
Le Point, 24 février
La xénophobie commerciale de Donald Trump
ÉDITO. Le battage médiatique autour des tarifs douaniers confirme que le protectionnisme est une gesticulation politique sans aucun fondement économique.

Extraits:
En économie aussi, Donald Trump a de la suite dans les idées, surtout quand elles sont stupides. Le 8 mars 2018, il avait relevé les tarifs douaniers de 25 % sur l’acier et de 10 % sur l’aluminium importés aux États-Unis, entraînant la démission du conseiller économique de la Maison-Blanche, Gary Cohn, totalement opposé à cette mesure. Une dizaine d’ouvriers sidérurgistes bodybuildés avaient même été conviés dans le Bureau ovale pour assister à la signature du décret retransmise en direct à la télévision.
Sept ans plus tard, bis repetita. Donald Trump vient non seulement d’annoncer une nouvelle hausse de 25 % des tarifs sur l’acier et l’aluminium mais il menace aussi de déclencher une guerre commerciale mondiale en imposant des droits de douane réciproques à tous les pays de la planète. (…)
Le battage médiatique orchestré par la Maison-Blanche autour des tarifs douaniers confirme que le protectionnisme est, aujourd’hui comme hier, une gesticulation politique sans aucun fondement économique. Et relève d’une xénophobie commerciale qui déjà faisait dire, au début du XVIIe siècle, à l’économiste français Antoine de Montchrestien « que les marchands étrangers sont des sangsues qui s’attachent à ce grand corps de la France, tirent son meilleur sang et s’en gorgent ». Ériger des barrières douanières ou un mur à la frontière du Mexique sont mus par la même idéologie.
Comme tout populisme, le protectionnisme a de fausses allures de bon sens et s’appuie sur la croyance très répandue selon laquelle les échanges commerciaux sont des opérations à somme nulle, dans lesquelles ce que gagne une nation, une autre le perd. Alors qu’on sait pourtant, depuis fort longtemps et depuis les théories d’Adam Smith et de David Ricardo sur les avantages absolus et comparatifs, qu’ils sont à somme positive, créateurs de richesses et de croissance pour les deux parties.
L’économie américaine mais aussi mondiale a tout à perdre d’une guerre des tarifs douaniers conduisant à un cycle de représailles, à une hausse généralisée de l’inflation et des taux d’intérêt. (…)
https://www.lepoint.fr/monde/la-xenophobie-commerciale-de-donald-trump-21-02-2025-2582961_24.php
The Economist, February 22
Trade at the pleasure of the president : Reciprocal tariffs really mean chaos for global trade
America has tried reciprocity before, and discovered its flaws

Extraits:
What happens when you ditch the principles that underpinned global trade for three-quarters of a century? Donald Trump hopes to find out. He wants to levy “reciprocal” tariffs, which match the duties American exports face abroad, plus charges to offset any policy he deems unfair. A stable multilateral trade system which has, for all its flaws, fostered miraculous rises in global prosperity would give way to arbitrary judgments made in the Oval Office.
After the second world war America built a system of global commerce that sought to treat countries equally. The operating principle was the “most-favoured nation” (MFN) clause, which means that members of the World Trade Organisation must levy the same charge on a given good, no matter where it comes from (except within deep free-trade agreements, such as that between America, Canada and Mexico). As a consequence, in any given market, American firms trade on the same terms as most other foreigners. This acts as a brake against lurches towards protectionism or lobbying for special favours, because changing tariffs for one trading partner would mean changing them for everyone.
MFN has led to asymmetries. Countries can protect powerful producers, so long as the external tariff is uniform. It also permits imbalances in average tariffs, because countries differ in their willingness to liberalise. America levied a simple average tariff of just 3.3% in 2023, lower than 5% in the eu and 3.8% in Britain. Poor countries tend to have higher levies.
That does not mean America is a victim. Its consumers benefit from cheap imports and its companies from cheap parts. In the 20th century free trade increased global stability. Still, perhaps reciprocity could nudge others to lower trade barriers, in order to increase their own access to America’s market.
The problem, however, is that Mr Trump’s policy would be fiddly, arbitrary and more likely to ratchet up instead of down. The administrative effort needed to implement it would range from gruelling to gargantuan, depending on how reciprocity was defined. At the very least, for each good a single tariff would be replaced by hundreds of possible bilateral levies and things would get fiendishly complex for products with supply chains spanning many countries. In the late 19th and early 20th centuries America pursued reciprocity only to conclude that constant bargaining was cumbersome and unpredictable, leading Congress to adopt unconditional MFN in 1922.
The unpredictability would be aggravated by Mr Trump’s desire to be the judge of whether a country’s trading practices are unfair. (…)
But there probably will be retaliation, so tariffs are likely to spiral upwards. The mere possibility of that will deter businesses from relying on trade. Because Mr Trump’s reasoning on vat is nonsense, who knows what grievance he will dream up next? And reciprocity is only one component of his plans. If he also whacks duties of 25% on some goods, as he continually threatens to, you have a recipe for retaliation and a full-scale trade war. That might suit Mr Trump, but it would be a blow to the American and world economies alike. ■
https://www.economist.com/leaders/2025/02/19/reciprocal-tariffs-really-mean-chaos-for-global-trade
Le Point, 20 février
Pour comprendre la vision économique de Javier Milei, lisez le philosophe John Locke
CHRONIQUE. Le président argentin, fervent défenseur du libéralisme, s’attaque aux fondements de l’État interventionniste hérité du péronisme. Une vision radicale de l’économie.

Article intégral :
Comment définir Javier Milei ? Au-delà des débats sémantiques qui l’entourent, il est indéniable que le président argentin est un économiste adepte des théories autrichiennes sur l’impôt, la monnaie et des cycles. Proche du professeur Jesus Huerta de Soto de l’université Rey Juan Carlos de Madrid, en Espagne, il lui a rendu hommage dans un ouvrage collectif publié en 2023**.
L’école autrichienne d’économie à laquelle se rattache Milei regroupe diverses sensibilités, mais ses penseurs partagent une même philosophie des droits de propriété, développée par John Locke (1632-1704). Cette vision lie la liberté individuelle à l’institution de la propriété, affirmant qu’il est naturel pour chacun d’être propriétaire de soi-même et des fruits de son travail. Ce principe éclaire les positions de Milei sur des sujets comme la libéralisation des drogues, du marché du sexe ou encore du commerce d’organes. Il place au cœur de sa pensée le consentement et le libre contrat, sacralisant ainsi la souveraineté individuelle. Pour lui, la liberté est une valeur centrale, qui n’exclut pas l’égalité : il s’agit de traiter les inégaux de manière égale, en opposition à l’idée socialiste selon laquelle il faudrait traiter les inégaux de manière inégale, ce qui revient à discriminer.
Supprimer la banque centrale
Milei s’inspire de cette philosophie libérale qui – il ne faut jamais l’oublier – est à l’origine de la prospérité de l’Occident et de nombreux pays dans le monde, comme le démontre magistralement l’historienne de l’économie Deirdre McCloskey***. Si l’Argentin défend cette tradition intellectuelle, il y a aussi contribué en tant qu’économiste et essayiste. C’est la beauté de la démocratie libérale d’accepter le débat et la confrontation. C’est aussi le rôle des intellectuels et des scientifiques : discuter afin de parvenir à un consensus sur ce qui est vrai et ce qui est bien.
Affirmer, par exemple, qu’il faut supprimer la banque centrale, cela suscite une importante controverse dans les sciences économiques contemporaines. En effet, il n’est pas certain que la banque centrale soit « la banque des banques » ; il est plus probable qu’elle soit la banque de l’État. Ses choix en matière de politiques monétaires ne servent pas nécessairement la stabilité économique. Ils sont au contraire au service de l’État qui utilise son pouvoir monétaire pour financer ses choix budgétaires. À ce titre, la politique monétaire peut être à l’origine de cycles économiques, de crises et d’hyperinflation.
Il est important de rappeler que les banques centrales n’ont pas toujours existé. La Banque de France, par exemple, a été créée sous Napoléon pour servir les intérêts de la famille impériale. De son côté, la Banque centrale d’Argentine a vu le jour en mai 1935. Malgré l’existence de cette institution et de sa politique monétaire, Javier Milei a accédé au pouvoir fin 2023 dans un pays en proie à une inflation dépassant 200 %, un taux de pauvreté supérieur à 40 %, un déficit budgétaire avoisinant 15 % du PIB, et au bord d’une nouvelle crise de la dette publique.
Déclin argentin lié à la politique de Juan Peron ?
Face à cette situation critique, le président argentin a engagé d’importantes réformes, ciblant notamment l’État. Selon lui, le déclin de l’Argentine est le résultat des politiques menées par les gouvernements péronistes et de leur idéologie interventionniste. Milei attribue ainsi les maux économiques du pays à des décennies de gestion étatique excessive et inefficace.
Contrairement à de nombreux journalistes, d’intellectuels, voire d’hommes politiques, Javier Milei a établi un diagnostic précis et argumenté sur la situation de son pays. Il l’a exposé dans un article académique coécrit en 2017 avec l’économiste Diego Pablo Giacomini****. Les deux auteurs y défendent la thèse que le déclin de l’Argentine résulte de l’idéal socialiste de Juan Peron (1895-1974) et des politiques keynésiennes qui ont dominé les politiques budgétaires de l’Argentine depuis le milieu du XXᵉ siècle.
Juan Peron, président de l’Argentine de 1946 à 1955, était un ancien militaire ayant participé au coup d’État de 1943. Emprisonné en 1945, libéré en 1946, il gouverna le pays avec les syndicats et adopta une ligne nationaliste et industrialiste. Il fonda une tradition politique, le péronisme, marquée par ses atteintes à la liberté d’expression et ses persécutions qu’il fit subir aux oppositions politiques et aux organes de presse, ce qui conduisit à son renversement en 1955. Sergio Massa, candidat sortant aux élections de 2024, était l’héritier de cette tradition péroniste, qui domina la vie politique de ce pays. Ce sont les élites de ce parti qui placèrent l’Argentine dans la liste des pays les plus corrompus de la planète.
De l’intervention de l’État au retrait du gouvernement
La corruption et les échecs répétés des politiques conduites expliquent d’ailleurs le diagnostic de Milei et sa colère. Son diagnostic est rationnel et relève de son travail d’économiste. Sa colère est son supplément d’âme, ce qui fait qu’il est peut-être devenu président de République. Son diagnostic explique pourquoi il affirme que pour traiter des maux de l’Argentine, la solution n’est pas plus de réglementations, plus d’impôts, plus de dépenses publiques et plus de déficits, mais moins. Moins d’État, c’est moins de corruption, en particulier parce que, si les hommes politiques ont moins d’argent public à distribuer et moins de pouvoir réglementaire, ils seront moins sollicités par les groupes d’intérêt et moins tentés d’utiliser leur position pour monnayer leurs décisions et corrompre la décision publique *****.
Tous ces principes expliquent les réformes de Milei : la réduction du nombre des ministères de 18 à 8, la baisse du nombre des emplois publics de 30 000 postes, la fermeture de l’agence de presse d’État Télam, la baisse des aides publiques à l’Institut national du cinéma, la dérégulation des compagnies aériennes, la privatisation de nombreuses entreprises publiques, etc. Ces mesures identifient un problème, l’intervention de l’État comme cause et une solution, le retrait du gouvernement.
Pour l’instant, les résultats confirment cet enchaînement, puisque le pays enregistre un retour des excédents budgétaires, une baisse spectaculaire de l’inflation et un retour annoncé de la croissance en 2025 qui devrait permettre une baisse du taux de chômage et, finalement, du taux de pauvreté. Milei dit aux Argentins : « Je vous laisse faire, vous vous enrichirez et le pays deviendra riche. »
Le message de Milei dépasse largement l’image de la tronçonneuse symbolisant la baisse des dépenses publiques. Il est avant tout moral. Il invite notamment la classe politique française à replacer au cœur de leurs préoccupations la liberté, autrement dit la souveraineté des propriétaires. Il appelle également à prendre conscience des dommages qu’impose le socialisme d’atmosphère qu’a installé la guerre froide (1945-1989) à notre pays et à la qualité des débats politiques.
* Professeur agrégé des universités, université Paris-1 Panthéon-Sorbonne, Centre d’économie de la Sorbonne.
** Milei, J.G. (2023). Capitalism, Socialism, and the Neoclassical Trap. In : Howden, D., Bagus, P. (eds) The Emergence of a Tradition : Essays in Honor of Jesús Huerta de Soto, Volume II. Palgrave Macmillan, Cham.
*** Un résumé de la pensée de cette économiste sera bientôt disponible en français. Deirdre N. McCloskey et Art Carden 2025. Laissez-moi faire et je vous rendrai riche. Comment le Pacte Bourgeois a enrichi le monde, traduit de l’anglais par Patrick Hersant, éditions markus haller, Leave me alone and I’ll make you rich. How the Bourgeois deal enriched the world, 2020, University of Chicago Press. Chicago et Londres.
**** Milei, J.G., and D.P., Giacomini 2017. Ensayos Monetarios para Economías Abiertas : El Caso Argentino, Actualidad Económica Año XXVII, Nº 91 – Enero / Abril.
***** Transparency International indiquait dans son rapport en 2024 que 49 % des observateurs estimaient que la corruption en Argentine avait tendance à augmenter.
The Wall Street Journal, February 14
Auto Executives Try to Sway Trump on Tariffs, EV Subsidies
Industry ratchets up its lobbying efforts; ‘what we’re seeing is a lot of cost and a lot of chaos,’ Ford CEO says

Extraits:
Ford Motor F 1.30%increase; green up pointing triangle Chief Executive Jim Farley warned lawmakers in Washington this week that tariffs would hurt U.S. car companies, the latest attempt by an auto executive to confront President Trump’s policy plans.
Farley said tariffs on Mexico and Canada would benefit the company’s foreign rivals in the auto sector, people with knowledge of the meetings said. He emphasized the importance of federal subsidies for electric vehicles and batteries, saying they are needed to prevent U.S. companies from falling further behind fast-moving Chinese carmakers. Farley called the meetings productive, according to a statement from Ford.
“There’s a global street fight in the auto industry right now,” Farley told investors at a Wolfe Research event earlier this week. While he sees promise in Trump’s pledge to strengthen the auto industry and U.S. manufacturing broadly, “so far what we’re seeing is a lot of cost and a lot of chaos.”
Auto executives have been making the rounds in Washington in recent weeks to lobby for a laundry list of priorities. Like CEOs from tech and other sectors, they are meeting with administration officials and others close to the White House to personally put forward their agendas with Trump.
The administration’s priorities, particularly on trade, have rattled an industry that spans borders and is heavily reliant on imports for its manufacturing operations. The proposed tariffs threaten to pinch already thin profit margins on some models, and executives fear the withdrawal of federal support for EVs could worsen losses on this technology. (…)
The Economist, February 13
Charlemagne : Can Europe afford to be the world’s last free-trader?
The EU tries to navigate a global trade spat

Extraits:
The European Union seems an unorthodox champion of free trade. Beyond a few purveyors of handbags and slimming drugs, few of its big companies compete successfully with rivals from America and China, the world’s two biggest economies. Negotiating a trade agreement with the EU means that countries halfway across the world have to sulkily accept that champagne can come only from the northern region of France or feta cheese from Greece. Back in Europe, the merest hint of a free-trade deal causes farmers from across the continent to descend on Brussels and pummel Eurocrats with eggs and manure.
Despite all this, the EU is what passes for a free-trade enthusiast these days—if only by default. America, which built the global free-trading system alongside Europe in the decades after the second world war, is now run by a president who adores tariffs almost as much as he does gaudy skyscrapers. China is no better. Though it got rich in part through its exporting prowess, it continues to lard favoured companies with subsidies, against the spirit of free-trade rules; this week it imposed retaliatory tariffs on American goods. Plenty of smaller economies, from Costa Rica to Japan, remain committed to the strictures of the World Trade Organisation. But of the world’s three major economic blocs, the EU is the only one that could plausibly hide behind trade barricades—leaving its firms serving a market of over 400m mostly rich consumers—but has so far decided not to. Being in this major-open-economy club of one sets nerves jangling among some politicians. Is the EU naive to follow global rules others ditched long ago? Can Europe afford to remain the world’s last free-trader?
The short answer is that it may have no choice. Donald Trump’s bluster on trade is concerning for Europe precisely because international commerce matters to it so much. (…)
Two prospects haunt the EU. The first is an inescapable trade tiff with Mr Trump, who calls the EU an “atrocity” on trade and has promised to impose his beloved tariffs, as he did in his first term. Assuming the threat is enacted, this would throttle Europe’s exports to its biggest market just as its economy is in the doldrums. The second fear is how China will react to finding itself on the sharp end of American protectionism. With its own biggest foreign market increasingly restricted, China might divert goods to the still-open EU so as to keep its factories humming. Though consumers would benefit from cheap wares, European firms making cars, dishwashers and the like there would suffer. Politicians are unlikely to tolerate this; a surge in Chinese electric vehicles (EVs) heading to the EU last year prompted the bloc to impose tariffs of around 35%, purportedly to offset the advantage Chinese firms get from state subsidies.
Such fretting over slumping exports and surging imports comes on top of a growing scepticism in some EU quarters of the benefits of free trade. These days it is not only European farmers who complain about imports. “Trade used to be about economics; now it is also about geopolitics,” says Jacob Kirkegaard at Bruegel, a think-tank in Brussels. Globe-spanning supply chains were once seen as clever business. Now politicians worry more about economic security, and becoming hooked on stuff produced by potential foes (Russian gas comes to mind). France, long sceptical of overly-open trade, has pushed the idea of “strategic autonomy”, meaning reducing reliance on foreigners. Germany used to be keen on trade with China when that meant shipping lots of cars there; less so now that Chinese rivals build world-beating EVs. (…)
Luckily for free-traders, France’s influence in Europe has atrophied as its politics has descended into chaos. And there are still lots of fans of open commerce in Europe, notably among its smaller countries, from Denmark to the Czech Republic and Ireland. Their firms have long thrived by looking beyond puny domestic markets: there are only so many potential Danish customers for Ozempic, a fat-busting drug invented there. (…)
With no choice but to keep trading, what are Europe’s options? One solution is to find a balance between China and America. EU officials have suggested the bloc should help America contain the “challenge” of Chinese exports, or conversely seek ways of expanding its trade with China (final outcome: to be confirmed). Meanwhile the bloc has signed or initiated a slew of bilateral trade arrangements with smaller partners in recent months, including Mexico, Malaysia and Mercosur, a bloc that includes Brazil and Argentina. More such deals are in the works, to farmers’ irritation. But if the two giants of the global economy step back from free trade, Europe will need new partners. ■
https://www.economist.com/europe/2025/02/06/can-europe-afford-to-be-the-worlds-last-free-trader
Le Figaro, 8 février, article payant
«Leur pensée, marginale, devient presque hégémonique»: sur les traces des libertariens, ces idéologues qui inspirent Musk et Milei
RÉCIT – Avec l’élection en Argentine du «premier président libertarien de l’histoire» en 2023 et l’ascension d’Elon Musk aux côtés de Donald Trump, le libertarianisme a le vent en poupe. D’Ayn Rand à Murray Rothbard, qui sont les penseurs phares de cette philosophie radicale encore pratiquement inconnue en Europe ?

Article intégral: https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/02/8-fevrier-1.pdf
Le Point, 8 février, article payant
En France, la méthode Milei ne laisse pas indifférent
Classe politique et patronat étudient avec intérêt les recettes drastiques du président argentin concernant les normes bureaucratiques et les dépenses de l’État. Modèle à suivre ou effet de mode

Extraits:
Une fois n’est pas coutume, ce n’est plus la gauche mais la droite française qui, cet hiver, s’est mise à l’heure sud-américaine. Qu’ils soient président de région, maire, député ou candidat à la présidentielle, toute une part de l’échiquier politique hexagonal se redécouvre un penchant libéral, jusqu’à scander l’étonnant mantra du président argentin, Javier Milei : « Afuera ! » (« Dehors », en français). Un brin moqué de ce côté-ci de l’Atlantique en novembre 2023 lors de son élection, tronçonneuse au poing, le libertarien ébouriffé finit par susciter l’envie et inspirer en France.
Pour cause. La cure qu’il a imposée à l’Argentine, faite de coupes budgétaires drastiques et de dégraissage de l’appareil étatique, a permis de réduire l’inflation de moitié en seulement un an et d’obtenir un excédent budgétaire et commercial record. De quoi faire pâlir l’Hexagone, étouffé par ses 3 300 milliards de dette, son déficit hors de contrôle, son nombre record de fonctionnaires (5,7 millions) et ses prélèvements obligatoires les plus hauts au monde… (…)
Attablé dans une brasserie parisienne, Santiago Muzio s’amuse du succès de son ami Milei, ici, en France : « Il faut comprendre que Javier est moins un homme politique qu’une rock star. Il a quelque chose de totalement disruptif en lui avec une véritable vision. Dans son esprit, seules trois choses sacrées doivent être protégées : la liberté, la propriété et la vie. » (…)
Les premiers hommages à Javier Milei en France sont venus du patron de Nouvelle Énergie, le libéral assumé David Lisnard. Déjà maire Les Républicains de Cannes (Alpes-Maritimes), il ne cache plus ses velléités d’être candidat à la prochaine présidentielle. En avril dernier, le quinquagénaire démontrait son soutien à Milei en parsemant presque chacune de ses prises de parole ou chacun de ses messages sur les réseaux sociaux de clins d’œil appuyés au président argentin. (…)
C’est moins le slogan que l’objet fétiche du libéral-populiste argentin qui a visiblement séduit Éric Ciotti. Voilà des semaines que l’ancien patron des Républicains, désormais allié à Marine Le Pen et à la tête d’une nouvelle formation, l’Union des droites pour la République (UDR), bûchait avec ses équipes sur une proposition de loi économique.
Ayant vocation à lutter contre l’excès de normes et la « suradministration, ce cancer qui ronge notre pays », le texte rebaptisé « loi tronçonneuse » aura finalement été présenté fin janvier à la presse dans les cossus salons de la Maison de l’Amérique latine, boulevard Saint-Germain, à Paris. (…)
Sans avoir à s’en réclamer, la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, se voit désormais pointée comme « ayant voulu faire du Milei avant Milei ». Avec sa proposition d’un « comité de la hache », visant notamment à supprimer 500 structures paraétatiques lors de la dernière présidentielle. Même chose pour Christelle Morançais, surnommée la « Javier Milei des Pays de la Loire », région que la LR préside depuis 2017, après avoir sabré du budget quelque 100 millions d’euros de dépenses publiques… (…)
Reste à savoir si la rhétorique antibureaucratique et antinorme qui souffle ces derniers mois sur le pays restera une mode éphémère. Ou si, au contraire, celle-ci peut muter en un des ressorts de la prochaine présidentielle…
Depuis ses bureaux face à l’Assemblée nationale, le chef des députés Les Républicains et probable candidat à la présidentielle, Laurent Wauquiez, a son idée : « Le ras-le-bol des normes, la complexité administrative sont des champs politiques importants. Mais la dérégulation ne peut pas être l’alpha et l’oméga d’une offre politique. Il faut bien comprendre que Javier Milei est le produit d’un pays ruiné par vingt ans d’inflation à des taux délirants qui, au bord du précipice, a voulu tenter le tout pour le tout… » Les précipices sont parfois plus proches que l’on ne croit.
Le Figaro, 6 février, libre accès
Pour Jean-Luc Mélenchon, «il est immoral d’être milliardaire» (avec Vidéo)
«Tout ce qui va aux milliardaires a été retiré à ceux qui produisent», a scandé le leader de La France insoumise au cours d’un meeting à Angers, avant de fustiger «le libéralisme».

Article intégral :
Le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a estimé mercredi qu’il est «immoral d’être milliardaire», au cours d’un meeting à Angers (Maine-et-Loire). Le fondateur LFI s’exprimait quelques heures après la motion de censure déposée par son parti à laquelle le gouvernement de François Bayrou a échappé, en partie grâce aux députés PS qui ont, à une très large majorité, choisi de ne pas s’y associer.
«C’est toujours la même chose : les uns accumulent sans fin et les autres se font dépouiller de même en parallèle exact, a lancé le tribun LFI devant ses partisans. Tout ce qui va aux milliardaires a été retiré à ceux qui produisent. C’est la vérité !» Le triple candidat à la présidentielle s’est lancé dans une diatribe du libéralisme, qu’il qualifie de «catastrophe permanente qui a ruiné ce pays, ses finances et sa capacité d’invention».
«La révolution citoyenne à laquelle nous aspirons se fait par les urnes et par des votes à l’Assemblée nationale», a estimé Jean-Luc Mélenchon, rappelant ensuite la victoire du Nouveau Front Populaire aux élections législatives début juillet, puis la chute gouvernement Barnier le 13 décembre. «C’est sans un mètre de barricade ni un coup de fusil que nous avons fait tomber un gouvernement, a-t-il poursuivi. C’est par ce chemin que nous l’emporterons, et par ce chemin démocratique citoyen que nous changerons tout de fond en comble !»
Contrepoints, 3 février, libre accès
Science maudite ou science du bonheur ? Les vertus cachées de la science économique

Article intégral :
Nos contemporains ignorent la science économique ou ne l’aiment pas ; cette prévention n’est pas nouvelle. Au dix-neuvième siècle et en dépit du fait que beaucoup d’économistes figuraient parmi les esprits les plus lumineux de leur temps : Jean Baptiste Say, Frédéric Bastiat, Frédéric Le Play, Alexis de Tocqueville par exemple, la science économique fut considérée par les uns comme une « science lugubre » (Thomas Carlyle), bien d’autres acquiesçant au verdict de Gustave Flaubert qui la disait une science « sans entrailles ».
Une certaine science économique, par sa formalisation austère ou trop mathématisée, est peu « économe » des forces de qui cherche à la comprendre. En se rendant souvent incompréhensible, notamment dans les cinquante dernières années, elle s’est rendue inefficace. Plus fondamentalement, les reproches les plus courants se sont presque tous polarisés sur sa définition de l’utilité et sur la notion associée du libéralisme, notions polluées en permanence par leurs significations multiples dans d’autres disciplines ou sous d’autres cieux. Les contemporains trouvent donc généralement la science économique trop utilitariste, trop matérialiste, trop horizontale, trop « terre à terre », sans élévation spirituelle ou même culturelle.
Au commencement, la science économique n’existait pas. Le terme « paradis terrestre » évoque une utilité maximisée d’avance, une perfection des sentiments et sensations qui la rendait inutile. La science économique apparaît dès la Chute, chacun devant maximiser son utilité à la sueur de son front. C’est donc une science associée à une malédiction mais aussi paradoxalement à la meilleure façon de retourner l’homme vers le bien ; elle fait connaître et organise la manière d’y parvenir à l’aide des éléments naturels de la création. Pour les chrétiens, elle est présente dans toutes les pages de l’Evangile consacrées au bonheur de l’homme et organise le « devoir d’état » en vue de l’utilité suprême. Joseph, patron des travailleurs, a élevé l’enfant Jésus à la tête d’une petite entreprise de charpentier-menuisier bien gérée, avec probablement l’aide de Marie comme cela se passe dans beaucoup de PME.
La science économique est la science de la production d’utilité
Comme le révèle l’analyse de Gary Becker, tous les individus sont dans le même cas, quelles que soient leurs croyances et selon leur fonction d’utilité particulière. Dans une société libérale, les moyens économiques sont donc toujours ordonnés par les personnes elles-mêmes en vue d’un bien supérieur. Ils contribuent à piloter la démographie et l’évolution des mentalités. Les gens de tous pays et de toutes religions conduisent ainsi leur existence, assurent au mieux leur devoir d’état et mènent leur vie professionnelle et personnelle en maximisant leur utilité selon les mêmes principes.
La production des biens et services marchands et la croissance sont la partie émergée de l’iceberg économique. Elles se déduisent de la fonction d’utilité en quantité comme en structure, en déployant efficacement tout ce que Ludwig von Mises appelait l’action humaine : le temps de travail, l’épargne, le capital humain ou matériel, les cultures, l’esprit d’entreprise et plus généralement les investissements. La croissance économique est ainsi une séquence infinie d’investissements réussis. Des moyens matériels et culturels sont mis en œuvre par tous les hommes et femmes de la Terre pour s’enrichir et enrichir les enfants et successeurs dans la direction que chacun se fixe en permanence.
L’économiste affirme par ailleurs que la somme imagée des utilités particulières en mouvement s’appelle le développement économique et il s’applique à en discuter dans l’optique de Pareto. Le développement est donc un concept bien plus général que la simple montée en puissance des économies des pays pauvres. Il est aussi et malheureusement réversible.
La liberté fait que chaque personne maximise sa propre utilité et beaucoup choisissent des buts a priori plus ou moins nobles ou carrément mauvais ou minables. Dans les sociétés contemporaines, au moins pour les pays occidentaux, on observe un émiettement sociétal par un effet pervers de la liberté des choix ; la diversification du peuplement et des cultures y contribue également pour nombre de pays. Cela rend de plus en plus difficile la coordination des aspirations particulières et la fraternité sociale nécessaires au développement. La croissance économique en est lourdement atteinte, comme l’exprime l’évolution quasi nulle du PIB français de ces dernières décennies. En aucun cas, ces phénomènes négatifs ne peuvent être imputés à la science économique elle-même qui se borne à les observer et ne cherche jamais à les justifier moralement. Elle n’a partie liée avec aucune des déviances de matérialisme, d’égoïsme, de recherche de puissance ni même à l’inverse avec la dégradation publique et l’impuissance qui en résulte.
The Economist, Leader, January 31, pay wall
Sticky tape : Around the world, an anti-red-tape revolution is taking hold
Done right, deregulation could kick-start economic growth

Article intégral : https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/31-janvier-2.pdf
The Wall Street Journal, January 30, pay wall
America’s Schools Keep Flunking
NAEP reading scores continue to decline, years after Covid lockdowns.

Extraits:
Talk about throwing good money after bad. Washington spent $190 billion to make up for the damage from the Covid school shutdowns. What did it get students and taxpayers? Worse academic performance.
That’s the bottom line from the 2024 National Assessment for Educational Progress (NAEP) report released on Wednesday. Fourth and eighth grade reading scores declined by two points on average since 2022—roughly as much as they did between 2019 and 2022. Some 33% of eighth graders scored below “basic” on the reading exam—a record low.
Eighth-grade math scores remained about the same as two years ago but were eight points lower than in 2019. The sliver of good news is that fourth-grade math scores increased by two points since 2022, but this doesn’t make up for the five-point drop between 2019 and 2022. The takeaway: Even with children back in school full-time, they still aren’t learning.
Worse, the achievement gap increased. High math performers in both grades scored better last year while low performers did worse or the same. Test scores for students scoring at the 75th and 90th percentiles in reading have marginally improved since 1992, but they’ve declined for students at the 10th and 25th percentiles. (…)
Some education experts such as Harvard’s Tom Kane point to student mental-health problems, less test-based accountability and increasing screen time. No doubt spending hours on TikTok after or even during school doesn’t help learning. Neither do the “no homework” policies that many school districts have implemented.
Pouring more money into the public school system clearly isn’t helping. On average, public school districts nationwide spent $15,825 per student in fiscal 2023 compared to $10,724 a decade earlier, according to the Census Bureau.
Yet the teachers unions use their failure to deliver better results as an excuse for ever-more money. Union boss Randi Weingarten on Wednesday claimed the “stagnant” NAEP scores show the need for “expanding community schools to provide wraparound services”—e.g., social and healthcare services—and “securing investments for smaller class sizes, good ventilation and the tools and technology for 21st-century learning.”
Sorry, children aren’t doing worse because of bad air filters or old computers. They scored better without 21st-century technology. Declining performance is a resounding argument for giving parents freedom to take their tax dollars to schools that meet their needs. This is what states such as Iowa, Florida and Arizona have done by enacting education savings accounts.
The continued learning loss after the hundreds of billions of dollars schools received in pandemic largesse is a disgrace. All the more reason for Donald Trump and Republicans to take the lead on education and make the case for more choice and accountability.
https://www.wsj.com/opinion/naep-scores-2024-education-covid
The Wall Street Journal, January 30, pay wall
DeepSeek AI Is the Competition America Needs
The company’s success demonstrates the futility of the U.S. policy of subsidies and sanctions.

Extraits:
The success of DeepSeek, the Chinese rival to American goliaths with radically more cost-effective artificial intelligence, reveals the futility of U.S. sanctions policies. Under the Biden administration, the American government was captured by some of the world’s most ham-handed national-security socialists, while the Chinese private sector under Xi Jinping commands some of the world’s most nimble capitalists.
The entrepreneur behind DeepSeek’s apparent breakthrough is Liang Wenfeng, who founded the High-Flyer hedge fund in 2015. Since DeepSeek’s launch less than two years ago, the venture has received no further outside funding. China has roughly nine times as many engineers as the U.S. and perhaps 15 times as many science and technology graduates. That means Mr. Liang had a cornucopia of technical talent at his disposal, all galvanized by the challenge of doing AI without violating U.S. restrictions on the memory bandwidth of their Nvidia graphics processing units. These chips, like the leading GPUs in U.S. AI data centers, are nearly all fabricated by Taiwan Semiconductor Manufacturing Co.
“Do more with less” is the Chinese entrepreneurial answer to American “Stargate” program socialism, mobilizing a half-trillion dollars to do more with more, as governments and politicians usually try to do. (…)
By discrediting U.S. sanctions and subsidies, again, Chinese capitalists are performing a service for U.S. capitalism. American entrepreneurs are hamstrung by a putative $6 trillion in global climate-change mandates and subsidies for obsolete technologies, such as windmills and solar panels, specified by zero-sum Green New Dealers. The U.S. has been dissipating the bonanzas conferred in recent decades on our economy by Chinese manufacturing prodigies from Foxconn in Shenzhen and other Chinese fabricators. Chinese factories have been crucial to enabling American companies to command as much as 70% of global equity market capitalization, compared with 10% at best for China.
DeepSeek, by using microchips more efficiently, is similarly favorable to the U.S. economy. As my chip-guru colleague John Schroeter wrote in his newsletter—and both Nvidia’s Jensen Huang and Microsoft’s Satya Nadella have said—semiconductors are an example of the Jevons Paradox. William Stanley Jevons, a 19th-century British economist, discovered that when a resource is rendered more efficient, we use more of it, often so much more that total spending on the resource rises. When people used only fire for lighting, the world was a very dark place. Nobel laureate William Nordhaus has pointed out that as we progressed from candles to oil lamps to incandescent lights and now LEDs, the cost of lighting dropped by 99.97%, yet we buy more of it than ever.
Advancing at an even faster pace, the number of transistors a dollar buys has increased by several million percent in 70 years. At the same time, annual global spending on semiconductors has grown from less than a few hundred million dollars to nearly $700 billion. The cheaper computing became, the more it was demanded.
Today, the key breakthrough in technology isn’t some ingenious trope in AI software but the emergence of an era altogether beyond microchips. Called wafer-scale integration, it obviates the usual data-center welter of chips and “chiplets” in plastic packages backed by snarls of wire and racks of computer servers. (…)
Pioneering this breakthrough are U.S. companies such as Cerebras and Tesla. (…)
The most advanced wafer-scale project is Tesla’s Dojo system for AI training. It is based on the vast accumulation of video data from the cameras on Tesla’s automobiles. This system is based not on chips or internet data, but on real sensory inputs and “training tiles,” which are interconnected across entire wafers. (…)
Working with Taiwan Semiconductor Manufacturing Co. to overthrow the existing data-center era, these ventures promise processing economies of a scale millions of times greater than anything contemplated at DeepSeek or other AI companies. (…)
The chief obstacle to the success of such ventures is the U.S. national-security apparatus, which somehow imagines that by inflicting sanctions on China, it can help Americans. Beyond the huge challenges of replacing the existing paradigm of semiconductor fabrication, Mr. de Heer’s main obstacle is his previous links with Tianjin University in China and his Chinese students at Georgia Tech. He is under investigation by a congressional committee on China for alleged links between his research and the Chinese military. Mr. de Heer said several of his students are back in China, collecting about $350 million in investments for a wafer-scale project.
Technology is the key adventure of human progress, and it is intrinsically global. The key test of the Trump administration will be whether it can come to terms with this fact of life and enterprise.
Mr. Gilder is author of “Gaming AI: Why AI Can’t Think but Can Transform Jobs” and “Life After Capitalism: The Information Theory of Economics.”
The Wall Street Journal, January 28, pay wall
Trump Tariffs Are a Wealth Killer
Two centuries of experience proves the economic foolishness of taxing imports.

Extraits:
“We will tariff and tax foreign countries to enrich our citizens,” President Trump declared in his inauguration speech. Adam Smith is turning in his grave. Tariffs destroy wealth. No matter, Mr. Trump said he may slap 25% tariffs on Canada and Mexico starting Feb. 1 and 10% on China. An executive memorandum demanded his administration study trade deficits and tariffs. Here’s a study guide:
In 1815, as the Napoleonic Wars ended and a fear of cheap grain imports arose, the landowner-protecting British Parliament passed the Corn Laws, imposing tariffs on foreign wheat and maize. This helped some farmers, but the Industrial Revolution was just starting, and workers who had flooded into cities faced shortages and high bread prices. There were many riots. Worse, reduced trade deprived the French and other countries of gold to pay for England’s new industrial output. The laws were self-defeating, yet they weren’t repealed until 1846.
Sound familiar? In a populist bid to protect our dwindling manufacturing workforce, economically clueless Trump whisperers push tariffs. A select few workers may be helped, but most Americans will be worse off—though I doubt we’ll see riots protesting higher prices on made-in-China Gap clothes, Barbie dolls or Hush Puppies shoes. But new Trump tariffs will raise prices and restrict other countries from affording our high-margin exports—drugs, phones, planes and many software and artificial-intelligence services. That’s dumb.
Why do presidents have the power to tariff anyway? Article I, Section 8 of the Constitution plainly states: “The Congress shall have Power To lay and collect Taxes, Duties, Imposts and Excises. . . . To regulate Commerce with foreign Nations.” (…)
Notice how everything is now either a national-security concern or an emergency. Tariffs on Canadian bacon for national defense? A national emergency? Hardly. But par for the course—we’ve had sugar tariffs since 1789. And a 25% “chicken tax,” a tariff on imported pickup trucks in retaliation for (long gone) European tariffs on American chicken.
Is the U.S. playing chicken? Apologists try to rationalize tariffs as a negotiating tactic, violating the first rule of negotiating by even mentioning it. Tariffs are coming. Expect retaliation and inflation—precisely why tariffs don’t work. (…)
In 2022 there were around 278,000 steel- and iron-manufacturing jobs in the U.S., with an average salary of about $75,000. There are an estimated 12 million jobs in industries that use steel. Two million of those are intensive users of steel, more than 5% of their input. Tariffs might theoretically create 100,000 new steel jobs, at best, but they would raise prices and probably destroy a million other jobs. This is the opposite of “the revolution of common sense” Mr. Trump mentioned in his inaugural address.
A 2021 study by Oxford Economics and the U.S.-China Business Council showed the first-term Mr. Trump’s tariffs and trade policies destroyed 245,000 jobs. The Tax Foundation estimates Trump-Biden tariffs reduced long-run gross domestic product by 0.2%—roughly $58 billion annually. On the flip side, the Peterson Institute for International Economics estimates that free trade since 1950 has cumulatively boosted the U.S. economy by $2.6 trillion, or $19,500 a household. Why go backward? Congress should reclaim its tariff power.
Instead, the backroom begging will start for tariff exemptions—machinery, certain pharmaceuticals, school pencils, cobalt for electric-car batteries, Nike Kobe 5 Protro “Year of the Mamba” sneakers—a lobbyist’s paradise. Free trade, not politicians, is best at allocating resources. Protectionism and mercantilism in the form of tariffs and subsidies, like the British Corn Laws, are inefficient, unproductive, corruption-inducing and wealth-destroying. That won’t make America great again.
Le Figaro, 28 janvier, article payant
«C’est normal qu’en France les salariés râlent» : visualisez les considérables écarts entre salaire brut et net à travers l’Europe
INFOGRAPHIES – Le patron de Michelin Florent Menegaux a récemment jugé que «le gros problème» de la France était le coût salarial «trop élevé». En Europe, notre pays fait en effet figure de champion des prélèvements.

Extraits:
En France, «le gros problème, ce n’est pas tant le niveau de salaire, c’est l’écart entre le brut et le net». Si cette préoccupation n’est pas nouvelle, le président de Michelin, Florent Menegaux, l’a remise sur le tapis la semaine dernière. Auditionné au Sénat, le patron du leader mondial de fabrication de pneus a pointé du doigt le poids des prélèvements pesant sur les salaires. En France, pour un salaire brut de 100 euros, «le coût moyen pour l’entreprise, c’est 142. Le salarié, lui, va toucher 77,5», a-t-il indiqué. «Les mêmes 100 euros, versés en Allemagne, vont coûter 120 à l’entreprise, et le salarié va toucher 80», a-t-il ensuite détaillé. «C’est normal qu’en France les salariés râlent. (…) C’est normal que les entreprises râlent», a-t-il affirmé. Avant de donner d’autres exemples internationaux : au Canada, «le coût pour l’entreprise, c’est 115, pour le salarié, c’est 85. Pour la Thaïlande, le coût pour l’entreprise, c’est 120, et pour le salarié, c’est 80». Un «sujet collectif qui ne va pas du tout», alors que le coût salarial «est trop élevé», quand le net «est trop faible» en France, a déploré le dirigeant.
En mars 2024, celui qui était alors ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, avait déjà questionné le poids du financement du système social français pesant sur les salaires, affirmant au quotidien régional Sud Ouest que l’écart entre le revenu net et le brut atteignait «40% à 50%» en France. Plutôt que le salaire brut, l’ex-locataire de Bercy parlait en réalité de la différence entre le «super brut», qui désigne le salaire brut augmenté des charges patronales, et le net, soit le salaire brut auquel on retranche les cotisations salariales.
Un écart appelé également «coin fiscal», ou «coin fiscalo-social», qu’Emmanuel Macron avait dit vouloir baisser «pour les revenus entre 1500 et 2500 euros», en mai 2023 dans une interview à L’Opinion . Il est vrai qu’en France, cette «différence entre les coûts de main-d’œuvre pour l’employeur et la part correspondant à la rémunération nette après impôt du salarié» – selon la définition de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) – est particulièrement élevée.

En 2023, elle s’établissait à 46,8% pour un salarié français célibataire (sans enfant) touchant le salaire moyen (autour de 1500 euros net par mois), bien au-dessus de la moyenne de l’OCDE (34,8% en 2023). Ainsi, en moyenne sur 1000 euros payés par un employeur à un salarié, environ 470 sont prélevés d’une manière ou d’une autre par l’État.
Autrement dit, en France, le salaire net après impôts représente seulement 53,2% du salaire «super brut». En Europe, seules l’Autriche, l’Allemagne et la Belgique sont derrière. À l’inverse, c’est en Suisse que le salaire net est le plus proche du coût du salarié pour l’employeur (76,5%) sur le Vieux Continent, devant le Royaume-Uni (68,7%) et l’Islande (68,3%).
Si nombre de salariés français se plaignent de l’écart entre leur salaire brut visible sur leur fiche de paie et le salaire qu’ils touchent au final, la France ne figure pourtant pas en queue de peloton en Europe. Elle se place en milieu de classement, avec un net représentant 72,5% du salaire brut. La Suisse trône toujours en tête (81,4%), devant l’Estonie (81,1%) et la République tchèque (80%), qui ont toutefois des modèles de protection sociale très différents. La Belgique (60,1%), la Lituanie (62,2%) et l’Allemagne (62,6%) traînent elles en bas de classement.
The Economist, January 25, pay wall
Do tariffs raise inflation?
Usually. But the bigger problem is that they harm economic growth and innovation

Extraits:
Mountain-naming turned out to be a curiously high priority for Donald Trump. Mere hours after his inauguration, the president signed an executive order to change the name of America’s highest peak from Denali, of indigenous Alaskan origin, back to Mount McKinley, as it was officially known until Barack Obama intervened in 2015. The rechristening reflects more than just the usual culture-war ping-pong. Like Mr Trump, William McKinley was a “tariff man”. As a congressman and later president, he swung America toward protectionism in the late 19th century. “President McKinley made our country very rich through tariffs and through talent,” said Mr Trump in his inaugural address.
Over a century later, Mr Trump hopes to pull off the same trick. His raft of day-one executive orders did not institute any new tariffs, focusing on mountains, a border emergency, drilling for oil and halting DEI programmes. But the president still found time to threaten a 10% tariff on China, as well as a 25% tariff on Canada and Mexico, to be introduced as soon as February 1st. He also floated a “global supplemental tariff”, which would apply to any good imported from abroad, no matter its country of origin.
Higher tariffs, Mr Trump and his backers say, will boost American manufacturing and fund tax cuts at little cost to the everyman, with foreigners footing the bill instead. These justifications are feeble, just as they were in McKinley’s day. For a start, firms usually pass on tariffs by raising prices. During Mr Trump’s last sortie against Chinese manufacturing in 2018-19, prices of impacted items went up roughly one-for-one with higher tariffs.
Mr Trump’s more thoughtful advisers, such as Scott Bessent, nominated for treasury secretary, and Stephen Miran, for chair of the Council of Economic Advisers, accept this dynamic. But they emphasise that tariffs also strengthen the dollar by pushing Americans to purchase less from abroad. This lifts their purchasing power and so should help cancel out higher prices. Exchange rates depend on much more than goods trade, so the effect of tariffs during Mr Trump’s first term was small. In 2018-19, for instance, they explain at most a fifth of the move in the dollar over the period, according to Olivier Jeanne and Jeongwon Son of Johns Hopkins University. Bigger tariffs would have bigger effects.
Yet even if the dollar rises, the pain simply shifts to exporters, whose wares become more expensive for international buyers (which is why Mr Trump usually favours a weaker dollar). For his part, Mr Miran argued in a recent paper that the greenback’s popularity imposes “externalities” on America’s economy, since demand for assets yanks the dollar above its fair value, hobbling exporters in the process. This theory is questionable on its own merits. The big deficits that recent administrations have run could not have been financed so cheaply without a queue of foreigners buying Treasury bonds. Moreover, if Mr Miran had his way, any boost to the dollar from tariffs would be short-lived: a dollar devaluation would once again leave households facing higher prices.
Tariff-boosters also downplay the odds that other countries will respond in kind. And patience, even among allies, is already wearing thin. (…)
So tariffs raise prices. Does that mean they cause painful inflation? Not necessarily. A one-off increase in prices might create only a short-term pop in inflation, not a sustained rise. Tariffs erode consumers’ overall spending power, and falling consumption of things produced at home creates offsetting disinflation over time. Yet there is at least a danger that a one-off shock would set off an upwards spiral of prices and wages. After several years of high inflation, such a risk is now more pronounced.
Worse still, tariffs also crimp economic growth by creating “deadweight loss”, as demand is skewed towards domestic companies even when they are less efficient. As a consequence, resources are wasted on production that is more expensive than it otherwise would have been. The result is a vast economic distortion and lower incomes throughout the economy.
This effect is exacerbated by the fact that tariffs induce companies to innovate less and misbehave more. Sheltered from better-run foreign rivals, firms have less incentive to produce superior and cheaper products. (…)
Over the course of his political career, McKinley’s own enthusiasm for protectionism softened. Although America’s 25th president never transformed into a free-trader of The Economist’s variety, he did come to appreciate the benefits of mutually advantageous trade deals with friendly countries. “We must not repose in fancied security that we can for ever sell everything and buy little or nothing,” he announced in Buffalo, New York, in 1901, before adding that “commercial wars are unprofitable”. America’s 45th and 47th president has perhaps not learned the correct lessons from his predecessor. ■
https://www.economist.com/finance-and-economics/2025/01/23/do-tariffs-raise-inflation
IREF, 25 janvier, libre accès
Le philosophe André Comte-Sponville a raison de dire qu’ « une économie libérale crée plus de richesse qu’une économie étatisée »

Article intégral:
André Comte-Sponville a donné une interview à l’hebdomadaire L’Express (16-22 janvier 2025). Nous nous étions fait l’écho, dans un précédent article, de la persistance chez l’auteur du Capitalisme est-il moral ? (2004) de certains préjugés concernant le libéralisme, que nous déplorions. Ancien sympathisant communiste dans sa jeunesse (comme beaucoup l’étaient alors), devenu social-démocrate avec le temps, le philosophe prend soin de rappeler dans l’entretien en question qu’il n’est nullement tombé pour autant dans l’ « ultralibéralisme » – quelle originalité ! Cela dit, nous nous réjouissons d’y lire les propos suivants :
- « Tant que la gauche française ne se sera pas réconciliée avec le libéralisme, elle se voue aux incantations, dans l’opposition, et à l’échec, quand elle parvient au pouvoir ». Cramponnée à sa défense de l’étatisme, du collectivisme et de la redistribution à tout-va, la gauche française reste sans doute en effet la gauche la plus archaïque de toute l’Europe : il n’y a probablement qu’elle qui n’ait jamais véritablement fait son Bad Godesberg – du nom du fameux congrès du Parti social-démocrate allemand de 1959, lequel a alors pris ses distances avec le socialisme dogmatique, en reconnaissant notamment le rôle premier de l’entrepreneur et de la libre-concurrence.
- « Quelles différences entre le programme commun (NDLR : de la gauche, adopté en 1972) et celui du Nouveau Front populaire ? Je n’en vois guère de décisives ».
- « Avec une politique de gauche traditionnelle, de relance par la demande, la France s’est retrouvée exsangue ». « La gauche n’a toujours pas compris que la politique de la relance par la demande, dans une économie mondialisée, ne peut pas fonctionner ». Ce point montre qu’André Comte-Sponville a compris que ce sont les politiques libérales dites de « l’offre » qui marchent, et non les politiques économiques d’inspiration keynésienne, qui semblent néanmoins toujours autant inspirer la gauche française malgré leurs innombrables échecs largement avérés.
- « Une économie libérale crée plus de richesse qu’une économie étatisée. Or créer de la richesse, c’est la seule manière de faire reculer la pauvreté ». Comme le regretté Jacques Marseille qu’il cite, André Comte-Sponville a compris que le socialisme fabrique de la pauvreté, là où le libéralisme permet au contraire d’en sortir.
On regrettera toutefois qu’André Comte-Sponville dise que « nous avons besoin de régulations » – ne veut-il pas en réalité parler ici de « réglementations » ? Non, nous avons besoin de liberté économique, de libre concurrence, d’une fiscalité juste et modérée, de responsabilité individuelle, et d’un État de droit qui garantisse le respect de ces grands principes fondamentaux. Reste qu’il convient de saluer les propos susmentionnés, qui tranchent avec les ritournelles qu’on entend à peu près partout à propos du capitalisme libéral comme supposé facteur d’aggravation des inégalités sociales.
IREF, 25 janvier, libre accès
L’économiste Joseph Stiglitz reste bien le « progressiste » qu’on a toujours connu

Article intégral :
Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, auteur de nombreux livres qui reçoivent toujours un accueil très favorable dans les cercles « progressistes », vient de donner un entretien au Figaro. Il y fustige, comme on pouvait s’y attendre, le « néolibéralisme », terme au demeurant vague et dont on peut se demander si le sempiternel emploi ne fonctionne pas comme un signe de ralliement des antilibéraux de tous bords. Tâchons ici de résumer et de discuter certains des points saillants de son propos.
- Le « néolibéralisme » serait fondé sur l’égoïsme des individus et sur la théorie de la « main invisible » guidant la satisfaction des intérêts privés vers le bien commun. Or, nous dit-il, seules les sociétés fondées sur la solidarité et la redistribution fonctionnent. Objectons déjà qu’il n’y a pas de solidarité possible dans la misère et la pénurie. En créant des richesses plus qu’aucun autre système économique, le libéralisme rend justement possible les actions de charité et de solidarité. Ensuite, il ne faut pas confondre la prétendue solidarité, celle qui est imposée aux individus par un État spoliateur, dilapidateur et prébendier, avec la vraie, celle qui est choisie librement par les individus, en dehors de toute contrainte : Stiglitz devrait savoir que c’est dans les sociétés capitalistes et libérales où l’État est traditionnellement peu présent en dehors des limites du régalien, que la solidarité est la plus développée, ainsi que l’atteste la riche et longue tradition de la philanthropie américaine.
- « Quand il y a trop d’inégalités (…), déclare également Stiglitz, les plus riches ne dépendent plus des services publics» (je souligne), car ils peuvent se permettre d’avoir recours à des services onéreux, d’ordre privé. Or est-ce là un mal ? Si les « riches » ont parfois recours à des services privés, n’est-ce pas parce qu’ils jugent défaillants ou insuffisamment efficaces les services publics ? Voilà bien au demeurant l’un des rêves des progressistes explicitement formulé : rendre les citoyens, et notamment « les plus riches », dépendants des services financés par l’État ! Or les services au public doivent avant tout répondre à la demande des « usagers », comme on dit en France, et ce au meilleur tarif, ce qui n’est possible que dans le cadre d’une véritable concurrence entre fournisseurs de services.
- En outre, pour Stiglitz, il ne fait aucun doute qu’aux États-Unis « on ne taxe pas assez le profit ». Il s’inscrit ainsi pleinement dans la tradition américaine du Big Government, se proposant même d’établir outre-Atlantique un « capitalisme progressiste ». Pour Stiglitz, il est temps de soumettre les marchés à un contrôle étatique plus strict, à travers l’impôt et la réglementation… L’inverse exact, en somme, de ce que fit Ronald Reagan en son temps, et de ce que proposent de faire Donald Trump et Elon Musk dans le cadre du Department of Government Efficiency (DOGE).
The Economist, January 24, pay wall
In search of growth : European governments struggle to stop rich people from fleeing
Exit taxes are popular, and counter-productive

Extraits:
When a government falls apart, pay attention to the laws ministers still manage to pass. Germany’s collapsing “traffic-light” coalition was unable to agree on climate policy or a budget, but it flashed green for one change: an exit tax. Since January 1st anyone with over €500,000 ($520,000) in investment funds has had to pay income tax on gains earned in Germany if they wish to extract their money from the country.
Germany’s exit-tax enthusiasm is replicated across Europe. Norway’s government also brought in changes for the new year. In a second stiffening of the rules in as many years, rich Norwegians will now pay levies on dividends if they plan to remain outside their fatherland. A doomed French budget would have tightened an exit tax that left-wing lawmakers complain has been gutted. Dutch parliamentarians have instructed their government to investigate introducing an exit tax of its own.
An exit tax can be a helpful piece of politics. So many rich Norwegians moved to Switzerland after the introduction of a higher wealth tax, that DNB, Norway’s biggest bank, set up a Swiss office, and the socialist party created a “wall of shame” for émigrés. Exit taxes, swiftly toughened, then appeared to be prudent fiscal planning (and a way to shift blame to those who had upped sticks). In recent years Europe’s economy and stockmarkets have lagged far behind those across the Atlantic. This both increases the incentive for people to invest elsewhere and for governments to look for new sources of revenue.
But how much money do exit taxes actually bring in? Not much. The well-heeled are well-motivated to find loopholes. (…)
European laws further complicate matters. Germany’s new rules may violate EU legislation protecting the free movement of capital, says Christian Kempges of Grant Thornton, a consultancy. (…)
This dysfunction shows up in revenues that are collected. Norway’s Ministry of Finance estimates its amended exit charge will raise $120m a year once its 12-year tail has run out, an amount equivalent to 0.04% of the state’s total revenue in 2023. Little surprise, then, that others are giving up on the taxes. Finland and Sweden both published proposals the year that Norway first tinkered with its measure, only to abandon them. For Norwegians sick of chocolate and yodelling, there may even be some relief: opposition parties are sceptical of the tax, and ahead in the polls.■
The Economist, January 23, pay wall
Schumpeter : Donald Trump’s America will not become a tech oligarchy
Reasons not to panic about the tech-industrial complex

Read full article here : https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/23-janvier-2.pdf
Link: https://www.economist.com/business/2025/01/21/donald-trumps-america-will-not-become-a-tech-oligarchy
The Economist, January 22, pay wall
Trading losses : Tariffs will spark retaliation, not a manufacturing renaissance
Donald Trump’s pursuit of tariffs will make the world poorer—and America, too

Read full article: https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/22-janvier-2.pdf
The Economist, 18 janvier, article payant
Many happy returns? What firms are for
The framework for thinking about business and capitalism is hopelessly outdated, argues a new book
The Corporation in the 21st Century. By John Kay. Yale University Press; 448 pages; $35. Profile; £25

Voir « Article du Jour » ici : https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/18-janvier-2.pdf
Link : https://www.economist.com/culture/2025/01/16/what-firms-are-for
Le Figaro, 17 janvier, article payant
À rebours de Donald Trump, l’ultralibéral Milei part en croisade contre le protectionnisme
DÉCRYPTAGE – Le président argentin a décidé de réduire les droits de douane pour freiner l’inflation et tenter de relancer la consommation.

Extraits :
(…) À rebours d’un Donald Trump qui menace la planète de droits de douane, le gouvernement de l’ultralibéral Javier Milei est parti en croisade contre le protectionnisme. Il a décidé un allègement des barrières douanières et une simplification des procédures. Des mesures qui ont déjà poussé les plateformes de vente en ligne à s’intéresser au marché argentin. Le géant Amazon propose désormais une livraison gratuite sur des commandes dépassant les 100 dollars. Le montant annuel que les consommateurs argentins sont autorisés à commander à l’étranger pour usage personnel a, lui, été multiplié par trois. Il atteint maintenant 3000 dollars, avec une exonération de droits de douane pour les premiers 400 dollars.*
Il faut rappeler que l’économie de ce pays sud-américain s’est caractérisée, pendant plus de deux décennies, par un fort protectionnisme, défendu par les gouvernements péronistes, qui visait à stopper l’hémorragie financière, les sorties massives de capitaux, et favoriser l’industrie locale. (…)
En arrivant au pouvoir, Milei a d’abord augmenté, de 7,5 à 17,5 %, « l’impôt pays », appliqué aux produits importés, avant de le supprimer, fin 2024. Les droits de douane ont été réduits sur toute une série de produits de consommation : petit électroménager, ventilateurs, bicyclettes, motos… « De manière progressive, le gouvernement est en train de libérer les marchés, reprend Menescaldi. Mais il faut avancer prudemment, car, si les importations venaient à augmenter de manière exponentielle, cela pourrait créer un déséquilibre sur le marché monétaire. Pour le moment, la consommation est en berne, en raison de la contraction du pouvoir d’achat des ménages. Il s’agit d’un équilibre très complexe à maintenir ! » L’économiste reste positif pour l’année 2025 qui devrait, selon lui, être marquée par une hausse des importations de l’ordre de 15 % par rapport à 2024.
Marchant sur des œufs, le gouvernement de Milei espère ne pas faire voler en éclat l’équilibre des finances publiques, véritable épine dorsale de son programme économique. Pour cela, il faudra compter sur l’entrée des devises de l’agrobusiness. « Les opérations d’importation se font au rythme des récoltes des céréales. En effet, notre pays est toujours aussi dépendant de ses exportations agricoles, analyse Silvana Roldan, commissionnaire en douane agréée, basée dans la ville de Cordoba (centre). Si les dollars ne rentrent pas dans les caisses, le gouvernement devra revenir sur certaines mesures. » (…)
Pour exaucer le souhait de son président, et devenir le pays « le plus libre du monde », l’Argentine devra d’abord recouvrer la confiance de ses partenaires. Sa mauvaise réputation, qui freine encore les grands investisseurs à mettre la main à la poche, s’applique aussi dans l’import-export. Les fournisseurs n’ont pas oublié l’année 2023, pendant laquelle le gouvernement péroniste avait bloqué tout paiement. (…)
« Les fournisseurs chinois, par exemple, demandent 30 % du paiement avant de commencer la production, puis les 70 % restants avant de placer la marchandise sur le bateau », explique Roldan. Pour que l’Argentine redevienne un marché normal, la route est encore longue. D’ici là, pour ceux qui en ont les moyens, il y aura toujours un beau voyage à prévoir pour s’acheter un smartphone.
L’Express, 16 janvier, article payant
André Comte-Sponville : “Si on m’avait dit que le principal problème des Français serait leur retraite…”
Grand entretien. Bonheur, religion, libéralisme, gauche, argent… Le philosophe, qui publie “L’Opportunité de vivre”, ses ultimes études, explique ce que l’existence comme la fréquentation de Montaigne lui ont appris. Une leçon de sagesse.

Extraits :
(…) On n’est pas modéré quand on a 17 ans… J’ai trop péché par radicalité, quand j’étais jeune, pour leur reprocher de faire de même. Ce n’est pas grave, ça passera. (…)
Mon problème avec la gauche française, ce n’est pas tant Mélenchon ou le PS actuel. Tout remonte en réalité à 1981 et 1983. Pendant dix ans, militant communiste, je me suis battu passionnément pour le Programme commun. Le 10 mai 1981, je venais de perdre mon premier enfant, d’une méningite foudroyante; j’étais en larmes, mais la gauche avait gagné. Or, durant les dix-huit mois qui ont suivi, il y eut trois dévaluations. Avec une politique de gauche traditionnelle, de relance par la demande, la France s’est retrouvée exsangue. Mais en plus, aux élections municipales de 1983, la gauche perdit 31 villes de plus de 30 000 habitants, et se retrouvait déjà minoritaire dans le pays. Je m’étais donc battu pendant dix ans pour un programme qui a tenu dix-huit mois. Certains diront que la gauche a trahi. Mais non! C’est son programme économique qui était absurde, obligeant le très estimable Jacques Delors au tournant de la rigueur.
Quelles différences entre le Programme commun et l’actuel programme du NFP? Je n’en vois guère de décisives. La gauche n’a toujours pas compris que la politique de la relance par la demande, dans une économie mondialisée, ne peut pas fonctionner. En 1981, ça a coulé la balance commerciale de la France sans créer d’emplois. Pendant les deux septennats de Mitterrand, le chômage a doublé. Jean-Luc Mélenchon continue à vouer un culte à François Mitterrand. Ce dernier, au congrès d’Epinay, prétendait rompre avec le capitalisme. Et chacun sait que la France était tout aussi capitaliste à la fin de son deuxième mandat, en 1995, qu’elle l’était en 1981. Mais le chômage, entre-temps, avait explosé, ce qui a fait le jeu du Front national. (…)
Mais libéral de gauche, n’est-ce pas contradictoire?
J’aime la liberté, valeur de gauche, et je constate qu’une économie libérale crée plus de richesse qu’une économie étatisée. Or créer de la richesse, c’est la seule façon de faire reculer la pauvreté. L’historien Jacques Marseille, grand libéral et ancien communiste, m’a dit : “Je suis devenu libéral le jour où j’ai compris que le libéralisme était plus favorable aux pauvres qu’une économie socialiste.” Il avait raison. Je ne suis pas ultralibéral; je pense que nous avons besoin de régulations. Mais c’est bien pour cela qu’il nous faut une gauche modérée, plutôt qu’une gauche prétendant rompre avec le capitalisme, ce qui n’a jamais abouti qu’à des échecs ou à des catastrophes. (…)
The Economist, 15 janvier, article payant
Anarcho-capitalism : Is Javier Milei’s economic gamble working?
A data deep-dive into Argentina’s economy

Extraits :
JAVIER MILEI, Argentina’s president, swept into office on a promise to conquer inflation by slashing government spending. The scruffy-haired, chainsaw-wielding economist has not disappointed. Since taking office in December 2023 Mr Milei has cut government outlays by around 30% in real terms, by laying off more than 30,000 government workers, slashing energy and transport subsidies, suspending public-works projects and freezing state wages and pensions. The effect on inflation has been dramatic. On January 14th INDEC, the county’s statistics authority, reported that prices rose in December by just 2.7% month on month, down from 25.5% a year earlier.
Mr Milei’s economic management is a vast improvement on that of his predecessor. During the previous left-wing Peronist administration, the government won over voters by running up vast budget deficits. To cover the bill the central bank printed money, leading to sky-high inflation and a near-worthless peso. Price controls on food and housing led to shortages. Mr Milei has done away with such distortions. Although his shock-therapy approach has led to some short-term pain, macroeconomic conditions are now stabilising. Inflation is falling, budgets have flipped from deficits to surpluses, and the economy returned to growth in the third quarter of 2024. The country’s stockmarket is booming and measures of country risk are tumbling. Mr Milei promised the cuts would affect the state itself more than Argentina’s poorest citizens. Has he pulled it off?
A closer look at inflation numbers suggests that, despite smaller price rises, most Argentines are not yet better off than they were a year ago. An estimated 53% are now living in poverty, according to the Catholic University of Argentina, up from 42% in the second half of 2023. Consumer spending is down by 20% over the same period. Construction activity is 29% lower than it was a year ago. Pensioners and construction workers have been particularly hard hit: a report by the Centre for Political Economy of Argentina, a think-tank, estimates that lower pensions and public-works spending together accounted for nearly half of Mr Milei’s cuts to government spending in 2024.
Although inflation has fallen, some essential goods upon which poorer households depend have shot up in price disproportionately since Mr Milei assumed office. Data from INDEC show that overall prices in greater Buenos Aires, for example, have climbed by 122% since Mr Milei took office. But the elimination of transport and energy subsidies means that bus and train fares have surged by more than 300% (albeit from a low baseline). Electricity and gas prices have rocketed by 430% during the same period. Other regions across the country have experienced similar increases.
The economic gloom could hobble Mr Milei’s reform efforts. The country still maintains strict currency controls to prop up the wobbly peso. Mr Milei has vowed to ease these restrictions and let the currency float. But first he wants to negotiate a loan with the IMF, a condition of which will probably be a new set of reforms. For now, Mr Milei remains popular: nearly half of Argentines support him, according to a recent survey by AtlasIntel, a pollster, even though just one in five rates the economy as “good”. But the public’s tolerance for weak growth, high unemployment and poverty will not last forever, even if inflation has been wrestled down.■
https://www.economist.com/graphic-detail/2025/01/14/is-javier-mileis-economic-gamble-working
The Wall Street Journal, 14 janvier, article payant
Political Sway of the Rich Seen as Main Driver of Inequality, Pew Survey Finds
Survey of dozens of countries finds broad-based dissatisfaction with the state of the economy

Extraits :
Most people think economic inequality is a big problem for their country, and see the excessive political sway of the rich as the leading cause, according to a report by the Pew Research Center.
In a survey of 36 countries—including 41,503 adults outside the U.S. and 3,600 within—the Washington D.C.-based non-partisan research group found that 54% saw the gap between the rich and the poor as a “very” big problem in their country, while an additional 30% saw it as a “moderately” big problem.
It also recorded pessimism about the prospects of young people as well as broad-based dissatisfaction with the state of the economy.
Concern about economic inequality became more widespread in the wake of the 2008 global financial crisis, which led to movements such as Occupy Wall Street. But while much of the heat around the issue has dissipated over recent years, the Pew survey indicates that gaps in living standards remain a worry for many people around the world.
In the Pew survey, Turkish respondents registered the highest level of concern, with 92% seeing economic inequality as a big problem, while those from Sweden and Poland were least concerned, although 70% still saw it as a big problem. In the U.S., 83% of respondents shared that view.
As measured by the widely-used Gini coefficient, income inequality was much lower in Sweden and Poland than in Turkey during 2022, the most recent year for which comparable data is available. Inequality in the U.S. was higher than in most European countries, but lower than in Turkey and a number of Latin American countries included in the survey, such as Mexico and Chile.
While Pew hasn’t previously surveyed the U.S. on this question on economic inequality, it has in a number of other countries. Compared with 2013, the view that it is a big problem has increased in Germany, the U.K., Japan and Canada, but decreased in France and Italy.
Many of those who see inequality as a problem believe that the exercise of political power by rich people is a leading cause, the survey found, ahead of problems with the education system, technological change or discrimination against minorities.
“In our list of six potential factors, the strong connection between money and politics resonates most with respondents, topping the list in 31 of 36 countries,” Pew said. (…)
Greeks were most convinced that the excessive influence of rich people over politics was a driver of inequality, with 95% of respondents from that country judging it had either contributed a great deal or a fair amount. Swedes were least convinced, but 64% shared that view, compared with 89% in the U.S.. (…)
As a result, many people want to see big changes in the way economies work, although they were not questioned on what kind of changes they would prefer. In Nigeria, 94% of respondents saw a need for major or complete reforms of the economic system, while only 29% of Singaporeans shared that view. In the U.S., 66% saw a need for major or complete reform, while in France 77% of respondents wanted to see big changes, as did 66% of Britons.
Neue Zürcher Zeitung, 14 janvier, article payant
Liberalismus ja, aber bitte sozialistisch: Der Historiker Samuel Moyn kritisiert das westliche Freiheitsdenken und verheddert sich in Widersprüchen
Die Liberalen seien zu unambitioniert geworden, sagt der Rechtshistoriker Samuel Moyn. Was er unter Ambition versteht, hat mehr mit Sozialismus als mit Freiheit zu tun.

Extraits :
(…) Das ist im Fall von Samuel Moyn nicht anders. Mit dem jüngst auf Deutsch veröffentlichten «Der Liberalismus gegen sich selbst» hat der Historiker in den USA eine kontroverse Debatte ausgelöst. Das Buch ist eine beissende Kritik an dem, was Moyn als «Kalter-Krieg-Liberalismus» bezeichnet. Doch es liefert mehr Einblicke in seine eigene Positionierung als Erkenntnisse über das Objekt seiner Analyse.
Ein Grundproblem liegt darin, dass Moyn einer Definition von Liberalismus ausweicht. Dennoch zeigt er natürlich implizit, welchem Verständnis von Liberalismus er selbst anhängt. Es ist selbst im amerikanischen Kontext, wo «liberalism» den Gegenpol zum Konservatismus bildet, klar links angesiedelt.
Freiheit ist für Moyn kein zentraler Wert, sondern letztlich eine nicht wirkliche Annehmlichkeit, die höheren Zielen wie der «kollektiven und persönlichen Selbsterschaffung» ziemlich bedenkenlos geopfert werden kann. Was mit dieser «Selbsterschaffung» genau gemeint ist, bleibt allerdings unklar.
Moyns reichlich vage und verzerrte Auffassung von Liberalismus zeigt sich etwa, wenn er schreibt, dass «Liberale auf der ganzen Welt die ambitioniertesten, interventionistischsten und grössten – wie auch die egalitärsten und redistributivsten – liberalen Staaten errichteten, die es je gegeben hat». Welche Staaten das waren, lässt er offen, aber interventionistische, grosse und redistributive Staaten als liberal zu bezeichnen, zeugt von einer seltsamen Auffassung des Begriffs.
Für seine utopische Vision greift Moyn selektiv auf Denker vergangener Zeiten wie Rousseau oder Hegel, ja sogar auf Marx zurück. Andere wie Locke oder Tocqueville werden demgegenüber zurückgestellt. Das erscheint als plumper Trick, um anschliessend die Liberalen zu Zeiten des Kalten Kriegs als empathie- und ambitionslose Reaktionäre brandmarken zu können. (…)
Ähnliches wirft Moyn im Vorbeigehen auch dem linksliberalen Säulenheiligen John Rawls vor. Dieser habe «eine Rücksichtnahme auf das gute Leben» abgelehnt und stattdessen «Koexistenz und Toleranz Vorrang» eingeräumt. Da vermisst man eine klare Definition von Liberalismus besonders schmerzlich. Denn die Trennung von Moral und staatlicher Politik muss eigentlich als zentrale Säule des liberalen Denkens betrachtet werden. Wenn man sie zugunsten eines kollektiven Strebens nach dem «guten Leben» aufgibt – was unterscheidet den Liberalismus dann noch vom Sozialismus?
Karl Popper kritisiert Moyn unter anderem für dessen Aussage, dass «weiterreichende Ziele niemals kurzfristige Verbrechen rechtfertigen» könnten. Eine solche Auffassung verunmögliche es, «überhaupt ein kollektives historisches Fortschreiten anzustreben». Moyn impliziert somit, dass ein solches «kollektives historisches Fortschreiten» Verbrechen notwendig machen kann.
Noch härter geht Moyn mit Hannah Arendt ins Gericht, der er «neoimperiale und rassistische Verstrickungen» unterstellt, weil sie die Dekolonialisierung mit Skepsis betrachtete und zugleich den Zionismus befürwortete. (…)
Moyns Kritik am «Kalter-Krieg-Liberalismus» entlarvt sich so als leicht durchschaubarer Versuch, durch Abwertung unerwünschter Auffassungen eine bestimmte ideologische Position zu befördern. Indem er die eigenen Vorstellungen auf den Liberalismus projiziert, kann er seinen Gegnern die Abkehr von liberalen Idealen vorwerfen. Ob seine Vorstellungen mit Liberalismus viel zu tun haben, ist allerdings mehr als fraglich.
Samuel Moyn: Der Liberalismus gegen sich selbst. Intellektuelle im Kalten Krieg und die Entstehung der Gegenwart. Suhrkamp-Verlag, Berlin 2024. 303 S., Fr. 44.90.
Reviews :
Mammon and merriment : How much happiness does money buy?
Your answer determines not just how you should live, but how you should invest

Voir l’article intégral: https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/13-janvier.pdf
Link : https://www.economist.com/christmas-specials/2024/12/19/how-much-happiness-does-money-buy
Le Figaro, 12 janvier, article payant
«Ce pays est devenu une ruine, les Castro ont tout détruit»: la révolution cubaine est morte et enterrée
REPORTAGE – Les difficultés économiques et sociales s’accumulent sur la plus grande île des Caraïbes, qui manque de tout, et voit les touristes et leurs devises se détourner d’elle.

Extraits :
Un vent mauvais souffle sur Cuba. Un frente frio (front froid) de 20 degrés s’abat sur La Havane. Les pêcheurs, transis, désertent le Malecon, le front de mer. Les dieux s’acharnent sur l’île crocodile. Des confins des paysages majestueux des plantations de tabac de Viñales, dans l’ouest du pays, jusqu’à Guantanamo la déshéritée, à l’autre extrémité de la nation, des milliers de maisons, d’arbres et de pylônes électriques se sont effondrés dans le sillage des ouragans de cet automne et d’un tremblement de terre majeur, le 10 novembre dernier. Les enfants de la révolution pleurent.
La série noire que Cuba traverse semble sans fin. « Je n’ai pas le droit de me plaindre, ni publiquement, ni au téléphone (qui est sur écoute), mais je n’en peux plus. Les pannes de courant s’amplifient. Elles durent parfois 22 heures dans la province de Santiago », confie Pedro, un habitant de cette région, venu voir son fils, un Havanais. La famille est réunie autour d’un large plat de moros y cristianos (« les Maures et les chrétiens », du riz et des haricots noirs) et de bananes plantains. Le porc, le plat fétiche des Cubains, a disparu des étals. Quant au poulet, que les Havanais regardaient avec un certain dédain et lassitude il y a encore trois ans car c’était la seule viande régulièrement disponible dans l’île, le gouvernement n’a plus les moyens d’en acheter suffisamment cette année au Brésil ou à l’ennemi américain.
Ce n’est pas le pire. « Il a fallu qu’on profite d’un moment de répit pour cuire le riz avant une autre apagone (coupure de courant, NDLR) », dit la mère, Marisela. L’effondrement du réseau électrique cubain à la mi-octobre, pendant près d’une semaine, a traumatisé les habitants de l’île caraïbe. Si « radio-bemba » (la rumeur) a longtemps affolé les chaumières, ce sont aujourd’hui les réseaux sociaux qui font paniquer les esprits. « J’ai lu sur Facebook que La Havane allait être touchée par des pannes de courant de 72 à 96 heures », assure Marisela, sans trop y croire cependant. Les Havanais, relativement épargnés par les apagones jusqu’à cet automne, sont choqués. Le cœur de la capitale s’éteint progressivement au coucher du soleil pour devenir un dédale de ruelles sombres, mal éclairées par un éclairage public déficient. (…)
Les Havanais, pour ceux qui en ont les moyens, cherchent à atténuer la durée des apagones à tout prix. C’est la ruée sur les rares groupes électrogènes à essence en vente dans la capitale. « Plus une boutique n’en vend. Le gouvernement n’est même pas capable d’en importer, alors qu’il nous les vend à prix d’or », dit Lydia, une Havanaise de 35 ans, qui vient d’acheter 70 dollars un ventilateur chinois importé du Panama, dont la batterie rechargeable délivre une autonomie théorique de huit heures. « Mais la batterie ne dure pas une heure », peste Lydia. (…)
Les Cubains, qui ne perdent pas le sens de l’autocritique et de l’humour, n’hésitent plus à se moquer de cette révolution perdue. Lydia se lance la première, sous l’œil amusé de son époux : « Viva la révolucion. Viva Fidel ! Viva Raul (Castro, NDLR). Jusqu’à la victoire toujours. La patrie ou la mort, nous vaincrons. À bas les impérialistes ! »… La jeune femme défile dans sa cuisine au pas de l’oie, salue militairement, puis éclate de rire. « Tous les jours à l’école primaire, à 8 heures tapantes, nous faisions le salut au drapeau, nous chantions La Bayamesa (l’hymne national) et nous récitions les slogans de la révolution », raconte Lydia. (…)
Mais bien des Cubains voient les choses de façon plus amère qu’elle. Les plus âgés, obligés parfois de mendier pour survivre – c’est nouveau -, ne cachent plus leur amertume. Le peso s’est effondré. « J’ai 75 ans. Je suis obligée de travailler comme femme de ménage, car ma retraite de 1500 pesos (quatre euros) par mois ne me permet pas de vivre », dit Manuela, une Havanaise du quartier de Centro Habana. « Je suis née du temps de Batista. À cette époque, il y avait de tout dans les magasins. Les enfants mangeaient bien le midi à l’école et ils recevaient un goûter. C’était fabuleux cette époque. », se remémore Manuela. « Ce pays est devenu une ruine. Les Castro ont tout détruit. C’est un désastre total. Tout est cassé. Plus rien ne fonctionne », s’emporte-t-elle. Un tel discours, tenu ouvertement, était impensable autrefois. (…)
Le secteur touristique, l’une des principales et rares sources de devises de Cuba, est fortement dépendant des Canadiens. Depuis de longues années, ils représentent près de 40 % des voyageurs du pays, suivis d’assez loin par les Cubano-Américains. Les difficultés d’approvisionnement dans les complexes hôteliers en formule « tout inclus » où se rendent presque tous les Canadiens et la panne électrique généralisée d’octobre ont évidemment semé le trouble. Au point que le principal voyagiste du Canada pour Cuba a annoncé, le 19 novembre dernier, retirer 26 hôtels de l’île de son catalogue pour privilégier d’autres liaisons. Le prélude probable à un retrait progressif de la majeure partie du tourisme canadien de l’île.
Des hôtels ont déjà été fermés à Cuba, faute de groupes électrogènes ou d’essence pour faire fonctionner les cuisines et les climatisations. (…)
La bureaucratie atteint des sommets dans le domaine touristique, comme si les autorités faisaient tout pour faire fuir les devises. Les étrangers doivent réaliser la plupart des transactions dans l’île au moyen de cartes de crédit, dans un environnement bancaire non sécurisé ! Payer en cash est impossible dans la plupart des hôtels, bars, boutiques et de nombreux restaurants. Un chef d’une entreprise de joaillerie française, habitué de Cuba, juge la situation intenable : « Je viens deux fois par an à Cuba. Mais je ne suis pas convaincu que je reviendrai ici prochainement »…
https://www.lefigaro.fr/international/la-revolution-cubaine-est-morte-et-enterree-20250103
The Economist, 12 janvier, article payant
Going big : America’s bet on industrial policy starts to pay off for semiconductors
Trump will not reverse the chip subsidies, but will he reinforce them?

Extraits :
IN THE FINAL days of Joe Biden’s presidency, most parts of his administration are winding down. Not so the top brass in the Department of Commerce: on an almost daily basis, they are signing giant funding contracts with chipmakers, racing to dole out cash before Donald Trump enters the White House. When all is said and done, they will have awarded nearly $40bn to semiconductor makers in little more than a year—arguably the biggest single bet on industrial policy by the government in decades, and one that could end up as Mr Biden’s most lasting economic legacy.
The rush to disburse cash has invited questions about whether the funding commitments—the cornerstone of the CHIPS and Science Act, passed in 2022—are at risk under Mr Trump. On the campaign trail, he called CHIPS a “bad” deal, saying the government could have just slapped tariffs on imported semiconductors.
Gina Raimondo, commerce secretary in the Biden administration, is not fretting about a rollback by Mr Trump or Howard Lutnick, nominated as her successor. In an interview with The Economist, she notes that support for the law is bipartisan, with both Republicans and Democrats keenly aware that a capacity to make chips, a critical component in every electronic device, is needed for national security. Moreover, she adds, people forget that it was Mr Trump who got things started by urging TSMC, a Taiwanese firm that is the world’s most advanced chipmaker, to build a semiconductor factory (or fab) in America. (…)
In fact, the recent concern about the frenetic pace is the exact opposite of the criticism that previously dogged the CHIPS programme—namely, that it was moving too slowly because of conditions attached to deals, including requirements that chipmakers ensure access to childcare for their workers. Much of the initial slowness also reflected basic prudence on the part of the commerce department as it built up its CHIPS office from scratch, recruiting a mixture of semiconductor veterans and Wall Street dealmakers. It was charged, in effect, with implementing a major departure from the usual distaste for industrial policy on Capitol Hill (apart from when it comes to weapons). “There are large numbers of congressional staffers just waiting for the first mistake so they can denounce the investment,” says Charles Wessner of Georgetown University.
In fact, the recent concern about the frenetic pace is the exact opposite of the criticism that previously dogged the CHIPS programme—namely, that it was moving too slowly because of conditions attached to deals, including requirements that chipmakers ensure access to childcare for their workers. Much of the initial slowness also reflected basic prudence on the part of the commerce department as it built up its CHIPS office from scratch, recruiting a mixture of semiconductor veterans and Wall Street dealmakers. It was charged, in effect, with implementing a major departure from the usual distaste for industrial policy on Capitol Hill (apart from when it comes to weapons). “There are large numbers of congressional staffers just waiting for the first mistake so they can denounce the investment,” says Charles Wessner of Georgetown University. (…)
The subsidies have helped to shrink a gap of roughly 30% in the cost of building and operating fabs in America compared with in Asian countries. In part costs are lower in Asia because Asian governments lavish handouts on companies. But Asian producers have also reaped the benefits of dense manufacturing clusters, with well-trained workforces and plenty of suppliers nearby. The hope is that CHIPS has started this process in America. “It’s enough to get the flywheel going,” says Ms Raimondo.
But neither she nor just about anyone in the industry thinks that it will ultimately prove to be enough. It can take five years to build a cutting-edge fab, while the CHIPS Act itself runs for just five years. TSMC alone spends more than $30bn annually on expanding and upgrading its manufacturing operations, and China is throwing multiples of that at its companies. (…)
Mr Trump will also have to decide what to do with the newly muscular Department of Commerce. The department’s headquarters in Washington, DC, was the largest office building in the world when completed in 1932, a measure of its institutional importance at the time. But over the decades it faded into the background, mainly handling trade missions. Over the past few years its labyrinthine corridors have pulsed with energy again, with the department leading not just the semiconductor push but also much of the effort to restrict exports of advanced technology to China. “This shouldn’t be a blip for the commerce department,” says Ms Raimondo. “This is where the world is today.” ■
The Economist, 11 janvier, article payant
Free markets : The capitalist revolution Africa needs
The world’s poorest continent should embrace its least fashionable idea

Extraits :
In the coming years Africa will become more important than at any time in the modern era. Over the next decade its share of the world’s population is expected to reach 21%, up from 13% in 2000, 9% in 1950 and 11% in 1800. As the rest of the world ages, Africa will become a crucial source of labour: more than half the young people entering the global workforce in 2030 will be African.
This is a great opportunity for the poorest continent. But if its 54 countries are to seize it, they will have to do something exceptional: break with their own past and with the dismal statist orthodoxy that now grips much of the world. Africa’s leaders will have to embrace business, growth and free markets. They will need to unleash a capitalist revolution.
If you follow Africa from afar you will be aware of some of its troubles, such as the devastating civil war in Sudan; and some of its bright spots, such as the global hunger for Afrobeats—streams on Spotify rose by 34% in 2024. Less easy to make out is the shocking economic reality documented in our special report this week and which we call the “Africa gap”.
In the past decade, as America, Europe and Asia have been transformed by technology and politics, Africa has, largely unnoticed, slipped further behind. Income per person has fallen from a third of that in the rest of the world in 2000 to a quarter. Output per head may be no higher in 2026 than it was in 2015. Two giants, Nigeria and South Africa, have done atrociously. Only a few countries, such as Ivory Coast and Rwanda, have bucked the trend. (…)
What should Africa’s leaders do? A starting-point is to ditch decades of bad ideas. These range from mimicking the worst of Chinese state capitalism, whose shortcomings are on full display, to defeatism over the future of manufacturing in the age of automation, to copying and pasting proposals by World Bank technocrats. The earnest advice of American billionaires on micro-policies, from deploying mosquito nets to designing solar panels, is welcome but no substitute for creating the conditions that would allow African businesses to thrive and expand. There is a dangerous strand of development thinking that suggests growth cannot alleviate poverty or does not matter at all, so long as there are efforts to curb disease, feed children and mitigate extreme weather. In fact in almost all circumstances faster growth is the best way to cut poverty and ensure that countries have the resources to deal with climate change.
So African leaders should get serious about growth. They should embrace the self-confident spirit of modernisation seen in East Asia in the 20th century, and today in India and elsewhere. A few African countries such as Botswana, Ethiopia and Mauritius have at different times struck what Stefan Dercon, a scholar, calls “development bargains”: a tacit pact among the elite that politics is about increasing the size of the economy, not just a fight to divvy up who gets what. More of those elite deals are needed.
At the same time governments should build a political consensus in favour of growth. The good news is that powerful constituencies are keen on economic dynamism. A new generation of Africans, born several decades after independence, care a lot more about their careers than they do about colonialism.
Narrowing the Africa gap calls for new social attitudes towards business, similar to those that unleashed growth in China and India. Instead of fetishising government jobs or small enterprises, Africans could do with more risk-taking tycoons. Individual countries need much more infrastructure, from ports to power, more free-wheeling competition and vastly better schools.
Another essential task is to integrate African markets so that firms can achieve greater economies of scale and attain an absolute size big enough to attract global investors. That means advancing plans for visa-free travel areas, integrating capital markets, plugging together data networks and finally realising the dream of a pan-African free-trade area.
The consequences for Africa of simply carrying on as usual would be dire. If the Africa gap gets bigger, Africans will make up nearly all of the world’s very poor, including the most vulnerable to climate change. That would be a moral disaster. It would also, through migration flows and political volatility, threaten the stability of the rest of the world.
But there is no reason to catastrophise or give up hope. If other continents can prosper, so can Africa. It is time its leaders discovered a sense of ambition and optimism. Africa does not require saving. It needs less paternalism, complacency and corruption—and more capitalism. ■
https://www.economist.com/leaders/2025/01/09/the-capitalist-revolution-africa-needs
Le Monde, 23 décembre, libre accès
Accord UE-Mercosur : quelles coalitions de pays pourraient bloquer l’adoption du traité ?

Selon les règles de vote au Conseil européen, il faudrait au moins quatre Etats membres, représentant plus de 35 % de la population européenne, pour bloquer l’accord.
Le Point, édito, 19 décembre, article payant
Javier Milei ou la vertu des thérapies de choc
En un an, le président argentin est parvenu à profondément transformer l’économie du pays et à enrayer la spirale du déclin.

Extraits:
Le 10 décembre 2023, après sa victoire inattendue au terme d’une campagne menée avec la tronçonneuse qui symbolisait sa volonté de rupture avec l’État péroniste, Javier Milei prenait ses fonctions de président de l’Argentine. Et ce au cœur d’une des pires crises de l’histoire du pays, que l’hyperinflation (211 %) et le surendettement public (155 % du PIB) entraînaient vers un nouveau défaut et un chaos de type vénézuélien.
Très nombreux furent ceux qui annoncèrent son échec programmé et sa chute rapide en raison de sa personnalité excentrique, du radicalisme de ses idées, de son inexpérience politique et de la faiblesse de son soutien parlementaire. Un an après, Javier Milei a tenu promesse. L’Argentine s’est profondément transformée. Elle a expérimenté la plus vigoureuse thérapie de choc depuis celle appliquée par Margaret Thatcher au Royaume-Uni.
Les dépenses publiques ont été diminuées de 44 à 32 % du PIB en quelques mois, avec des coupes claires dans les retraites, les salaires du secteur public, les subventions à l’énergie et aux transports, les aides sociales. Simultanément, des privatisations massives ont été engagées et une dévaluation de 50 % du peso a été réalisée.
Cet ajustement d’une brutalité et d’une rapidité extrêmes a conjuré la faillite et permis de stabiliser l’économie. L’inflation a été ramenée de 27 à 2,7 % par mois, ce qui a transformé la vie des Argentins. Le déficit public a été éradiqué, passant de 5,4 % du PIB à zéro, et un excédent primaire de 1,8 % a été dégagé. Le peso a retrouvé stabilité et crédibilité.
La prime de risque sur la dette argentine a été réduite de 2 200 à 750 points de base. Plus de 20 milliards de dollars de capitaux ont été rapatriés, et 50 milliards d’investissements étrangers réalisés. Les exportations de produits agricoles, de matières premières et d’énergie ont bondi. La suppression du contrôle des loyers a permis d’augmenter l’offre locative de 30 % et de diminuer leur montant de 20 %.
Cette conversion accélérée du modèle étatiste, protectionniste et inflationniste péroniste a un coût élevé. Elle a été acquise au prix d’une récession de 3,5 %, qui sera compensée par une croissance de 5,2 % attendue en 2025, et surtout de 3,4 millions de pauvres supplémentaires, ce qui porte à 53 % de la population les indigents. Mais les Argentins imputent à juste titre la responsabilité première de la crise à la classe politique traditionnelle et maintiennent leur confiance à Javier Milei, dont le taux de popularité atteint 56 %.
Au total, le président argentin a été capable d’appliquer une ligne politique très claire et cohérente, tout en effectuant les compromis indispensables. (…)
Les défis qui se présentent à Javier Milei restent majeurs. Après la réussite de sa thérapie de choc, l’Argentine demeure en quête d’un modèle de développement stable et durable. Pour cela, le démantèlement du contrôle des changes et des capitaux est aussi indispensable que risqué. (…)
Au total, en deux décennies, le néo-péronisme des époux Kirchner et de leurs affidés a ruiné et détruit l’un des pays les plus riches d’Amérique latine. En un an, Javier Milei n’a pas sauvé l’Argentine. Mais il lui a rendu l’espoir en la libérant du piège fatal du populisme.
La descente aux enfers et le douloureux relèvement de l’Argentine sont riches d’enseignements, notamment pour la France qui se trouve engagée sur la même voie avec la décomposition de son système productif, l’expansion incontrôlée de son État-providence et la perte de contrôle de ses finances publiques.
L’Argentine nous rappelle tout d’abord que les États peuvent faire faillite et que les premières victimes des défauts sur la dette publique sont les plus pauvres. Elle souligne que les populistes exacerbent tous les maux qu’ils prétendent combattre.
Elle montre que seules les thérapies de choc peuvent casser la spirale du déclin et remettre un pays sur la voie du développement et du progrès social, ainsi que le confirment les stratégies de rupture conduites avec succès par le général de Gaulle en France en 1958 et par Margaret Thatcher au Royaume-Uni en 1979. (…)
Javier Milei note enfin qu’une démocratie en crise ne peut chercher son salut que dans la responsabilité et la liberté. (…)
La tradition libertarienne dont il se réclame est extrême : inspirée de l’anarcho-capitalisme de Murray Rothbard, elle voue une détestation profonde à la puissance publique, mais n’a rien à voir avec l’extrême droite, car elle récuse toute idéologie d’État et affirme le primat absolu de l’individu.
Sa devise, « Viva la libertad, carajo ! » (soit « Vive la liberté, putain ! »), sonne de manière provocatrice. Elle dessine pourtant la seule solution crédible à l’interminable et tragique chute de la France depuis plus de quatre décennies et la seule qui n’ait jamais été essayée.
Neue Zürcher Zeitung, 18 décembre, article payant
Seit einem Jahr zerlegt Federico Sturzenegger für Javier Milei den Staat – der Ökonom mit Schweizer Wurzeln ist auch ein Vorbild für Elon Musk
Der frühere argentinische Zentralbankpräsident überprüft 4200 Gesetze darauf, ob sie abgeschafft, reformiert oder beibehalten werden sollen. Wie macht er das? Ein Gespräch mit einem Insider.

Extraits:
Zwei Jahre lang traf sich der frühere argentinische Zentralbankpräsident Federico Sturzenegger jeden Samstag mit Ökonomen, Juristen und Verwaltungsexperten. Über die Treffen mussten die Teilnehmer Stillschweigen bewahren. Ihr Ziel war ein Plan zur umfassenden Deregulierung von Wirtschaft und Staat. 4200 Gesetze und 2000 internationale Abkommen durchforstete Sturzenegger mit seinem Team.
Er bereitete den Plan für die bürgerliche Präsidentschaftskandidatin Patricia Bullrich vor. Doch diese schied bereits im ersten Wahlgang aus. Da machte Sturzenegger sein Projekt öffentlich: Ein Video zeigt den Ökonomen in einer spartanisch eingerichteten Bibliothek vor zwei Papierstapeln. Er deutet auf den kleineren Stapel, so hoch wie zwei Schuhkartons: «Das sind die Gesetze, die sofort abgeschafft werden müssen – etwa 300.»
Dann wendet er sich dem zweiten, deutlich höheren Stapel zu, blättert ihn mit beiden Händen durch und sagt mit ernster Miene: «Das sind die Gesetze, die neu geschrieben werden müssen.» Alles müsse von Grund auf geändert werden, um die Privilegien abzuschaffen, die sich durch den Staat eingenistet hätten, sagt er.
Präsident Milei postete auf X einen Kommentar zu dem Video: «Das interessiert mich.» Ein paar Tage später traf er sich mit Sturzenegger. Es wurde ein fünfstündiges Arbeitstreffen. Danach war Sturzenegger Mileis Mann für Deregulierung. Er erhielt den Auftrag, seinen Plan für wirtschaftliche Liberalisierung, Vereinfachung von Vorschriften, Sparmassnahmen und Entbürokratisierung eins zu eins umzusetzen. (…)
Der Deregulierungszar gibt kaum Interviews. Doch ein Gespräch mit einem Insider, der seit Jahren eng mit Sturzenegger zusammenarbeitet und hohe Regierungsämter bekleidete, gibt wertvolle Einblicke. (…)
Sturzenegger sei ein Getriebener, der sich auf einem Kreuzzug befinde, so der Ökonom. Für den Deregulierer sei der argentinische Staat von Partikularinteressen kooptiert. Unternehmer, Gewerkschafter und Politiker hätten sich Privilegien verschafft und saugten seit Jahrzehnten die Ressourcen des Staates ab. Wenn man sich die Liste der reichsten Argentinier anschaue, stünden an der Spitze dieselben Familien wie vor fünfzig Jahren. Damit wolle Sturzenegger Schluss machen.
Sturzenegger legte sofort los: Zehn Tage nach Mileis Amtsantritt – also kurz vor Weihnachten 2023 – veröffentlichte die Regierung ein Paket von Notstandsdekreten, den wichtigsten ersten Massnahmen und Haushaltkürzungen, darunter die Abschaffung von Ministerien und die Entlassung von 33 000 Staatsbediensteten. (…)
Mileis Staats- und Wirtschaftsreformen finden inzwischen weltweit Beachtung. Das liegt auch an der Wahl von Donald Trump, der mit dem Unternehmer Elon Musk auch in den USA die Bürokratie abbauen und den Staatseinfluss zurückdrängen will. Milei behauptet, sein Plan sei ein Vorbild für Elon Musk. Tatsächlich hat sich Milei dreimal mit diesem getroffen. (…)
Über die App «Reportá la burocracia» kann die Bevölkerung melden, wo sie die Bürokratie nervt und wie sie das ändern würde. «Helfen Sie uns, Regeln zu identifizieren und abzuschaffen, die den freien Handel und den Wettbewerb behindern», heisst es dort. Innerhalb weniger Tage sollen 2500 Vorschläge eingegangen sein. (…)
s sei eine beachtliche politische Leistung Mileis, die Staatsausgaben um ein Viertel gekürzt zu haben, sagt der befragte Ökonom. Keine Regierung zuvor habe es gewagt, die zentrale Ursache des jahrzehntelangen Inflationsproblems so radikal anzugehen. (…)
Sturzenegger kündigte nun eine zweite Phase der Staatsreformen an: 40 000 Beamte sollen in den nächsten drei Monaten Prüfungen ablegen, ob sie die Kriterien für ihren Job erfüllen. Geprüft werden Mathematik, Logik, Denk- und Lesefähigkeit sowie Kenntnisse im öffentlichen Recht. In drei Stufen, je nach Position. Noch vor kurzem wäre das undenkbar gewesen. Die Gewerkschaften der öffentlichen Angestellten hätten sich heftig gewehrt und zum Streik aufgerufen. Doch nun fürchten sie, dass sich unter Milei die öffentliche Meinung gegen sie wenden könnte – und halten sich mit Protesten zurück. (…)
Inzwischen ist Sturzenegger auch Minister. Es heisst, er könne jedes Büro eines Kabinettsmitglieds betreten, ohne anzuklopfen, so einflussreich sei er. Aber er weiss auch, dass seine Zeit knapp ist: Das Notstandsgesetz läuft am 8. Juli 2025 aus. Dieses Datum soll Sturzenegger gross an seine Bürotür gepinnt haben.
Wall Street Journal, 13 décembre, article payant
We Are All Mercantilists Now
China’s emergence as an economic power helped fuel the rise of protectionist views on trade worldwide.
Extraits:
Time magazine in 1965 published an article whose title quoted Milton Friedman: “We Are All Keynesians Now.” Using fiscal deficits to manage business cycles—once an unorthodox idea—had become mainstream, driving market outcomes in the decades that followed.
When society’s beliefs about the role of government shift, it affects investors. Philosophical shifts alter how people expect the government to respond to changes in economic conditions and determine to what extent policy drives economies. The rise of Keynesianism, for instance, became critical for understanding the global financial crisis and Covid shock.
For much of the post-World War II era, neoliberalism was the mainstream economic ideology. Countries lowered tariffs, integrated their economies and specialized according to areas of comparative advantage. The U.S. helped create global institutions, like the World Trade Organization, to enforce freer trade.
This system of global cooperation and robust institutions has been crumbling as China in particular, and other countries to varying degrees, has pushed the boundaries. With Donald Trump’s election, the postwar economic order is poised to change for good.
It will be replaced by a quasimodern mercantilist system. The term “mercantilism,” popularized in the 18th century, was used to describe economic policies of colonial powers that focused on managing the economy to build up state power.
Modern mercantilism today is built on four tenets: First, the state has a large role in orchestrating the economy to increase national wealth and strength. Second, trade balances are an important determinant of national wealth and strength, and trade deficits should be avoided. Third, industrial policy is used to promote self-reliance and defense. Fourth, national corporate champions are protected.
Mercantilist ideology is contagious. The postwar system of free trade relied on America’s soft power and the general respect that many nations had for the system. But as countries defected and adopted mercantilist policies, the global system lacked sufficient authority to stop them. Each time another country adopted mercantilist policies, it pushed others to react similarly.
China turned a slow drip into a death spiral. While many countries had pushed the boundaries before China did, its economic size and the effectiveness of its mercantilist policies broke the pre-existing order. Through currency management, public procurement, state subsidies, protectionism and other implicit subsidies, China has developed a range of leading industries, including electric vehicles, solar power, and batteries.
China’s emergence as an economically powerful strategic competitor to the U.S. worries many in the free world. It has raised concerns about supply-chain dependencies, the lack of robust manufacturing, and an ailing defense industrial base. The political and social consequences of lost domestic manufacturing jobs are leading policymakers to second-guess whether cheaper consumer goods and a more market-efficient allocation of capital are worth it. (…)
With China and the U.S. now in the mercantilist camp, pressure is growing for Europe to follow. (…)
French President Emmanuel Macron, who’s pushing for a more independent Europe, had some sharp remarks following the U.S. election: “The world is made up of herbivores and carnivores. If we decide to remain herbivores, then the carnivores will win and we’ll be a market for them.”
Modern mercantilism will reshape the global economic order. Government policies will reduce the competitive pressures companies face, as their survival will be a matter of national interest. Tariffs, industrial policy and export controls will define a market for the kinds of companies the government wants to exist. The market’s role in determining companies’ success will diminish.
Countries that rely on rising, persistent trade surpluses to achieve growth are the most at risk in a mercantilist world, as the U.S.—the world’s largest trade-deficit economy—becomes unwilling to absorb these surpluses. (…)
Countries with trade deficits will have the upper hand in trade wars because they will have more imports to tariff than their trading partners. Competing countries will likely respond with a range of measures. (…)
Capitalists have long worried that socialism would end the Reagan-Thatcher economic system. Instead, modern mercantilism is poised to strike the final blow. We are all mercantilists now, and the implications are profound and unavoidable.
Mr. Jensen is co-chief investment officer at Bridgewater Associates.
Le Monde, 14 décembre, article payant
Frédéric Duval, DG d’Amazon : « Il n’y aura ni marché ni économie du livre s’il n’y a plus suffisamment de lecteurs »
Le directeur général d’Amazon répond à une tribune parue dans « Le Monde » accusant son entreprise de contourner la loi sur les frais de port en ligne, en ayant recours à des points de retrait de livres gratuits. « Grâce à cette initiative, les livres ne coûteront pas plus cher aux habitants des régions rurales qu’à ceux de Paris », argue-t-il.

Extraits:
Il faut choisir ses combats. On peut se complaire dans la critique caricaturale d’Amazon, une entreprise qui a créé plus d’emplois en France qu’aucune autre depuis 2010, soutient l’activité de plus de 16 000 PME tricolores et figure dans le top 100 des plus gros contributeurs fiscaux en France. Mais attention à ne pas se perdre dans les postures, à l’image d’une récente tribune publiée dans ces colonnes.
A la plume, une grande enseigne spécialisée dans la distribution de biens culturels bien connue des Français et deux associations professionnelles qui cherchent à défendre – c’est louable – les intérêts de leurs adhérents. Mais le grand absent de cette tribune, c’est le lecteur, qui n’y est pas mentionné une seule fois. Le réquisitoire : Amazon a annoncé début novembre la livraison gratuite de livres dans 2 500 points de retrait situés dans des commerces qui vendent des livres. (…)
Le fait est que les gens lisent moins et achètent moins de livres. Ce n’est une bonne nouvelle pour personne ! D’après les chiffres sectoriels de référence, le nombre de livres vendus a diminué depuis octobre 2023. Dans ce contexte délétère, plusieurs études de l’IFOP dévoilent que plus de quatre acheteurs de livres sur 10 ont réduit leurs achats de livres à cause des frais de port obligatoires introduits il y a un an [IFOP, « Baromètre. Les Français et l’achat de livres, vague 4 », en partenariat avec Amazon, 7 octobre 2024].
Ces études soulignent aussi que les lecteurs qui vont davantage en magasin physique pour échapper à ces frais privilégient massivement (environ 70 %) les hypers et supermarchés et les grandes enseignes culturelles, ce report ne bénéficiant que marginalement aux librairies indépendantes. En somme, les frais de port obligatoires pénalisent la lecture sans pour autant atteindre leur objectif affiché, à savoir soutenir les librairies indépendantes. Il n’y aura ni marché ni économie du livre s’il n’y a plus suffisamment de lecteurs en France. (…)
Pour justifier les frais de port obligatoires sur les livres, véritable taxe sur la lecture, on agite souvent le chiffon rouge des librairies qui fermeraient à cause du commerce en ligne. En vérité, le nombre de librairies indépendantes continue d’augmenter en France : entre 2019 et 2023, d’après le Syndicat de la librairie française, le nombre de créations de librairies en France a même atteint des niveaux record, avec 574 nouvelles librairies. Cette dynamique importante, dont je me réjouis, n’est pas due à la loi Darcos puisqu’elle est antérieure à sa mise en œuvre, qui date de fin 2023. Elle est une preuve supplémentaire que l’offre en ligne et celle des libraires sont en réalité complémentaires.
D’abord, parce que tout le monde n’a pas une librairie à proximité, loin s’en faut. Ensuite, parce que l’offre en ligne permet la diffusion de toutes les œuvres. D’après le ministère de la culture, plus de 60 000 titres nouveaux ont été commercialisés en 2023. Un chiffre à mettre en regard du nombre de références qu’une librairie physique peut proposer, qui est généralement de quelques milliers voire dizaines de milliers. Internet offre un débouché à ces ouvrages au sein d’une vaste sélection qui va des classiques aux titres les plus spécialisés et rares, en passant par les œuvres d’auteurs et éditeurs indépendants.
Alors oui, notre initiative fâchera peut-être ceux qui s’obstinent à ignorer que, pour soutenir les librairies indépendantes, il y existe de meilleures solutions que de pénaliser les lecteurs. Mais, surtout, elle facilitera l’accès aux livres en concrétisant l’esprit de la loi Lang [promulguée en 1981, obligeant à fixer un prix unique aux livres], à savoir d’assurer « l’égalité des citoyens dans l’accès au livre ». Où est l’« égalité » quand les livres coûtent 3 euros plus cher aux ruraux qu’aux urbains ? Le prix unique du livre doit protéger les lecteurs. Le premier enjeu, qui doit tous nous réunir et nous mobiliser, c’est de promouvoir la lecture et de garantir un accès facile et égal au livre à tous les Français, où qu’ils vivent. Cela se fera au bénéfice des lecteurs, des auteurs et de l’ensemble des acteurs de la filière – à commencer par les libraires.
The Economist, 13 décembre, article payant
European (g)ratification : Can an agreement with the EU resurrect Mercosur?
A big geopolitical deal

Extraits:
It took a full quarter of a century, but on December 6th, at the second attempt, the European Union (EU) and Mercosur, a bloc based on Brazil and Argentina, finalised the text on a wide-ranging treaty that enshrines trade and political co-operation. Its impact on world trade will be modest. But its geopolitical symbolism is far bigger. With the United States poised to become even more protectionist under Donald Trump, and with China’s influence in Latin America large and growing, it marks an effort to strengthen relations between two democratic regions long linked by culture and history. But its ratification by the Europeans is far from certain, since the continent’s influential farmers are fearful of Mercosur’s highly efficient agribusinesses. (…)
Over the past 18 months Lula, now back in the presidency, and Ursula von der Leyen, president of the European Commission, sought to conclude the deal. (…)
If the commission was prepared to be more flexible than in the past, it is because Russia’s invasion of Ukraine and Mr Trump’s return have made many European leaders rethink. “For the EU, this is important economically, but [it is] very much a geopolitical decision,” says Cecilia Malmström, a former European trade commissioner. “With a possible tariff war coming up, Europe needs friends and allies.”
The deal is hardly a free-trade revolution. It will remove tariffs on around 90% of trade in goods between the two sides, but mostly over a period of up to 12 years and in a few cases longer. Agricultural exports from Mercosur will be subject to gradually rising quotas. Nevertheless, the agreement is a big one. Mercosur’s core members, which also include Paraguay and Uruguay, have a combined population of 275m people—and a total GDP of $3trn, making it the EU’s biggest economic partner after Japan and Britain. (Bolivia joined Mercosur this year, but is not party to the agreement). Total trade between the two blocs is close to $150bn a year. (…)
Lula’s switch from sceptic to champion of the deal reflects his desire for Brazil to retain its autonomy in a world where Mr Trump and China both push countries to take sides. Brazil has been discomfited by China’s drive to expand the BRICS group into an anti-Western front. “Having alternatives is crucial,” says Oliver Stuenkel of Fundação Getulio Vargas, a Brazilian university. (…)
To ease ratification in Europe, the trade part has been duplicated in a separate agreement that requires assent only by the European Council and the European Parliament for it to take effect. The full treaty must be approved by national parliaments. The council is likely to discuss the deal in the summer.
It is torn between its protectionist instincts and geopolitical calculation. France opposes the trade agreement but may not be able to get the necessary blocking minority of at least four countries totalling 35% of the EU’s population. With Germany, Spain and Sweden strongly in favour, the outcome may depend on Poland and Italy. The EU’s credibility as an economic partner will be at stake. ■
https://www.economist.com/the-americas/2024/12/12/can-an-agreement-with-the-eu-resurrect-mercosur
The Economist, 13 décembre, article payant
Bitcoin is up by 138% this year. It is a nonsense-free rally
The link between digital assets and mainstream finance is strengthening

Extraits:
BITCOIN IS BACK. Since Donald Trump’s election victory on November 5th, the world’s dominant cryptocurrency has surged to new heights above $100,000 a unit, enjoying a rise of 138% since the start of the year. Altogether, the world’s cryptocurrencies now have a market capitalisation of almost $4trn—making them more valuable than the entirety of Britain’s stockmarket.
Holders of digital assets certainly have reason to be excited. Mr Trump has nominated Paul Atkins, a lawyer and head of a crypto-advocacy group, to lead the Securities and Exchange Commission, America’s main financial regulator. The incoming administration is surrounded by Silicon Valley moguls who believe that regulation and enforcement have held back the crypto industry. A proposal by Cynthia Lummis, a Republican senator, for a government reserve of 1m bitcoin may be absurd, but it no longer seems impossible.
As such, today’s crypto surge looks different from earlier booms. Rallies in 2017 and 2021 dovetailed with rising excitement over new crypto use cases. The most fanatical believers envisaged a future in which the tech would take over the financial world, displacing stodgy existing institutions. This time, there is less hyperbole. Bitcoin, in particular, is being whipped into shape by large, mainstream investors. And so the way the market behaves is changing. The utopian exuberance of earlier crypto adopters is giving way to a more institutional and mercenary climate.
Hedge funds are the most prominent members of the new wave of investors. (…)
In its focus on untrammelled speculation, the current rally is much more straightforward. What matters for new owners of bitcoin is the prospect that the line will continue to go up. Crypto is a highly volatile asset that prospers in relatively brief periods of rising risk appetite, a feature that its new owners value. Very few hedge-fund managers booking a triple-digit return on bitcoin will lose sleep over whether crypto will fulfil the lofty aims of early adopters. (…)
If the regulatory threat to the industry does recede, it seems likely that the institutional adoption of crypto will accelerate, especially when it comes to bitcoin—tying the market closer still to more traditional ones. Crypto’s true believers will find themselves in an awkward position. Bitcoin and its ilk might be rallying but the surge is being driven by the increased institutionalisation of the asset class. That will make it more ordinary, and more linked to the ups and downs of the regular financial world, which advocates had hoped to replace. At least they can comfort themselves with simply enormous profits.■
L’Express, 11 décembre, article payant
La France connaîtra-t-elle son “moment Milei” ? Par Nicolas Bouzou
Economie. Résolu, le président argentin déroule son programme de lutte contre l’inflation et de simplification de l’économie. Avec de premiers résultats qui méritent qu’on s’y attarde, relève notre chroniqueur.

Extraits:
Le président argentin Javier Milei, un an après son élection, suscite moins de mépris qu’il y a douze mois, et plus de considération, comme en témoigne la couverture récente de The Economist où il est en vedette. Même dans la presse française, il n’est plus systématiquement traité de fasciste néolibéral. Cela tombe bien car il ne l’est pas.
Dans le long et passionnant entretien qu’il vient de donner au podcaster américain Lex Fridman, ce professeur d’économie détaille son itinéraire intellectuel, en grande partie fondé sur les économistes de “l’école autrichienne”, dont des auteurs quasi inconnus en France comme Carl Menger, Ludwig von Mises ou Murray Rothbard. On peut, comme l’auteur de ces lignes, s’être éloigné de cette école de pensée après l’avoir excessivement révérée, mais ce serait une erreur majeure que de tirer un trait dessus en raison de sa radicalité, surtout dans le contexte argentin, magnifique pays ruiné par l’interventionnisme étatique.
Jusqu’à la Première Guerre mondiale, l’Argentine était l’un des pays les plus prospères au monde. Le niveau de vie y était supérieur à celui de la France et proche de celui de l’Angleterre. (…) Tout a changé en 1946 quand, après une série de coups d’Etat militaires, Peron a accédé au pouvoir. Son mélange de dirigisme, de corporatisme et de protectionnisme, a entraîné un déclin que ses trop nombreux successeurs populistes ont fait perdurer. Après le centre mou de Mauricio Macri, il n’est pas illogique qu’une majorité d’Argentins, fatigués de l’inflation et du délabrement, se soient tournés vers la médication forte – et le style outrancier – du Pr Milei.
Sa politique repose sur deux idées simples, radicales et justes. La première, c’est que l’inflation est un fléau qui détruit non seulement l’économie mais aussi, comme l’avait montré Stefan Zweig dans ses Mémoires, les relations de confiance entre les membres d’une même société. Or, comme l’ont établi les économistes autrichiens, c’est la planche à billets utilisée pour financer les déficits budgétaires qui fait naître l’inflation. (…)
Deuxième idée de Milei : la liberté économique est le meilleur outil pour fabriquer de la prospérité. Le président argentin veut donc simplifier les lois, supprimer les monopoles et déréglementer jusqu’au point où l’Argentine sera économiquement aussi libre que Singapour ou la Suisse. L’objectif et le chemin sont clairs.
Pour quels résultats? En un an, la dépense publique a baissé de 15 %, l’Etat argentin est en excédent budgétaire et l’inflation semble terrassée. Javier Milei reste populaire car les Argentins lui savent gré de combattre ce mal inflationniste. De fait, une telle thérapie de choc n’est pas sans effets secondaires. La croissance s’est effondrée, le taux de chômage est passé de 6,1 % en 2023 à 8,2 % en 2024 et surtout, le taux de pauvreté à 50 % – la part des gens qui vivent avec moins de 50 % du revenu médian – a bondi de 42 % il y a un an à 53 % à la mi-2024. Cela n’est guère étonnant. Combattre l’inflation peut difficilement se faire sans sacrifier quelques mois d’activité. Le pari de Javier Milei, crédible, c’est que l’assainissement ainsi réalisé va remettre l’Argentine sur les rails de la prospérité.
Le plus compliqué pour lui sera de réduire la taille de l’Etat, non pas pour l’affaiblir mais pour le rendre plus efficace et le mettre au service de l’intérêt général. Moins de fonctionnaires, mais les meilleurs. Clairement, cette politique et ses fruits sont à suivre de près. Parce que le moment que vit l’Argentine, après des décennies de populisme, est fascinant. Peut-être aussi parce que la France, sans avoir traversé de telles affres inflationnistes, aura peut-être à connaître aussi son “moment Milei” dans quelques années.
The Economist, 11 décembre, article payant
Top of the charts : Which economy did best in 2024?
We rank countries on five measures

Extraits:
Interest rates at their highest in decades, wars in Europe and the Middle East, elections in countries as important as America and India. No matter. The world economy delivered another strong performance in 2024; according to the IMF, global GDP will rise by 3.2%. Inflation has eased and employment growth remains solid. Stockmarkets have risen by more than 20% for the second consecutive year.
Yet, as ever, the rosy global picture conceals wide variation between countries. To assess these differences, we have compiled data on five economic and financial indicators—GDP, stockmarket performance, core inflation, unemployment and government deficits—for 37 mostly rich countries. We then ranked each economy based on its performance on these measures to create a combined score. The table below shows these rankings. Who are the winners?
The Mediterranean’s rally rolls on for the third consecutive year, with Spain at the top of this year’s list. Greece and Italy, once emblematic of the euro zone’s woes, continue their strong recoveries. Ireland, which has attracted lots of tech firms, and Denmark, home to Novo Nordisk of Ozempic fame, round out the top five. Meanwhile, northern European heavyweights disappoint, with underwhelming performances from Britain and Germany. The Baltic duo of Latvia and Estonia find themselves back at the bottom, a position they also occupied in 2022. (…)
Our final measure looks at fiscal balances, excluding interest payments, as a share of GDP. After years of big spending, consolidation is required in many countries to ensure that debt burdens stay manageable. Denmark and Portugal stand out for achieving rare budget surpluses through fiscal discipline. Norway and Ireland also boast surpluses, though for other reasons: Norway owing to oil revenues and Ireland to a corporate-tax windfall, bolstered by a multibillion-dollar back-tax payment from Apple, a tech giant.

Most governments, however, continue to spend with abandon. Poland’s primary deficit exceeded 3% of GDP, owing to a rise in defence spending in response to Russia’s war in Ukraine. In Japan hefty fiscal stimulus, aimed at propping up the economy and easing cost-of-living pressures, risks compounding debt problems as an era of ultra-low interest rates comes to an end. Britain’s debt trajectory is deteriorating; its latest budget failed to repair the public finances. France is mired in political turmoil and unable to restrain spending.
As 2025 comes into view, the global economy faces new challenges. Nearly half the world’s population lives in countries that held elections this year, many of which ushered in leaders who might be described as “unpredictable”. Trade is under threat, government debt is swelling and stockmarkets have little room for error. For now, at least, Spain, Greece and Italy—long belittled by their northern neighbours—can bask in their economic resurgence. They deserve a fiesta. ■
https://www.economist.com/finance-and-economics/2024/12/10/which-economy-did-best-in-2024
Le Figaro, 11 décembre, article payant
«C’est l’enfer d’investir en France» : le cri d’alarme des patrons d’EDF, Engie et TotalEnergies
Luc Rémont, Catherine MacGregor et Patrick Pouyanné, patrons respectifs des trois entreprises, font état de vives inquiétudes sur les perspectives du marché de l’électricité, la réindustrialisation et la décarbonation.

Extraits:
Le cœur du problème est connu : la demande en électricité a baissé depuis les années 2010 et elle ne remonte pas, entraînant les prix de gros dans sa chute. Certes, il y a du positif dans ce constat, les efforts de sobriété et d’efficacité énergétique portent leur fruit. Mais il y a aussi une grande part de négatif. La demande des industries n’est pas au rendez-vous. D’abord, parce que les usines « tournent à 75 % de leurs capacités, comme en 2010, alors que le taux normal est à 82 % », a rappelé Patrick Martin, le président du Medef. Ensuite parce que le chemin de la réindustrialisation et de l’électrification des usages est pavé d’embûches. Par exemple, les véhicules électriques représentent 10 TWh de consommation. Ce sera 100 TWh en 2035… « À condition qu’on arrête les politiques de stop-and-go. Les constructeurs ont fait des choix stratégiques pour 2035 (avec l’interdiction de commercialiser des véhicules thermiques neufs après cette date, NDLR), il faut maintenir le cap », a tranché Catherine MacGregor, appelant, comme tous les patrons, à « de la stabilité des politiques en place et de la visibilité ». Et à de la simplification.
« C’est l’enfer d’investir en France pour des raisons réglementaires. Les délais administratifs sont incommensurables. Le premier frein à la décarbonation de l’industrie, ce sont les procédures », a ajouté Luc Rémont, rapidement rejoint par le patron de TotalEnergies. « En France, on sait rénover Notre-Dame de Paris en cinq ans, organiser les Jeux olympiques, construire des centrales nucléaires, mais on ne sait pas gérer des petits projets dans les énergies renouvelables. La loi d’accélération des renouvelables a tout ralenti, en ajoutant des comités là où il n’y en avait pas », s’est emporté Patrick Pouyanné, avant d’expliquer que son groupe allait installer dix fois plus de capacité de production d’énergie renouvelable en Allemagne (2 gigawatts) qu’en France (200 mégawatts). « Ce n’est pas un problème de place, mais de réglementation », a-t-il martelé, menaçant de déplacer ses investissements vers d’autres pays. (…)
Point de réserve pour Patrick Pouyanné, qui a une nouvelle fois affirmé être « prêt à financer le nucléaire, mais pas à prendre le risque de construction d’une centrale ». Ce n’est pas son métier. Pour autant, il n’y a toujours pas eu de contrat d’allocation de production nucléaire (CAPN), sorte de graal de l’après-Arenh, signé entre les deux entreprises et espéré par le gouvernement sortant (et les deux précédents). Il préfère continuer à déployer des parcs éoliens et solaires. (…)
C’est un des paradoxes du moment. Tous se plaignent de prix trop bas, d’une demande atone… et ils continuent à investir plus ou moins massivement dans les renouvelables. « Si on continue d’ajouter de la production instable sans demande complémentaire : à la fin on arrête d’ajouter de l’offre, c’est du bon sens », a alerté Luc Rémont. Au risque de prendre le risque de manquer d’électricité dans quelques années. Face aux flots de doléances, on en oublierait presque le constat posé par le patron d’EDF. La France bénéficie d’une électricité massivement décarbonée – sa production nucléaire qui se rapproche de ses niveaux historiques -, ses prix sont compétitifs par rapport à l’Allemagne et l’Italie (moins par rapport à la Chine et aux États-Unis) et, cette année, elle va battre tous ses records d’exportation d’électricité. Tout irait pour le mieux, si seulement la demande suivait…
Neue Zürcher Zeitung, 9 décembre, article payant
Sie macht uns glücklich und frei: Die liberale Demokratie ist immer noch das beste System
Erinnerung an eine fast vergessene Utopie.

Extraits:
Man könnte es das Rousseau-Marx-Syndrom nennen. Das Leiden daran, dass es unter den Politikern keine Utopisten mehr gibt. Dass sich niemand mehr eine schönere Welt vorstellen kann, dass keiner mehr gross zu denken vermag. Es ist eine weitverbreitete Klage, man kennt sie von melancholischen Tischgesellschaften und gut abgehangenen Leitartikeln. Als letzter Visionär ist uns der superreiche Supernerd geblieben, Elon Musk aus Kalifornien, der zum Mars fliegen und den Homo sapiens zur multiplanetaren Spezies upgraden möchte. Allerdings bleibt die Vorstellung vom Leben auf der Raumstation diffus, und Musks Utopie ist weit stärker technologievernarrt als menschenfreundlich.
Dennoch bekommt sie viel Aufmerksamkeit – man muss mit den Träumen vorliebnehmen, die noch übrig sind. Dies, weil im letzten Jahrhundert so manche Utopie in Rauch aufging, besonders prominent der Kommunismus. Worauf, so die weitverbreitete Ansicht, der Liberalismus endgültig triumphiert und der amerikanische Politologe Francis Fukuyama das «Ende der Geschichte» ausgerufen habe. Dies jedoch sehr zu Unrecht, sind sich die Polit-Kommentatoren einig.
Denn spätestens mit der Finanzkrise von 2008 habe auch der Liberalismus seine Glaubwürdigkeit verspielt. Jene Weltanschauung, die sich angelsächsische und französische Philosophen einst als Utopie ausgedacht hatten und die – zumindest in Westeuropa und Nordamerika – für ein paar Jahrzehnte weitgehend Realität geworden war. (…)
Man kann diese Angelegenheit auch anders sehen. Gerade der vielgeschmähte, oft zitierte, zugleich vermutlich nur selten tatsächlich gelesene Francis Fukuyama bietet einen guten Ausgangspunkt dafür. Der Clou seines Klassikers «Das Ende der Geschichte» von 1992 ist nämlich nicht, dass der Autor behaupten würde, der Lauf der Zeit sei nun definitiv einbetoniert. Fukuyama mag ein Hegelianer sein, der gewisse Entwicklungslinien sieht, ein Dummkopf ist er nicht.
Die aufregende, aber kaum beachtete Erkenntnis seines Buchs liegt vielmehr darin, dass die Idee der liberalen Demokratie nicht mehr aus der Welt zu schaffen ist. Das Wissen darum, dass es da draussen ein politisches System gibt, das ein freies und gutes Leben nicht bloss verspricht, sondern für die Mehrheit einer Gesellschaft zu realisieren vermag. (…)
«Die entscheidende Schwäche des totalitären Systems bestand darin, dass es nicht in der Lage war, die Gedanken zu kontrollieren», schrieb Fukuyama in seinem Buch über die Sowjetunion. Diese Aufgabe ist für die Autokraten seither kaum einfacher geworden, kam doch noch das Internet dazu. Und seit Lenin versuchen die Antidemokraten vergeblich, das schöne Wort Demokratie für sich zu vereinnahmen. Es bleibt mit dem Liberalismus verknüpft, ebenso wie Wirtschaftlichkeit – und damit auch das Glück. Nicht zufällig dominieren in einer Erhebung wie dem «World Happiness Report» die liberalen Demokratien, und das nach wie vor. Ausser ihnen haben es nur ein paar arabische Ölstaaten sowie der Stadtstaat Singapur in die Top 30 geschafft.
Die liberale Demokratie lässt dem Menschen seine Freiheiten und verleiht ihm zugleich die Macht, über seine politischen Vertreter zu bestimmen. Sie ist die einzige Utopie der Moderne, die ihre Versprechungen zu weiten Teilen eingelöst hat. Sicher, sie kennt ebenfalls Armut und Verzweiflung. Manchmal kollabieren ihre Börsen, und zuweilen implodieren nicht nur ihre Regierungen, sondern auch sie selbst. Die Weimarer Republik ist ein dramatisches Beispiel, aber auch das Jelzin-Russland. Doch die positive Entwicklung überwiegt. Beim Kommunismus war es umgekehrt: vereinzelte Zwischenerfolge, im Grossen und Ganzen aber ein Desaster. (…)
Dennoch bringen die Russen und mehr noch die Chinesen so manchen ins Grübeln. Wäre ein kräftiges Durchregieren nicht effektiver? Auch hier hilft es, Fukuyamas Wälzer nochmals zur Hand zu nehmen. So widmet der Stanford-Politologe dem Nachfolgeproblem der Nichtdemokraten einige erhellende Passagen. «Nur wenige totalitäre Regime standen einen oder mehrere Diadochenkämpfe durch», schreibt Fukuyama. Bei diesen Kämpfen hätten sich dann oft jene Politiker hervorgetan, die einen Systemwechsel versprachen. Politiker, die auf die «Reformkarte» setzten und mit den Verheissungen der liberalen Demokratie lockten. In Konflikten mit autoritären Staaten läuft die Zeit mittelfristig für die Demokratie. (…)
Was bleibt uns Normalbürgern zu tun? Trinken wir Tee, und gehen wir weiterhin vernünftig wählen. Und seien Sie bitte nicht allzu überrascht, wenn Ihr Leben in der Zwischenzeit noch ein bisschen besser geworden sein sollte.
Wall Street Journal, 9 décembre, article payant
Measuring Milei’s Argentine Progress
A year into his rule, the reform effort is working, but time is running short.

Extraits:
(…) Mr. Milei begins his second year in office on Tuesday. He inherited a large fiscal deficit, swelling debt and a 2023 inflation rate of more than 200% from Peronist former President Alberto Fernández. At his inauguration Mr. Milei was careful to warn the nation that recovery would be painful. He’s been right. The economy is expected to contract 3.5% this year and annual inflation will finish 2024 near 120%. Even so the president’s public approval is above 50%. He scores higher in public trust than any of the past three presidents after 12 months in office.
Milei supporters are convinced that things would be much worse if not for their chain-saw-wielding president. He’s their David fighting the Goliath state, a reckless central bank and regulatory capture by special interests—from labor unions and nongovernmental social organizations to domestic producers. The recession is probably over and next year the economy might grow 4% to 5%. Country risk has fallen sharply. Inflation still isn’t whipped—prices are forecast to rise around 30% in 2025—but relative to recent history it’s tame. For now he can boast a softer-than-expected landing and some stability, which a year ago seemed out of reach.
Skeptics have reason to fret. The government brags that it has reached fiscal balance. But as a recent paper by economists Sebastian Galiani at the University of Maryland and Santiago Afonso at the University of Buenos Aires explains, Milei technocrats used surging prices in the first six months of this year to get there. “The administration,” the authors write, “has heavily relied on inflation-driven cuts to social spending and public investment rather than on structural reforms.” (…)
SPECIAL PRESS REVIEW ON MERCOSUR-DEAL

Le Monde, 7 décembre, article payant
L’Union européenne et le Mercosur annoncent un accord de libre-échange, un revers pour la France
Au bout de vingt-cinq ans de négociations, la Commission européenne et cinq nations d’Amérique du Sud se sont entendues sur un texte facilitant leurs échanges commerciaux. L’accord doit encore être validé par les Etats membres et le Parlement européen. La France, opposée au traité, organise la résistance.
Extraits:
Depuis qu’elle avait pris l’avion pour rejoindre Montevideo, en Uruguay, jeudi 5 décembre, il semblait acquis qu’Ursula von der Leyen allait profiter du sommet du Mercosur (Argentine, Bolivie, Brésil, Uruguay et Paraguay) pour conclure l’accord entre l’Union européenne (UE) et les pays de ce marché commun d’Amérique du Sud. (…)
Les échanges entre ces espaces économiques ne vont pas pour autant être libéralisés demain. Maintenant que la Commission, qui négocie au nom des Vingt-Sept, et le Mercosur ont trouvé un accord, il faut en effet que les Etats membres et le Parlement européen le valident, avant qu’il puisse être ratifié. Ce qui peut prendre des mois, voire des années, tant le dossier est complexe.
Vendredi, Mme von der Leyen s’est réjouie d’« un accord qui bénéficiera aux deux parties » et « apportera des bénéfices significatifs aux consommateurs et aux entreprises ». Il devrait permettre de supprimer les droits de douane pour environ 90 % des biens exportés vers la région, aujourd’hui taxés pour les voitures à 35 %, les produits chimiques jusqu’à 18 %, les produits pharmaceutiques jusqu’à 14 % et les chaussures en cuir à 35 %.
Ce « n’est pas seulement une opportunité économique, c’est une nécessité politique », a-t-elle ajouté, alors que l’UE a de plus en plus de mal à conclure des traités de libre-échange dans un monde de plus en plus protectionniste.
Entre l’élection de Donald Trump, qui promet de surtaxer les importations européennes, et une Chine qui se ferme aux produits étrangers tout en étant très offensive hors de ses frontières où elle exporte ses surcapacités industrielles, l’Europe a effectivement de quoi s’inquiéter. D’autant que Pékin et Washington travaillent à élargir leur zone d’influence en dehors de leurs frontières. « Des vents violents soufflent (…) vers l’isolement et la fragmentation, mais cet accord est notre réponse immédiate », a insisté Mme von der Leyen.
Dans la foulée, le chancelier allemand, Olaf Scholz, s’est félicité, sur X, qu’une étape importante ait été franchie vers « un libre marché, plus de croissance et de compétitivité pour plus de 700 millions de personnes ». (…) Le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, dont le pays est très lié à l’Amérique du Sud, a pour sa part salué un accord « historique » ; il « nous rendra – nous tous – plus prospères et plus forts »,a-t-il commenté sur X.
Côté français, l’ambiance était nettement moins festive. Annoncée moins de quarante-huit heures après la chute du gouvernement Barnier, mercredi 4 décembre, la conclusion de l’accord ne pouvait pas tomber plus mal pour le président de la République, Emmanuel Macron, déjà affaibli sur la scène européenne depuis la dissolution ratée de l’Assemblée nationale en juin. (…)
Si la Commission juge qu’il s’agit là d’un traité exclusivement commercial, alors il devra être validé par une majorité qualifiée (au moins quinze pays représentant au moins 65 % de la population) des Etats membres et une majorité des eurodéputés. Sinon, il lui faudra obtenir l’unanimité des Vingt-Sept, une majorité au Parlement européen et une ratification par tous les Parlements nationaux de l’UE. (…)
En attendant, la France cherche à fédérer une minorité de blocage. A ce stade, deux pays – la Pologne et l’Autriche – ont exprimé leur opposition à un l’accord. L’Italie entretient l’ambiguïté, alors que la coalition de Giorgia Meloni est divisée sur le sujet et que le patronat y est favorable quand les agriculteurs s’en inquiètent. (…)
M. Macron essaiera avant tout de rallier à son combat les pays où la grogne agricole est la plus prompte à déstabiliser les gouvernements, comme « la Pologne, les Pays-Bas, l’Autriche ou la Belgique », précise l’Elysée. Il compte aussi sur le Parlement européen, où le vote s’annonce serré. (…)
Une chose est sûre : les relations entre M. Macron et Mme von der Leyen, que les proches du président de la République aimaient jusqu’à peu à qualifier d’« excellentes », ont changé de nature. D’ailleurs, la présidente de la Commission, qui devait se rendre samedi 7 décembre à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris, a finalement renoncé. « Elle a compris qu’il valait mieux qu’elle ne vienne pas », commente un proche de l’Elysée.
The Guardian, 7 décembre, libre accès
EU farmers plan protests as Von der Leyen approves Mercosur trade deal
Deal objected to by France will, if ratified, cut tariffs on trade with Argentina, Brazil, Paraguay and Uruguay
Extraits:
The EU executive has struck a deeply controversial trade deal with four South American countries, overriding objections from France and triggering an immediate call for protest from European farmers.
Ursula von der Leyen, the European commission president, flew to Montevideo to sign what she called a “historic agreement” with the four founding members of Mercosur: Argentina, Brazil, Paraguay and Uruguay. (…)
Von der Leyen said the agreement was “not just an economic opportunity” but a “political necessity” between like-minded, democratic countries. (…)
She approved the deal despite being told it was “unacceptable” by the French president, Emmanuel Macron, who is embroiled in a domestic political crisis. (…)
The agreement still has to be approved by EU member states and the European parliament, although the precise mechanisms have yet to be determined. It is widely expected that commission lawyers will opt for the easier method of ratification that does not give a veto to member states.
Even so, ratification is not a certainty. France’s minister for trade, Sophie Primas, told AFP the latest deal was “not the end of the story”, saying “this only commits the commission, not the [EU] member states”. (…)
On Friday, one of Meloni’s allies in the European parliament, Carlo Fidanza, said there was no reason to give the green light, as compensation for European producers who could lose out remained “too meagre”, among other concerns.
The agreement is strongly supported by Germany and Spain, who see export opportunities and stronger diplomatic links.
The German chancellor, Olaf Scholz, tweeted that an important obstacle had been overcome: “This will create a free market for more than 700 million people along with more growth and competitiveness.” (…)
EU officials said they had made significant improvements to the 2019 text: the agreement can now be suspended if countries fail to abide by their promises under the Paris climate treaty. The trade deal “respects Mercosur’s extraordinary and fragile natural heritage”, von der Leyen said.
Green campaigners and politicians argue that climate protections are inadequate. The European Trade Justice Coalition has claimed the deal will drive deforestation and promotes “destructive agricultural models that displace small farmers and Indigenous communities”. (…)
The commission, which has the power to negotiate trade deals on behalf of the EU, has been in despair that the Mercosur agreement could fail. Officials fear that the EU would lose influence and credibility in South America, as China rapidly increases its investments on the continent.
New York Times, 7 décembre, article payant
A Second Trump Term Is Set to Scramble Trade Alliances
Europe’s new pact with South America, its largest deal to date, could be a sign of how countries will diversify trade relationships as Donald Trump threatens tariffs.

Extraits:
Even before stepping back into the Oval Office, President-elect Donald J. Trump is prompting governments across the globe to rethink their trading relationships as they prepare for a four-year period in which business with the United States could become much more volatile.
Foreign officials and analysts say that Mr. Trump’s threats to impose tariffs on much of the rest of the world are encouraging some countries to try to diversify their trading relationships and find other avenues for their products as they seek to get ahead of a potentially damaging trade war.
A tie-up between the European Union and South America announced on Friday demonstrates the kind of shifting trade alliances that Mr. Trump’s presidency could bring. The European Union finalized its biggest trade deal to date, signing an agreement with members of Mercosur, a South American trade bloc that includes Argentina, Bolivia, Brazil, Paraguay and Uruguay.
If ratified, the deal will establish one of the largest trade zones in the world, lowering tariffs on cars, machinery and pharmaceuticals that move between the continents. That allegiance could put American exporters at a disadvantage, as many of the partner countries gain better trading terms with one another than they have with the United States. For instance, American farmers who want to sell beef, poultry and soybeans into Europe may find themselves boxed out by South American exports that will now gain access to the market with lower tariffs.
Trade relationships have been undergoing a seismic shift over the past eight years as the United States has backed away from its longstanding position as a champion of globalization and free-trade agreements. Mr. Trump’s first presidency included a sharp turn toward protectionism, as he negotiated deals globally but ended up leaving much higher tariffs in place against allies like Mexico and Europe, and competitors like China. (…)
Skepticism about the benefits of trade is growing in other countries as well, particularly about doing business with China, which has put many global firms out of business with its cheap products. But many other countries have still been pushing forward with new trade pacts. (…)
While the E.U. had been negotiating the South American agreement for a long time, Mr. Trump’s election may have accelerated its completion, he said. “The idea of spreading the wealth and diversifying the portfolio is probably one of the factors,” he said.
https://www.nytimes.com/2024/12/06/us/politics/trump-trade-alliances.html
Le Figaro, 7 décembre, article payant
Accord UE-Mercosur : la faute d’Ursula von der Leyen
TRIBUNE – Si l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur est loin d’être aussi néfaste que certains le prétendent, la présidente de la Commission européenne fait une grave erreur en cherchant à l’imposer par la force aux États réticents, estime l’essayiste Jérémie Gallon*.
*Jérémie Gallon est l’auteur de Journal d’un jeune diplomate dans l’Amérique de Trump (Gallimard, 2018) et Henry Kissinger, l’Européen (Gallimard, 2021).
Extraits:
Le libre-échange est devenu un concept « toxique ». En France, comme aux États-Unis, il est désormais impossible d’avoir un débat rationnel, apaisé et non manichéen sur un accord commercial. Si vous appartenez au camp de ceux qui le soutiennent, vous êtes accusé d’être l’objet de soi-disant lobbys, des intérêts du grand capital et d’être l’incarnation de ceux que le sociologue David Goodhart appelle les « anywhere », des élites déracinées et déconnectées de la réalité des « vraies gens ». À l’inverse, si vous vous opposez à ces accords, les prétendues « élites » vous expliquent avec mépris que vous n’avez rien compris, que vous êtes ignorants des grandes dynamiques économiques et géopolitiques qui structurent le monde. Entre ces deux camps, enfermés dans leurs préjugés, il n’y a plus de dialogue.
Il est incontestable qu’au cours des dernières décennies, nos dirigeants n’ont pas toujours su protéger nos concitoyens des excès du libre-échange. (…)
Mais il est tout aussi vrai que les accords commerciaux, tels qu’ils sont aujourd’hui négociés par l’Union européenne, n’ont rien à voir avec ceux du passé. Ils protègent beaucoup mieux nos intérêts et contiennent des garanties sans précédent pour obliger nos partenaires à respecter nos normes environnementales, sanitaires et en matière de droit du travail. Alors que l’accord commercial avec le Canada, dit Ceta, était présenté par les populistes de tous bords comme une catastrophe annoncée, il a permis aux exportations françaises d’augmenter d’un tiers en six ans. Durant la même période, notre agriculture a vu son excédent commercial avec le Canada être multiplié par trois, nos exportations de fromage ont augmenté de 60% et un nouveau marché s’est ouvert pour notre filière viticole qui souffre tant.
Dans ce contexte, le débat sur l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur n’a pas été à la hauteur des enjeux. Certes, comme tout accord qui résulte de compromis, il n’est pas parfait. Mais alors que l’Europe fait face à un déclin démographique et que son poids économique sur la scène mondiale ne cesse de se réduire, avons-nous le luxe de pouvoir nous replier sur nous-mêmes et de ne pas partir à la conquête du cinquième marché mondial ? (…) Ne devons-nous pas renforcer nos liens avec cette Amérique du Sud si riche en matières premières critiques ? Xi Jinping, qui vient de se rendre pour la sixième fois sur ce continent depuis 2013, semble l’avoir parfaitement compris. À l’inverse, nos politiciens ont fait le choix de la démagogie. (…) En faisant de l’accord avec le Mercosur un chiffon rouge, ils ont méprisé nos agriculteurs. (…)
Pourtant, malgré tous ces éléments, Ursula von der Leyen a commis une faute majeure en signant l’accord avec le Mercosur ce vendredi 6 décembre à Montevideo. Dans une Union européenne où les deux principaux États Membres, l’Allemagne et la France, sont profondément affaiblis, la présidente de la Commission européenne estime qu’elle peut désormais avancer sans leur accord. C’est ainsi qu’elle a imposé des tarifs sur les importations de véhicules électriques chinois alors que Berlin s’y opposait. De la même manière, elle conclut aujourd’hui un accord commercial majeur malgré l’opposition de la France. (…)
Mais en prenant ce chemin, Ursula von der Leyen oublie que l’Union européenne demeure une union des États Nations. Elle oublie que, pour le meilleur ou pour le pire, la légitimité démocratique appartient aux dirigeants nationaux qui, contrairement à elle, ont été élus par leurs peuples. Surtout, en pensant défendre l’Union européenne à court terme, elle l’affaiblit à long terme. (…) Le débat sur l’accord avec le Mercosur aura donc fait deux victimes : nos agriculteurs, auxquels nos dirigeants ont refusé un débat de fond sur les vrais défis auxquels ils font face, et l’Union européenne, parce qu’elle paiera un jour le prix de ce déni démocratique.
https://www.lefigaro.fr/vox/monde/accord-ue-mercosur-la-faute-d-ursula-von-der-leyen-20241206
L’Opinion, 7 décembre, article payant
Von der Leyen signe le Mercosur et se fait virer de Notre-Dame
La présidente de la Commission européenne a ulcéré le chef de l’Etat en signant l’accord Mercosur en catimini
Extraits:
Virée de Notre-Dame. Ursula Von der Leyen n’assistera pas samedi à l’inauguration de la cathédrale restaurée. Pour la version officielle, la présidente de la Commission européenne a renoncé d’elle-même à assister à la cérémonie de réouverture. “La visite n’avait pas été confirmée. La présidente n’ira pas à Paris”, faisait savoir la Commission vendredi en fin d’après-midi. Inacceptable. En réalité, Ursula Von der Leyen est désormais persona non grata à Paris. Son escapade sud-américaine pour signer l’accord Mercosur a ulcéré Emmanuel Macron qui martèle depuis 2017 son opposition à ce traité de libre-échange entre l’Europe d’un côté, le Brésil, l’Argentine, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela de l’autre. “La Commission a achevé son travail de négociation avec le Mercosur, c’est sa responsabilité mais l’accord n’est ni signé ni ratifié, indiquait l’Elysée vendredi. Cet accord, dont le résultat final n’a pas été présenté aux Etats, reste inacceptable en l’état”.
Autour d’Emmanuel Macron, on soupçonne ouvertement la présidente de la Commission d’avoir sciemment profité de la crise politique que traverse le pays pour tenter d’accélérer. (…)
Le rejet du Mercosur est l’un des seuls sujets consensuels du moment. La semaine dernière, les députés ont rejeté l’accord à une très large majorité de 484 voix. Le chef de l’Etat lui-même s’y oppose (depuis 2017) et cherche une minorité de blocage en Europe pour arrêter le projet. (…)
“Ce n’est pas la fin de l’histoire”, jure-t-on à l’Elysée. La signature de l’accord par Ursula Von der Leyen n’est qu’une première étape. Un paraphe pour acter la fin des négociations entre l’UE et les pays du Mercosur. Désormais, c’est aux Etats de se pencher sur le contenu de l’accord et décider de le signer à leur tour ou non, avant, dernière étape, de le ratifier.
“Le texte est paraphé mais cette conclusion technique n’emporte aucun effet juridique et ne lie pas les états membres”, explique un diplomate. Aux politiques désormais d’entrer en scène. Et à Emmanuel Macron de rendre la monnaie de sa pièce à Ursula Von der Leyen.
https://www.lopinion.fr/politique/von-der-leyen-signe-le-mercosur-et-se-fait-virer-de-notre-dame
Articles du 5 juin au 7 décembre 2024