I.3. La crise économique française


Le Figaro, 22 février

Christelle Morançais et Agnès Verdier-Molinié: «Notre méthode choc pour baisser enfin la dépense publique»

ENTRETIEN – Alors que le gouvernement de François Bayrou n’arrive pas à réduire durablement les dépenses de l’État, Christelle Morançais, présidente de la région Pays de la Loire, et Agnès Verdier-Molinié, directrice de la Fondation Ifrap, démontrent qu’il est possible de le faire.

Article intégral:  https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/02/22-fevrier-3.pdf

https://www.lefigaro.fr/lefigaromagazine/christelle-morancais-et-agnes-verdier-molinie-notre-methode-choc-pour-baisser-enfin-la-depense-publique-20250221


IREF, 19 février

Déficit de la Sécurité sociale : une vraie réforme s’impose

Article intégral :      

Lundi 17 février, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 a été définitivement adopté par le Sénat. Selon la ministre du Travail et de la Santé, le PLFSS a permis de contenir le déficit entre 22 et 23 milliards d’euros en 2025 au lieu de 30 milliards.

Ce gouffre financier, en progression constante, illustre l’incapacité chronique de l’État à gérer efficacement notre système de protection sociale et à réformer en profondeur. L’objectif national de dépenses d’assurance-maladie (Ondam) s’élève à 265,9 milliards d’euros – une hausse de 3,4 % par rapport à 2024 – et comporte 1 milliard d’euros supplémentaires pour les hôpitaux publics qui s’engouffrent dans le déficit. Pour les entreprises, le coût du travail augmente : les exonérations de cotisations sociales seront réduites à 1,6 milliard d’euros pour redresser les comptes de la Sécurité sociale. Quant à l’augmentation de la taxe sur les boissons sucrées, elle témoigne davantage d’un opportunisme fiscal que d’une réelle volonté de responsabiliser les citoyens. En résumé, on continue d’injecter toujours plus d’argent dans un système défaillant, sans jamais questionner son mode de fonctionnement. L’argument de la solidarité est devenu le paravent d’une organisation publique en situation de monopole légal.

Contrairement aux entreprises du secteur privé, la Sécurité sociale ne subit aucune pression concurrentielle et n’est donc pas incitée à optimiser ses coûts. Elle a déjà été épinglée à de multiples reprises par la Cour des comptes, notamment pour des erreurs de règlements de frais de santé, de prestations de retraite, mais aussi pour des fraudes à l’Assurance maladie. C’est pourquoi l’IREF soutient sa privatisation et sa mise en concurrence afin d’encourager une meilleure gestion financière et, plus fondamentalement, d’offrir aux citoyens la liberté de choisir leur assurance auprès de mutuelles ou de compagnies privées à des prix plus compétitifs.

https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/deficit-de-la-securite-sociale-une-vraie-reforme-simpose/


Le Point, 6 février, article payant   

Taxer les plus riches : en finir avec ce réflexe pavlovien qui masque les vrais enjeux

CHRONIQUE. Face à la dette, le gouvernement Bayrou envisage de renforcer la taxation des hauts revenus. Une stratégie qui soulève des questions d’efficacité économique et de justice fiscale.

Article intégral :

Dans le volet « recettes » du projet de loi de finances de 2025, le gouvernement Barnier envisageait d’ajuster la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) afin de faire participer les hauts revenus au redressement des finances publiques. François Bayrou reprend cette mesure pour son propre budget, espérant qu’elle rapportera 2 milliards d’euros en 2025.

Actuellement, la CEHR s’ajoute à l’impôt sur le revenu pour les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence dépasse 250 000 euros pour les célibataires (veuf, séparé ou divorcé) et 500 000 euros pour les personnes mariées ou pacsées. Les taux appliqués sont les suivants :

  • Pour une personne seule :
    • De 250 001 à 500 000 euros : 3 %
    • De 500 001 à 1 000 000 euros : 4 %
    • Au-delà de 1 000 000 euros : 4 %
  • Pour un couple :
    • De 500 001 à 1 000 000 euros : 3 %
    • Au-delà de 1 000 000 euros : 4 %

Comme le gouvernement Barnier, l’équipe de Bayrou envisage de majorer cette contribution par une contribution différentielle. Tous les foyers fiscaux qui paient la CEHR, et dont le montant total de l’impôt sur le revenu et la CEHR est inférieur à 20 % de leur revenu fiscal de référence, devrait payer cette nouvelle taxe, la CDHR. Cette dernière serait égale à la différence entre 20 % du revenu fiscal de référence (RFR) du foyer et le cumul de son impôt sur le revenu et de sa CEHR.

Prenons l’exemple d’un célibataire avec un revenu fiscal de référence de 350 000 euros. Si la somme de son IR et de sa CEHR est inférieure à 70 000 euros (soit 20 % de son RFR), il serait redevable de la CDHR.

Si cette proposition venait à être adoptée, elle rappellerait d’abord que la dérive des finances publiques, marquée par les déficits et la dette, se traduit inévitablement par des hausses d’impôts. La dette publique n’est, en réalité, qu’un impôt différé. Elle montrerait ensuite que le gouvernement opte pour une approche de compromis : il ne choisit pas de réduire les déficits uniquement par une baisse des dépenses publiques, mais décide d’augmenter les taux d’imposition sur les hauts revenus. Cependant, si l’on considère qu’un bon impôt repose sur une assiette large et des taux faibles, une telle mesure manque d’efficience. Elle prend le risque d’évasion fiscale (délocalisation de l’assiette), mais aussi d’amplifier les effets d’inactivité. Les contribuables travaillent moins pour passer en dessous des seuils.

Enfin, cette proposition met en lumière un constat : l’idée de taxer les riches pour assainir les finances publiques apparaît comme transpartisane, réunissant gauche et droite. La CEHR a été inventée par un gouvernement de droite. Elle a été votée en 2012 et utilisée sous la présidence Hollande pour contourner la décision du Conseil constitutionnel qui avait invalidé le projet d’une tranche de l’impôt sur le revenu à 75 % sous le motif qu’un tel taux était confiscatoire. D’une taxe exceptionnelle, la CEHR est devenue une mesure pérenne.

Tant que le gouvernement sait qu’il peut augmenter les impôts pour couvrir sa dette sans subir de sanction des urnes parce qu’il peut concentrer l’impôt sur un petit nombre d’électeurs, la dérive des comptes publics continuera. Pour sortir de ce cycle, il faut proposer d’autres solutions.

À long terme, le gouvernement Bayrou pourrait aller vers un régime de TVA à taux unique et à large assiette. À plus court terme, et dans le cadre de sa majorité, il pourrait proposer la création d’un taux d’imposition de l’impôt sur le revenu des personnes physiques de 1 % dès le premier euro gagné. ; il pourrait instaurer une contribution exceptionnelle de solidarité des agents de la fonction publique de 1 %. Ces pistes ne sont évidemment pas exhaustives, et d’autres solutions pourraient être explorées.

Si on écarte les réformes plus ambitieuses par manque de majorité, la création d’un taux à 1 % permettant d’élargir l’assiette de l’impôt sur le revenu pourrait être une solution. Un tel taux aurait pour effet d’augmenter le rendement de l’impôt sur le revenu sans augmenter les effets d’inactivité qu’une hausse du taux haut provoquerait. On le sait l’assiette de l’impôt sur le revenu est étroite. Parmi les 43,2 % des foyers fiscaux qui paient effectivement l’impôt, les contribuables appartenant au 10 % des plus hauts revenus contribuent à 72 % des recettes de cet impôt (année 2020).

Outre les gains financiers d’une telle mesure, la création d’un taux à 1 % dès le premier euro gagné éviterait de stigmatiser les hauts revenus, créerait une unité nationale autour de ce problème commun qui est la dette publique et serait le premier pas vers une fiscalité moins destructrice de richesse.

Une autre piste susceptible de rallier la gauche pourrait être la création d’une contribution exceptionnelle de solidarité (CES). Cette contribution, initialement introduite par la gauche dans le cadre du programme commun en 1982, avait un caractère exceptionnel. Elle a perduré jusqu’en 2018 et servait à financer l’aide de l’État aux allocations de solidarité versées aux travailleurs privés d’emploi. Elle était gérée par l’Unedic. Son taux était fixé à 1 % et elle était acquittée par l’ensemble des agents de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics administratifs.

Une telle contribution pourrait être justifiée de la manière suivante : les agents des administrations publiques sont parmi les principaux bénéficiaires de la dette publique. En effet, ils sont payés par l’impôt et/ou par l’épargne collectée via l’émission de titres publics. Comme tous les contribuables, ils bénéficient des services publics, des transferts sociaux mais, en plus, d’un statut qui les protège des risques de licenciement. Pour toutes ces raisons, il semble juste de leur demander une contribution exceptionnelle.

Si on retient le chiffre de 322 milliards d’euros de masse salariale totale pour le secteur public, une contribution exceptionnelle de 1 % pourrait rapporter 3,22 milliards d’euros.

* François Facchini est professeur agrégé des universités, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Centre d’économie de la Sorbonne.

https://www.lepoint.fr/economie/contribution-exceptionnelle-sur-les-hauts-revenus-cehr-en-finir-avec-ce-reflexe-pavlovien-qui-masque-les-vrais-enjeux-04-02-2025-2581564_28.php


Le Figaro, 31 janvier, article payant

L’alerte de Florent Menegaux, PDG de Michelin : «Pour 142 euros versés par une entreprise, le salarié n’en touche que 77,5»

RENCONTRE – Le PDG du groupe Michelin tire la sonnette d’alarme : face à la concurrence asiatique, il est urgent de préserver la compétitivité des entreprises européennes.

Extraits:

D’un naturel sobre et discret, le patron de Michelin est encore méconnu du grand public. Depuis son intervention remarquée devant la commission du Sénat consacrée aux difficultés de l’industrie automobile, le 22 janvier, on ne parle cependant plus que de lui dans les milieux économiques. Auditionné suite à l’annonce fin 2024 de la fermeture des usines Michelin de Vannes et de Cholet, Florent Menegaux n’y est pas allé par quatre chemins pour dénoncer posément, mais avec fermeté, l’enfer fiscal et social dans lequel opèrent les entreprises françaises, alors qu’elles sont confrontées à une compétition féroce sur les marchés mondiaux.

Il n’est pas fréquent de voir le patron d‘un groupe comme Michelin (28 milliards d’euros de chiffres d’affaires, 132.000 salariés dans 26 pays) pointer aussi clairement les maux qui menacent l’industrie européenne et expliquent son décrochage progressif face à ses concurrents. « Le constat de Florent Menegaux est factuel, franc et très juste. Il le dresse de façon limpide, sans détour, exprimant ce que beaucoup de patrons ressentent », analyse Jean-Dominique Senard, président du groupe Renault et ancien PDG de Michelin jusqu’en mai 2019. (…)

En 27 ans de maison, Menegaux a vécu aux premières loges l’arrivée des pneus asiatiques à bas coûts sur le marché européen. « Leur part est passée de 5% du marché mondial à plus de 20% aujourd’hui, explique-t-il au Figaro Magazine200 manufacturiers de pneus ont été créés en Chine au cours des vingt-cinq dernières années, ce qui a fait chuter de 15 points les parts de marché respectives des trois premiers producteurs mondiaux (NDLR : Michelin, le japonais Bridgestone, l’américain Goodyear) et généré une surcapacité mondiale massive. »

Dans un tel contexte, la compétitivité des entreprises est un enjeu décisif. Or, « la compétitivité en France et en Europe s’est fortement dégradée au cours des cinq dernières années, prévient Florent Menegaux. Elle ne permet plus d’exporter depuis l’EuropeEn référence à une base 100 en Asie, les coûts de production en Europe se situaient chez Michelin à 134 en 2019, ce qui était encore gérable. Mais aujourd’hui, ils sont passés à 191, alors qu’ils sont toujours à 100 en Asie. En 2024, produire en Europe nous coûte deux fois plus cher qu’en Asie ! », s’inquiète-t-il.

Comment en serait-il autrement alors que le prix de l’électricité, dont l’industrie du pneumatique est fortement consommatrice, se négocie à 108 € le mégawattheure en France contre, par exemple, 97 € en Espagne ou 68 € en Amérique du Nord ? L’inflation, qui s’est reportée sur les salaires, pèse également sur les coûts de production. Mais pour Florent Menegaux, défenseur d’un capitalisme plus juste et à l’origine du concept de « salaire décent » mis en place en 2024 chez le numéro 1 mondial des pneumatiques, ce n’est pas tant le niveau des salaires qui pose problème que l’écart entre le brut et le net. « Pour 100 € brut versés en France, le coût moyen pour l’entreprise est de 142 € ; mais le salarié, lui, va toucher 77,5 €. Les mêmes 100 € versés en Allemagne coûteront 120 € à l’entreprise ; et le salarié touchera 80 €. »

Comme nombre de chefs d’entreprise, le patron de Michelin dénonce le poids des prélèvements obligatoires dont la France est championne, à 45,6 % du PIB. « On peut bien sûr augmenter les taxes sur les industries en France, mais il ne faut pas s’étonner après si les industries vont ailleurs, dans un environnement concurrentiel ouvert, mondial. Michelin ne demande pas des règles du jeu uniformes, mais équitables. Si une équipe de foot à 11 joueurs est confrontée à une équipe qui en compte 22 et qui peut prendre la balle avec la main, ce n’est plus le même jeu. »

Une inquiétude qui sonne comme un avertissement, alors que le gouvernement envisage d’alourdir la fiscalité sur les entreprises. (…)

https://www.lefigaro.fr/conjoncture/l-alerte-de-florent-menegaux-pdg-de-michelin-pour-142-euros-verses-par-une-entreprise-le-salarie-n-en-touche-que-77-5-20250130


Le Figaro, 29 janvier, libre accès

«C’est un peu la douche froide» : Bernard Arnault déplore la hausse prévue des impôts sur les entreprises françaises

Lors de la présentation des résultats annuels de LVMH, le milliardaire a vivement critiqué cette «taxe sur le made in France», alors qu’«aux USA, les impôts vont descendre à 15%».

Extraits:

Bernard Arnault, PDG du numéro un mondial du luxe LVMH, a dénoncé mardi l’augmentation prévue des impôts sur les entreprises françaises, estimant qu’il s’agit d’une «taxe sur le made in France» qui «pousse à la délocalisation»«Je reviens des USA et j’ai pu voir le vent d’optimisme qui régnait dans ce pays. Et quand on revient en France, c’est un peu la douche froide» (…)

«Aux USA, les impôts vont descendre à 15%, les ateliers sont subventionnés dans une série d’Etats et le président (Trump) encourage ça», a salué le dirigeant du géant français du luxe lors de la présentation des résultats 2024 de LVMH. «Quand on revient en France et qu’on voit qu’on s’apprête à augmenter de 40% les impôts des entreprises qui fabriquent en France, c’est incroyable. Pour pousser à la délocalisation, c’est idéal!», a-t-il dénoncé. «C’est la taxation du made in France.» M. Arnault faisait allusion à la surtaxe d’impôt sur les sociétés, prévue, pour les plus grosses, dans le budget actuellement en préparation en France pour l’année 2025. Cette surtaxe devrait rapporter quelque 8 milliards d’euros à l’Etat cette année. (…)

Le gouvernement a cependant indiqué ne vouloir l’appliquer que pour un an. «Personne n’y croit, une fois qu’on a augmenté les impôts de 40%, qui va les baisser de 40%?», a jugé M. Arnault en marge de la conférence de presse. «Nous sommes fortement sollicités par les autorités américaines à continuer nos implantations (d’ateliers)», a-t-il ajouté, et, «dans l’environnement actuel, c’est quelque chose qu’on regarde sérieusement». (…)

https://www.lefigaro.fr/societes/c-est-un-peu-la-douche-froide-bernard-arnault-deplore-la-hausse-prevue-des-impots-sur-les-entreprises-francaises-20250128


Le Figaro, 28 janvier, article payant

«Personne ne sait où on va» : l’alarmante hausse du chômage renforce les craintes pour 2025

DÉCRYPTAGE – Le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à France Travail a augmenté de 3,9% au quatrième trimestre 2024. La bonne dynamique d’augmentation des créations d’emplois s’est grippée l’an dernier. La situation pourrait empirer en 2025.

Extraits:

La fin d’un cycle pour Emmanuel Macron et le marché du travail. Depuis l’arrivée au pouvoir de l’ex-ministre de l’Économie jusqu’à la fin de l’année 2023, le pays a connu une embellie généralisée sur le front de l’emploi. Depuis 12 mois, en revanche, l’économie française est entrée en phase de turbulence. Un trou d’air qui a ranimé la crainte d’un retour en force du chômage dans un avenir proche. Fonderie de Bretagne, Vancorex… Plusieurs annonces de fermetures d’usines ces derniers mois ont donné l’impression d’un retournement violent de conjoncture. 

« Cela n’est que le début, si on ne fait rien, d’une nouvelle saignée industrielle », a prophétisé Sophie Binet, à la tête de la CGT. Le nombre de demandeurs d’emploi au quatrième trimestre, publié ce lundi, va dans ce sens : il a progressé de 3,9% sur trois mois et de 3,5% sur l’année (France entière), pour atteindre 3,138 millions. Hors sursaut pendant le Covid, cela fait plus de dix ans que la progression n’avait pas été aussi forte sur la catégorie sans activité (la catégorie A). Si on y ajoute les demandeurs d’emploi à temps partiel (catégories A, B et C), la hausse sur un an est néanmoins contenue à 1,8%.

« On ne s’attendait pas à ce que ça soit bon, mais là, c’est très mauvais. 2024 sonne comme l’année où le marché de l’emploi a calé », relève Mathieu Plane, directeur adjoint du département analyse et prévision l’OFCE. (…)

« Il n’y a pas de raison de tenir un discours alarmiste », note Alexandra Roulet, professeur d’économie à l’Insead, pour qui « on ne peut pas dire que le marché du travail ait déraillé en 2024 ». Pour preuve, le taux de chômage a certes cessé de baisser mais n’est pas reparti à la hausse. (…)

Mais le temps du « quoi qu’il en coûte » est révolu. Le nombre de défaillances s’est envolé de 16,8% en 2024, selon la Banque de France : 65.764 entreprises ont ainsi disparu sur les douze derniers mois. (…)

Pour ne rien arranger, l’économie française a fait face à une série de phénomènes déstabilisateurs. Hier porteur, le climat géopolitique s’est dégradé. L’Allemagne, le principal client de la France, a fini 2024 comme 2023, en récession. Outre-Atlantique, la santé insolente des États-Unis est devenue un aspirateur à investissements, ne laissant que des miettes à l’Europe. « Il y avait 220 milliards d’euros fin 2023 investis par les Français dans des bons du Trésor américain, c’était 330 milliards fin 2024, s’est ému récemment Patrick Martin, le président du Medef. Il faut enrayer ça (…) en renforçant la puissance économique de la France. »

Mais le plus néfaste pour l’économie reste la dissolution de l’Assemblée nationale décidée à l’été pour « clarifier les débats », selon les mots du président de la République. Celle-ci a ouvert une période d’incertitude – honnie par les chefs d’entreprise – qui dure depuis. Mécaniquement, les projets d’investissements et d’embauches ont été mis en pause. (…)

Si 2024 est l’année du ralentissement, 2025 pourrait bien être celle des complications. La généreuse politique de soutien à l’emploi d’Emmanuel Macron n’a en effet jamais été accompagnée de mesures d’économies équivalentes. Résultat, le déficit public n’a cessé de se creuser, pour atteindre 6,1 % en 2024. Devenu le mouton noir de l’Europe, Paris se doit de serrer la vis. Hausse du coût du travail, baisse des aides à l’apprentissage… C’en est fini de la politique de l’offre telle que voulue par Emmanuel Macron. (…)

https://www.lefigaro.fr/social/pourquoi-le-marche-du-travail-a-cale-en-2024-20250127


Le Figaro, 23 janvier, article payant

Les retraités français sont-ils particulièrement taxés et peuvent-ils l’être davantage ?

DÉCRYPTAGE – Alors que les retraités font déjà l’objet d’une fiscalité particulière, la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet a avancé ce mardi l’idée de taxer davantage les plus aisés d’entre eux.

Extraits:

(…) Pour les retraités, l’impôt sur le revenu est ainsi calculé «par tranches, en fonction du montant des revenus de 2023 sur 2024», sur le même barème que celui appliqué à tous les Français. Chaque tranche correspond à un taux d’imposition (compris entre 0 à 45%). Et s’il est important de noter que les indemnités de fin de carrière (IFC) sont intégrées dans l’assiette d’imposition, il existe en revanche des exonérations. Certaines prestations sociales sont en effet exonérées de l’impôt sur le revenu. Parmi elles se trouvent l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), l’Allocation supplémentaire d’invalidité (ASI), les pensions de retraite du combattant et des anciens combattants, ainsi que les pensions militaires d’invalidité.

Les retraités doivent également s’acquitter de différentes contributions sociales. En premier lieu, la Contribution sociale généralisée (CSG) directement ponctionnée sur les pensions de retraite. Son taux diffère selon le revenu fiscal de référence et la composition du foyer fiscal, allant de 8,3% pour le taux normal – avec deux taux réduits pour les faibles pensions -, contre 9,2% pour les salaires et les revenus du patrimoine. 

En outre, les pensions de retraite sont assujetties à la Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux unique de 0,5% pour toutes les personnes redevables de la CSG au taux réduit, médian ou normal. Seuls échappent à la CRDS les contribuables exonérés de CSG. Les retraités qui paient la CSG au taux médian ou normal doivent aussi s’acquitter de la Contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (Casa) au taux de 0,3% sur leur pension. En sont exonérés les retraités déjà exonérés de CSG ou soumis au taux réduit.

Si l’on compare la fiscalité de nos aînés avec celle de la population active, «les retraités français paient moins d’impôts que les actifs français, les chômeurs compris», explique Bruno Palier. Le chercheur du CNRS, professeur au Centre d’études européennes et de politique comparée de Science Po prend en effet l’exemple des chômeurs, qui «paient plus de CSG que les retraités». De même, les retraités français ne paient «pas de cotisations sociales sur leurs pensions elles-mêmes issues des cotisations sociales», rappelle l’expert. Ce qui est pourtant le cas en Suède, souvent cité en exemple sur la question du financement du système des retraites. Dans ce pays, les retraités «paient des impôts sur l’ensemble de leurs revenus», souligne-t-il. (…)

https://www.lefigaro.fr/conjoncture/les-retraites-francais-sont-ils-particulierement-taxes-et-peuvent-ils-l-etre-davantage-20250122


Le Figaro, 22 janvier, article payant

Alain Minc : «Face au carnivore Trump, les Français restent les seuls Bisounours d’Europe»

TRIBUNE – En réalité, ce ne sont pas les «carnivores» américains qui menacent la France, mais ses partenaires européens, qui finiront par dévorer notre pays de Bisounours, alerte l’ancien conseiller politique et essayiste.

Dernier livre paru : « Somme toute » (Grasset, 2024).

Lire article intégral : https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/22-janvier-1.pdf

Link : https://www.lefigaro.fr/vox/monde/alain-minc-face-au-carnivore-trump-les-francais-restent-les-seuls-bisounours-d-europe-20250122


L’Express, 21 janvier, article payant   

“La France a perdu tant d’occasions de se réformer” : quand le Medef suédois livre ses conseils

Economie. Rétablissement des finances publiques, refonte du système de retraite, réforme de l’Etat… La Suède est aussi passée par là. Une source d’inspiration pour la France ? L’analyse d’Anna Stellinger, la n° 2 du patronat suédois.

Extraits:

L’instabilité politique mine la croissance, le rétablissement des finances publiques est de plus en plus hypothétique et le fameux “spread”, l’écart de taux d’intérêt entre la France et l’Allemagne, ne cesse de s’élargir, signe d’une inquiétude croissante des investisseurs sur la situation hexagonale. Comment sortir de l’impasse? En Europe, un pays au bord du précipice en 1992 a réussi, la Suède, qui affiche aujourd’hui des comptes publics au carré, une croissance solide et un taux de chômage bas. La méthode? Un cocktail de mesures radicales prises grâce à un consensus politique, obtenu après des mois de discussions. Anna Stellinger, directrice des affaires européennes et internationales du patronat suédois, livre les secrets de la méthode. Reste à savoir si la France est suffisamment mûre politiquement pour entamer une telle révolution…

L’Express : La France est confrontée à un sérieux problème de finances publiques. La Suède est passée par là aussi, en 1992, ce qui a débouché sur une crise financière gravissime. Faut-il être au fond du gouffre pour rebondir?

Anna Stellinger :Plusieurs ingrédients expliquent la remise à plat du système suédois à cette époque. Le premier est, comme vous le rappelez, la gravité de la crise financière qui a frappé le pays au début des années 1990. Au pire moment des attaques spéculatives contre la Suède et sa monnaie, les taux d’intérêt sont montés à 500 %! Cela veut dire que tout le monde était touché. Cette crise n’était pas seulement intellectuelle et hypothétique, elle était visible par tous les Suédois dans leur quotidien, quand ils allaient à la banque pour négocier un crédit immobilier ou acheter une voiture. Résultat : lorsque les politiques ont commencé à pointer les racines du mal, et à dire pourquoi il fallait changer les choses, ils n’ont pas eu à convaincre très longtemps puisque tout le monde subissait au plus près cette crise. Le deuxième élément déterminant a été le consensus politique et la volonté de faire des réformes dans la durée. Aujourd’hui, plus de trente ans après cette crise profonde, la dette publique atteint tout juste 32 % du PIB du pays.

Justement, par où a-t-il fallu commencer?

Par le volet politique : l’obtention d’un consensus total avec toutes les forces politiques sur la nécessité de changer de modèle. Deuxième étape : se mettre d’accord sur le “quoi faire”. Et le “quoi faire” n’a pas été un maquillage budgétaire pour récolter quelques milliards ici ou là. Nous sommes allés au fond des choses avec une décision majeure qui est l’adoption d’une discipline budgétaire. Désormais, nous sommes obligés d’avoir un budget en équilibre et on ne peut proposer des dépenses nouvelles sans trouver les recettes qui permettent de les financer. Aucun gouvernement, quelle que soit sa couleur, n’a depuis des décennies le droit de creuser un déficit ni d’alourdir la dette. Cette règle d’or apporte de la sécurité. Car lorsque le pays traverse un choc conjoncturel, comme au moment du Covid, il a les moyens de soutenir l’économie et les plus fragiles. Nous ne nous sommes pas arrêtés là. Nous avons aussi basculé le système de retraite d’un régime par répartition vers un système par capitalisation. Chacun est désormais responsable de sa propre retraite et cotise pour sa propre pension. Enfin, nous avons fait le tri dans les dépenses publiques. Chaque ligne a été étudiée. Ce nettoyage a été effectué de manière sérieuse et presque toujours consensuelle. Avec, à chaque fois, l’objectif de changer les choses de manière robuste.

En France, ce travail sur la dépense publique fait craindre à une partie de l’opinion publique un détricotage, un démantèlement de l’Etat providence…

Je peux le comprendre mais la manière dont la Suède a géré cette transformation profonde et durable a été faite dans le respect de ce cadre-là. Peu de gens disent aujourd’hui que la Suède n’est pas un Etat providence. Nous voulons être un pays attractif mais avec une économie saine.

Quelle a été l’ampleur des sacrifices? Et surtout, ont-ils été justement répartis?

Tout le monde a dû se serrer la ceinture. Les entreprises, les ménages, les salariés, les retraités…

Vous ne parlez pas de réforme de l’Etat. Mais là aussi, le modèle suédois est très différent de celui de la France…

En France, je lis souvent qu’on parle d’un Etat obèse. En Suède, l’ambition a été de l’alléger. Le gouvernement est tout petit. Si je cumule les postes de tous les ministères, nous devons arriver à moins de 5 000 fonctionnaires! Le reste des agents de l’Etat travaille dans des agences gouvernementales, qui par ailleurs sont jugées parfois trop nombreuses et coûteuses par certains partis politiques. J’en ai dirigé deux personnellement. Ces agences sont dotées d’un budget alloué chaque année par le gouvernement central. Impossible d’afficher des comptes déséquilibrés. Leurs comptes sont audités chaque année et si un surplus budgétaire apparaît, une agence ne peut pas garder plus de 3 % de cet excédent dans ses caisses. Par ailleurs, le gouvernement fixe dans une lettre de mission les objectifs, mais laisse une totale indépendance sur les moyens à mettre en oeuvre pour les atteindre. Les directeurs d’agence sont autonomes. Ce qui compte, c’est le résultat. Cette autonomie permet de dépolitiser l’action publique. Enfin, les agents sont des salariés – il n’y a pas de contrat à vie en Suède – et leur rémunération est liée à leurs performances.

Comment expliquez-vous l’impossibilité de réformer la France?

Les raisons sont multiples. La première, et peut-être la plus importante, c’est qu’en France, la dette n’est pas suffisamment prise au sérieux. L’endettement public a crû depuis des décennies et le sujet s’est presque banalisé dans l’opinion publique. C’est comme si les Français, dans leur grande majorité, pensaient que “parce que c’est la France”, une crise de la dette ne les rattrapera jamais.

La deuxième explication est presque culturelle. C’est l’incapacité à obtenir un consensus politique, même si la confrontation politique n’est pas une mauvaise chose en soi, et parfois en Suède, nous n’avons pas suffisamment de débats majeurs. Troisième point, l’absence de syndicats forts et une culture assez faible du dialogue social. (…)

Cette qualité du dialogue social joue beaucoup sur les négociations salariales. Lorsque les salaires sont négociés chaque année, le référentiel est celui de l’industrie exportatrice. C’est ce que nous appelons “la marque”. Le but est de conserver la compétitivité du pays, et les organisations syndicales et patronales adhèrent, avec quelques exceptions, à cette norme. (…)

Quatrième et dernière explication, la France n’a pas la culture de la “flexisécurité” de l’emploi, même si je n’aime pas trop ce terme. En clair, ce qui compte en Suède, ce sont les individus, pas les emplois. Quand il a fallu fermer les mines il y a quelques décennies, nous l’avons fait sans drame car la priorité de tous les acteurs était de s’occuper de ceux qui perdaient leur job. Quand une entreprise disparaît, pour manque de compétitivité, nous n’essayons pas coûte que coûte de la maintenir en vie. Ce sont quatre ingrédients essentiels à la réforme qui manquent, hélas, à la France.

Votre constat est très pessimiste…

Oui et non. La France a perdu tant d’occasions de réformes au cours des années passées… Or le pays a de formidables atouts. Il sait se mobiliser pour de très grandes choses. La France reste la nation la plus attractive d’Europe en matière d’investissements étrangers. S’ajoute l’excellence de la recherche, dans l’intelligence artificielle notamment… La France a tellement de cartes en main! Cela fait si longtemps que le pays n’a pas mené de réformes que vous avez peut-être oublié comment les mettre en oeuvre. (…)

https://www.lexpress.fr/economie/politique-economique/la-france-a-perdu-tant-doccasions-de-se-reformer-quand-le-medef-suedois-livre-ses-conseils-HQ3CYYK6SRHUTCQ7ILL46I5XJU/


Le Point, 18 janvier, article payant   

Denis Olivennes : « En France, le travail n’est pas rémunérateur »

ENTRETIEN. Dans « La France doit travailler plus », le chef d’entreprise exhorte à mieux récompenser le travail, qui, aujourd’hui, « ne paye pas assez ».

Voir « Article du Jour »: https://kinzler.org/wp-content/uploads/2025/01/18-janvier-3.pdf Link : https://www.lepoint.fr/debats/denis-olivennes-en-france-le-travail-n-est-pas-remunerateur-17-01-2025-2580227_2.php


Le Figaro, 15 janvier, article payant

Bertille Bayart: «Le monde de 2025 n’est pas fait pour la France (à moins que ce ne soit l’inverse)»

CHRONIQUE – La hausse des taux longs, l’appréciation du dollar et la guerre commerciale vont faire souffrir la France surendettée, importatrice et dépendante.

Extraits :

Il faudrait ne jamais partir. Car, quand on revient, comme cet industriel tout juste rentré du salon de la tech à Las Vegas, le choc est trop violent. Vertige devant un fossé qui est devenu un gouffre. « Le décalage est immense », dit-il, entre les enjeux mondiaux du moment et les sujets du débat public en France, entre le déluge d’investissements notamment consacrés à l’intelligence artificielle là-bas et nos calculs d’épiciers ici.

Pendant que nous ergotons sur les mérites comparés d’une « suspension » ou d’une « remise en chantier » de la réforme des retraites, aveugles au fait que nous serions le seul pays développé à engager une contre-réforme dans ce domaine, le monde autour de nous change, vite. Dans plusieurs domaines, il bascule, même. Et ce monde de 2025 n’est pas fait pour la France.

C’est un monde qui n’est plus du tout fait pour un pays surendetté. Déjà, la France a « monumentalement changé de catégorie » en tant qu’emprunteur, selon l’expression d’un ponte des questions monétaires. Cela se traduit par un écart de taux avec l’Allemagne, installé entre 80 et 90 points de base. En 2025, il y a pire. Deux phénomènes concomitants sont à l’œuvre. D’une part, 2025 marque la fin officielle d’une décennie d’argent magique. Depuis la fin de l’année dernière, la Banque centrale européenne n’achète plus de titres de dette souveraine. Son bilan va désormais se contracter sur un rythme de croisière de 40 milliards d’euros par mois. Un acheteur majeur et fidèle quitte ainsi la table du marché obligataire au moment même où la France devient, devant l’Italie, le premier émetteur de dette souveraine en zone euro (plus de 300 milliards d’euros). D’autre part, l’installation de Donald Trump augure d’une politique économique agressive, potentiellement inflationniste.

Cette conjonction se traduit par une réappréciation brutale et générale des taux d’intérêt à long terme, calquée sur le mouvement du marché américain. C’est à la fois sain – le temps et le risque ont de nouveau un prix – et dangereux. Ça l’est en tout cas pour la France. Le taux d’emprunt à dix ans approche les 3,5 % contre moins de 2,9 % en décembre. Or l’inflation est retombée – la prévision est à 1,6 % pour 2025 – et la croissance sera, probablement au mieux du fait de la crise politique, de 0,9 % (dernier chiffre de la Banque de France). Cela signifie que nous sommes passés en ce début d’année de l’autre côté du miroir, là où « r » est supérieur à « g » : les taux d’intérêt réels (« r » pour « rates ») sont désormais supérieurs à la croissance (« g » pour « growth »). Dans cette zone-là, les taux sont prédateurs. Nous sommes mécaniquement condamnés à voir la dette gonfler, encore et encore.

Le monde de 2025, c’est aussi un monde où il ne faut pas être importateur et dépendant. La France l’est, massivement, comme l’illustre le niveau du déficit commercial (84 milliards d’euros sur douze mois à fin novembre). Or, la facture va s’alourdir sous l’effet d’appréciation forte du dollar face à l’euro (de 1,12 dollar pour 1 euro cet été à 1,02 aujourd’hui), et probablement aussi du fait de la hausse des cours du pétrole et du gaz. Les efforts pour desserrer cet étau, par la réindustrialisation, vont être sapés par une double pression. Celle de la guerre commerciale qu’entend lancer à une échelle inédite Donald Trump dès la semaine prochaine. Et celle des surcapacités de production chinoises, qui chercheront cette année les débouchés en Europe qu’ils ne trouveront plus ni aux États-Unis ni sur leur marché domestique du fait du ralentissement de la croissance.

Le monde de 2025, c’est celui d’une compétition économique exacerbée. Il n’est pas fait pour les percepteurs. Les États-Unis s’apprêtent à engager une nouvelle étape de baisse des impôts, avec un président républicain qui entend ramener à 15 % l’impôt sur les sociétés. En Allemagne, la CDU de Friedrich Merz, favorite pour mener la coalition qui sortira des élections le mois prochain, vise un taux de 10 %. La France, contrainte à surtaxer les bénéfices de ses grandes entreprises pour cause de marasme budgétaire, va nager à contre-courant.

Le monde de 2025 sera encore plus rude que celui de 2024. Il n’est pas fait pour les fragiles. Avec Donald Trump à la Maison-Blanche, l’époque est aux hommes puissants et aux rapports de force. Or, le pouvoir en France est plus faible que jamais, dans le pays, au sein de l’Union européenne et sur la scène internationale.

Peut-être est-ce parce que ce monde de 2025 est si hostile que la France se met en marge. On rouvre, encore et encore mais sans imagination, les mêmes vieux débats sans lesquels il semble qu’il ne saurait y avoir de vie politique digne de ce nom dans notre pays : taxation des riches et des entreprises, et système de retraite. Arguments rebattus, conversation étriquée, impasse assurée puisque les lois de la gravité financière et de la réalité démographique sont pareillement ignorées. Le monde, en 2025, avance. Nous, on s’occupe. C’est une autre façon de faire l’autruche.

https://www.lefigaro.fr/vox/societe/bertille-bayart-le-monde-de-2025-n-est-pas-fait-pour-la-france-a-moins-que-ce-ne-soit-l-inverse-20250115


Le Figaro, 13 janvier, article payant

Jean-Pierre Robin: «Rigueur oblige, l’État n’est plus en mesure de protéger les Français des multiples crises»

CHRONIQUE – La France a l’un des taux de croissance les plus faibles en Europe depuis la création de l’euro en 1999 et la plus forte augmentation de sa dette publique.

Extraits :

(…) Ainsi l’objectif de déficit des finances publiques, qui aura atteint 6,1% du PIB l’an dernier, sera « moins de 5,5% et plus de 5% (du PIB) », [indique Éric Lombard, le ministre de l’Économie et des Finances]. « Afin de préserver la croissance (économique) », a précisé notre grand argentier, au nom prédestiné, pour justifier ce relâchement par rapport au gouvernement Barnier, dont l’ambition était de ramener le déficit à 5 % du PIB. Le chiffre retenu par Bercy devrait finalement être de 5,4%, une différence de 12 milliards d’euros par rapport au scénario Barnier, ce qui n’est pas rien.

Ainsi l’objectif de déficit des finances publiques, qui aura atteint 6,1% du PIB l’an dernier, sera « moins de 5,5% et plus de 5% (du PIB) », a-t-il indiqué. « Afin de préserver la croissance (économique) », a précisé notre grand argentier, au nom prédestiné, pour justifier ce relâchement par rapport au gouvernement Barnier, dont l’ambition était de ramener le déficit à 5 % du PIB. Le chiffre retenu par Bercy devrait finalement être de 5,4%, une différence de 12 milliards d’euros par rapport au scénario Barnier, ce qui n’est pas rien.

Ces comptes d’apothicaire paraîtront d’autant plus dérisoires qu’ils sont entachés d’énormes incertitudes. Ils résultent en outre d’arbitrages peu glorieux visant à obtenir un minimum de stabilité politique, fût-ce au détriment de l’assainissement des comptes. (…)

Perclus de dettes et astreint à la rigueur que lui demandent ses créanciers ainsi que les règles de copropriété de la zone euro, l’État n’est plus en mesure d’assumer son rôle de régulateur de la conjoncture qu’il conviendrait de conforter en temps de vaches maigres. C’est là, faut-il le rappeler, l’une des trois fonctions des politiques publiques assignées par l’économiste américain Richard Musgrave, le premier à les avoir théorisées au début des années 1960. Les deux autres fonctions consistent en la fourniture de services publics et la lutte contre les inégalités par la fiscalité. (…)

Nous vivons une rupture historique. Traditionnellement, les gouvernements laissaient dériver les dépenses publiques en période de ralentissement économique et ils acceptaient le reflux inhérent des recettes fiscales, au prix d’une envolée des déficits. Ce jeu des « stabilisateurs automatiques », selon le terme technique, a toujours été plus marqué en France qu’ailleurs du fait même de dépenses publiques records dépassant 55% du PIB. « Ce qui explique pourquoi les récessions sont moins prononcées que dans le reste de l’Europe et pourquoi les reprises y sont plus lentes », note François Ecalle sur son site Fipeco. Avec pour conséquence aussi que depuis la création de l’euro, en 1999, la France a l’un des taux de croissance les plus faibles en Europe et la plus forte augmentation de sa dette publique. Et c’est devenu intenable.

Les Français découvrent avec effroi que la puissance publique est incapable de les protéger des crises. Loin d’être « un réducteur d’incertitudes », selon la définition du philosophe anglais Thomas Hobbes, l’État les aggrave.

https://www.lefigaro.fr/conjoncture/jean-pierre-robin-rigueur-oblige-l-etat-n-est-plus-en-mesure-de-proteger-les-francais-des-multiples-crises-20250112


Le Point, 9 janvier, libre accès

Taux d’emploi : la France reste à la traîne

LE CHIFFRE DE LA SEMAINE. Le taux d’emploi des séniors, âgés de 55 à 64 ans, atteint 78 % en Suède, contre seulement 58,4 % dans l’Hexagone.

Extraits:

Selon l’Insee, le taux d’emploi, qui mesure le rapport entre le nombre d’individus ayant un emploi et le nombre total d’individus, s’est élevé en France à 68,4 % chez les 15-64 ans en 2023, en progression de 0,2 point par rapport à 2022 et à son plus haut niveau depuis 1975. Malgré cette hausse, le taux d’emploi reste en France inférieur à la moyenne de 70,4 % observée dans l’Union européenne (UE), où il varie de 61,5 % en Italie à 82,4 % aux Pays-Bas.

Dans l’ensemble de l’UE, le taux d’emploi des hommes (75,1 %) était en 2023 supérieur de 9,4 points à celui des femmes (65,7 %), soit un écart supérieur à celui de 5 points constaté en France (66 % pour les femmes, 71 % pour les hommes). De son côté, le taux d’emploi des jeunes âgés de 15 à 24 ans a progressé de 0,4 point dans l’UE en 2023 pour s’établir en moyenne à 35,2 %, avec de fortes disparités entre les pays.

Le taux d’emploi des jeunes est inférieur à 20 % en Grèce, en Roumanie et en Bulgarie, alors qu’il dépasse 50 % en Allemagne, en Autriche, au Danemark et même 75 % aux Pays-Bas. « Les écarts entre pays reflètent des différences de durée de scolarité, de cumul emploi-études (dont l’apprentissage), mais aussi des difficultés d’insertion des jeunes plus ou moins marquées sur le marché du travail », commente l’Insee. En France, le taux d’emploi des jeunes (35,2 %) a sensiblement augmenté ces dernières années et se situe désormais au même niveau que la moyenne européenne.

Enfin, le taux d’emploi des séniors âgés de 55 à 64 ans s’est établi en moyenne à 63,9 % dans l’Union européenne en 2023, en hausse de 20,7 points depuis 2009 (de 18,2 points en France). Les niveaux les plus élevés sont observés en Suède (78 %), aux Pays-Bas (75 %), en Allemagne (74,6 %) et au Danemark (74,2 %) et les plus faibles, en Roumanie (51 %) et en Grèce (54,1 %). La France se situe en dessous de la moyenne européenne, avec un taux d’emploi des séniors de 58,4 % en 2023.

https://www.lepoint.fr/economie/taux-d-emploi-la-france-reste-a-la-traine-08-01-2025-2579509_28.php


Le Monde, 24 décembre, article payant

Eric Lombard, un banquier « de gauche » à l’économie

Nommé à Bercy, l’ancien directeur général de la Caisse des dépôts et consignations croit dans son profil et sa méthode pour faire adopter un budget 2025 combinant baisse du déficit et soutien à la croissance.

Extraits:

(…) Le visage de cet homme discret de 66 ans, diplômé d’HEC, qui a fait l’essentiel de sa carrière dans la finance, va pourtant rapidement s’imposer aux Français. Numéro six dans l’ordre hiérarchique du gouvernement, M. Lombard hérite du dossier le plus explosif : le budget. Celui qui a fait tomber l’ancien premier ministre Michel Barnier, le 4 décembre, après le vote d’une motion de censure et qui déterminera la durée de vie du gouvernement Bayrou.

Si son seul mandat électoral se résume à un siège de conseiller municipal à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne), entre 1995 et 2001, M. Lombard est un fin connaisseur des circuits ministériels et l’ancien banquier cachait de moins en moins son envie de s’engager. (…)

Son parcours atypique, Eric Lombard l’a raconté dans un livre, Au cœur de la finance utile, à quoi sert votre épargne, paru en février 2022 (L’Observatoire), une profession de foi visant, aux yeux des observateurs, à préparer une future ascension ministérielle. (…)

Même s’il est l’héritier d’une famille de riches industriels, M. Lombard ne se définit pas comme « libéral »Il a bien fait l’essentiel de sa carrière dans le saint des saints du capitalisme, la finance – banquier d’affaires chez Paribas à sa sortie de Bercy, puis patron de BNP Paribas Assurances, avant de partir, en 2013, pour diriger Generali France – mais il dit prôner un « capitalisme plus responsable ». « J’ai aujourd’hui la conviction que le capitalisme est déréglé, parce que le taux de rendement demandé par les actionnaires est trop élevé »disait-il au Monde, en février 2022. (…)

https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/12/24/eric-lombard-un-banquier-de-gauche-a-l-economie_6464803_3234.html


Le Figaro, 24 décembre, article payant   

Gouvernement Bayrou : Éric Lombard, un financier de la gauche réformiste à Bercy

PORTRAIT – Le directeur général de la Caisse des dépôts devient le ministre de l’Économie et des Finances.

Extraits:

Il passe d’une institution publique réputée riche à la gestion des finances d’un État impécunieux. Son nom est peu connu du grand public, et pourtant, cela fait sept ans qu’Éric Lombard occupe l’un des postes les plus importants de la République : celui de directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), que l’on qualifie souvent de bras armé financier de l’État. L’été dernier, déjà, son profil en avait fait l’un des premiers ministrables souvent cités dans la catégorie « technos », avant qu’Emmanuel Macron ne choisisse Michel Barnier

Éric Lombard, 66 ans, est un animal hybride. Un HEC qui a obtenu un poste, à la Caisse des dépôts, traditionnellement dévolu aux inspecteurs des finances. Pour le décrocher, il avait écrit une longue lettre manuscrite de candidature au président de la République. Il est aussi un héritier d’une histoire entrepreneuriale, celle des Devanlay (Lacoste), dont le cœur a toujours battu à gauche. Le nouveau locataire de Bercy est de la famille des rocardiens.

Il a fréquenté les think-tanks de cette deuxième gauche sociale-démocrate, d’abord En Temps Réel, où il a rencontré Emmanuel Macron, puis les Gracques. Éric Lombard a beaucoup travaillé dans le privé, dans le secteur de la banque et de l’assurance, chez BNP Paribas Cardif France, puis chez Generali. (…)

La direction de la Caisse des dépôts prépare sans aucun doute à entrer au gouvernement. (…)

Ami de François Baroin, Éric Lombard défend une vision sociale-démocrate de l’économie, appelant à la tempérance du capitalisme et à une « finance utile », selon le titre d’un livre publié en 2022. « L’économie mixte est loin d’être un concept dépassé », déclarait-il dans Le Figaro en juillet 2021. (…)

https://www.lefigaro.fr/politique/gouvernement-bayrou-eric-lombard-un-financier-de-la-gauche-reformiste-a-bercy-20241223


Le Figaro, 23 décembre, article payant   

Les Français ne travaillent pas assez pour financer leur modèle social

Retraite, maladie… le système de protection dont bénéfice le pays est plébiscité mais largement déficitaire. S’ils veulent le préserver, les Français vont être contraints de travailler davantage.

Extraits:

Les Français travaillent-ils assez ? Le débat anime depuis toujours les discussions entre gauche et droite, entre représentants des salariés et des chefs d’entreprise et entre les Français eux-mêmes. Ce jeudi 19 décembre, une nouvelle étude de l’institut Rexecode vient mettre de l’eau au moulin des partisans d’un allongement du temps de labeur. Le constat est sans appel : Paris reste sous la moyenne européenne en la matière. La situation est particulièrement criante pour les salariés français à temps complet. 

Ces derniers ont passé en moyenne 1673 heures en poste en 2023. Soit 120 heures de moins que leurs voisins européens. Si l’écart a tendance à se résorber, il reste aujourd’hui d’environ trois semaines de travail avec l’Allemagne (1 790 heures), qui est à la moyenne européenne. Seules la Suède et la Finlande affichent des chiffres plus bas. Sauf qu’à la différence de l’Hexagone, ces pays profitent d’un taux d’emploi particulièrement élevé – 74 % en Finlande et 77,5 % en Suède, contre 68,4 % en France.

De la à en déduire que les Français ne travaillent pas assez… Mais les choses sont évidemment plus complexes. « La question du temps de travail est en réalité celle de la création de richesse dans le pays », éclaire Olivier Redoulès, directeur des études de Rexecode. C’est elle qui se traduit en pouvoir d’achat pour les actifs et les entreprises, mais également en recettes fiscales et sociales pour financer le train de vie de l’État et le généreux modèle social dont bénéfice le pays.

Or, celui-ci craque de toutes parts. Malgré la réforme des retraites, le régime est annoncé dans le rouge de 5,8 milliards d’euros cette année, selon les dernières prévisions du Conseil d’orientation des retraites (COR). Sauf nouveau tour de vis, la situation ne peut que s’aggraver dans le futur. La Sécurité sociale ne va pas mieux. Le déficit prévu en 2024 s’élève à 18 milliards d’euros. Et là non plus, les prévisions ne vont pas vers un équilibre du régime.

Face à l’urgence, certains politiques se sont finalement emparés du sujet. « La quantité d’heures travaillées dans le pays ne suffit plus aujourd’hui à financer notre modèle social, a déclaré le ministre démissionnaire de l’Économie, Antoine Armand, le mois dernier. Si on veut le conserver, il faudra travailler davantage. » (…)

 La France peut espérer davantage de gains en augmentant le nombre de personne entre 15 et 64 ans en emploi. Pour les plus jeunes, une partie du chemin a été réalisée avec le développement de l’apprentissage. Mais pour égaler les meilleurs élèves de l’UE, il faut dorénavant résorber le nombre ceux qui ne sont ni en emploi ni en formation (les Neets). « La France en compte environ 250.000 de plus qu’un pays comme l’Allemagne, pointe le directeur des études de Rexecode, et si nous ne les intégrons pas aujourd’hui, nous laissons s’installer toute une carrière de précarité. » 

De l’autre côté du spectre, la réforme des retraites doit permettre de combler une large partie du retard en matière d’emploi des seniors. La part des 60-64 ans en poste a ainsi grimpé de près de 8 points entre 2017 et 2023 – de 31,1 % à 38,9 %. Avec le recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, l’exécutif espère arriver à 60 % dès 2030. (…)

Pour espérer continuer dans cette voie, le dernier levier à actionner est celui du temps partiel choisi. Celui-ci est largement sous-développé en France : « Il représente 8 % de la population en âge de travailler (…) contre 21 % en Allemagne et 31 % aux Pays-Bas », illustre l’étude. Or de nombreux actifs ne peuvent exercer une activité à temps plein (usure physique, proche aidant, enfants à charge…). Sans alternative, ils sont aujourd’hui contraints d’arrêter totalement leur activité plutôt que d’alléger la charge de travail. 

Tous ces leviers montrent le chemin que Paris doit encore parcourir pour égaler la quantité de travail de ses voisins. Une chance, selon Olivier Redoulès, « cela montre qu’il y a encore de l’argent à dégager pour financer notre modèle social. Sans cela, il faudrait faire une croix dessus. »

https://www.lefigaro.fr/social/les-francais-ne-travaillent-pas-assez-pour-financer-leur-modele-social-20241219


Le Figaro, 22 décembre, article payant

L’éditorial de Gaëtan de Capèle: «Explosion de la dette française, une faute morale»

Face à 80% de députés enclins à dépenser plus, on voit mal comment François Bayrou va s’y prendre pour élaborer un budget crédible.

Extraits:

L’idée que, par irresponsabilité, par couardise, par égoïsme, nous soyons en train de fabriquer une bombe financière à retardement ferait-elle enfin son chemin ? À en croire les récents sondages, l’explosion de la dette entre désormais dans les préoccupations premières des Français. Cet accès de lucidité n’a, hélas, pas encore atteint l’Assemblée, où l’on trace des « lignes rouges » absurdes en se moquant comme d’une guigne de la marée qui menace de tout engloutir. 

Cette désinvolture ne laisse pas d’étonner, tant les chiffres donnent le vertige : l’an prochain, la France, déjà endettée jusqu’au cou (3300 milliards au dernier pointage !), empruntera encore 300 milliards sur les marchés. Non pour préparer l’avenir en investissant, mais pour boucler ses fins de mois, payer des pensions… et rembourser ses dettes. Pendant que dans les hautes sphères on regarde ailleurs, les signaux d’alarme se multiplient. Les agences de notation s’inquiètent de la chienlit qui paralyse le pays, privé de gouvernement et de budget. Les grands créanciers internationaux, guère plus rassurés, nous font payer plus cher nos emprunts.

On ne peut soupçonner François Bayrou d’ignorer la gravité de la situation. Il fait partie des quelques rares responsables politiques à sonner régulièrement l’alerte sur la montagne de dette accumulée, une « faute morale » à l’égard des futures générations. Mais, face à 80 % de députés enclins à dépenser plus, qui ont déjà œuvré pour détricoter les quelques mesures d’économies annoncées par son prédécesseur, on voit mal comment il va s’y prendre pour élaborer un budget crédible. Surtout en entamant les discussions par une faute inexcusable : la remise en question de la réforme des retraites. Quoi qu’en pensent ses détracteurs, la loi de 2023, portant l’âge de départ à 64 ans, est déjà dépassée. Le système, qui coûte chaque année plus de 30 milliards d’euros à l’État pour combler le déficit de la fonction publique, va replonger dans le rouge dès l’an prochain. Faire marche arrière sur la seule réforme des dernières années produisant des économies ruinerait définitivement le crédit de la France.

https://www.lefigaro.fr/vox/economie/l-editorial-de-gaetan-de-capele-explosion-de-la-dette-francaise-une-faute-morale-20241220


Le Point, 22 décembre, article payant    

Pourquoi il faut résister à la tentation de taxer les plus aisés ou les retraités

LA CHRONIQUE DE PATRICK ARTUS. Les Français ciblés puiseront dans leur épargne, qui manquera à moyen terme à l’investissement, donc à la croissance.

Extraits:

 (…) La tentation est grande alors de concentrer les hausses d’impôts sur les personnes à revenu élevé et sur les retraités, de manière à éviter un recul trop important de la consommation. Mais ce raisonnement suppose que l’épargne n’a pas d’utilité. Si les hausses d’impôts affectent surtout l’épargne et peu la consommation, il y aura moins d’épargne disponible. Le financement du déficit public restera évidemment assuré.

La réduction de l’épargne disponible peut alors avoir deux conséquences. Soit une réduction de l’investissement, et plutôt de l’investissement des entreprises (les personnes à revenu élevé ou les retraités ne modifieront pas leur investissement en logements) ; soit un supplément d’endettement extérieur qui compensera le recul de l’épargne domestique disponible pour le financement de l’investissement.

Dans le premier cas, il y aura un recul de la croissance potentielle, à la fois parce que moins de capital physique aura été accumulé et parce qu’il en résultera un recul des gains de productivité. Dans le second cas, il y aura une dépendance accrue de la France vis-à-vis des capitaux étrangers et une fragilité financière accentuée (les investisseurs étrangers sont moins stables que les investisseurs domestiques).

Un choix court-termiste pour réduire le déficit public

En réalité se pose la question de l’horizon de temps visé par les gouvernements. S’ils privilégient le court terme, il est vrai qu’en concentrant les hausses d’impôts sur les personnes à haut revenu ou âgées, ils évitent un recul important de l’activité et donc une perte de recettes fiscales. Mais s’ils privilégient le long terme, ils doivent refuser d’amputer l’épargne disponible et donc la croissance potentielle.

Il est vrai que se pose aussi un problème d’évaluation. Autant il est assez facile d’évaluer l’effet à court terme sur la consommation d’une hausse des impôts, autant les effets à moyen terme de cette hausse sur l’investissement et les capacités disponibles sont plus difficiles à estimer. Si l’objectif est de réduire le déficit public rapidement, la hausse des impôts sur les plus aisés et les plus âgés sera spontanément privilégiée, en ignorant les conséquences néfastes à moyen et long terme du recul de l’épargne disponible pour investir.

Patrick Artus, Economiste, Ecole polytechnique, ENSAE. Chef économiste. Professeur associé à l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, professeur de sciences économiques à l’Ecole polytechnique. Membre du cercle des économistes. Ancien administrateur de l’Insee.

https://www.lepoint.fr/economie/pourquoi-il-faut-resister-a-la-tentation-de-taxer-les-plus-aises-ou-les-retraites-21-12-2024-2578474_28.php


Contrepoints, 18 décembre, libre accès

Dissolution, censure, volonté du peuple et avenir de la France

Extraits:

(…) Car en cet automne-hiver 2024, le malaise français est très loin de se limiter à ses impasses politiques. Il est aussi, et peut-être même surtout, le fait de ses impasses budgétaires, lesquelles ne sont finalement que la transcription dans nos comptes publics de la monumentale impasse idéologique où en est arrivé notre modèle social hyper-collectivisé, hyper-redistributif, hyper-égalitariste et, osons le dire, hyper-clientéliste – ce dernier point expliquant une bonne partie de la coupable couardise de notre classe politique dans sa façon de ne surtout pas aller au fond des problèmes. (…)

Sortir de la dépense, des aides, des subventions, de la redistribution et des monopoles d’État ? Il arrive qu’on en parle, mais personne ne songe à faire un budget en ce sens. Déréglementer, simplifier les procédures (comme pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris), libérer les énergies, laisser la créativité et l’innovation faire leur chemin ? Il arrive qu’on en parle, mais personne non plus ne songe à légiférer en ce sens.

J’en arrive à la dernière question. François Bayrou ? On voit mal comment il pourrait changer la donne ; ni son propre CV ni l’état d’esprit encore très étatiste des Français et de leurs représentants ne l’y prédisposent. Première grande réflexion du nouveau locataire de Matignon : réautoriser le cumul des mandats pour les parlementaires afin de « réenraciner les responsabilités politiques » dans la vie locale. On sent comme un léger décalage…

Le risque que la situation du pays se dégrade encore plus, jusqu’à un point de faillite qui ne trouverait de résolution ultime que dans la rue et/ou sous l’égide amère d’instances internationales telles que le Fonds monétaire international ou la Banque centrale européenne est tout sauf nul. Or ce sont dans ces moments où les institutions sont dépassées et où l’État perd son autonomie que l’État de droit souffre le plus et que les citoyens ont le plus à perdre.

Dans ces conditions, les acteurs et commentateurs de la libéralosphère dont je suis n’ont d’autre choix que de poursuivre inlassablement l’exposé de leurs arguments en faveur d’un État limité, en espérant qu’ils commencent à prendre sens auprès d’un nombre croissant d’électeurs et de responsables politiques avant qu’il ne soit trop tard.

https://www.contrepoints.org/2024/12/17/479919-dissolution-censure-volonte-du-peuple-et-avenir-de-la-france


Le Point, 17 décembre, article payant   

Ces 9 indicateurs économiques qui annoncent une année noire

Spread, dette, emploi… Quel sera le bilan économique d’Emmanuel Macron alors que les plus pessimistes parlent déjà de récession ?

Extraits:

Pendant longtemps, Emmanuel Macron a pu se vanter de son bilan économique. Il était le président du pouvoir d’achat, de la croissance et de l’emploi. Nos finances publiques ? Ce n’était pas un problème : tout serait réglé grâce à des réformes structurelles et des baisses d’impôts dopant l’activité. Petit à petit, la question des dépenses publiques, de la dette et du déficit a été reléguée au second plan par le locataire de l’Élysée…

Cette année, la bombe budgétaire a pourtant explosé, avec la chute du gouvernement Barnier sur le PLFSS et l’absence de loi de finances pour 2025. Au pire moment. Croissance morose, chômage en hausse, dette galopante : les perspectives des derniers et des prochains mois n’étaient déjà pas réjouissantes.

L’absence de budget vient alimenter la dégradation du climat. Tensions sur les taux français, méfiance des investisseurs, besoins de financements considérables, attentisme des ménages et des entreprises : le cocktail semble prêt pour une année noire. Les plus pessimistes parlent déjà de récession… Espérons qu’ils aient tort.

https://www.lepoint.fr/economie/ces-9-indicateurs-economiques-qui-annoncent-une-annee-noire-16-12-2024-2578031_28.php


Le Figaro, 17 décembre, article payant

Jean-Pierre Robin: «Les exonérations de charges sociales explosent et bénéficient à 93% des salariés»

CHRONIQUE – Sur les 17,4 millions de salariés du secteur privé, 16,2 millions ont bénéficié en 2023, à des degrés divers, d’exonérations.

Extraits:

C’est l’une des causes majeures du dérapage des finances publiques depuis 2019, quand le pays avait encore des comptes à peu près présentables, avant que tout ne se détraque avec le Covid. Les exonérations sur les cotisations sociales que les entreprises paient en plus du salaire brut («la part patronale») explosent, plombant le financement de la protection sociale. Leur coût global est passé de 57,7 milliards d’euros en 2019 à 78,4 milliards en 2024 selon le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). S’appuyant sur le rapport demandé l’an dernier par Élisabeth Borne, l’hôte de Matignon, à deux économistes, Antoine Bozio et Étienne Wasmer, et remis le 3 octobre («Les politiques d’exonérations de cotisations sociales: une inflexion nécessaire»), le gouvernement Barnier avait proposé de réduire l’ensemble de ces aides de 5 milliards d’euros. Avec, simultanément, un reprofilage des exonérations, aujourd’hui très dégressives, au point que les entreprises sont dissuadées de relever les salaires. Le rapport Bozio-Wasmer donne des exemples précis de ce mécanisme pervers: «En 2019, une augmentation du salaire brut mensuel de 3803 euros (45.636 annuels) à 3804 euros (au seuil de 2,5 smics) conduit pour l’employeur à une hausse du coût du travail annuel de 2756 euros, contre un gain net pour le salarié d’environ 9,50 euros sur l’année.» (…)

Selon l’institut de conjoncture Rexecode qui a dépouillé les statistiques de l’Urssaf sur les 17,4 millions de salariés du secteur privé, 16,2 millions d’entre eux, soit 93%, ont bénéficié en 2023 à des degrés divers d’exonérations. Les 9,8 millions de «bas salaires» constituent le plus gros contingent, soit plus d’un Français sur deux travaillant dans le secteur privé (les fonctionnaires et l’État employeur ne sont pas concernés). À l’opposé, seuls 1,2 million des salariés, soit 7% de l’ensemble – ceux dont le revenu brut est de 3,5 smics ou plus et représentent 22% de la masse salariale totale du secteur privé selon l’institut Rexecode – paient «plein pot» le taux «normal» et «maximal» des «cotisations employeurs» qui est de 47%. (…)

Loin d’être théorique, ce débat a une portée pratique considérable. La politique systématique de subvention des gens les moins formés menée depuis trente ans, outre la «smicardisation» de la société française, a-t-elle conduit à pénaliser les métiers les plus qualifiés et les secteurs de pointe? «Quand je regarde un ingénieur, il peut coûter jusqu’à trois fois plus cher en France qu’en Allemagne», s’inquiétait à l’hiver 2022, peu avant l’élection présidentielle, Bruno Le Maire. Non sans quelque exagération, le ministre de l’Économie pointait un fait bien réel: les charges d’assurance-maladie étaient alors plafonnées à 4837,5 euros de salaire mensuel outre-Rhin quand ce plafond était de 13.172 euros en France, pratiquement trois fois plus. En clair, l’ingénieur français cotise pour l’ouvrier spécialisé. Le Maire préconisait d’alléger les cotisations sociales au-delà de 2,5 smics, au nom de la réindustrialisation de l’Hexagone et de ses secteurs les plus performants à l’exportation. De facto les cotisations sociales sont devenues un impôt à taux très progressif, à l’instar de l’impôt sur le revenu.

https://www.lefigaro.fr/conjoncture/jean-pierre-robin-les-exonerations-de-charges-sociales-explosent-et-beneficient-a-93-des-salaries-20241215


Le Figaro, tribune, 12 décembre, article payant

Jean-Marc Daniel : Emmanuel Macron: l’heure du bilan économique

Le président promettait de baisser les dépenses publiques, de s’attaquer aux rentes et de remettre la France au travail, rappelle l’économiste, professeur à l’ESCP. Il dresse un bilan critique des promesses économiques non tenues et stigmatise un pays vivant plus que jamais au-dessus de ses moyens.

Extraits:

(…) Un des textes fondateurs du macronisme remonte à la fin août 2015. Il s’agit du discours d’Emmanuel Macron à l’université d’été du Medef. Il y déclarait: «Lorsqu’on a 57 % de dépense publique rapportée au PIB, ça n’est plus possible. Ça n’est plus possible… parce que c’est reporter le problème sur les générations à venir, c’est créer une iniquité intergénérationnelle nouvelle! C’est considérer que le traitement de nos difficultés d’aujourd’hui, les jeunes le paieront demain et que ça n’est pas notre problème. Et c’est avoir une forme de discours irresponsable lorsqu’on constate que la moyenne des pays de la zone euro est de 8 points inférieure à la nôtre. Donc notre ambition, notre perspective, c’est, d’ici à 2022, de revenir à 50 % de dépense publique rapportée au PIB.» Dans le même discours, il martelait: «La gauche a pu croire, à un moment, il y a longtemps, que la France pourrait aller mieux en travaillant moins. C’était une fausse idée.»

(…) Dans son programme présidentiel de 2017, on trouve en outre cette assertion: «Notre projet est celui de la société du travail. Car c’est en travaillant que l’on peut vivre décemment, éduquer ses enfants, profiter de l’existence, apprendre, tisser des liens avec les autres.»

Emmanuel Macron ministre de l’Économie d’un gouvernement socialiste puis candidat de centre gauche à la présidentielle entendait donc baisser les dépenses publiques, se défaire du statut de la fonction publique et plus généralement des rentes, et invitait le pays à davantage travailler.

Où en sommes-nous aujourd’hui? Si on regarde l’évolution du PIB, celui-ci est passé de 2275 Mds € en 2017 à 2822 en 2023, soit 24 % d’augmentation, dont une partie tient néanmoins à l’inflation. Quant au taux de chômage en France métropolitaine, il était de 9,3 % au 1er trimestre 2017 et de 7,1 % au 2e trimestre de 2024. Si ce bilan paraît à première vue plutôt positif, une analyse plus précise conduit à une critique plutôt acerbe. La dépense publique, dont Emmanuel Macron déclarait en 2015 qu’elle était trop élevée, a gardé son poids dans le PIB (57 %) passant de 1 285 Mds € en 2017 à 1591 Mds € en 2023. Et une partie significative de cette dépense est et a été financée par des emprunts, si bien que la dette publique est passée de 97 % du PIB en 2017 à 110 % aujourd’hui.

(…) Nicolas Gregory Mankiw résume les fondements de l’économie. Son principe 8 énonce que «le niveau de vie d’un pays dépend de sa capacité à produire des biens et des services». Or la France d’aujourd’hui a un revenu supérieur à sa production. Et comme elle consacre une partie importante de ce revenu à la consommation, le pays importe massivement et s’enfonce dans le déficit extérieur.

Face à cela, Emmanuel Macron a concentré son combat contre ce qu’il appelle le déni de la réalité sur la nécessité de davantage travailler pour accroître la production. À juste titre, puisque, selon l’OCDE, en 2022, la France aura mobilisé 655 heures de travail par habitant quand la moyenne des membres a été de 805 heures. C’était la vraie justification du report de l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans (…).

En France où le taux d’investissement n’est pas particulièrement élevé (le ratio investissement sur PIB tournant autour de 20 % alors que la transition écologique en réclame de plus en plus), le diagnostic est clair: nous sommes victimes d’un déficit public abyssal et d’une «fringale de consommation». La France est un exemple parfait du problème des déficits jumeaux, c’est-à-dire d’un déficit extérieur nourri par le déficit budgétaire. (…)

En résumé, l’enjeu pour la France d’aujourd’hui est double. Il faut d’abord accroître la quantité de travail. (…)

Il faut ensuite générer de l’épargne pour affronter le vieillissement, et mieux gérer cette épargne. Cela suppose d’abord de réduire le déficit budgétaire en ramenant la dépense publique à 50 % du PIB comme le disait Emmanuel Macron en 2015. (…)

Pour que de telles mesures soient acceptées, il faut les défendre sans ambiguïtés auprès de la population. Il faut surtout affirmer la nécessité de l’effort de tous et pas exclusivement tantôt des retraités, tantôt des riches, tantôt des entreprises. En fait, ce dont a besoin le pays, c’est d’une politique fondée sur le triptyque «concurrence, travail, épargne», alors que le macronisme s’est transformé en une promotion de «protectionnisme, dette, consommation»…

Derniers livres parus: Nouvelles leçons d’histoire économique, Odile Jacob, 2024 ; Histoire de l’économie mondiale, Tallandier, 2023.

https://www.lefigaro.fr/conjoncture/emmanuel-macron-l-heure-du-bilan-economique-20241213


Le Point, 13 décembre, article payant    

Pourquoi les moteurs du PIB français tombent en panne l’un après l’autre

L’ÉDITO DE PIERRE-ANTOINE DELHOMMAIS. Le choix solitaire d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée risque au final de coûter à l’économie française un « pognon de dingue »

Extraits:

(…) Au vu de l’extraordinaire confusion budgétaire et politique qui règne en France, il faut malgré tout s’étonner que la défiance de nos créanciers ne soit pas pour l’instant plus grande. Au vu du spectacle désolant du gouvernement de Michel Barnier, qui s’est montré incapable de couper dans la dépense publique, d’un Nouveau Front populaire au sadisme fiscal décomplexé, d’un Rassemblement national plus irresponsable et démagogique que jamais. Au vu de Français, enfin, qui refusent obstinément de travailler davantage et réclament pour les trois quarts d’entre eux l’abrogation de la réforme des retraites.

Les gérants des fonds de pension américains et des caisses de retraite japonaises ne sont pas les seuls à s’inquiéter. Les chefs d’entreprise français aussi, qui naviguent en plein brouillard et qui du coup n’investissent plus et embauchent encore moins. Quant aux ménages, ils préfèrent prudemment et rationnellement épargner plutôt que consommer, même avec modération.

Bref, les moteurs du PIB tombent l’un après l’autre en panne et, alors qu’une croissance molle était attendue pour 2025, la menace d’une récession grandit chaque jour. (…)

Quitte à faire de la psychanalyse de comptoir, l’initiative du président mais aussi le rejet collectif d’efforts budgétaires pour réduire les déficits s’apparentent à une pulsion de mort financière et à une volonté d’autodestruction économique. On est au-delà du déni et de l’aveuglement, on a l’impression d’assister à un suicide en direct dont seuls des économistes freudiens pourraient identifier les raisons profondes. (…)

Certains spécialistes des marchés se veulent toutefois encore rassurants. D’abord en expliquant que, compte tenu de la taille de la dette française, il n’existe pas d’alternative aux OAT pour une épargne mondiale soucieuse de se diversifier géographiquement.

Ensuite en affirmant que la France est « too big to fail ». En clair que la Banque centrale européenne n’hésitera pas, en cas de trop fortes tensions, à racheter massivement des emprunts d’État français pour empêcher une nouvelle crise des dettes souveraines et une dislocation de la zone euro.

Mais la BCE mettrait des conditions drastiques à son soutien et imposerait un programme d’austérité et de réformes structurelles en comparaison desquels le traitement proposé par Michel Barnier relève de l’homéopathie. Il ne faut pas sous-estimer le ras-le-bol que suscite chez nos partenaires européens le laxisme budgétaire de la France.

L’économiste Gilbert Cette comparait l’autre jour sur BFM Business une crise financière à une avalanche, où le passage d’un skieur aventureux suffit à mettre en mouvement des milliers de tonnes de neige, où le pari spéculatif d’un hedge fund new-yorkais contre la dette française suffit à déclencher la vente de centaines de milliards d’euros d’OAT. De la voile au ski en passant par l’escalade périlleuse des spreads, les chroniques économiques deviennent pour le moins sportives.

https://www.lepoint.fr/editos-du-point/pourquoi-les-moteurs-du-pib-francais-tombent-en-panne-l-un-apres-l-autre-13-12-2024-2577819_32.php


Le Figaro, 13 décembre, article payant

Face au désordre politique, les chefs d’entreprise en colère

DÉCRYPTAGE – Investissement en recul, commandes annulées, embauches gelées, le risque d’un engrenage délétère pèse sur l’économie.

Extraits:

« Il faut être fou pour investir et embaucher aujourd’hui », lâche un patron industriel, alors que la France attend toujours le nom du prochain locataire de Matignon. Depuis plusieurs mois déjà, les entreprises sont fébriles et inquiètes d’une impasse politique dont on ne voit pas l’issue. Bien que refroidi par un projet de loi de finances pour 2025 qui, à ses yeux, mettait fin à la politique de l’offre menée par Emmanuel Macron en faveur des entreprises, le patronat français est ébranlé par la chute du gouvernement de Michel Barnier. (…)

« La censure décalerait le redémarrage de notre économie en nous faisant basculer dans un “no man’s land” de l’indécision », alertait déjà François Asselin, le président de la Confédération des PME, fin novembre dans Le Figaro. (…)

Les enquêtes d’opinion auprès des chefs d’entreprise se suivent, se ressemblent et s’aggravent à mesure que la France, après la chute du gouvernement, s’enfonce dans une crise politique durable. Alors que 56 % des dirigeants de TPE et PME en France estiment que l’incertitude pèse sur leur activité selon la dernière enquête trimestrielle Bpifrance Le Lab/Rexecode, 45 % des petits patrons comptent reporter leurs projets d’investissement et 21 % prévoient de les annuler. Même chose sur le front de l’embauche où 35 % des sondés reportent leurs intentions d’embauche et 19 % les annulent.

Cette tendance ne se cantonne d’ailleurs pas aux petites entreprises, mais touche aussi celles de taille intermédiaire (ETI). (…)

Et la trésorerie se resserre pour plus de 40 % des ETI en cette fin d’année. Dans les plus petites entreprises, le solde d’opinion sur l’évolution de la trésorerie plonge aussi, atteignant son plus bas niveau jamais relevé (hors Covid) par Bpifrance depuis 2018. Une litanie de signaux qui laisse craindre le pire pour l’économie française, alors que les faillites approchent les 65.000. (…)

Et pourtant, les données réelles sur l’économie ne sont pas si alarmantes, nombre d’observateurs signalant que, malgré un horizon sombre, les fondamentaux demeurent solides. (…)

https://www.lefigaro.fr/economie/face-au-desordre-politique-les-chefs-d-entreprise-en-colere-20241212


Le Point, 13 décembre, article payant    

Mur de la dette : comment trouver 150 milliards

TRIBUNE. Selon les économistes Olivier Blanchard et François Ecalle, il faut baisser les dépenses, notamment sociales, et non augmenter les impôts pour être à la hauteur des enjeux budgétaires.

Voir « Article du Jour » !

https://www.lepoint.fr/economie/mur-de-la-dette-comment-trouver-150-milliards-13-12-


Neue Zürcher Zeitung, 11 décembre, article payant     

Börsenrekorde überall, doch Frankreich bleibt das Schlusslicht Europas – daran ist nicht nur Emmanuel Macron schuld, sondern auch Louis Vuitton

Der französische Aktienmarkt zeigt die schlechteste Performance aller europäischen Börsen. Das politische Chaos im Inland belastet die Aktien, aber auch die Abhängigkeit vom Absatz von Luxusgütern.

Extraits:

«L’exception française» – die französische Ausnahme – gilt auch an den Finanzmärkten. Die Börsen in den USA und teilweise auch in Europa markieren fast täglich neue Höchststände. Der deutsche DAX steht dieses Jahr 20 Prozent im Plus, die spanische Börse ebenso. Sogar der konservative Schweizer SMI hat 5 Prozent zugelegt.

Nicht die französische Börse, sie kam dieses Jahr kaum vom Fleck. Seit Staatspräsident Emmanuel Macron das Land nach Auflösung des Parlaments im Juni in die Regierungskrise stürzte, hat der französische Leitindex CAC 40 zeitweise fast zehn Prozent verloren. Die Pariser Börse zeigt damit die schlechteste Performance in Europa.

Der Grund ist vordergründig die Unsicherheit. Denn das politische Chaos ist noch lange nicht ausgestanden. (…)

Doch was als politisches Vakuum daherkommt, bedeutet kurzfristig Stabilität: Das Parlament wird bis zu möglichen Neuwahlen im Sommer nicht in der Lage sein, grössere wirtschaftliche Veränderungen zu beschliessen. (…)

Kurzfristig ist das gut für die Börse. So haben sich die französischen Finanzmärkte dank dem politischen Vakuum beruhigt. Der wichtigste Messwert für das politische Risiko, die Differenz zwischen den Renditen 10-jähriger französischer und deutscher Anleihen, der «Spread», ist wieder geringer geworden. Die Nervosität über Frankreichs Finanzsituation hat abgenommen. (…)

Der CAC 40 hat seit dem Rücktritt der Regierung Barnier sogar zugelegt. Besonders die Aktien grosser Luxuskonzerne wie LVMH, Kering und Hermès machten einen Kurssprung. Insbesondere LVMH und Kering mussten in den vergangenen Monaten wegen der lahmenden chinesischen Wirtschaft und der wenig spendierfreudigen Konsumenten in China schwierige Zeiten durchleben. Luxuskonzerne wie LVMH oder Richemont aus der Schweiz sind in hohem Masse von China und Hongkong als Absatzmärkten abhängig.

Die Regierungskrise ist somit nicht der einzige Grund, der die französische gegenüber anderen europäischen Börsen zurückhält. Zumal Frankreich für die CAC-40-Konzerne gar nicht so wichtig ist. Der französische Markt macht weniger als 15 Prozent des Umsatzes der 40 Unternehmen aus dem Index aus. (…)

Ein grösseres Problem ist die hohe Konzentration. Der CAC 40 wird von den Schwergewichten LVMH, Hermès und L’Oréal dominiert. Gemäss einer Auswertung des Vermögensverwalters Amundi ist die schlechte Performance auch auf diese Zusammensetzung zurückzuführen, die sich stark auf Luxus abstützt und auf Konsumgüter, die nicht zum Grundbedarf gehören, etwa Kosmetika. (…)

Das Problem der französischen Banken ist, dass sie einer der grössten Gläubiger französischer Staatsanleihen sind. Die sechs grössten Institute halten zusammen fast ein Fünftel aller ausstehenden Bonds. Das entspricht Anleihen im Gegenwert von rund 1500 Milliarden Euro. Gemäss Outin haben die Banken zwar die Lehren aus der Euro-Krise vor zehn Jahren gezogen, kurzfristige Zinsschwankungen würden ihnen nicht viel ausmachen. Aber es gebe die Gefahr einer «boucle fatale», also einer fatalen Schleife zwischen Staats- und Bankenschulden.

Diese könnte in einem Stress-Szenario eintreten, wenn der französische Staat länger Schwierigkeiten haben sollte, sich am Anleihemarkt zu refinanzieren, und es deshalb zu einem Liquiditätsengpass käme. Von einer solchen Situation ist Frankreich aber weit entfernt. (…)

Auch die Aussichten für Staatsanleihen werden besser. So haben alle grossen Agenturen das Qualitäts-Rating Frankreichs bestätigt. S&P etwa hat die AA-negativ-Bewertung beibehalten: Französische Anleihen würden von einem günstigen Umfeld im Zuge der Lockerungspolitik der Europäischen Zentralbank und der nachlassenden Inflation profitieren.

Die Analysten von Lombard Odier gehen davon aus, dass die Renditen französischer Anleihen weiter sinken, die Spreads aber nicht ansteigen werden. Frankreich sei in der Lage, seine Schulden im Inland zu finanzieren, und das Leistungsbilanzdefizit sei geringer als in Grossbritannien oder in den Vereinigten Staaten.

https://www.nzz.ch/finanzen/boersenrekorde-ueberall-doch-frankreich-bleibt-das-schlusslicht-europas-daran-ist-nicht-nur-emmanuel-macron-schuld-sondern-auch-louis-vuitton-ld.1861291


Le Point, 6 décembre, article payant    

L’emploi, trophée terni du macronisme

L’ÉDITO DE PIERRE-ANTOINE DELHOMMAIS. Auchan, Michelin, Valeo… Les plans sociaux s’accumulent en France, assombrissant le bilan vanté par Emmanuel Macron.

Extraits:

« Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille ». La formule de Jacques Chirac se vérifie aussi en économie. Déjà confronté à l’envolée du déficit, à la pression de Bruxelles, à la défiance des agences de notation et des marchés financiers, à la colère des agriculteurs, des cheminots, des pilotes de ligne, des fonctionnaires, des retraités et des riches, le gouvernement (…) doit également faire face à une détérioration du marché de l’emploi.

Après Auchan et Michelin, c’est au tour de Valeo d’annoncer un plan social tandis que, selon l’Insee, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de 35 000 au troisième trimestre pour s’établir à 2,3 millions. Le taux de chômage, qui était tombé à un plus bas niveau de 7,1 % début 2023, est, quant à lui, remonté à 7,4 % et celui des jeunes de 15 à 24 ans à 19,7 %, soit 2,4 points de plus qu’il y a un an. (…)

Rien d’étonnant au vu de la croissance anémique en France et dans la zone euro, de la dégradation de la situation financière des entreprises et de la hausse du nombre de leurs défaillances (…).

Il faut dire aussi que le dynamisme affiché ces dernières années par le marché de l’emploi laissait les économistes perplexes. (…) Une divergence inédite qui s’est traduite par un recul alarmant de la productivité, l’économie française ayant eu besoin de plus de salariés pour produire la même quantité de travail et créer la même quantité de richesses. C’est d’abord cette anomalie qui est en passe d’être corrigée, les entreprises cherchant à alléger leur masse salariale et à tailler dans leurs effectifs pour regagner en productivité et restaurer leur profitabilité.

Si l’on ajoute à cela l’impact récessif qu’auront les hausses d’impôts et les baisses de dépenses prévues dans le budget 2025 pour tenter de contenir le déficit, l’horizon en matière de chômage est bien sombre. Les économistes de l’OFCE prévoient 140 000 destructions d’emploi l’année prochaine et un taux de chômage remontant à 8 % fin décembre.

Son recul était pourtant le trophée économique brandi dans le camp macroniste pour justifier le bien-fondé de la politique de l’offre et pro-business. (…)

Tout cela se trouve aujourd’hui remis en question. La courbe du chômage est en train de s’inverser, mais dans le mauvais sens. Non seulement l’objectif de plein-emploi à la fin du quinquennat visé par le chef de l’État s’envole, mais les succès remportés ces dernières années sont grandement fragilisés et relativisés. Notre taux de chômage reste deux fois plus élevé qu’en Allemagne (3,5 % selon Eurostat). (…)

Il apparaît surtout de plus en plus que la décrue du chômage a été largement obtenue à crédit, grâce à la politique du « quoi qu’il en coûte » et à l’injection massive d’argent public. Il faut mettre en regard les quelque 1,9 million d’emplois salariés créés depuis l’arrivée à l’Élysée d’Emmanuel Macron avec les 1 000 milliards d’euros supplémentaires de dette. Cela fait cher l’embauche.

https://www.lepoint.fr/editos-du-point/fin-de-partie-pour-le-recul-du-chomage-trophee-macroniste-06-12-2024-2577247_32.php


Articles du 6 décembre au 14 octobre 2024