que les marchés financiers et les agences de notation pourraient vite se charger d’un rappel à l’ordre musclé. Une flambée des taux d’intérêt serait dévastatrice pour un pays qui emprunte chaque année près de 300 milliards d’euros. Liz Truss en sait quelque chose. En quelques semaines, la première ministre britannique a été chassée de Downing Street pour bien moins que les folles promesses des amis de Sophie Binet !
«Le programme du Nouveau Front populaire, droit dans le mur de la dette» (lefigaro.fr)
Houdininomics : Germany’s debt brake and the art of fantasy budgeting
The country is tiring of its self-imposed fiscal straitjacket (The Economist, 13 juillet, article payant)
Extraits :
(…) The second lesson is that the debt brake itself, a 15-year-old constitutional provision that limits annual structural deficits to 0.35% of gdp, is pushing the budgeting process to ever-greater heights of absurdity. With Germany’s sluggish economy leaving revenues flat, the complex provisions of the rule force politicians into endless accounting wheezes: disguising subsidies as loans, say, or rescheduling interest payments. Mr Lindner says the debt brake avoids burdening future generations. But Holger Schmieding, the chief economist at Berenberg Bank, reckons Germany could run deficits of 1.5-2% without markedly adding to its not-very-high debt load.
Binding its own hands seems unhelpful when Germany faces a municipal public-investment backlog of nearly €190bn, huge challenges decarbonising heavy industry and questions over long-term defence financing. “Far from forcing politicians to prioritise, the debt brake encourages them to play fantasy economics and ignore Germany’s actual challenges,” says Philippa Sigl-Glöckner of Dezernat Zukunft, a fiscal think-tank.
Everyone from the imf to German industry now wants to reform the debt brake. The two-thirds majority needed to amend it can probably not be found this side of the next general election, due in autumn 2025. But if, as polls suggest, the conservative Christian Democrats return to government, expect them to open discussion on reform to ease their passage to sensible budgeting, and that of their premiers in Germany’s states, where the brake squeezes even tighter. Unlike Houdini, Germany is tiring of straitjackets.
Germany’s debt brake and the art of fantasy budgeting (economist.com)
Législatives : abroger la réforme des retraites d’Emmanuel Macron, un coût colossal pour les finances publiques
Revenir sur la réforme contestée de 2023 – un souhait réaffirmé dimanche soir par le Nouveau Front populaire – entraînerait un gouffre financier de plusieurs dizaines de milliards d’euros par an, selon l’Institut Montaigne (Le Figaro, 9 juillet, article payant)
Extraits :
C’était une mesure phare d’Emmanuel Macron, que le Nouveau Front populaire – arrivé en tête des élections législatives dimanche soir avec 178 députés – veut tout bonnement détricoter… Il y a un an, les premiers décrets d’application de la réforme des retraites entraient en vigueur. Objectif : passer progressivement l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et la durée de cotisation à 43 ans dès 2027. Mais avec la dissolution de l’Assemblée nationale, le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national avaient fait de cette réforme un cheval de bataille pour séduire les électeurs. Quitte à faire supporter aux finances publiques un coût colossal, des deux côtés, selon les calculs de l’Institut Montaigne. (…) À cela s’ajoutent la réaffirmation «de l’objectif commun du droit à la retraite à 60 ans» et la prise en compte «du RSA pour valider des trimestres en vue de la retraite». (…)
La réforme de la coalition de gauche et d’extrême gauche représenterait ainsi un coût annuel de l’ordre de 58 milliards d’euros. «Compte tenu de l’ampleur des modifications, une marge de +-15% est fixée pour les scénarios bas et haut, soit respectivement 49 milliards d’euros et 67 milliards d’euros», souligne l’Institut Montaigne. (…)
Qu’il s’agisse du Rassemblement national ou du Nouveau Front populaire, il est à noter que le chiffrage de l’Institut Montaigne n’intègre pas la potentielle diminution de l’activité et donc du PIB. Gilbert Cette, président du Conseil d’Orientation des Retraites, estimait notamment que les pertes de recettes fiscales associées à la hausse des pensions pour le seul retour à l’âge légal de 60 ans, pourrait induire un coût annuel pour les finances publiques compris entre 50 milliards d’euros et 120 milliards d’euros. Les externalités positives ne sont pas non plus prises en compte. (…)
Une chose est sûre : alors que le déficit du système des retraites continue de se creuser, malgré la réforme de 2023, l’équilibre budgétaire risque d’être de plus en plus difficile à trouver si les changements récents, adoptés au forceps, sont annulés.
Le calme en trompe-l’œil des marchés financiers après les législatives
Les investisseurs espèrent une coalition de centre ou un gouvernement technique, et ne croient pas à l’application du programme du Nouveau Front populaire (Le Figaro, 9 juillet, article payant)
Extraits :
(…) Entre les 150 milliards d’euros de nouveaux impôts, le blocage des prix ou le smic à 1600 euros, le programme du Nouveau Front populaire, arrivé en tête aux législatives, est pourtant de nature à inquiéter les investisseurs. Selon Olivier Blanchard, l’ancien chef économiste du FMI, en cas de smic à 1600 euros, par exemple, « l’augmentation de leurs coûts provoquera la faillite de nombreuses entreprises, beaucoup d’autres licencieront des salariés pour retrouver de la compétitivité, toutes couperont dans leurs investissements et la croissance plongera ». (…)
Mais les marchés ne pensent pas que le programme économique du Nouveau Front populaire, qui est celui qui leur faisait le plus peur, pourra être mis en œuvre. Cela les soulage car ce programme dégraderait fortement les finances publiques. » (…)
À Aix-en-Provence, où se réunissaient autour du Cercle des économistes ce week-end de nombreux représentants des milieux économiques, les participants évoquaient ce scénario d’un gouvernement technique avec une certaine appétence. Beaucoup formulaient même les vœux, bien irréalistes, de voir Christine Lagarde en prendre la tête. Blagueur, Mario Draghi avait de son côté prévenu : il n’est pas disponible ! Ces châteaux en Espagne ignorent toutefois une réalité de la politique française : le fait majoritaire. Premier groupe de l’Assemblée, le Nouveau Front populaire devrait tenter de constituer dans les prochains jours un gouvernement. S’il y parvient et qu’il commence à évoquer l’application de son programme, l’ambiance pourrait changer du tout au tout sur les marchés. (…)
Reste que la France, entrée en procédure de déficit excessif, est censée présenter en septembre un plan de redressement de sa dette sur sept ans et boucler un budget 2025 qui réduira son déficit d’un point. L’agence de notation Standard & Poor’s s’inquiète de ces perspectives. Selon elle, le scrutin « est susceptible de compliquer l’élaboration des politiques » et « crée une incertitude quant aux détails de la stratégie de politique économique et fiscale » de la France dans les prochains mois. (…)
Le calme en trompe-l’œil des marchés financiers après les législatives (lefigaro.fr)
Jean-Pierre Robin: «Où sont passés les 1000 milliards d’euros de la dette publique?» (Le Figaro, 8 juillet, tribune, article payant)
CHRONIQUE – Les «1000 milliards de dette publique» accumulée depuis mai 2017 sont une marque indélébile dont le prochain gouvernement ne pourra s’exonérer
Extraits :
(…) Il existe bel et bien une exception française en Europe, comme le révélait en avril le Fonds monétaire international (FMI) dans son examen semestriel des finances publiques. Alors que tous les pays ont subi les mêmes chocs (pandémie de Covid en 2020, crise énergétique à partir de 2021, guerre en Ukraine), la France a vu son taux d’endettement rapporté au PIB s’envoler de 14,2 points de pourcentage de PIB, contre 4,6 % en moyenne dans la zone euro, 4,1 % en Allemagne, 5,1 % en Italie, 8,1 % en Espagne. (…)
Jean-Pierre Robin: «Où sont passés les 1000 milliards d’euros de la dette publique?» (lefigaro.fr)
STREIT DER INSTITUTIONEN: Darf die Notenbank einspringen, weil ein Volk das Falsche wählt? (FAZ, 7 juillet, article payant)
Die Sorge um Frankreichs Staatsanleihen bleibt groß. Und sie bringt die alte Debatte über die Rolle der EZB und der Staaten in Europa neu aufs Tableau
Die große Frage, die auch in Sintra für Gesprächsstoff sorgte: Darf die Notenbank notfalls, wenn die Turbulenzen um die französischen Anleihen eskalieren, durch neue Anleihekäufe im großen Stil beruhigend eingreifen?
TPI („Transmission Protection Instrument“) nennt sich ein Instrument, das die EZB vor zwei Jahren geschaffen hatte, um bei einem unkontrollierten Hochschießen von Anleihenrenditen einzelner Euroländer im Zuge ihrer Leitzinserhöhungen notfalls in den Markt eingreifen zu können. Das Instrument wurde bislang noch nie eingesetzt. Als Bedingung hatte man damals eingebaut, dass es nur angewendet werden sollte, wenn ein plötzlicher Anstieg der Anleihenrenditen einzelner Länder oder ihres Abstands von der Rendite der deutschen Bundesanleihe („Spread“) „unbegründet und ungeordnet“ erfolge. Das sollte heißen: Wenn es sich um eine Spekulation der Finanzmärkte handelt, wenn der Anstieg der Rendite also nicht durch die Fundamentaldaten rund um die Verschuldung und die Lage des jeweiligen Landes gerechtfertigt ist.
Zumindest für Verwunderung sorgte bei Notenbankern der Vorstoß des deutschen Finanzministers Christian Lindner (FDP), der durchblicken ließ, ein Einsatz von TPI mit Geld der gemeinsamen Notenbank zur Lösung der Probleme im Zusammenhang mit der Frankreichwahl könnte illegal sein. Ein solcher Schritt könnte „einige wirtschaftliche und verfassungsrechtliche Fragen aufwerfen“, sagte Lindner. Gegebenenfalls werde man die juristisch prüfen lassen.
Offenbar wollte der deutsche Finanzminister, der selbst gerade um seinen Haushalt rang, den Menschen in Frankreich ein Signal geben, dass es nicht die anderen Länder Europas ausbaden würden, wenn das Land durch seine Wahlentscheidung selbstverschuldet in Finanzmarktturbulenzen geraten sollte.
Die EZB hätte beleidigt reagieren können. Schließlich ist die Unabhängigkeit der Notenbank ein hohes Gut, die Politiker sollen möglichst nicht reinreden. Tat sie aber nicht: Auch EZB-Präsidentin Lagarde wünscht sich sicher weder einen Sieg der Rechten in Frankreich, noch ist sie besonders scharf darauf, das heikle Instrument TPI tatsächlich einzusetzen.
Am meisten geschimpft wurde auffälligerweise von italienischer Seite. Der frühere EZB-Direktor Lorenzo Bini Smaghi, heute Chairman der französischen Bank Société Générale, sagte dem Sender „Bloomberg TV“ über die Lindner-Äußerung: „Ich finde das ziemlich schockierend.“ Die EU-Verträge besagten doch eigentlich, dass Politiker versuchen sollten, jedweden Druck auf die Europäische Zentralbank zu vermeiden.
Wahl in Frankreich schürt Sorgen um Anleihen: Darf die EZB einspringen? (faz.net)
Agnès Verdier-Molinié : « Réveillez-vous ! »
La directrice de la fondation iFrap, qui va publier un audit sur la situation financière de la France, met en garde contre une possible crise de la dette. (Le Point, interview 5 juillet, article payant)
La fondation iFrap fait son entrée dans le débat politique. Ce think tank dont la raison d’être, depuis trente ans, est d’évaluer la performance de la dépense publique, passant au crible tableaux, chiffres et indicateurs en tout genre, a réalisé un audit des finances de la France. Le constat est sans appel : à ce rythme d’augmentation des déficits et de gonflement de la dette, notre pays fonce droit dans le mur. (…)
Dans cette campagne des législatives anticipées, les différents blocs semblent avoir un peu vite oublié que 2023 a été une année de dérapage budgétaire massif : le déficit était prévu à 4,4 % du PIB, et il a été relevé, à la surprise générale, à 5,5 %, ce qui a conduit à l’annonce d’une grande salve d’économies… Tout le monde, et en particulier les concepteurs des programmes des différents partis en lice, donne l’impression d’avoir zappé cet épisode.
(…) Mercredi 19 juin, la Commission européenne a ouvert la voie à une procédure pour déficit public excessif contre la France. (…) la France est devenue la lanterne rouge de l’Europe ! En 2024, les prévisions de déficit public des pays de la zone le montrent très clairement. Si l’on ne réalise pas les 30 milliards d’euros d’économies qui étaient prévus pour 2025, notre déficit pourrait se situer autour de 5,6 % du PIB l’an prochain. Pour se rassurer, on se dit que les taux n’ont pas tellement augmenté depuis l’annonce de la dissolution. (…)
La Commission européenne vise six autres pays. Le cas de la France n’est donc pas unique dans l’Union européenne…
Mais c’est en partie grâce à la BCE, qui continue de racheter de la dette française sur le marché secondaire. La Banque centrale ne pourra pas le faire éternellement dans des proportions de plus en plus importantes. (…)
C’est vraiment la culture du « raser gratis » ou alors celle du « ne disons rien pour ne pas inquiéter les Français ». Il est en réalité antisocial de proposer de dépenser toujours plus d’argent public que nous n’avons pas ou de cacher la réalité de la situation de nos finances publiques, car la charge de la dette pourrait devenir tellement importante que notre pays finirait asphyxié. Et nous avec. (…)
Mais, jusque-là, la France est toujours parvenue à emprunter sur les marchés…
Certes, mais nous sommes arrivés au bout de l’histoire. Certains croient encore que la France sera toujours sauvée par nos partenaires européens et que la BCE interviendra encore à coups de centaines de milliards sur les marchés, mais cela n’est pas viable à long terme. La France fait preuve d’égoïsme, elle met toute la zone monétaire dans une situation délicate, et une crise de la dette sur la France est un risque systémique : cela pourrait faire exploser la zone euro. (…)
Bien souvent, ceux qui proposent de continuer à dépenser sans compter livrent un discours anti-marchés. C’est antinomique. L’accumulation de déficits publics et le gonflement de notre dette mettent justement la France dans les mains des marchés qu’ils font mine de honnir. Notre dépendance aux marchés et aux investisseurs étrangers – ils possèdent plus de 52 % de notre dette négociable – nous met dans une situation de dépendance terrible.
Bardella’s burden? How bad could things get in France? (19 juin, article payant)
The country’s next prime minister faces a brutal fiscal crunch (The Economist)
Extraits :
It was a French politician, Valéry Giscard d’Estaing, who coined the term “exorbitant privilege” in the 1960s. He was referring to the benefits received by America as issuer of the world’s reserve currency—namely, the ability to run high deficits comfortably. These days France is reminded that it has no such privilege. Ahead of parliamentary elections on June 30th and July 7th, its hefty deficit and growing debt are central to the campaign. On June 19th the European Commission is expected to put France into an excessive-deficit procedure (edp), the eu’s fiscal torture chamber, meaning that the country’s politicians will have to come up with a plan to fix things.
The commission’s officials have good reason to do so. France has an American-style deficit of 5% of gdp, which its central bank and the imf expect to come down only slowly. The country’s debt-to-gdp ratio of 111% is similar to Italy’s before the euro crisis in the early 2010s, and is set to rise. s&p Global, a ratings agency, downgraded the French government’s sovereign-debt rating from aa to aa- on May 31st—before Emmanuel Macron, France’s president, gambled on snap elections that may bring the hard-right National Rally (rn) or the left-wing New Popular Front (npf) to power, under his continuing presidency.
Now markets are worried. The yield on French debt is similar to that on Portugal’s and its spread over German bunds, Europe’s benchmark, has widened to 0.7% (see chart). The French stockmarket is down by 5% since the European Parliament elections on June 9th, the results of which prompted Mr Macron to gamble on the snap poll. Share prices of firms focused on the domestic market have been hit especially hard. France’s two largest banks, bnp Paribas and Crédit Agricole, have lost 11% of their value. Banks with the most exposure to domestic government bonds, including Le Banque Postale and bpce, are not listed on public exchanges.
How bad could things get? (…)
Contrary to warnings from Bruno Le Maire, France’s finance minister, even a victory for the hard right or left would be unlikely to prompt a financial crisis. (…)
The problem is that, without spending cuts, France’s deficit will widen to 5.7% this year and 5.9% next, according to the French senate’s finance committee. Even if this is not crisis-inducing, it does represent a large and growing problem. (…)
Both the RN polling in first place with over 30% of voters, and the left bloc, at just under 30%, are far ahead of Mr Macron’s centrist alliance, and have spending plans that would add to the deficit. (…) Both groups also want to repeal Mr Macron’s pension reforms that raised the age of retirement to 64 from 62, although the rn has rowed back on plans to do so straight away.
Such profligacy could lead to a clash with the European Commission and the markets. (…) The hope is that, once in power, the rn would mellow in the manner of Georgia Meloni, Italy’s hard-right prime minister.
The victor will have to oversee spending cuts that could harm growth and prove unpopular with the broader electorate, or risk chaos. Although there is no such thing as a bad election to win, the celebrations of France’s next prime minister may not last long.
How bad could things get in France? (economist.com)
Xavier Fontanet: «Il existe des solutions pour baisser intelligemment les dépenses publiques» (19 juin)
Alors que la note financière de la France poursuit sa dégradation et que les candidats aux législatives rivalisent de propositions démagogiques, il faudrait imposer un régime de sportif à l’État-providence en s’inspirant des enseignements de l’économiste libéral Frédéric Bastiat, plaide l’ex-PDG du groupe Essilor (Le Figaro, Tribune)
Extraits :
(…) Il est un principe qu’il faudrait absolument enseigner dans nos écoles, il est simple et change votre vie quand vous l’avez compris : c’est le principe de l’action et de la réaction. On ne peut juger de la qualité d’une action qu’une fois pris en compte l’effet des réactions qu’elle a produites. (…)
À ne s’occuper que des conséquences sans remonter à la source des problèmes, on renforce les causes qui les ont produits. Ce petit jeu dure depuis des décennies. Jugeons donc sur cinquante ans le PIB par tête des pays avec lesquels nous sommes en relation. Le résultat que chacun peut constater en allant sur les sites de la Banque mondiale est édifiant. Nous dégringolons régulièrement dans les classements de PIB par tête : le PIB par tête de la Suisse, qui était le même que le nôtre à la mort du regretté Pompidou en 1974, est deux fois et demie plus élevé aujourd’hui. Le smic en Suisse est à 5000 euros, les problèmes de pouvoir d’achat ne sont évidemment pas les mêmes à Lausanne et à Paris. On va vous dire : petit pays ! Très bien, regardons les États-Unis : l’écart est pratiquement de 1 à 2. On va vous dire : oui, mais ce ne sont pas des Européens… Prenez les Pays-Bas ou le Danemark : on parle de 50 %. (…)
Tout un chacun sait que quelque chose ne va pas. On peut taxer les riches, mais l’expérience récente a montré que les gens vendent leurs entreprises et partent. Les 2 millions d’emplois récemment créés sont en grande partie le fruit de la suppression de l’ISF et de la baisse de fiscalité sur les dividendes. (…)
Le fait nouveau, c’est qu’il y a eu dans le monde des cas exemplaires de pays qui ont réduit de façon significative les dépenses publiques, et que cela a dopé leur économie : Canada, Nouvelle-Zélande et, plus près de nous, Allemagne. Ces pays ont fait des réformes profondes, le Canada sur les dépenses régaliennes, la Nouvelle-Zélande sur la santé et la retraite, l’Allemagne sur le droit du travail et les relations entre l’État et la sphère sociale. Dans ces trois cas, les dépenses publiques ont été baissées de l’ordre de 12 points de PIB sur huit-dix ans. Les faits ont montré que cette baisse a en réalité fait croître l’économie du pays. (…)
Il est temps de revenir, en ce qui concerne la dépense publique et sociale, dans la moyenne européenne. Les solutions pour baisser intelligemment les dépenses publiques sont nombreuses, il suffit de copier ce qui a marché ailleurs : des contrats seniors pour permettre à ceux qui veulent travailler plus longtemps, ce qui soulagera les caisses de retraite ; un puissant développement de l’actionnariat salarié qui donne un fort complément aux retraites ; la sortie du paritarisme, qui permettra aux partenaires sociaux de mieux mesurer le coût de leurs décisions ; la suppression d’une couche régionale et la fusion des communes qui sont trop petites ; l’arrêt de certains ministères ; la mise en Bourse de La Poste ; la vente de France Télévisions ou son apport à un grand groupe de médias coté ; le recours à des concessions et à la sphère bénévole pour reprendre des activités de la sphère publique ; l’organisation d’une saine concurrence entre éducation privée et publique, puisqu’il est évident que le coût de cette dernière est moins élevé… Sans aller jusqu’à vendre La Joconde, il y a beaucoup de choses à faire.
Notre pouvoir d’achat n’est en fait que l’envers de notre compétitivité globale. Il faut adopter à partir de maintenant un régime de sportif pour que notre sphère publique redevienne svelte et permette à nos entreprises de donner enfin toute leur mesure.
After the dissolution, the threat of the “spread” (June 18)
Pay wall :Après la dissolution, la menace du « spread ». La confiance en la solidité financière de la France plonge avec le spectre de l’arrivée de Bardella ou de Mélenchon au pouvoir (Le Point, Editorial)
Excerpt :
À l’exception d’une brève poussée de fièvre, fin 2011, lors de la crise des dettes souveraines quand il avait atteint 1,2 %, le spread OAT-Bund a évolué depuis deux décennies dans une fourchette étroite comprise entre 0,1 et 0,6 %. Une stabilité quasi miraculeuse au vu de la dégradation de nos finances publiques et de l’envolée de notre dette, mais qui a pris brutalement fin avec le résultat des élections européennes et l’annonce surprise de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron.
Reflétant l’inquiétude de nos créanciers sur la situation politique en France et leur crainte compréhensible que Jordan Bardella ou Jean-Luc Mélenchon s’installe bientôt à Matignon, le spread OAT-Bund a bondi en une semaine de 0,49 à 0,75 %.
Indignations grotesques des extrêmes
À l’image du leader d’extrême droite italien Matteo Salvini qui, dans des circonstances comparables, avait fustigé il y a deux ans le « chantage des spéculateurs » et clamé que « les Italiens ne seront jamais les esclaves du spread de taux avec l’Allemagne », des dirigeants du RN et de LFI s’emploient d’ores et déjà à dénoncer « le mur de l’argent », « l’ingérence inacceptable » des marchés financiers dans la vie démocratique et « la dictature du spread ».
Des élans d’indignation aussi sublimes que grotesques. Qui ignorent totalement la réalité financière d’une France où la dette publique dépasse les 3 000 milliards d’euros, dont plus de la moitié détenue par des investisseurs étrangers, d’une France qui va devoir emprunter cette année la bagatelle de 285 milliards d’euros pour pouvoir notamment continuer à payer ses enseignants, ses infirmières et verser leurs pensions aux retraités.
Le « Spread » OAT-Bund a augmenté et ce n’est pas une bonne nouvelle pour la France (lepoint.fr)
“Pension deficit of 53 billion euros in 2023” (June 14)
Free access: Le déficit des retraites est de 53 milliards d’euros en 2023 (Contrepoint)
Excerpt :
« Mesurer les déficits des retraites en refusant de prendre en compte les déficits liés aux retraites des employés du secteur public n’a aucun sens. Nous ne sommes pas dans un pays qui équilibre ses comptes publics et c’est justement parce que l’Etat a été imprévoyant en matière de retraite que ses comptes sont déséquilibrés depuis la fin du baby-boom ». (…)
Le COR ne tient pas compte dans son calcul de déficit :
- des subventions dont bénéficient les régimes spéciaux du secteur public (SNCF, ouvriers d’État, RATP…) et dont les montants figurent pourtant dans de multiples sources officielles (Compte général de l’État…) ;
- du caractère dérogatoire des taux de cotisation retraite en vigueur dans le secteur public. Pourtant, les cotisations retraite y sont beaucoup plus élevées que dans le privé (28 % du salaire brut), elles représentent 42 % dans la fonction publique territoriale, 85 % des traitements indiciaires bruts des fonctionnaires civils de l’État et 137 % pour les militaires. (…)
Le COR a occulté 40 milliards d’euros de subventions aux retraites des fonctionnaires d’État en 2023 et 674 milliards depuis 2002.
Le déficit des retraites est de 53 milliards d’euros en 2023 – Contrepoints
“Pensions: the deficit is already growing, a new reform seems unavoidable” (June 11)
Pay wall :Retraites : le déficit se creuse déjà, une nouvelle réforme semble inéluctable – Malgré la réforme, le système est de nouveau déficitaire cette année et y restera jusqu’en 2070, selon le Conseil d’orientation des retraites (COR). Le RN comme LFI veulent annuler l’âge de départ à 64 ans adopté au forceps en 2023 (Le Figaro)
Excerpt :
La dissolution de l’Assemblée annoncée dimanche soir par Emmanuel Macron risque bien de faire ressurgir dans le débat le sujet toujours sensible des retraites. Si elle soutenait encore la retraite à 60 ans en 2017, Marine Le Pen a atténué son programme en 2022 pour envisager un âge minimum de départ variant entre 60 et 62 ans selon l’âge d’entrée dans la vie active. Une mesure qui demeurerait cependant très coûteuse. De son côté, LFI veut purement et simplement restaurer le droit à la retraite à 60 ans à taux plein pour tous après 40 annuités de cotisation. Des mesures qui se heurtent de plein fouet à la réalité des comptes. (…)
Deux mesures particulièrement coûteuses sont venues annihiler les efforts d’économies liés au report de l’âge. D’une part, la revalorisation des petites pensions à 85 % du smic. D’autre part, l’extension des départs anticipés pour carrière longue, désormais possible pour tous ceux ayant commencé à travailler avant 21 ans. Pourtant, bien avant la réforme, la Cour des comptes avait alerté sur ce dispositif à la fois injuste et coûteux. Or, au lieu de limiter et recentrer ce dispositif, la réforme des retraites l’a pérennisé et élargi.
Retraites : le déficit se creuse déjà, une nouvelle réforme semble inéluctable (lefigaro.fr)
“Debt stabilization will require efforts unprecedented in the history of French public finances” (June 11)
Pay wall :« La stabilisation de la dette demandera des efforts inédits dans l’histoire des finances publiques françaises » : L’économiste Xavier Ragot propose, dans une tribune au « Monde », de placer la réduction des déficits publics au cœur du débat politique, afin de « dépasser les postures » actuelles (Le Monde, Guest Essay)
Excerpt :
Où trouver l’argent ?
Le troisième changement répond à une question inéluctablement posée : où trouver l’argent ?
La baisse des dépenses ou un ajustement portant sur les ménages est un marqueur politique de droite, mettant en avant le niveau des impôts très élevés en France.
La hausse des impôts ou un ajustement portant sur les entreprises est un marqueur de gauche, s’appuyant sur le constat que le taux d’imposition des plus hauts revenus est relativement faible.
Il faudra dépasser cette opposition tant le montant des ajustements est élevé : la stabilisation de la dette demandera des efforts de réduction du déficit inédits dans l’histoire des finances publiques françaises.
L’exemple des autres pays montre qu’il faut surtout chercher la cohérence des ajustements avec une clarté des objectifs : où veut-on emmener la santé, le tissu productif, les émissions de CO2, les inégalités ou encore le système éducatif, dans dix ans ? De grands rapports, incluant la participation des partis politiques et mesurant les implications budgétaires précises, permettraient d’identifier clairement les politiques possibles. Le moment churchillien de la juste répartition des efforts pour le rétablissement des comptes publics doit aussi montrer où se situe le bout du tunnel, de manière crédible.